LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 212-15-3 III du code du travail, alors applicable, ensemble l'article 4 de l'accord du 22 juin 1999, étendu par arrêté du 21 décembre 1999, relatif à la durée du travail et l'annexe II du 15 décembre 1987, relative à la classification, de la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets de conseil et sociétés de conseil (Syntec) ;
Attendu, d'abord, que selon le second de ces articles, les collaborateurs susceptibles de conclure une convention de forfait en jours doivent obligatoirement disposer d'une grande latitude dans l'organisation de leur travail et dans la gestion de leur temps et doivent également bénéficier de la position 3 de la convention collective (en général les positions 3.2 et 3.3, et dans certains cas 3.1) ou avoir une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale , ou être mandataire social ;
Attendu, ensuite, que selon l'annexe II à la convention collective, relèvent de la position 2.3 les ingénieurs ou cadres ayant au moins six ans de pratique en cette qualité et étant en pleine possession de leur métier ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé par la société Linedata services ingénierie aux droits de laquelle vient la société Linedata services leasing et crédit, le 5 juillet 2001 en qualité de consultant, position II.2, coefficient 130 de la classification de la convention collective Syntec ; que, faisant valoir qu'il avait conclu une convention de forfait en jours, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaire fondée sur la reconnaissance de la position 3 de la grille de classification annexée à la convention collective ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que le salarié a été engagé en qualité de cadre autonome et que la durée de son travail était comptabilisée en forfait jours, sur la base de deux cent treize jours par an qu'il s'ensuit qu'il devait nécessairement être classé, dès son embauche, à la position 3.1 et non à la position 2.2, et ce peu important que l'intéressé ne possède pas les six années d'expérience prévues par la convention collective pour être classé à la position 2.3, et donc a fortiori à la position 3.1, cette condition ne faisant pas obstacle à ce que l'employeur fasse bénéficier un salarié de la classification 3.1, même s'il ne remplit pas ladite condition ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié qui avait moins de six ans de pratique en qualité de cadre, ne pouvait être classé à la position 3.1, ce dont il se déduisait qu'il n'était pas susceptible de relever du régime du forfait jours qui lui avait été appliqué, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condame M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Linedata services leasing et crédit
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Société LINEDATA SERVICES LEASING et CREDIT à payer à Monsieur X... les sommes de 57.631 euros à titre de rappel de salaires pour la période allant de 2001 à 2004 inclus et de 5.763,10 euros à titre de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE considérant que l'accord du 22 juin 1999 sur la durée du travail, étendu par arrêté du 21 décembre 1999 et pris en application de la convention collective SYNTEC, stipule que pour pouvoir relever de la comptabilisation du temps de travail en jours, « les collaborateurs concernés doivent obligatoirement disposer de la plous large autonomie d'initiative et assumer la responsabilité pleine et entière du temps qu'il consacrent à l'accomplissement de leur mission le bon accomplissement de cette mission caractérisant la mesure réelle de leur contribution à l'entreprise. Ils doivent donc disposer d'une grande latitude dans leur organisation du travail et la gestion de leur temps et doivent également bénéficier de la position 23 de la convention collective (-en général les positions 3.2 et 3.3 et dans certains cas 3.1) ou avoir une rémunération annuelle en supérieure à 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale, ou être mandataire social » ; qu'il résulte du contrat de travail de Monsieur X... que ce dernier a été engagé en qualité de cadre autonome et que la durée de son travail était comptabilisée en forfait jours, sur la base de 213 jours de travail par an ; qu'il s'ensuit que Monsieur X... devait nécessairement être classé, dès son embauche, à la position 3.1 et non à la position 2.2, étant observé d'ailleurs que l'employeur reconnaît qu'il sousclassifiait ses salariés, et ce peu important que l'intéressé ne possédait pas les six années d'expérience prévues par la convention collective pour être classé à la position 2.3 et donc à fortiori à la position 3.1, cette condition permettant aux salariés qui la remplissent de revendiquer au moins la classification 2.3 mais ne faisant pas obstacle à la possibilité pour un employeur de faire bénéficier un salarié de cette classification même s'il ne remplit pas ladite condition ; que, comme le soutient Monsieur X..., il peut prétendre, par application du principe « à travail égal, salaire égal », à un rappel de salaire sur la base de la rémunération moyenne des salariés ayant la position l'employeur ne fournissant aucun élément objectif et matériellement véritable justifiant le fait qu'il aurait dû percevoir un salaire inférieur à cette moyenne ; Considérant qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande de Monsieur X..., laquelle est justifiée en son montant par les propres documents produits par l'employeur, et de condamner la société Linedata Services Leasing et Crédit à lui payer les sommes suivantes :
57.631,00 € (bruts) à titre de rappel de salaire pour la période allant de 2001 à 2004 inclus 5.736,10 € (bruts) à titre de congés payés afférents ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'annexe II à la Convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieursconseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 intitulée « Classification des ingénieurs et cadres » énonce que la position II.3, inférieure à la position III.1 revendiquée par Monsieur X..., est réservée aux « ingénieurs ou cadres ayant au moins six ans de pratique en cette qualité » ; qu'il en résulte que Monsieur X... ne pouvait légitimement obtenir la position III.1 sans avoir au moins six ans de pratique en qualité d'ingénieur ou de cadre, ce qui n'était pas le cas au jour de sa démission ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'annexe susvisée, ensemble les articles L.1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE dans l'hypothèse de l'attribution par le juge d'un coefficient hiérarchique supérieur à un salarié, l'employeur n'est tenu qu'au paiement d'un rappel de salaire correspondant au minimum conventionnel de rémunération afférent à ce coefficient ; qu'en supposant que Monsieur X... ait dû bénéficier de la position III.1 pour la seule raison qu'il avait conclu avec la Société LINEDATA SERVICES LEASING ET CREDIT une convention de forfait dont la validité était subordonnée à l'obtention de cette position, il devait simplement s'en induire que cette surqualification ouvrait droit pour ce dernier au salaire minimum correspondant ; qu'en octroyant à Monsieur X... sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal » un rappel de salaire sur la base de la rémunération moyenne des salariés ayant la position III.1, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'annexe II à la Convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieursconseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 intitulée « Classification des ingénieurs et cadres », et l'article 1134 du Code civil ;
ALORS ENFIN, ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l'application du principe « à travail égal, salaire égal » suppose que les salariés comparés soient dans une situation identique et, notamment, que ces salariés effectuent un travail de même valeur ; qu'en octroyant à Monsieur X... un rappel de salaire sur la base de la rémunération moyenne des salariés ayant la position III.1, sans établir que ce dernier accomplissait un travail de même valeur aux salariés ayant obtenu cette position, ni, de façon générale, qu'il se trouvait dans une situation identique cependant que cette position lui était reconnue sur le seul fondement qu'il avait conclu une convention de forfait jours « par an », sans considération des fonctions réellement exercées par lui, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du principe « à travail égal, salaire égal ».