LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité d'animateur-technico-réalisateur par la société Performances, dans le cadre d'une succession de contrats à durée déterminée d'usage du 4 juillet 2002 au 11 juillet 2004 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et paiement, notamment, d'un rappel de salaire au titre d'une majoration de 25 % des heures de nuit ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties :
Vu les articles L. 3122-29, L. 3122-39 et L. 3122-40 du code du travail issus de la loi n° 2001-397 du 9 mai 2001 ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que la contrepartie dont doivent obligatoirement bénéficier les travailleurs de nuit, au titre des périodes de nuit pendant lesquelles ils sont occupés, doit être prévue sous forme de repos compensateur, à laquelle peut s'ajouter, le cas échéant, une compensation salariale, laquelle relève du domaine conventionnel ;
Attendu que pour condamner la société Performances à payer à M. X... une somme au titre de la compensation salariale pour travail de nuit et les congés payés afférents, l'arrêt retient, après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 3122-39 du code du travail, que l'employeur ne justifie pas d'un accord collectif dérogatoire au texte susmentionné applicable à la relation contractuelle ; que l'employeur s'estime à tort exonéré de cette obligation en arguant d'une rémunération de M. X... supérieure au minimum conventionnel ; que la cour dispose dans la cause des éléments pour fixer la compensation salariale à la somme de 26 420 euros correspondant à une majoration de 25 % des heures de nuit ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la seule contrepartie obligatoire au travail de nuit doit être attribuée sous forme de repos compensateur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Performances à payer à M. X... la somme de 26 420 euros à titre de compensation salariale pour travail de nuit et celle de 2 642 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 7 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par Mme Mazars, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-huit septembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Performances
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR requalifié les contrats de travail à durée déterminée de Monsieur Samuel X... en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 juillet 2002, d'AVOIR en conséquence condamné la SA PERFORMANCES à payer à Monsieur Samuel X... la somme de 5. 839 euros à titre d'indemnité de requalification, d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail en date du 16 juin 2004 s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la Société PERFORMANCES à verser à Monsieur X... les sommes de 5. 839 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement et 12. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QUE « le secteur de l'audiovisuel, dans lequel s'exerce l'activité du salarié, relève bien des secteurs d'activité concernée par les contrats à durée déterminée d'usage visés à l'article D 1242-1 du code du travail ; que l'examen des conditions d'exercice des fonctions de M. X... fait apparaître, qu'en réalité, il n'était pas responsable d'une émission particulière thématique ou personnalisée, mais se trouvait chargé, dans la tranche horaire de 0 heure et 6 heures, de la diffusion technique de chansons pré-programmées par une tierce personne et sur laquelle il n'exerçait aucun contrôle ; qu'il n'est pas justifié par l'employeur, de la diffusion sur les ondes de RFM, d'annonces quelconques relatives à la tranche horaire ou à la personne de son responsable ; qu'il résulte par ailleurs de l'enquête médiamétrie en date du 15 juillet 2003, relative à RFM, que la programmation de la tranche 0 heure – 6 heures n'est même pas analysée par cette enquête ; qu'à l'inverse sont analysées toutes les autres tranches horaires et émissions avec mention du titre de l'émission et/ ou de l'animateur titulaire de la tranche ou de l'émission ; que dans ces conditions, l'activité de M. X... n'avait pas de caractère temporaire mais entrait dans le cadre normal et habituel de l'entreprise, consistant, sur cette tranche considérée, à diffuser de la musique ; qu'en conséquence il convient d'infirmer le jugement déféré sur ce chef de demande et de faire droit à la demande de requalification du contrat à durée déterminée (CDD) en contrat à durée indéterminée (CDI) à compter du 02 juillet 2002 et à la demande relative à l'indemnité prévue par l'article L 1245-2 du code du travail dont le montant n'est pas critiqué en soit par l'employeur et sera fixé eu égard aux éléments sur la discrimination salariale examinés ci-dessus ; qu'en suite de la requalification du contrat en CDI et à défaut de toute procédure de licenciement et de lettre motivée que la rupture du contrat de travail se trouve privée de cause réelle et sérieuse ; qu'en application des articles L 1234-1 et 1234-5 du code du travail, le salarié justifiant d'une ancienneté inférieure à deux ans est en droit d'obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis équivalente à un mois de salaire, soit 5839 € ; qu'il est également fondé à obtenir le paiement d'un mois de salaire à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ; que compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise, de l'ancienneté (moins de 2 ans) et de l'âge du salarié (né en mars 1975) ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L. 122-14-5 du Code du travail ancien devenu L 1235-5, une somme de 11700 € à titre de dommages-intérêts »
ALORS QUE s'il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1245-1 et D. 1242-1 du Code du travail que dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive 1999/ 70/ CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ; que l'emploi d'animateur – technico – réalisateur dans le secteur de la radiophonie est par nature temporaire en raison du caractère nécessairement évolutif des programmes de radio qui doivent par essence faire l'objet de renouvellements périodiques ; que tel était le cas de l'emploi de Monsieur X..., engagé pour occuper la fonction précise d'« animateur – technico – réalisateur » ayant trait à des émissions musicales spécifiques diffusées le soir ou la nuit, susceptibles d'être modifiées ou supprimées à tout moment en raison de l'évolution nécessaire de la grille de programmes ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, aux motifs inopérants que Monsieur X... n'aurait exercé aucun contrôle sur la diffusion, durant le programme qu'il animait, de chansons pré-programmées par une tierce personne et que l'employeur ne justifiait pas de la diffusion sur les ondes de RFM de publicités se rapportant spécifiquement à Monsieur X... ou à la tranche horaire qu'il animait, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société PERFORMANCES à verser la somme de 37. 