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17/11/2011 | FRANCE | N°10-20400

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 novembre 2011, 10-20400


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'un juge des référés, à la demande de Mme X..., a ordonné une mesure d'expertise afin que soit examinée la stabilité d'un mur de soutènement situé sur la propriété, contiguë à la sienne, appartenant à Mme Y... ; que l'expert judiciaire ayant conclu à l'absence de danger du mur et aucune action au fond n'ayant été engagée par Mme

X..., Mme Y... a saisi une juridiction de proximité afin d'obtenir, sur le fon...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'un juge des référés, à la demande de Mme X..., a ordonné une mesure d'expertise afin que soit examinée la stabilité d'un mur de soutènement situé sur la propriété, contiguë à la sienne, appartenant à Mme Y... ; que l'expert judiciaire ayant conclu à l'absence de danger du mur et aucune action au fond n'ayant été engagée par Mme X..., Mme Y... a saisi une juridiction de proximité afin d'obtenir, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, le remboursement des sommes versées à son avocat au titre de la procédure de référé et de la mesure d'expertise ;
Attendu que pour accueillir cette demande et condamner Mme X... à verser une certaine somme à titre de dommages-intérêts, le jugement retient que l'indemnisation fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ne peut être accordée qu'en considération de la notion d'équité, qui n'est pas forcément équivalente au préjudice subi, que le juge des référés, qui se trouve dessaisi avant que le résultat de l'expertise ne soit connu, peut difficilement accorder préventivement une indemnité de procédure à l'une quelconque des parties et que le bénéfice de l'article 700 ne peut être demandé que pour les sommes exposées dans le cadre de l'instance à l'occasion de laquelle il est sollicité et non pour les sommes exposées pour une procédure antérieure ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les frais d'avocat non compris dans les dépens ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 mai 2010, entre les parties, par la juridiction de proximité de Draguignan ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande de Mme Y... et les demandes respectives des parties au titre des frais irrépétibles exposés devant le juge du fond ;
Condamne Mme Y... aux dépens, y compris ceux exposés devant la juridiction du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief au jugement attaqué :
D'AVOIR condamné Madame Andrée X... à payer à Madame Jocelyne Y... la somme de 1. 400 € à titre de dommages et intérêts, ainsi que la somme de 600 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Madame Y... produit à l'instance l'ordonnance de référé construction en date du 20 février 2008 ; qu'aux termes de cette décision, un expert a été nommé aux fins d'examiner le mur construit par la demanderesse en limite de sa propriété et dire si sa stabilité était assurée dans le temps et s'il ne représentait pas un danger quelconque ; que l'expert commis a rendu son rapport, également produit, aux termes duquel il conclut que le mur ne présente aucun danger et sera stable dans le temps sans que toutefois, les propriétaires du fonds inférieur ne doivent déchausser le talus servant de confort au mur en bas de restanque ; que la possibilité de faire ordonner une mesure d'instruction en référé est prévue par la loi, en l'occurrence, par l'article 145 du Code de procédure civile ; que l'article 700 du Code de procédure civile s'applique à toutes les procédures, y compris devant le juge des référés ; qu'il ne peut être accordé que s'il est demandé ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de référé ne mentionne aucune demande en ce sens ; que le bénéfice de l'article 700 ne peut être demandé que pour les sommes exposées dans le cadre de l'instance où il est sollicité et non pour les sommes exposées à l'occasion d'une procédure antérieure ; que les frais non compris dans les dépens ne sont pas considérés comme un préjudice réparable à l'occasion de l'instance où ils sont exposés et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile c'est-à-dire de l'équité ; que la demande principale, en l'espèce, n'est pas fondée sur l'article 700 dudit Code mais sur l'article 1382 du Code civil ; que ce dernier article énonce que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » ; que le juge des référés, dans son dispositif, renvoie les parties à se pourvoir (au fond) ainsi qu'elles aviseront ; que Madame X... n'a pas jugé utile de poursuivre mais que Madame Y... a tout à fait la possibilité de le faire et que par son action au fond, elle entend demander l'indemnisation du préjudice à elle causé par la procédure de référé, au cours de laquelle elle n'a pas pu le faire, le juge des référés n'étant saisi que de mesures urgentes et provisoires et une indemnisation fondée sur l'article 700, ne pouvant être accordée que sur la notion d'équité, n'est pas forcément équivalente au préjudice subi ; que d'autre part, le juge des référés, qui se trouve dessaisi avant que le résultat de l'expertise ne soit connu, peut difficilement accorder préventivement une indemnité de procédure à l'une quelconque des parties ; que la présente juridiction n'est pas saisie par Madame X... d'une quelconque demande reconventionnelle, comme elle en aurait eu la possibilité, si ce n'est celle fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile ; que l'article 1382 du Code civil prévoit l'indemnisation du préjudice provoqué par « tout fait quelconque de l'homme » ; qu'en conséquence, si l'action en justice, sans être téméraire ou abusive, a occasionné un préjudice matériel ou moral, non indemnisé au cours de la procédure, celui-ci devra nécessairement être réparé comme tout préjudice ; que la demande actuelle vise à faire fixer le préjudice subi par la demanderesse au montant des factures d'avocat ; qu'il ne s'agit pas d'une demande de remboursement de frais irrépétibles, lequel serait impossible, la première instance étant éteinte et le juge dessaisi ; qu'il n'y a pas atteinte à l'autorité de la chose jugée, le juge ne s'étant pas prononcé sur la présente demande et la décision de référé ne pouvant juger au fond ; qu'il s'agit en réalité d'une demande d'indemnisation classique d'un préjudice subi par une partie ; que la faute ne réside pas forcément dans le caractère abusif de l'action en justice mais sur son caractère au moins téméraire ou disproportionné, tiré de l'absence d'action au fond par la défenderesse ; que le fait de ne pas avoir poursuivi Madame Y... au fond, peut laisser supposer qu'elle n'aurait eu aucun motif de le faire et qu'en conséquence, elle doit être tenue d'assumer les conséquences financières de son choix ; qu'en l'absence de procédure diligentée par sa voisine, Madame Y... n'aurait pas eu à s'adresser à avocat ; qu'en l'occurrence, Madame X... n'invoque aucune part de responsabilité de la requérante dans son propre préjudice, ce qui aurait pu éventuellement conduire à un partage de responsabilité dans le préjudice allégué ; que ce préjudice est certain puisque le montant des factures n'est pas contesté par la demanderesse et qu'elle doit les payer ; que la détermination du préjudice constitué par des frais d'avocat doit faire l'objet d'une évaluation conforme aux usages communément admis en la matière ; que la procédure de référé s'est accompagnée d'une expertise qui a duré du 6 mars 2008 au 6 juillet 2009, date de reddition du rapport ; qu'il aurait été difficile à Madame Y... de se passer d'avocat en l'espèce ; qu'en conséquence, le montant du préjudice subi par Madame Y..., que la défenderesse devra indemniser, peut être fixé à la somme de 1. 400 € ; que l'équité commande d'accorder à la demanderesse, qui a été contrainte de s'adresser à justice pour faire valoir ses droits, une indemnité de procédure de 600 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; que le présent jugement, rendu en dernier ressort, sera exécutoire de plein droit et qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de prononcer l'exécution provisoire ; que Madame X..., qui succombe, supportera les dépens » ;

