La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2011 | FRANCE | N°09-72823

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 octobre 2011, 09-72823


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Adecco France et rejette sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... engagé par la société de travail temporaire Védiorbis (devenue Randstad) a été mis à la disposition de la société Hélio Corbeil Quebecor dont l'activité principale est l'imprimerie de périodiques, en vue d'occuper un emploi de receveur dans le cadre de 185 missions d'intérim successives entre le 3 septembre 2003 et le 30 novembre 2005 aux

motifs de remplacements de salariés absents et d'accroissements temporaires...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Adecco France et rejette sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... engagé par la société de travail temporaire Védiorbis (devenue Randstad) a été mis à la disposition de la société Hélio Corbeil Quebecor dont l'activité principale est l'imprimerie de périodiques, en vue d'occuper un emploi de receveur dans le cadre de 185 missions d'intérim successives entre le 3 septembre 2003 et le 30 novembre 2005 aux motifs de remplacements de salariés absents et d'accroissements temporaires d'activité ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de ces missions d'intérim et des contrats de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée ainsi que la condamnation in solidum des sociétés Hélio Corbeil Quebecor et Védiorbis au paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen du pourvoi du salarié :
Vu les articles L. 1251-5 et L. 1251-6 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que la possibilité donnée à l'entreprise utilisatrice de recourir à des contrats de missions successifs avec le même salarié intérimaire pour remplacer un ou des salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu, ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à son activité normale et permanente ; qu'il en résulte que l'entreprise utilisatrice ne peut recourir de façon systématique aux missions d'intérim pour faire face à un besoin structurel de main-d'oeuvre ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X... tendant à la requalification des missions d'intérim au sein de la société Hélio Corbeil Quebecor en un contrat à durée indéterminée, l'arrêt énonce que le motif d'accroissement temporaire d'activité était accessoire et que les missions étaient presque exclusivement fondées sur le remplacement de multiples salariés qui se trouvaient en congés, en arrêt de travail pour cause de maladie ou accomplissement de leur mission de délégué syndical ; que les pièces justifient de la réalité de ces motifs, lesquels sont conformes à ceux exigés par l'article L. 1251-11 du code du travail ; que le salarié n'a pas été mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice de façon continue comme le démontre le relevé mensuel des périodes de non utilisation depuis la première mission jusqu'en novembre 2005 ; qu'il n'est nullement établi que la société utilisatrice a continué d'employer le salarié sans contrat de mise à disposition ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que pendant plus de deux années consécutives, et quel que soit le remplacement assuré à l'occasion des multiples missions d'intérim le salarié avait occupé le même emploi de receveur, ce dont il résultait que l'emploi qu'il occupait était lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise et qu'il y avait lieu de requalifier la relation de travail en un contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation encourue du chef des dispositions de l'arrêt relatives à la requalification des missions d'intérim en contrat à durée indéterminée entraîne par voie de dépendance nécessaire, celle des dispositions relatives l'indemnisation du licenciement ;
Et sur le pourvoi incident de la société Randstad (anciennement Védiorbis) :
Vu l'article L. 1251-41 du code du travail ;
Attendu que la cour d'appel a condamné la société Védiorbis au paiement d'une indemnité de requalification ;
Attendu, cependant, qu'il résulte de l'article L. 1251-41 du code du travail qu'en cas de requalification d'une mission d'intérim en contrat à durée indéterminée, le juge doit accorder au salarié, à la charge de l'utilisateur, une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire ; qu'il en résulte que le salarié ne peut prétendre, au paiement, par l'entreprise de travail temporaire, d'une indemnité de requalification ;
Qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes à l'encontre de la société Hélio Corbeil Quebecor tendant à la requalification des missions d'intérim en contrat à durée indéterminée et au paiement de rappels de salaire, d'indemnité de requalification, d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il a condamné la société Védiorbis, devenue Randstad au paiement d'une indemnité de requalification, l'arrêt rendu le 3 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Hélio Corbeil Quebecor aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Hélio Corbeil Quebecor à payer à M. X... la somme de 181,460 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de ses demandes à l'encontre de la Société HELIO CORBEIL QUEBECOR tendant la requalification de ses contrats de travail temporaire en contrat à durée indéterminée avec reprise de son ancienneté à compter de la première mission effectuée, ainsi qu'au paiement de divers rappels de salaire et d'indemnités de rupture ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que par contrat de mission en date du 3 septembre 2003, Djemaï X... a été mis à la disposition de la Société HELIO CORBEIL par la Société VEDIORBIS en vue d'occuper l'emploi de receveur ; que de 2003 à novembre 2005, 185 contrats de mission ont été conclu (…) ; qu'en application de l'article L.1251-40 du Code du travail le salarié d'une entreprise de travail temporaire ne peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission que dès lors que ladite entreprise a eu recours au salarié en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35 dudit Code ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que les motifs énoncés pour justifier les différentes missions ne consistaient pas en un seul accroissement temporaire d'activité ; qu'ils étaient fondés sur le remplacement de multiples salariés absents parce qu'ils se trouvaient en congés, en arrêt de travail pour cause de maladie ou assuraient une délégation ; que les motifs retenus sont conformes à ceux exigés par l'article L. 1251-11 du Code du travail ; qu'en outre, l'intimé n'a pas été mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice par la société de travail temporaire de façon continue, comme le démontre le relevé des périodes de son utilisation de l'année 2003 jusqu'en novembre 2005 ; qu'il n'est nullement établi que la société utilisatrice a continué d'employer l'intimé sans contrat de mise à disposition ; qu'enfin, le non respect du délai de carence prévu à l'article L. 124-7 alinéa 3 devenu L. 1251-36 du Code du travail n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 1251-40 du Code du travail ; que cependant la signature d'un contrat écrit imposée par la loi dans les rapports entre l'entreprise de travail temporaire et le salarié est destinée à garantir qu'ont été observées les diverses conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main d'oeuvre est interdire ; que cette prescription étant d'ordre public, son omission entraîne à la demande du salarié la requalification en contrat de droit commun à durée indéterminée ; que toutefois l'obligation de remise d'un contrat écrit de mission incombe à l'entreprise de travail temporaire ; que les dispositions de l'article L. 1251-39 du Code du travail ne permettent pas au salarié intérimaire d'invoquer la violation par l'entreprise de travail temporaire des prescriptions de l'article L. 1251-16 dudit Code pour faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits afférents à un contrat à durée indéterminée ; que la Société VEDIORBIS ne verse pas de contrat de mission de juin à novembre 2005 alors que l'intimé a été, à de multiples reprises, mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice durant cette période ; qu'une telle irrégularité a pour effet d'entraîner la requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée à compter du 6 juin 2005 ; que compte tenu des énonciations figurant sur l'attestation ASSEDIC et de bulletins de paye produits, il convient d'évaluer la rémunération mensuelle brute moyenne de l'intimé à la somme de 2.179 € ; que seule la Société VEDIORBIS doit être condamné au paiement de cette indemnité ; que l'intimé n'étant pas salarié de la société utilisatrice, il ne saurait prétendre bénéficier des avantages liés au plan de sauvegarde de l'emploi ni obtenir de prime de participation ou d'intéressement, de rappel de salaire au titre de la mensualisation ou de primes en application de l'accord d'entreprise ; qu'il convient en conséquence de débouter l'intimé de sa demande formée à l'encontre de la Société HELIO CORBEIL QUEBECOR ;
1) ALORS QUE les contrats de travail temporaire, qui ont pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise, doivent être requalifiés en contrat de travail à durée indéterminée ; que dès lors, en l'espèce, en déboutant Monsieur X... de sa demande de requalification de ses contrats de travail temporaire en contrat à durée indéterminée formée à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, après avoir constaté que son premier contrat de mission datait du 3 septembre 2003 et que, de 2003 à novembre 2005, 185 contrats de mission avaient été conclus, la Cour d'appel a violé les articles L. 1251-5 et L. 1251-40 du Code du travail ;
2) ALORS QU'en tout état de cause, en se bornant à relever que Monsieur X... n'avait pas été mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice par la société de travail temporaire de façon continue, pour débouter le salarié de sa demande de requalification de ses 185 contrats de travail temporaire formée à l'encontre de la société utilisatrice, sans rechercher si le salarié n'avait pas toujours occupé le même emploi de receveur, la Cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1251-5 et L. 1251-40 du Code du travail ;
3) ALORS, et subsidiairement encore, QUE la décision de première instance avait constaté que « la plupart des salariés a connu des périodes sans mission, qui en fait correspondent soit à la période de l'année où ils ont nécessairement pris leurs congés, soit aux périodes où ils se sont trouvés en arrêt maladie ou en arrêt de travail, ce dont il est justifié par la production des attestations de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie » ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce motif que Monsieur X... s'était approprié, en demandant la confirmation de la décision de première instance sur la requalification de ses contrats de travail temporaire à l'égard de la Société HELIO CORBEIL QUEBECOR, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) ALORS, et à titre infiniment subsidiaire, QUE lorsque l'entreprise utilisatrice continue à faire travailler un salarié temporaire après la fin de sa mission sans avoir conclu avec l'entrepreneur de travail temporaire un contrat écrit de mise à disposition, ce salarié est réputé lié à l'entreprise utilisatrice par un contrat de travail à durée indéterminée ; qu'il incombe à l'entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la conclusion d'un contrat écrit de mise à disposition ; qu'en retenant, pour débouter Monsieur X... de sa demande de requalification de ses contrats de travail temporaire en contrat à durée indéterminée formée à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, qu'il n'était nullement établi que cette dernière avait continué d'employer le salarié sans contrat de mise à disposition, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;
5) ALORS, et à titre encore plus subsidiaire, QU'en déboutant le salarié de ses demandes à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, après avoir constaté que « la Société VEDIORBIS ne verse pas de contrat de mission de juin à novembre 2005 alors que l'intimé a été, à de multiples reprises, mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice durant cette période », la Cour d'appel a violé l'article L. 1251-39 du Code du travail.

