La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/10/2011 | FRANCE | N°10-17165

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 octobre 2011, 10-17165


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 janvier 2010), que M. X... a agi contre la commune d'Avèze, aux fins de lui voir enjoindre de cesser des travaux d'adduction d'eau qu'elle faisait réaliser sur un chemin traversant des parcelles lui appartenant et de remettre les lieux dans leur état initial ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 161-2, ensemble L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime ;
Attendu que pour accueillir la demande de M. X..., l'arrêt, qui relè

ve que l'affectation du chemin à l'usage du public n'est pas démontrée...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 janvier 2010), que M. X... a agi contre la commune d'Avèze, aux fins de lui voir enjoindre de cesser des travaux d'adduction d'eau qu'elle faisait réaliser sur un chemin traversant des parcelles lui appartenant et de remettre les lieux dans leur état initial ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 161-2, ensemble L. 162-1 du code rural et de la pêche maritime ;
Attendu que pour accueillir la demande de M. X..., l'arrêt, qui relève que l'affectation du chemin à l'usage du public n'est pas démontrée dès lors que l'utilisation du chemin décrite dans une attestation en date du 11 juillet 2006 produite par la commune est parfaitement compatible avec la qualification de chemin d'exploitation, y compris avec l'éventualité du passage de randonneurs à le supposer établi, l'article L. 162-1 du code rural laissant aux propriétaires d'un tel chemin la faculté de le fermer à la circulation publique, retient que la commune ne fait pas la preuve de la propriété du chemin litigieux et qu'il doit être fait droit à la demande de qualification de chemin d'exploitation de M. X... ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si le chemin litigieux servait exclusivement à la communication entre les divers fonds des utilisateurs mentionnés dans l'attestation ou à leur exploitation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. X... et de la commune d'Avèze ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la commune d'Avèze.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il avait dit que la portion du chemin de VILONGE traversant les parcelles de Monsieur X... était un chemin rural faisant partie du domaine privé de la commune d'AVEZE, et statuant à nouveau, d'AVOIR jugé que ce chemin sur les parcelles cadastrées section A n° 452, 474, 530 et 547 était un chemin d'exploitation au sens de l'article L. 162-1 du Code rural et de la pêche maritime et d'AVOIR condamné la commune d'AVEZE à payer à Monsieur X... la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE " la commune revendique contre les titres de Monsieur X... propriétaire des parcelles sur lesquelles il a son assiette, la propriété du chemin litigieux en se prévalant en particulier d'une promesse de cession gratuite, mais cette promesse n'est pas datée et sa signature qui serait celle de feu Roger X..., père de l'appelant, est contestée par ce dernier ; qu'or, elle ne présente aucune ressemblance avec celles des documents de comparaison ; qu'elle a pour forme l'écriture du nom entier en lettres nettement liées avec un trait de soulignement séparé, alors que sur sa carte d'identité, son testament du 14 octobre 1983 et le document d'arpentage évoqué ci-après, elle prend la forme du nom entier en lettres partiellement liées, par groupes de lettres, le " o " terminal se prolongeant en trait de soulignement de la droite vers la gauche ; que le document d'arpentage de Monsieur Y..., géomètre expert du 17 décembre 1979 porte la signature de Monsieur X... père et cette signature, conforme à celles des documents de comparaison est d'autant moins suspecte qu'elle a été recueillie par un tiers digne de foi mais qu'il ne s'agit