La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/10/2011 | FRANCE | N°10-16924

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 octobre 2011, 10-16924


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 4 mars 2010), que M. X... a été engagé le 30 avril 1990 par la société Knoerr et Mohr au sein de laquelle il exerçait en dernier lieu l'emploi de peintre-isolateur ; qu'il a été licencié par lettre du 29 novembre 2006 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de débouter le salarié de ses demandes tendant à voir condamner la société au paiement de diverses sommes, alor

s, selon le moyen :
1°/ que les juges ne doivent examiner le caractère réel et sé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 4 mars 2010), que M. X... a été engagé le 30 avril 1990 par la société Knoerr et Mohr au sein de laquelle il exerçait en dernier lieu l'emploi de peintre-isolateur ; qu'il a été licencié par lettre du 29 novembre 2006 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de débouter le salarié de ses demandes tendant à voir condamner la société au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges ne doivent examiner le caractère réel et sérieux des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement que s'ils sont suffisamment précis et matériellement vérifiables, faute de quoi le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; que M. X... faisait expressément valoir que les trois griefs qui lui étaient reprochés dans la lettre de licenciement étaient manifestement imprécis ; que l'allégation, sans autre précision, d'un simple manque de rigueur et de soins dans l'exécution du travail, l'allégation, sans autre précision, d'une attitude déplacée vis-à-vis des autres ouvriers de l'entreprise et auprès des différents chefs d'équipe, et l'allégation sans autre précision d'un rendement insuffisant sur différents chantiers ne constituent pas des griefs matériellement vérifiables ; que la cour d'appel a examiné la réalité et le sérieux de ces prétendus griefs sans contrôler préalablement si au moins un des trois griefs invoqués dans la lettre de licenciement était suffisamment précis et matériellement vérifiable, a violé l'article L. 1232-6 du code du travail, ensemble l'article L. 1235-3 du code du travail ;
2°/ que si les juges du fond sont maîtres de la qualification juridique des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, ils ne peuvent se prévaloir d'autres griefs pour pallier l'imprécision de ceux qui sont contenus dans la lettre de licenciement et qui fixent à ce titre les limites du litige ; que pour juger que le licenciement de M. X... était fondé sur son insuffisance professionnelle, la cour d'appel s'est fondée sur les témoignages de MM. Y... et Z... qui relataient notamment que M. X... ne respectait pas les horaires, ne suivait pas les directives qu'il recevait, mais aussi sur ceux de MM. A... et B... qui soulignaient le refus de M. X... d'exécuter certaines tâches ; qu'en se prévalant ainsi de griefs de nature disciplinaire, qui figuraient d'autant moins dans la lettre de licenciement qu'elle constatait que celle-ci visait, comme le revendiquait l'employeur dans la procédure une insuffisance professionnelle, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et de l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, sans s'écarter des termes de la lettre de licenciement qui reprochait au salarié de manquer de rigueur dans son travail, d'avoir un comportement déplacé envers d'autres salariés et des chefs d'équipe, et de réaliser un rendement insuffisant, a effectué la vérification qui lui incombait de la réalité de ces griefs ; qu'ainsi le moyen, qui manque en fait dans sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges du fond qui statuent par des motifs contradictoires violent l'article 455 du nouveau code de procédure civile ; que d'un côté, la cour d'appel a relevé que MM. C... et D... avaient attesté que M. X... s'était normalement comporté avec les autres salariés de l'entreprise et que son travail a été «plus que correct» ; que d'un autre côté, la cour d'appel a aussitôt affirmé que ces témoignages ne répondent qu'au grief de comportement déplacé vis-à-vis des autres salariés de l'entreprise et de ses supérieurs hiérarchiques et non aux deux autres invoqués par l'employeur ; qu'en statuant ainsi, alors que ces deux autres griefs concernaient précisément le travail de M. X... et que la cour d'appel avait elle-même relevé que M. C... avait attesté de son travail «plus que correct», la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
