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08/11/2011 | FRANCE | N°10-30088

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 novembre 2011, 10-30088


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses troisième et quatrième branches :

Vu les articles L. 227-6 et l'article R. 123-54 2° du code de commerce, ensemble les articles L. 1232-2 et L. 1232-6 du code du travail ;
Attendu que si, selon le premier de ces textes, la société par actions simplifiée est représentée à l'égard des tiers par son président et, si ses statuts le prévoient, par un directeur général ou un directeur général délégué dont la nomination est soumise à publicité, cette règle n'excl

ut pas la possibilité pour ces représentants légaux de déléguer le pouvoir d'effectue...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses troisième et quatrième branches :

Vu les articles L. 227-6 et l'article R. 123-54 2° du code de commerce, ensemble les articles L. 1232-2 et L. 1232-6 du code du travail ;
Attendu que si, selon le premier de ces textes, la société par actions simplifiée est représentée à l'égard des tiers par son président et, si ses statuts le prévoient, par un directeur général ou un directeur général délégué dont la nomination est soumise à publicité, cette règle n'exclut pas la possibilité pour ces représentants légaux de déléguer le pouvoir d'effectuer des actes déterminés tels que celui d'engager ou de licencier les salariés de l'entreprise ; qu'il résulte du deuxième de ces textes que n'ont pas à être déclarées au registre du commerce et des sociétés les mentions relatives aux personnes bénéficiant de telles délégations de pouvoir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 3 septembre 1984 par la société Lehwood Montparnasse anciennement dénommée Montparnasse Park Hôtel, exerçait en dernier lieu les fonctions d'employée de comptabilité et était investie d'un mandat syndical ; que le directeur du personnel de l'entreprise, après autorisation donnée le 17 février 2009 par l'inspecteur du travail, lui a notifié son licenciement le 23 février suivant pour faute grave ; que Mme X..., qui avait antérieurement saisi la formation de référé de la juridiction prud'homale de demandes à caractère salarial ou indemnitaire pour discrimination liée à sa situation de famille et à son engagement syndical, a formé une demande en nullité du licenciement pour défaut de délégation de pouvoir donné par l'employeur au directeur du personnel pour procéder au licenciement ; que le syndicat CGT des Hôtels Méridien de Paris est intervenu à l'instance pour réclamer des dommages-intérêts ;
Attendu que pour constater la nullité du licenciement, l'arrêt retient que le président de la société Lehwood Montparnasse a délégué à M. Y..., directeur général de la société, ses pouvoirs en matière de gestion du personnel, en particulier, le pouvoir de mettre fin aux contrats de travail, avec faculté pour le délégataire de subdéléguer ce pouvoir, faculté dont celui-ci a usé en consentant à son tour, le 7 janvier 2007, une subdélégation en faveur de M. Z..., le signataire de la lettre de licenciement de Mme X..., que cependant, l'extrait du registre du commerce concernant la société Lehwood Montparnasse ne mentionne aucune délégation consentie à ce dernier, que dans ces conditions, la société Lehwood Montparnasse ne justifie pas à l'égard des tiers, dont fait partie la salariée, que M. Z... a reçu délégation du pouvoir de licencier ;
Q'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a rejeté la demande en paiement d'une provision au titre d'une discrimination, l'arrêt rendu le 10 décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils pour la société Lehwood Montparnasse
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR, infirmant l'ordonnance entreprise de ce chef, constaté la nullité du licenciement de Madame X... le signataire de la lettre de licenciement n'ayant pas le pouvoir de la licencier, et d'avoir fait droit à ses diverses demandes en paiement, AUX MOTIFS QU'il n'est pas contestable que la société LEHWOOD MONTPARNASSE est une société par actions simplifiée et que la lettre de licenciement notifiée, comme dit ci-dessus, à Mme X..., a été signée par M. Jean-Luc Z..., directeur du personnel ; Qu'il n'est pas contesté que la lettre de licenciement doit émaner de l'employeur ou de son représentant et que si le signataire de cette lettre est dépourvu du pouvoir de licencier le salarié intéressé, cette irrégularité constitue une nullité de fond du licenciement ; Qu'enfin, il n'est pas prétendu par la société LEHWOOD MONTPARNASSE que Mme X... ne serait pas un tiers par rapport à elle ; Que selon l'appelante, les dispositions de l'article L 227-6 du code de commerce ont été méconnues par la société LEHWOOD MONTPARNASSE, qu'en vertu de ce texte le licenciement ne peut procéder que du président de la SAS ou des directeurs, général ou général délégué, et que les délégations ou subdélégations consenties jusqu'au niveau de Monsieur Z... n'étaient pas valables ; Que pour que le licenciement de Mme X... soit valable, la lettre de licenciement doit émaner du président de la SAS ou de la personne autorisée par les statuts à recevoir délégation pour exercer le pouvoir de la licencier, détenu par le seul président, conformément au statut légal de la SAS ; Que la société LEHWOOD MONTPARNASSE objecte, dès lors, à tort qu'au sein d'une SAS, la délégation de pouvoirs peut être implicite et que l'obligation de mentionner au registre du commerce la ou les délégations consenties par le président ne résulte d'aucune disposition légale ; Que selon l'article 15 10° du décret du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce, « doivent être déclarés, pour figurer à ce registre, notamment les noms, prénoms (…) des associés et tiers ayant le pouvoir d'engager la société » ; Qu'en l'espèce il n'est pas contestable, d'une part, que les statuts de la société LEHWOOD MONTPARNASSE stipulent en leur article 9. 