que d'un document d'arpentage et non d'un procès-verbal de bornage et qu'il ne rend compte que de la disposition des lieux en particulier du chemin litigieux, et non de leur statut ; qu'il ne vaut pas titre translatif de propriété ; que la commune démontre la continuité de son action depuis la délibération du conseil municipal du 21 septembre 1968 portant notamment sur une proposition de création de chemins communaux en vue de désenclaver des maisons d'habitation et des propriétés suivie d'une lettre du 26 novembre 1969 de l'ingénieur des TPE selon laquelle le projet de création de quatre chemins dont celui de VILONGE, du CD 329 au Mas du Cruveiller, a été déclaré d'utilité publique par arrêté préfectoral du 1er août 1969 pour une durée de cinq ans ; qu'un courrier de Monsieur le subdivisionnaire de la direction départementale de l'équipement du Gard, du 4 octobre 1971 confirme cette déclaration d'utilité publique, et qu'il résulte de ce courrier que le projet a reçu l'approbation d'une délibération du conseil municipal du 23 juillet 1970 puis du sous-préfet le 1er octobre 1970, que le marché des travaux a été approuvé par Monsieur l'ingénieur en chef le 4 décembre 1970 et notifié le 13 janvier 1971 (nota : ce courrier ne fait pas référence aux parcelles X...) ; qu'enfin, les travaux ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception définitive du 21 novembre 1972 ; qu'une délibération du conseil municipal du 21 mars 1991 reconduit l'entreprise X..., frère de l'appelant, pour l'entretien des chemins communaux (débroussaillage) dont le chemin de VILONGE ; que ces documents rendent compte d'actes accomplis par la commune, en particulier l'entretien du chemin, correspondant à des actes de propriétaire, pendant plus de trente ans avant l'action introduite par Monsieur X... par exploit du 17 mai 2006, mais qu'ils ne comportent aucun élément de localisation de ces actions ; qu'or, sur le plan cadastral, le chemin s'arrête à la propriété de Monsieur X... ; qu'aucun prestataire ne donne de repaire géographique de son intervention, et que les photocopies de photographies versées aux débats, outre leur mauvaise qualité, ne représentent qu'un chemin sans aucun élément de localisation ; qu'il n'est pas matériellement démontré que ces travaux ou actions d'entretien ont été réalisés sur le prolongement du chemin de VILONGE dans la propriété X... ; que l'acquisition par prescription trentenaire n'est donc pas établie ; que l'affectation à l'usage du public n'est pas démontrée ; que l'attestation du maire du 11 juillet 2006, outre qu'elle émane de la partie elle-même, n'y suffit pas ; qu'en effet, son auteur ne fait état d'aucun site, d'aucun équipement public ou à l'usage du public auquel ce chemin donnerait accès, et qu'aux termes de cette attestation, le maire fait de l'usage de ce chemin cette description : « il est fréquenté (depuis sa création) quotidiennement notamment par les membres des trois familles qui résident dans ce quartier, à savoir les familles Z..., A... et B.... Il est également emprunté très régulièrement par les propriétaires des « campagnes » ou « vignes » (comme on les appelle chez nous) qu'il dessert, mais aussi par les randonneurs. » ; que l'utilisation ainsi décrite est parfaitement compatible avec la qualification de chemin d'exploitation, y compris avec l'éventualité du passage de randonneurs qui n'est accréditée par aucun élément, aucun dépliant touristique, aucun document émanant d'une quelconque association ou autre, aucune constatation d'un tel passage, lequel, à le supposer établi, n'est pas exclusif de la notion de chemin d'exploitation, l'article L. 162-1 du Code rural et de la pêche maritimes susénoncé laissant à leurs propriétaires la faculté de les fermer à la circulation publique ; que la commune d'AVEZE ne fait donc pas la preuve de la propriété du chemin litigieux, et que sur le principe il doit être fait droit à l'action de Monsieur X... " ;

