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13/10/2011 | FRANCE | N°10-23291

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 octobre 2011, 10-23291


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1147 du code civil, L. 461-1, L. 461-2 et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'un

e faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurit...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1147 du code civil, L. 461-1, L. 461-2 et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que M. X..., salarié de la société Compagnie Electro-Mécanique, devenue SSD Parvex, (la société) du 6 mars 1973 au 31 décembre 2006, a adressé le 26 octobre 2006 à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or (la caisse) une déclaration de maladie professionnelle au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles ; que la caisse a pris en charge cette maladie au titre de la législation professionnelle ; que M. X... a saisi une juridiction de sécurité sociale en reconnaissance d'une faute inexcusable de son employeur ;
Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que, de l'ensemble des éléments produits, il ressort qu'au sein de la société, qui ne fabriquait pas des produits contenant de l'amiante, M. X... était doté d'équipements de protection individuelle constitués pour partie d'amiante, qu'il travaillait dans un atelier contenant des fours calorifugés avec de l'amiante et qu'il pouvait être appelé de temps en temps à participer à des tâches de maintenance de ces fours sans aucun moyen de protection ; qu'il retient également que l'inhalation de poussières d'amiante qui avait pu justifier la reconnaissance de maladie professionnelle ne se situait pas à un niveau tel que la société ait eu ou aurait dû avoir connaissance du danger auquel le salarié était exposé ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il suffit, pour qu'une faute inexcusable puisse être reconnue, que l'exposition du salarié au risque ait été habituelle, peu important le fait que la société ne participait pas au processus de fabrication ou de transformation de l'amiante, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si, compte tenu de son importance, de son organisation et de la nature de son activité, la société, n'aurait pas dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne la société SSD Parvex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société SSD Parvex ; la condamne à payer à M. X... la somme de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Serge X... de ses demandes tendant à voir dire que la maladie professionnelle déclarée le 26 octobre 2006 était imputable à la faute inexcusable de son employeur, la Société SSD PARVEX SAS et à obtenir, outre une majoration de sa rente maladie professionnel, l'indemnisation de ses différents chefs de préjudice.
Aux motifs propres qu'« En vertu du contrat de travail qui le lie à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles. le manquement à cette obligation ayant le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Il incombe à la victime de prouver que l'employeur qui devait avoir conscience du danger n'a pas pris les mesures pour l'en préserver. La SAS SSD PARVEX produit des variateurs pour moteurs et des servomoteurs. Elle fabriquait des flasques dans son atelier de fonderie doté de fours et de presses ; Serge X... se prévaut des témoignages de salariés qui ont travaillé à la fonderie ainsi que dans l'atelier de bobinage. N'étant pas démontré que l'intéressé ait travaillé ailleurs qu'à la fonderie, seules les attestations d'Antoine Y..., de Lino Z..., de Mohamed A..., de Luigi B... et d'Antonio C... ont lieu d'être examinées. Antoine Y..., fondeur de 1973 à 1987, rapporte que des gants en amiante jusqu'au coude et une combinaison amiante étaient utilisés et que des plaques d'amiante étaient découpées dans le local fonderie avec uns scie sauteuse sans aucune protection. Lino Z..., ouvrier d'entretien de 1975 à 1988, était chargé du calorifugeage des trois fours de fusion ainsi que des fours de maintien des presses. Il précise qu'il réalisait ce travail un samedi sur deux avec les nommés D... et A..., qu'il intervenait parfois pour remplacer les creusets cassés et que dans ce cas, il se faisait aider par le fondeur de la machine concernée. Son attestation ne contient pas une seule allusion à l'amiante. Mohamed A..., ouvrier d'entretien de 1979 à 1985, confirme les rythmes de travail cités par Lino Z.... Il affirme que le calorifugeage était réalisé avec des plaques d'amiante qui arrivaient en camion et que les travaux étaient réalisés sans aucun moyen de protection. Luigi B... qui a travaillé avec Serge X... déclare qu'il utilisait des gants et des combinaisons en amiante et que pour réaliser le travail quotidien. Il fallait découper des morceaux d'amiante, sans plus de précisions sur la nature de ces travaux ainsi que sur leur fréquence. Antonio C... atteste que Serge X... a, travaillé à la fonderie jusqu'à sa fermeture en 1987 et qu'il utilisait des gants en amiante ainsi que des plaques d'amiante pour protections diverses. Serge X... évoque également le rapport de prélèvement et d'analyse de matériaux établi par le Bureau Veritas le 13 avril 2007 dans lequel est mentionnée la présence d'amiante sous forme fibreuse blanche dans l'isolation de la trémie du four (étuve) n° 994. Dans un rapport en date du 14 mai 2007, l'inspecteur du travail note que l'entreprise Parvex a utilisé de l'amiante de façon quasi continue depuis sa création comme isolant et pour la protection des opérateurs contre la chaleur, que l'utilisation la plus marquée remonte à la période 1950/ 1988 avec des équipements de protection individuelle pour les opérateurs de fonderie (gants et tabliers) contenant de l'amiante et lors du renouvellement de joints de tresse d'amiante sur les creusets et que les salariés employés à la fonderie, à la maintenance et à l'outillage semblent avoir été plus particulièrement en contact avec des produits amiantés sans qu'il soit possible de déterminer le nombre de salariés concernés eu égard à la multiplicité des postes visés. De l'ensemble de ces éléments, il ressort qu'au sein de la SAS SSD PARVEX, qui ne fabriquait pas des produits contenant de l'amiante, Serge X... était doté d'équipements de protection individuelle constitués pour partie d'amiante, qu'il travaillait dans un atelier contenant des fours calorifugés avec de l'amiante et qu'il pouvait être appelé, de temps en temps, à participer à des tâches de maintenance de ces fours sans aucun moyen de protection. Rien ne prouve qu'il existait du flocage en amiante dans l'atelier de fonderie. En retenant que l'inhalation de poussières d'amiante qui avait pu justifier la reconnaissance de maladie professionnelle ne se situait pas à un niveau tel que la SAS SSD PARVEX ait eu ou aurait du avoir connaissance du danger auquel Serge X... était exposé, le tribunal des affaires de sécurité sociale a fait une exacte appréciation des éléments qui lui étaient soumis. »

