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05/10/2011 | FRANCE | N°10-20046

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 octobre 2011, 10-20046


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 mars 2010), que la Société de distribution de Coutras (Sodisc), propriétaire d'un immeuble à usage commercial, se plaignant d'infiltrations, a fait assigner, après expertise en référé, la société Sodicover, chargée de la réalisation de la verrière et son assureur la Société Mutuelle d'Assurance du Bâtiment et des Travaux Publics (SMABTP), M. X..., architecte chargé de la maîtrise d'oeuvre, assuré par la société Axa Assurances, devenue la sociÃ

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 mars 2010), que la Société de distribution de Coutras (Sodisc), propriétaire d'un immeuble à usage commercial, se plaignant d'infiltrations, a fait assigner, après expertise en référé, la société Sodicover, chargée de la réalisation de la verrière et son assureur la Société Mutuelle d'Assurance du Bâtiment et des Travaux Publics (SMABTP), M. X..., architecte chargé de la maîtrise d'oeuvre, assuré par la société Axa Assurances, devenue la société Axa France IARD (société Axa), la société Bureau Véritas, chargée du contrôle technique, assurée par la SMABTP ; qu'après transactions intervenues entre la société Sodisc, et, d'une part, la société Sodicover ainsi que son assureur la SMABTP, et, d'autre part, la société Axa, assureur de l'architecte, ayant abouti à l'indemnisation partielle de la société propriétaire, celle-ci a maintenu ses demandes à l'égard de la société Bureau Véritas et de son assureur, la SMABTP ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Bureau Véritas et la SMABTP font grief à l'arrêt de dire la société Bureau Véritas responsable pour un tiers des conséquences dommageables des désordres, alors, selon le moyen :
1°/ que les transactions, revêtues de l'autorité de chose jugée entre les parties, n'en sont pas moins opposables aux tiers ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a estimé que la SMABTP et la société Bureau Véritas ne pouvaient pas se prévaloir des montants d'indemnisation fixés par transactions signées par la société Sodisc car la société Bureau Véritas et la SMABTP n'y avaient pas été parties, a violé les articles 1134, 1165, 2044, 2048, 2049 et 2052 du code civil ;
2°/ que le signataire d'une transaction indemnisant son préjudice n'a intérêt à agir contre un tiers responsable que dans la limite de la part non réparée du préjudice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a estimé que la société Sodisc pouvait réclamer à la société Bureau Véritas et à la SMABTP, non pas la portion non réparée de son préjudice par transactions signées avec les autres locateurs d'ouvrage et leurs assureurs, mais la réparation intégrale de celui-ci, a accordé au propriétaire de l'ouvrage affecté de désordres une double réparation de son préjudice, en violation de l'article 1147 du code civil et du principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les montants des dommages à réparer, mentionnés dans les deux transactions, faisaient partie des concessions réciproques consenties pour parvenir à un accord, n'avaient pas pour suite nécessaire une limitation des droits de la société Sodisc à l'égard de la société Bureau Véritas et de son assureur, et qu'il n'était pas justifié d'un enrichissement sans cause légitime au détriment de ceux-ci, en a exactement déduit que la société Bureau Véritas devait être déclarée responsable d'un tiers du préjudice à la réalisation duquel sa faute avait contribué, sans qu'elle puisse opposer au propriétaire les deux transactions signées par lui avec d'autres co-obligés, pour limiter le montant de son indemnisation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Bureau Véritas, et la SMABTP font grief à l'arrêt de les condamner à payer les dépens, comprenant les frais d'expertise, alors, selon le moyen, qu'une partie ne peut obtenir deux fois, même sous couvert de condamnation aux dépens, l'indemnisation des frais d'expertise judiciaire dont elle a déjà été dédommagée en cours d'instance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a condamné la société Bureau Véritas et la SMABTP à régler à la société Sodisc le montant des dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire, sans rechercher si ceux-ci n'avaient pas déjà été réglés, en cours d'instance, par la SMABTP, a privé sa décision de base légale au regard des articles 695 et 696 du code de procédure civile, ainsi que du principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Mais attendu que la condamnation de la partie perdante aux dépens relevant du pouvoir discrétionnaire des juges du fond, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bureau Véritas et la SMABTP aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum la société Bureau Véritas et la SMABTP à payer à la société SODISC la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Bureau Véritas et de la SMABTP ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils pour la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics et de la société Bureau Véritas.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait dit qu'un bureau de contrôle (le BUREAU VERITAS, assuré par la SMABTP) devait dédommager, malgré l'intervention de deux transactions sur ce point, le propriétaire d'un ouvrage (la SODISC), à hauteur d'un tiers, des conséquences des désordres affectant l'immeuble commercial en cause ;