2°/ que si les juges du fond apprécient souverainement la portée et la valeur des éléments de preuve, ils doivent faire montre d'impartialité lors de la prise en compte des attestations régulièrement établies par chacune des parties conformément à l'article 202 du nouveau code de procédure civile ; qu'après avoir relevé qu'étaient concordants les témoignages affirmant que M. X... s'était normalement comporté et que son travail avait été «plus que correct», la cour d'appel a, malgré tout, affirmé que ces témoignages étaient imprécis et ne permettaient pas de remettre en cause la force probante qui s'attachent aux attestations produites par l'employeur qui constituent un ensemble solide et concordant ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'a en rien montré en quoi les témoignages produits par l'employeur étaient plus précis au point de justifier la mise à l'écart de ceux produits par M. X..., la cour d'appel a fait preuve de partialité et violé l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ qu' un licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des griefs non seulement précis mais qui doivent en plus être personnellement imputables au salarié ; que pour dire le licenciement de M. X... justifié par des lacunes et insuffisances révélées par le salarié dans son travail, la cour d'appel s'est aussi fondé sur le grief invoqué par l'employeur de «rendement insuffisant constaté sur différents chantiers» ; que M. X... soutenait que ce grief ne pouvait lui être personnellement imputé , mais concernait tous ceux qui ont travaillé sur ces chantiers ; qu'en refusant d'écarter d'emblée ce troisième grief, sans examiner ce moyen déterminant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé et violé l'article L. 1232-6 et, ensemble, l'article L. 1232-1 du code du travail ;
4°/ qu'à supposer même que le grief de manque de rigueur et de soins dans l'exécution du travail soit, par impossible, suffisamment précis, l'employeur qui ne met pas à la disposition de son salarié le matériel adapté aux travaux qu'il a à réaliser ne peut ensuite lui reprocher la mauvaise qualité de son travail ; que M. X... soutenait dans ses conclusions que s'il n'avait pas débarrassé l'un des chantiers sur lequel il travaillait, ce n'est que parce que l'employeur n'avait pas tenu à sa disposition, le moment venu, la camionnette qui lui permettait de le faire ; qu'en jugeant malgré tout que le reproche fait à M. X... de manque de rigueur et de soins dans l'exécution de son travail sur différents chantiers était -à supposer le grief suffisamment précis-, justifié, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-1 du code du travail ;
5°/ que l'employeur peut d'autant moins reprocher à l'un de ses salariés un manque à la fois de rendement et de rigueur et de soins dans l'exécution de son travail que ce salarié revient d'un arrêt maladie et qu'il a, en plus d'être convalescent, fait l'objet d'un avis d'aptitude avec des restrictions notamment sur le port de charge à 20 Kg et interdiction de montages d'échafaudages, de travaux d'isolation ; qu'en jugeant que le licenciement de M. X... était justifié par les lacunes et insuffisances révélées dans son travail, sans rechercher si ces insuffisances n'étaient précisément pas liées, comme il le soutenait dans ses conclusions, à sa maladie et à son aptitude restreinte au travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
6°/ que l'employeur ne peut, sans se contredire, licencier pour insuffisance professionnelle un salarié qu'il n'a pas critiqué pendant sa longue ancienneté dans l'entreprise et qu'il a au contraire promu à plusieurs reprises ; qu'en s'abstenant de rechercher si le passé professionnel irréprochable de M. X... pendant 16 ans dans l'entreprise et la promotion dont il avait bénéficié récemment ne s'opposaient pas à son licenciement pour insuffisance professionnelle et si, sous couvert d'un tel motif, le licenciement n'était pas en réalité l'aboutissement du processus d'éviction dont il s'estimait victime suite à sa maladie, la cour d'appel a pour encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de contradictions de motifs, défaut de base légale et violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des droits fondamentaux, le moyen ne tend qu'à mettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation par les juges du fond, lesquels ne sont pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, des éléments de fait et de preuve qui leur étaient soumis ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de débouter M. X... de sa demande spécifique de dommages-intérêts pour licenciement abusif tenant aux circonstances de la rupture, alors, selon le moyen, que les juges du fond qui ne répondent pas à un véritable moyen explicité dans les conclusions voient leur décision censurée au visa de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ; que dans ses conclusions, M. X... demandait, dans un moyen précisément explicité, la réparation du préjudice distinct qu'il avait subi du fait des conditions abusives et vexatoires de sa rupture, celle-ci étant en effet intervenue brutalement à savoir après 16 ans d'ancienneté sans qu'il n'ait fait l'objet du moindre avertissement pendant toute ces années ; qu'en ne répondant pas à ce moyen qui était d'autant plus sérieux que le préjudice allégué est indépendant de savoir si le licenciement a ou non une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel n'était tenue de répondre qu'aux demandes exprimées par les parties et que M. X... n'avait formé aucune demande particulière au titre du licenciement abusif ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et, ce faisant, de l'avoir débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et, également, de l'avoir condamné aux dépens de première instance et d'appel,
AUX MOTIFS QU'il convient d'examiner successivement les griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ;Attendu qu'il y a lieu de remarquer au préalable qu'aux termes de l'article L. 1235-1 du Code du travail, la Cour doit former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter a priori les attestations de témoin produites par l'employeur comme l'ont fait les premiers juges ; Attendu que le caractère réel de ces griefs est clairement établi par les attestations de témoin de deux chefs d'équipe sous les ordres desquels Monsieur X... a travaillé, Messieurs Alain Y... et Julio Z..., qui tous deux relatent qu'il ne respectait pas les horaires de travail, ne suivait pas les directives qu'il recevait, montrait du laxisme dans l'exécution des tâches qui lui étaient confiées, faisait preuve de lenteur, avait une attitude vis-à-vis de ses collègues de travail qui "nuisait au bon déroulement des chantiers", aux dires de Monsieur Y... ; Attendu que ces témoignages sont corroborés par ceux de deux collègues de travail, Messieurs Michaël A... et Jean-Marc B... qui soulignent dans leurs attestations respectives son refus d'exécuter certaines tâches et son absence d'esprit d'équipe ; Attendu que le salarié entend combattre ces attestations concordantes tout d'abord par les attestations de deux anciens collègues de travail, Messieurs Patrick C... et Didier D..., qui affirment que Monsieur X... se serait normalement comporté avec les autres salariés de l'entreprise et que son travail aurait été "plus que correct", Monsieur D... ajoutant que Monsieur X... aurait été victime d'une "petite discrimination"; Attendu toutefois que ces témoignages ne répondent qu'au grief de comportement déplacé vis-à-vis des autres salariés de l'entreprise et de ses supérieurs hiérarchiques et non aux deux autres invoqués par l'employeur ; Attendu de surcroît qu'ils sont imprécis et ne permettent pas de remettre en cause la force probante qui s'attachent aux attestations produites par l'employeur qui constituent un ensemble solide et concordant ; Attendu que l'allégation de discrimination dont Monsieur X... aurait été victime n'est pas étayée du moindre élément permettant de la présumer ; Attendu ensuite que Monsieur X... se prévaut des témoignages d'une gardienne d'immeuble et du pasteur d'un presbytère, lieux dans lesquels il a participé à des chantiers, témoins qui attestent qu'il n'aurait jamais tenu de propos déplacés envers les autres salariés de l'entreprise et ses chefs ; Attendu cependant que ces personnes, extérieures à l'entreprise, n'étaient pas en situation de porter une appréciation juste et pertinente aussi bien sur la qualité du travail fourni par le salarié que sur ses relations tant avec ses supérieurs hiérarchiques que ses collègues de travail ; Attendu que ces témoignages n'ont aucune valeur probante ; Attendu enfin que Monsieur X... excipe un document non daté signé par huit personnes qui affirment avoir travaillé sur deux chantiers de concert avec lui et que son comportement leur avait semblé "normal" et qu'il n'avait pas eu une "attitude agressif (sic)" ; Attendu néanmoins qu'on ne sait quelle est la qualité des signataires de ce document (collègues de travail, salariés d'autres entreprises participants aux mêmes chantiers, maîtres d'ouvrage, etc,) ; Attendu de plus qu'ils déclarent l'avoir côtoyé uniquement sur deux chantiers si bien qu'ils n'étaient pas en mesure déjuger de ses qualités professionnelles et humaines; Attendu que cette pièce n'a donc pas de valeur probante ; Attendu que les lacunes et insuffisances révélées par le salarié dans son travail perturbait le bon fonctionnement de l'entreprise en ce qu'elles engendraient des malfaçons, des retards dans le travail et créaient des tensions avec les autres salariés de l'entreprise ; Attendu qu'elles constituaient donc une cause réelle et sérieuse de licenciement; Attendu que le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer la somme de 18.000€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Attendu que, statuant à nouveau à ce sujet, il convient de dire que le licenciement de l'intimé repose sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les juges ne doivent examiner le caractère réel et sérieux des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement que s'ils sont suffisamment précis et matériellement vérifiables, faute de quoi le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; que Monsieur X... faisait expressément valoir que les trois griefs qui lui étaient reprochés dans la lettre de licenciement étaient manifestement imprécis ; que l'allégation, sans autre précision, d'un simple manque de rigueur et de soins dans l'exécution du travail, l'allégation, sans autre précision, d'une attitude déplacée vis-à-vis des autres ouvriers de l'entreprise et auprès des différents chefs d'équipe, et l'allégation sans autre précision d'un rendement insuffisant sur différents chantiers ne constituent pas des griefs matériellement vérifiables ; que la Cour a examiné la réalité et le sérieux de ces prétendus griefs sans contrôler préalablement si au moins un des trois griefs invoqués dans la lettre de licenciement était suffisamment précis et matériellement vérifiable, a violé l'article L.1232-6 du Code du travail, ensemble l'article L.1235-3 du Code du travail.
ALORS, à tout le moins, QUE si les juges du fond sont maîtres de la qualification juridique des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, ils ne peuvent se prévaloir d'autres griefs pour pallier l'imprécision de ceux qui sont contenus dans la lettre de licenciement et qui fixent à ce titre les limites du litige ; que pour juger que le licenciement de Monsieur X... était fondé sur son insuffisance professionnelle, la Cour d'appel s'est fondée sur les témoignages de Messieurs Y... et Z... qui relataient notamment que Monsieur X... ne respectait pas les horaires, ne suivait pas les directives qu'il recevait, mais aussi sur ceux de Messieurs A... et B... qui soulignaient le refus de Monsieur X... d'exécuter certaines tâches ; qu'en se prévalant ainsi de griefs de nature disciplinaire, qui figuraient d'autant moins dans la lettre de licenciement qu'elle constatait que celle-ci visait, comme le revendiquait l'employeur dans la procédure une insuffisance professionnelle, la Cour d'appel a méconnu le principe susvisé et de l'article L.1232-6 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et, ce faisant, de l'avoir débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et, également, de l'avoir condamné aux dépens de première instance et d'appel,
AUX MOTIFS ENONCES AU PREMIER MOYEN
ALORS QUE 1°) les juges du fond qui statuent par des motifs contradictoires violent l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; que d'un côté, la Cour d'appel a relevé que Messieurs C... et D... avaient attesté que Monsieur X... s'était normalement comporté avec les autres salariés de l'entreprise et que son travail a été «plus que correct» ; que d'un autre côté, la Cour d'appel a aussitôt affirmé que ces témoignages ne répondent qu'au grief de comportement déplacé vis-à-vis des autres salariés de l'entreprise et de ses supérieurs hiérarchiques et non aux deux autres invoqués par l'employeur ; qu'en statuant ainsi alors que ces deux autres griefs concernaient précisément le travail de Monsieur X... et que la Cour d'appel avait elle-même relevé que Monsieur C... avait attesté de son travail «plus que correct», la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.