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Randstad anciennement Védiorbis.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Védiorbis à verser à M. X... une somme de 2.179 euros à titre d'indemnité de requalification ;
AUX MOTIFS QUE la société Védiorbis ne verse pas de contrat de mission à compter du 3 avril 2000 alors que l'intimé a été, à de multiples reprises, mis à la disposition de l'entreprise utilisatrice durant cette période ; qu'une telle irrégularité a pour effet d'entraîner la requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée à compter du 6 juin 2005 ; que compte tenu des énonciations figurant sur les bulletins de paye et sur l'attestation Assedic produits, il convient d'évaluer la rémunération mensuelle brute moyenne de l'intimé à la somme de 2.179 euros ; que seule la société Védiorbis doit être condamnée au paiement de cette indemnité ;
ALORS QU' en cas de requalification d'une mission d'intérim en contrat à durée indéterminée, le salarié ne peut prétendre au paiement par l'entreprise de travail temporaire d'une indemnité de requalification, qui ne peut être mise à la charge que de l'entreprise utilisatrice ; qu'en condamnant la société Védiorbis à verser au salarié une indemnité de requalification, la cour d'appel a violé l'article L.1251-41 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72823
Date de la décision : 13/10/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 oct. 2011, pourvoi n°09-72823


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72823
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award