560, 34 euros à titre de rappel de salaire ainsi que la somme de 3. 756, 03 euros au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... soutient qu'il a été victime d'une discrimination salariale, notamment au regard de deux anciens collègues Messieurs Y... et Z..., qui occupaient les postes similaires d'animateur-technico-réalisateur, et percevaient, 5. 214, 19 € pour 5 heures d'émission par semaine pour le premier, et 159, 78 € pour une émission journalière de 3 heures pour le second ; que l'employeur réplique que le principe « à travail égal, salaire égal » ne peut recevoir application que dans les cas où les situations comparées sont des situations identiques ; que l'employeur se contente d'alléguer que la différence de salaire est justifiée par la nécessité d'affecter des animateurs technico-réalisateurs de plus grandes compétences sur des horaires ayant une audience différente ; que néanmoins, l'employeur ne produit aucun élément permettant de vérifier que Messieurs Y... et Z... étaient affectés, en raison de leur célébrité et de leur compétence, à un créneau horaire spécifique ou à une émission particulière ; que la seule circonstance que M. X... a été affecté à un créneau de nuit ne justifie pas une différence de salaire de plus du double en ce qui concerne Mrs Z... et Y... ; qu'il convient donc, sur la base des éléments de rémunération des animateurs technicoréalisateurs sous contrat de travail à durée indéterminée, d'infirmer le jugement déféré sur ce chef de demande et de considérer que le salarié aurait dû percevoir, eu égard au nombre d'heures mensuelles travaillées, un salaire mensuel brut de 4. 800 €, au lieu des 2290 € perçus ; que faute de critiquer le décompte produit par le salarié, la cour fera droit à la demande de rappel de salaire à hauteur de 37560 €, à laquelle il convient d'ajouter les congés payés » ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE la violation du principe « à travail égal, salaire égal » suppose que soit établie une différence de rémunération qui n'est pas justifiée objectivement et de façon pertinente entre deux salariés, au moins, placés dans une situation identique ; que pour se prononcer comme elle l'a fait, la cour d'appel s'est bornée à relever que les salariés auxquels se comparait Monsieur X... et celui-ci occupaient les postes similaires d'animateur – technico – réalisateur ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs ne suffisant pas à établir une identité de situation entre Monsieur X... et les salariés auxquels il se comparait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QUE la cour d'appel a estimé pour dire que Monsieur X... n'occupait pas un emploi par nature temporaire qu'il n'était pas responsable d'une émission particulière thématique ou personnalisée et que la tranche horaire qu'il animait ne faisait pas l'objet d'une enquête médiamétrie contrairement à d'autres tranches horaires ; qu'en se bornant dès lors à affirmer que les salariés auxquels se comparait Monsieur X... étaient dans une situation identique à la sienne, sans rechercher, comme elle y était invitée par la Société PERFORMANCES, si ces salariés étaient réellement, au regard des créneaux horaires de leur émission et/ ou de leur notoriété, dans une situation identique à celle de Monsieur X..., la cour d'appel a de plus fort privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'il appartient au salarié se prévalant d'une prétendue violation du principe « à travail égal, salaire égal », de présenter les éléments de fait laissant supposer une violation de ce principe, et donc, de présenter les éléments de fait établissant une identité de situation entre lui et les salariés auxquels il se compare ; que pour dire que ce principe avait été violé, la cour d'appel a énoncé que l'employeur se contentait d'alléguer que la différence de salaire était justifiée par la nécessité d'affecter des animateurs plus célèbres et plus compétents à un créneau spécifique ou à une émission particulière et ne rapportait pas la preuve de cette allégation ; qu'en statuant de la sorte, cependant que ces éléments se rapportaient à l'existence ou l'inexistence d'une identité de situation entre les salariés auxquels Monsieur X... se comparait et lui, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ;
ALORS ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que pour condamner la Société PERFORMANCES à verser la somme de 37. 560, 34 euros à titre de rappel de salaire ainsi que la somme de 3. 756, 03 euros au titre des congés payés afférents, la cour d'appel s'est bornée à faire référence aux éléments de rémunération des animateurs technico-réalisateurs sous contrat de travail à durée indéterminée pour dire que Monsieur X... aurait dû percevoir un salaire mensuel brut de 4. 800 euros ; qu'en statuant de la sorte, sans s'expliquer en aucune façon sur la méthode retenue pour arriver à un tel salaire mensuel eu égard au nombre d'heures mensuelles travaillées, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SA PERFORMANCES à payer à Monsieur Samuel X... la somme de 26. 420 € à titre de compensation salariale au travail de nuit, ainsi que la somme de 2642 € au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QU'« en ce qui concerne la demande relative à la compensation salariale pour un travail de nuit fondée sur l'article L 3122-32 et suivants du code du travail, qu'est considéré comme travailleur de nuit le salarié qui accompli, au moins deux fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins trois heures de son temps de travail entre 21 heures et 06 heures du matin ; que l'article L 3122-39 du code du travail dispose que : « les travailleurs de nuit bénéficient de contreparties ou au titre des périodes de nuit pendant lesquelles ils se sont employés sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale » ; que l'employeur ne justifie pas d'un accord collectif dérogatoire au texte sus mentionné applicable à la relation contractuelle ; que l'employeur s'estime à tort exonéré de cette obligation en arguant d'une rémunération de M. X... supérieure au minimum conventionnel ; que la cour dispose dans la cause des éléments pour fixer la compensation salariale à la somme de 26420 € » ;
ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que pour fixer la compensation salariale au titre de l'absence de contreparties ou de repos compensatoire bénéficiant aux travailleurs de nuit à la somme de 26. 420 euros, la cour d'appel s'est contentée d'affirmer disposer dans la cause des éléments lui permettant d'arriver à une telle estimation ; qu'en se prononçant de la sorte, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.