Aux motifs adoptés que « La faute inexcusable de l'employeur est définie par la jurisprudence dominante comme le manquement de celui-ci à une obligation de résultat, en matière de prévention des accidents du travail ou des maladies professionnelles, dès lors qu'il avait ou aurait da avoir conscience du danger qui s'est ainsi matérialisé, auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour lien préserver. Il convient d'examiner si la Société PARVEX aurait du avoir conscience des risques que leurs conditions de travail faisaient courir aux salariés. La réalité de l'exposition aux risques est en effet établie par la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle que l'employeur ne peut plus contester, et, en l'état du droit, la relation contractuelle de travaille constitue débiteur d'une obligation de sécurité à l'égard de ses préposés. Dès lors en effet que la Société PARVEX ne transforme par l'amiante en l'intégrant à d'autres matériaux mais l'utilise, sauf exceptions, sous forme de plaques isolantes, les considérations habituelles de la jurisprudence sur la connaissance des dangers de l'inhalation des poussières d'amiante et des études et réglementations successives ne peuvent s'appliquer en l'espèce sans analyse déterminante de l'Importance de l'exposition aux risques. Concernant le port de gants et combinaisons en amiante, M. X... et la Société PARVEX sont contraires en fait : cette dernière verse aux débats l'attestation d'un salarié retraité qui témoigne que lui-même et ses collègues ne portaient pas de tablier ou combinaison en amiante ; le même témoin déclare que les gants de protection étaient d'amiante tressé et de tissu pour la partie en contact avec la peau. L'exposition aux risques se trouvait ainsi très réduite. Le demandeur et la défenderesse le sont encore concernant la présence d'amiante dans la fonderie et il y a lieu d'examiner les rapports d'analyses de la Société ‘ " Bureau Véritas'que produit le demandeur. Ceux-ci relèvent de l'amiante dans un échantillon sur cinq analysés le 13 avril 2005, ce dernier étant dénommé ‘ protos n° 3 (plaque isolation)'sans que, comme d'autres, leur nature et leur usage apparaissent de façon utile ; ainsi un autre échantillon renfermant de l'amiante, selon rapport du 3 novembre 2000, est identifié comme ‘ plaque'sans précision autre. Ainsi encore, dans un rapport du 20 mars 2007, trois prélèvements sur huit révèlent de la présence d'amiante sans aucune indication sur leur provenance, leur usinage ou leur usage précis, et par quel type de salariés. M. X... sur ce point ne rapporte pas la preuve des faits qu'il allègue. Concernant la découpe de plaques d'amiante pour calorifuger les fours et les presses, la fréquence de ces opérations est incertaine : le demandeur produit une attestation d'un ouvrier d'entretien entre 1975 et 1988 qui témoigne que l'opération s'effectuait un samedi sur deux et que lorsqu'elle était accidentellement nécessaire en semaine l'ouvrier fondeur de la machine concernée l'aidait dans cette tâche de recalorifugeage. L'inhalation de poussières d'amiante par M. X... a pu justifier la reconnaissance de maladie professionnelle sans se situer à un niveau tel que la Sté PARVEX ait eu ou aurait du avoir connaissance du danger auquel ce salarié se trouvait exposé. La demande est en conséquence mal fondée. »

1) Alors qu'il n'est pas nécessaire, pour caractériser la faute inexcusable de l'employeur de constater une exposition permanente et continue au risque ; qu'il suffit que ladite exposition soit habituelle ; qu'aussi en retenant, pour écarter la faute inexcusable, que le salarié, dont elle constatait qu'il avait dû travailler avec des équipements de protection individuelle constitués pour partie d'amiante avait pu être appelé, de temps en temps, à participer à des tâches de maintenance de fours calorifugés avec de l'amiante sans aucun moyen de protection, la cour d'appel, qui a subordonné l'existence d'une faute inexcusable à une exposition permanente et continue au risque, a violé l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale.
2) Alors qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en protéger ; qu'en retenant, pour écarter la faute inexcusable, de la société SSD PARVEX, qu'elle ne participait pas au processus de fabrication ou de transformation de l'amiante, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale.
3) Alors qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en protéger ; qu'en retenant, pour écarter la faute inexcusable, que la société SSD PARVEX ne pouvait avoir conscience du danger de l'inhalation des poussières d'amiante auquel elle avait exposé le salarié du 6 mars 1973 au 31 décembre 2006, sans avoir recherché, comme elle y était pourtant invitée, si la société PARVEX, compte tenu de ses caractéristiques particulières et plus spécifiquement du fait qu'elle exploitait une fonderie pour mener à bien son activité de fabrication et de réparation de moteur et utilisait donc nécessairement l'amiante comme isolant de façon constante, n'aurait pas dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-23291
Date de la décision : 13/10/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 17 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 oct. 2011, pourvoi n°10-23291


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.23291
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