AUX MOTIFS QUE le BUREAU VERITAS exposait en premier lieu que le tribunal avait chiffré à la somme de 264.000 € HT le coût de reprise de la verrière et qu'il y avait ajouté celle de 12.465 € au titre des frais exposés pour les besoins de l'expertise judiciaire ; que, pourtant, la société SODISC avait été en grande partie indemnisée des préjudices matériels qu'elle avait subis ; qu'elle avait en effet perçu, les concernant, la somme de 190.000 € en principal de la SMABTP, assureur de la société SODICOVER, ainsi qu'une somme de 40.000 € de la part d'AXA, en application des protocoles d'accord intervenus avec ces deux sociétés ; que si elle avait certes fait mention de ces transactions devant le premier juge, elle s'était en revanche gardée d'en préciser le montant, en vue de pouvoir solliciter sa condamnation à réparer la totalité du préjudice ; que le tribunal aurait dû retrancher du montant de la réparation des désordres ce qui avait déjà été touché et n'accorder en conséquence que la somme de 46.465 € ; que l'exécution provisoire ayant été ordonnée, elle avait été amenée à verser, avec son assureur la SMABTP, la somme de 109.870,50 € à la société SODISC, qui avait en conséquence bénéficié d'un enrichissement sans cause s'élevant à la somme de 63.405,50 € (109.870,50 – 46.465) ; qu'elle réclamait la restitution de ce montant ; que la SMABTP avait, quant à elle, fait valoir que la société SODISC avait délibérément accepté, en transigeant, de fixer le montant de son préjudice matériel à la somme de 264.000 € HT et qu'elle devait donc lui rembourser la somme de 56.052,13 € ; que, toutefois, les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris ; que celles qui étaient intervenues avec les autres parties n'avaient pas pour suite nécessaire une limitation à l'égard du BUREAU VERITAS et de son assureur, des droits de la société SODISC qui n'y avait à aucun moment renoncé expressément envers eux ; que si des montants de dommages à réparer étaient mentionnés dans ces transactions, il apparaissait qu'ils n'étaient opposables qu'aux parties qui les avaient signées, car ils faisaient partie de l'ensemble des concessions réciproques qu'elles avaient faites pour y parvenir ; que, dès lors, le tribunal, qui avait connaissance de l'existence de ces transactions, s'était sans erreur abstenu d'en tenir compte pour statuer sur le montant du préjudice et qu'il n'était pas justifié d'un enrichissement sans cause légitime au détriment du BUREAU VERITAS ou de son assureur ;
1°/ ALORS QUE les transactions, revêtues de l'autorité de chose jugée entre les parties, n'en sont pas moins opposables aux tiers ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que la SMABTP et le BUREAU VERITAS ne pouvaient pas se prévaloir des montants d'indemnisation fixés par transactions signées par la société SODISC car les appelantes n'y avaient pas été parties, a violé les articles 1134, 1165, 2044, 2048, 2049 et 2052 du code civil ;
2°/ ALORS QUE le signataire d'une transaction indemnisant son préjudice n'a intérêt à agir contre un tiers responsable que dans la limite de la part non réparée du préjudice ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que la société SODISC pouvait réclamer au BUREAU VERITAS et à la SMABTP non pas la portion non réparée de son préjudice par transactions signées avec les autres locateurs d'ouvrage et leurs assureurs mais la réparation intégrale de celui-ci, a accordé au propriétaire de l'ouvrage affecté de désordres une double réparation de son préjudice, en violation de l'article 1147 du code civil et du principe de la réparation intégrale du préjudice.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné un bureau de contrôle (le BUREAU VERITAS) et son assureur (la SMABTP) à régler les dépens, comprenant les frais d'expertise, d'un litige l'opposant au propriétaire (la société SODISC) d'un ouvrage affecté de désordres ;
AUX MOTIFS QUE, concernant les frais d'expertise de M. Y... relativement auxquels le BUREAU VERITAS reprochait à la société SODISC de bénéficier « d'un nouvel enrichissement sans cause d'une somme de 8.554,55 € », il convenait d'observer qu'il indiquait, dans ses conclusions du 17 novembre 2009, « que s'il est vrai que cette somme n'a pas été réglée, il s'agit là d'un point mineur au regard du fait que la société SODISC a intégralement été indemnisée de ses dépens d'expertise par la SMABTP assureur de la société SODICOVER » ; qu'il ne justifiait personnellement d'aucun appauvrissement ; qu'en application des dispositions de l'article 695 du code civil, la rémunération des techniciens est comprise dans les dépens ; que le tribunal, dans la stricte logique de la motivation du jugement dans lequel la SMABTP ne figurait pas en tant qu'assureur du BUREAU VERITAS, avait fait masse des dépens comprenant le coût de l'expertise de M. Y... et avait dit qu'ils seraient supportés à hauteur du tiers par le défendeur ; qu'il appartiendra aux parties de faire leurs comptes en ce qui concernait le sort final des dépens après que la cour se sera prononcée les concernant ; que compte tenu du sens de l'arrêt, il apparaissait que le tribunal s'était exactement prononcé en ce qui concernait le sort des dépens de première instance ; que la société SODISC n'avait pas lié les demandes de condamnation aux dépens qu'elle avait formées contre l'appelante et l'intervenante qui, en tant que parties perdantes, devaient donc être condamnées aux dépens, mais sans autre précision ;
ALORS QU'une partie ne peut obtenir deux fois, même sous couvert de condamnation aux dépens, l'indemnisation des frais d'expertise judiciaire dont elle a déjà été dédommagée en cours d'instance ; qu'en l'espèce, la cour, qui a condamné le BUREAU VERITAS et la SMABTP à régler à la société SODISC le montant des dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire, sans rechercher si ceux-ci n'avaient pas déjà été réglés, en cours d'instance, par la SMABTP, a privé sa décision de base légale au regard des articles 695 et 696 du code de procédure civile, ainsi que du principe de la réparation intégrale du préjudice.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-20046
Date de la décision : 05/10/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 08 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 oct. 2011, pourvoi n°10-20046


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Odent et Poulet, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.20046
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