1°) ALORS QUE la preuve de la propriété immobilière peut se rapporter par tous moyens ; qu'en écartant la demande de la commune d'AVEZE visant à faire juger qu'elle était propriétaire des parcelles composant l'assiette de la partie du chemin de VILONGE traversant la propriété de Monsieur X... et que ce chemin était un chemin rural, au motif inopérant que le document d'arpentage établi par Monsieur Y..., géomètre expert, ne valait pas titre translatif de propriété, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, et partant, a violé ensemble les articles 1353 et 544 du Code civil ;

2°) ALORS QUE le procès verbal de délibération du conseil municipal de la commune d'AVEZE du 21 septembre 1968 approuvant la proposition de son président de créer quatre nouveaux chemins communaux indique que le chemin de VILONGE part de la route de Pommiers jusqu'au mas de VILONGE Maison Cruvellier ; que le courrier de Monsieur le subdivisionnaire de la direction départementale de l'équipement du Gard du 4 octobre 1971 qui précise que le projet de création des nouveaux chemins a été déclaré d'utilité publique et qu'il a reçu l'approbation d'une délibération du conseil municipal du 23 juillet 1970 puis du sous préfet le 1er octobre 1970 et que le marché des travaux a été approuvé par Monsieur L'ingénieur en chef le 4 décembre 1970 vise expressément la délibération précitée du 21 septembre 1968 qui précise que le chemin de VILONGE ira de la route de Pommiers au mas de VILONGE ; qu'en retenant pourtant, pour écarter la demande de la commune d'AVEZE tendant à voir juger qu'elle est propriétaire des parcelles constituant l'assiette du chemin de VILONGE, et que ce dernier était un chemin rural, que ces documents ne comportent aucun élément de localisation des actions de la commune, la Cour d'appel les a dénaturés et, partant, violé l'article 1134 du Code civil ;
3°) ALORS QU'une contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour juger que la commune n'établissait pas qu'elle avait acquis par prescription trentenaire les parcelles constituant l'assiette du chemin de VILONGE, que les documents démontrant la continuité de l'action de la commune depuis la délibération du conseil municipal du 21 septembre 1968, dont la lettre du 26 novembre 1969 de l'ingénieur des TPE, ne comportaient aucun élément de localisation de ces actions, après avoir constaté que cette lettre précisait que le chemin de VILONGE allait du " CD 329 au Mas de Cruveiller ", la Cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE les juges du fond doivent examiner, même succinctement, les éléments de preuve du débat ; que la commune d'AVEZE produisait un document d'arpentage établi par Monsieur Y..., géomètre expert, le 17 décembre 1979 duquel il résultait que le chemin de VILONGE permettait désormais la desserte des habitations environnantes jusqu'à la route départementale de " Pommiers au Vigan " ; qu'en se bornant, pour juger que l'affectation à l'usage du public n'était pas démontrée, à retenir que l'attestation du maire de la commune du 11 juillet 2006 n'était pas suffisante, quand il résultait du document d'arpentage versé aux débats que la prolongation du chemin de VILONGE avait permis son accès à la route départementale menant aux villages de Pommiers et du Vigan, la Cour d'appel a encore violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE l'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ; qu'en jugeant que l'affectation à l'usage du public n'était pas démontrée au seul motif que dans son attestation du 11 juillet 2006, le maire de la commune d'AVEZE ne faisait état d'aucun site, d'aucun équipement public ou à l'usage du public auquel ce chemin donnerait accès, sans rechercher s'il ne résultait pas de cette attestation que le chemin était utilisé comme voie de passage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 161-2 du Code rural et de la pêche maritime ;
6°) ALORS QUE constitue un chemin d'exploitation celui qui sert exclusivement à la desserte ou à l'exploitation des propriétés riveraines ; qu'en retenant, pour juger que le chemin litigieux était un chemin d'exploitation, que l'utilisation de ce chemin décrite par l'attestation du 11 juillet 2006 du maire de la commune d'AVEZE comme étant un chemin fréquenté quotidiennement notamment par les membres des trois familles qui résident dans ce quartier et « emprunté très régulièrement par les propriétaires des campagnes ou vignes qu'il dessert, mais aussi par les randonneurs » était parfaitement compatible avec la qualification de chemin d'exploitation, sans constater que le chemin avait pour fonction essentiellement la desserte des propriétés riveraines, la Cour d'appel a violé l'article L-162-1 du Code rural et de la pêche maritime.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la commune d'AVEZE à payer à Monsieur X... la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur X... ne fait état d'aucun autre préjudice que celui résultant de l'atteinte à son droit de propriété, les ouvrages critiqués ayant pour seul effet de limiter l'usage de la surface qu'ils affectent à celui qu'il en fait actuellement, à savoir celui de chemin ; qu'en réparation de ce préjudice, il doit lui être alloué la somme de 1000 euros » ;

ALORS QUE constitue un chemin d'exploitation, celui qui sert exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation ; qu'en relevant, pour condamner la commune d'AVEZE à payer à Monsieur X... une somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts, que les ouvrages effectués par la commune d'AVEZE sur la partie des parcelles appartenant à Monsieur X... constituant l'emprise du chemin avaient pour seul effet de limiter l'usage de la surface que ces ouvrages affectaient à celui qui en était fait actuellement, à savoir celui de chemin, quand elle constatait que cette surface était déjà utilisée comme chemin, qu'elle qualifiait de chemin d'exploitation, la Cour d'appel a violé l'article L. 162-1 du Code rural et de la pêche maritime.

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande en remise en état du chemin d'exploitation ;
AUX MOTIFS QUE les canalisations enterrées dans ce chemin et leurs regards sont des ouvrages publics dont le juge judiciaire ne peut pas ordonner la suppression et la demande de remise en état formée par M. X... ne peut prospérer ;
ALORS QUE si les juridictions de l'ordre judiciaire ne peuvent prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public, il en va autrement dans l'hypothèse où la réalisation de l'ouvrage procède d'un acte qui est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative et qu'aucune procédure de régularisation appropriée n'a été engagée ; qu'en refusant d'ordonner la remise en état du chemin, après avoir caractérisé l'existence d'une voie de fait commise par la commune d'Avèze, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 544 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-17165
Date de la décision : 25/10/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 26 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 oct. 2011, pourvoi n°10-17165


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17165
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award