2 que le président peut, sous sa responsabilité, consentir toutes délégations de pouvoirs à tout tiers, pour un ou plusieurs objets déterminés et pour une durée limitée, et d'autre part, que le 2 janvier 2007, le président de la société LEHWOOD MONTPARNASSE a délégué à M. Y..., directeur général de la société, ses pouvoirs en matière de gestion du personnel (et en particulier le pouvoir de mettre fin aux contrats de travail) avec faculté pour le délégataire de subdéléguer ce pouvoir, faculté dont M. Y... a usé, en consentant à son tour, le 7 janvier 2007, une subdélégation en faveur de M. Z..., le signataire de la lettre de licenciement de Mme X... ; Que cependant, l'extrait du registre du commerce concernant la société LEHWOOD MONTPARNASSE produit par l'appelante ne porte trace d'aucune délégation consentie par ce dernier ; Que dans ces conditions, la société LEHWOOD MONTPARNASSE ne justifie pas à l'égard des tiers (dont fait partie l'appelante) d'une délégation à M. Z..., du pouvoir de licencier ; Que le défaut de pouvoir de ce dernier constitue une irrégularité de fond qui affecte comme dit précédemment la validité du licenciement notifié à Mme X... ; qu'il s'ensuit que ce licenciement s'avère nul et de nul effet et que la demande de l'appelante tendant à voir constater cette nullité doit être accueillie ; Qu'en vain, la société LEHWOOD MONTPARNASSE fait plaider qu'une telle constatation excèderait les pouvoirs du juge des référés, alors que celle-ci ressort de la seule lecture des délégation et subdélégation, versées aux débats, et que cette évidente constatation conduit, elle, à conclure de façon, tout aussi évidente, que l'irrégularité, ainsi non contestable, des lettres de licenciement est cause d'un trouble manifestement illicite pour Mme X..., qu'il convient de faire cesser ; Que les demandes indemnitaires provisionnelles présentées par Mme X... résultent strictement de cette nullité et ne sont pas contestables, ni d'ailleurs contestées, tant dans leur principe que leur montant par la société LEHWOOD MONTPARNASSE ; qu'il convient donc d'allouer à Mme X... les sommes qu'elle requiert ; Que l'inobservation par l'employeur des règles, présidant à la validité du licenciement d'un salarié, qui, de surcroît, est son représentant syndical, en l'espèce, a causé au syndicat CGT des Hôtels MERIDIEN de PARIS un préjudice évident qui sera réparé par l'octroi d'une indemnité provisionnelle de 1000 euros (arrêt p 4, 5) ;
1°) ALORS QUE la formation des référés du Conseil des Prud'homme peut, dans tous les cas d'urgence, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifient l'existence d'un différend, qu'à l'évidence, la demande en prononcé de la nullité de son licenciement formée Mme X..., pour défaut de pouvoir publié au registre du commerce des sociétés de la subdélégation du signataire de la lettre de licenciement, fondée sur un raisonnement tiré de l'application des dispositions combinées de l'article L 227-6 du code de commerce, et de l'articleR 123-54 2° a) du code de commerce (anciennement article 15 10° du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce) était sérieusement contestable et ne pouvait relever que d'un examen au fond, qu'en décidant le contraire, l'arrêt attaqué a excédé ses pouvoirs en violation de l'article R 1455-5 du code du travail,
2°) ALORS QUE l'arrêt attaqué qui, après avoir mené un raisonnement fondé sur la combinaison et l'analyse des textes légaux comme des pouvoirs consentis au sein de la SAS LEHWOOD MONTPARNASSE, conclut que la constatation de la nullité du licenciement ressort de la seule lecture des délégation et subdélégation, évidente constatation qui conduit à conclure de façon tout aussi évidente que l'irrégularité des lettres de licenciement est cause d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser en allouant à Mme X... les sommes qu'elle requiert, a violé l'article R 1455-6 du code du travail,
3°) ALORS QUE la délégation de pouvoirs donnée par le chef d'entreprise pour mener l'entretien préalable, sanctionner disciplinairement, ou licencier n'est soumise à aucun formalisme et notamment n'a pas à être écrite ; que l'arrêt attaqué, qui a relevé que Monsieur Z... directeur du personnel de l'Hôtel était titulaire d'une subdélégation du directeur général de la société, lui-même délégué par le président de la SAS LEHWOOD MONTPARNASSE, et a néanmoins prononcé la nullité du licenciement pour l'unique raison que l'extrait du registre du commerce concernant la Société LEHWOOD MONTPARNASSE ne porte trace d'aucune délégation consentie par ce dernier, a violé ensemble l'article L 227-6 du code de commerce et l'articleR 123-54 2° a) du code de commerce (anciennement article 15 10° du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce), ensemble les articles L 1232-2 et 1232-6 du code du travail (anciennement L. 122 14 et L. 122 14 1) ;
4°) ALORS QUE la SAS LEHWOOD MONTPARNASSE avait clairement exposé dans ses conclusions la distinction à opérer entre la délégation générale de pouvoirs donnée à un dirigeant social soumise aux dispositions de l'article L 227-6 du code de commerce et de l'article R 123-54 2° a) du code de commerce (anciennement article 15 10° du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce), et celle de nature technique et limitée donnée à un cadre salarié pour l'exercice de ses fonctions, ce qui était le cas du directeur du personnel de l'hôtel Monsieur Z... ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, l'arrêt attaqué a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE salariée et unie par un contrat de travail à la SAS LEHWOOD MONTPARNASSE, Mme X... ne possédait pas la qualité de tiers ; qu'en décidant que la Société LEHWOOD MONTPARNASSE ne justifie pas à l'égard des tiers dont fait partie l'appelante d'une délégation à M. Z... du pouvoir de la licencier, l'arrêt attaqué a violé, ensemble l'article L 227-6 du code de commerce et l'article 1165 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-30088
Date de la décision : 08/11/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 nov. 2011, pourvoi n°10-30088


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Lesourd

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.30088
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