ALORS QUE, D'UNE PART, la rémunération des avocats n'est pas comprise dans les dépens, qu'elle soit ou non réglementée, lorsque leur ministère n'est pas obligatoire ; que les frais non compris dans les dépens ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'en condamnant néanmoins, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, Madame X... à indemniser Madame Y... du préjudice financier né des honoraires d'avocat qu'elle a dû supporter dans le cadre d'une procédure sans représentation obligatoire, la juridiction de proximité de DRAGUIGNAN a violé ensemble l'article 700 du Code de procédure civile et l'article 1382 du Code civil ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, SUBSIDIAIREMENT, l'abus du droit d'agir en justice suppose, pour être constitué, de relever une faute quelconque commise dans l'exercice de ce droit ; qu'en estimant que l'action en référé de Madame X..., sans être téméraire ou abusive, a occasionné à Madame Y... un préjudice matériel ou moral non indemnisé au cours de la procédure, et qui doit nécessairement être réparé comme tout préjudice, car la faute de Madame X... ne réside pas forcément dans le caractère abusif de son action en justice mais dans son caractère au moins téméraire ou disproportionné tiré de l'absence d'action au fond, la juridiction de proximité de DRAGUINAN a violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-20400
Date de la décision : 17/11/2011
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Juridiction de proximité de Draguignan, 11 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 nov. 2011, pourvoi n°10-20400


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.20400
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