QUE 2°) si les juges du fond apprécient souverainement la portée et la valeur des éléments de preuve, ils doivent faire montre d'impartialité lors de la prise en compte des attestations régulièrement établies par chacune des parties conformément à l'article 202 du nouveau Code de procédure civile ; qu'après avoir relevé qu'étaient concordants les témoignages affirmant que Monsieur X... s'était normalement comporté et que son travail avait été «plus que correct», la Cour d'appel a, malgré tout, affirmé que ces témoignages étaient imprécis et ne permettaient pas de remettre en cause la force probante qui s'attachent aux attestations produites par l'employeur qui constituent un ensemble solide et concordant ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'a en rien montré en quoi les témoignages produits par l'employeur étaient plus précis au point de justifier la mise à l'écart de ceux produits par Monsieur X..., la Cour d'appel a fait preuve de partialité et violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
QUE 3°) un licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des griefs non seulement précis mais qui doivent en plus être personnellement imputables au salarié ; que pour dire le licenciement de Monsieur X... justifié par des lacunes et insuffisances révélées par le salarié dans son travail, la Cour d'appel s'est aussi fondé sur le grief invoqué par l'employeur de «rendement insuffisant constaté sur différents chantiers» ; que Monsieur X... soutenait que ce grief ne pouvait lui être personnellement imputé , mais concernait tous ceux qui ont travaillé sur ces chantiers ; qu'en refusant d'écarter d'emblée ce troisième grief, sans examiner ce moyen déterminant, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé et violé l'article L.1232-6 et, ensemble, l'article L.1232-1 du Code du travail.
QUE 4°) à supposer même que le grief de manque de rigueur et de soins dans l'exécution du travail soit, par impossible, suffisamment précis, l'employeur qui ne met pas à la disposition de son salarié le matériel adapté aux travaux qu'il a à réaliser ne peut ensuite lui reprocher la mauvaise qualité de son travail ; que Monsieur X... soutenait dans ses conclusions que s'il n'avait pas débarrassé l'un des chantiers sur lequel il travaillait, ce n'est que parce que l'employeur n'avait pas tenu à sa disposition, le moment venu, la camionnette qui lui permettait de le faire ; qu'en jugeant malgré tout que le reproche fait à Monsieur X... de manque de rigueur et de soins dans l'exécution de son travail sur différents chantiers était -à supposer le grief suffisamment précis-, justifié, la Cour d'appel a violé l'article L.1232-1 du Code du travail.
QUE 5°) l'employeur peut d'autant moins reprocher à l'un de ses salariés un manque à la fois de rendement et de rigueur et de soins dans l'exécution de son travail que ce salarié revient d'un arrêt maladie et qu'il a, en plus d'être convalescent, fait l'objet d'un avis d'aptitude avec des restrictions notamment sur le port de charge à 20 Kg et interdiction de montages d'échafaudages, de travaux d'isolation ; qu'en jugeant que le licenciement de Monsieur X... était justifié par les lacunes et insuffisances révélées dans son travail, sans rechercher si ces insuffisances n'étaient précisément pas liées, comme il le soutenait dans ses conclusions, à sa maladie et à son aptitude restreinte au travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1231-1 du Code du travail.
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOYHESE, QUE 6°) l'employeur ne peut, sans se contredire, licencier pour insuffisance professionnelle un salarié qu'il n'a pas critiqué pendant sa longue ancienneté dans l'entreprise et qu'il a au contraire promu à plusieurs reprises ; qu'en s'abstenant de rechercher si le passé professionnel irréprochable de Monsieur X... pendant 16 ans dans l'entreprise et la promotion dont il avait bénéficié récemment ne s'opposaient pas à son licenciement pour insuffisance professionnelle et si, sous couvert d'un tel motif, le licenciement n'était pas en réalité l'aboutissement du processus d'éviction dont il s'estimait victime suite à sa maladie, la Cour d'appel a pour encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1231-1 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande spécifique de dommages et intérêts pour licenciement abusif en raison des circonstances vexatoires et brutales de la rupture.
AUX MOTIFS ENONCES AU PREMIER MOYEN
ALORS QUE, les juges du fond qui ne répondent pas à un véritable moyen explicité dans les conclusions voient leur décision censurée au visa de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; que dans ses conclusions Monsieur X... demandait, dans un moyen précisément explicité, la réparation du préjudice distinct qu'il avait subi du fait des conditions abusives et vexatoires de sa rupture, celle-ci étant en effet intervenue brutalement à savoir après 16 ans d'ancienneté sans qu'il n'ait fait l'objet du moindre avertissement pendant toute ces années ; qu'en ne répondant pas à ce moyen qui était d'autant plus sérieux que le préjudice allégué est indépendant de savoir si le licenciement a ou non une cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-16924
Date de la décision : 25/10/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 04 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 oct. 2011, pourvoi n°10-16924


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.16924
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award