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27/09/2011 | FRANCE | N°11-80434

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 septembre 2011, 11-80434


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Alain X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 1er décembre 2010, qui, pour harcèlement moral, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 222-33-2 du code pénal, préliminaire, 388, 591 à 593 du code de procédure

pénale, défaut de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, confirmant le jugement en ses d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Alain X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 1er décembre 2010, qui, pour harcèlement moral, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 222-33-2 du code pénal, préliminaire, 388, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, confirmant le jugement en ses dispositions pénales, a condamné M. X... à la peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis, et le réformant sur l'action civile, a condamné M. X... à payer la somme de 2 000 euros à Mme Y... au titre de son préjudice moral et de 500 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale, ainsi qu'à payer la somme de 15 829,52 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Maritime au titre des débours exposés pour Mme Y... et de l'indemnité forfaitaire de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et enfin à supporter les droits fixes de procédure ;

"aux motifs propres qu'il résulte des pièces de la procédure et principalement des auditions des différents employés de l'entreprise, qu'au-delà d'une antipathie entre le prévenu et la partie civile, il existait un comportement chez M. X... dépassant les normes admises ; qu'il apparaît en effet, au vu de l'enquête de gendarmerie et des investigations des services de l'inspection du travail étayées par des attestations que M. X... a multiplié durant plusieurs années des attitudes, paroles blessantes ou vexations répétées envers Mme Z... qui ont eu pour effet de dégrader ses conditions de travail et sa dignité et d'altérer son état de santé ; qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'incidents isolés pouvant ponctuer la vie professionnelle mais d'une répétition d'agissements significatifs ; que si les qualités purement professionnelles de M. X... ne sont pas critiquées, elles ne peuvent excuser le comportement de celui-ci ; que les accusations de la partie civile s'appuyant sur les témoignages précis et concordants de plusieurs employés de la société : M. A..., Mme B..., MM. C..., D... et E... ; que le premier patron de l'entreprise, M. F..., a reconnu être intervenu pour gérer des différends entre ces deux employés, tout en précisant que M. X... en était le responsable ; que la surprise des deux nouveaux dirigeants de la société face aux accusations de Mme
Z...
à l'encontre de M. X... paraît étonnante dès lors que Mme G... et M. H... étaient depuis longtemps employés de la société de l'entreprise avant d'en prendre la direction ; que d'ailleurs, Mme Z... et certains employés leur reprochent de n'avoir pas pris des mesures adéquates à temps ;

"et aux motifs éventuellement adoptés, que les accusations réitérées de Mme Y..., au terme desquelles M. X... a usé, à de nombreuses reprises, de propos insultants et de comportements agressifs ou blessants pour mettre en cause sa capacité professionnelle et plus simplement son existence au bureau au travers de sa façon de se vêtir, de se parfumer et jusqu'à sa façon de s'exprimer, sont corroborés par les attestations et les auditions des autres employés et de l'ancien directeur du cabinet de géomètre-expert ; que ce comportement, pour partie avoué à la barre par le prévenu, est en harmonie totale avec la description qu'il donne de son caractère, tel qu'il a été perçu par son ancien employeur ; que les employés entendus n'ont adressé aucun grief à M. X... et reporté sur le seul M. X... la responsabilité des faits ; qu'il est d'ailleurs symptomatique que le prévenu ait été le seul à être en mésentente avec Mme Y... ; que les affirmations de ses employeurs actuels de leur méconnaissance des faits jusqu'à ce que, en octobre 2007, Mme Y... leur écrive, ne sont pas crédibles, la taille réduite de leur entreprise les exposant nécessairement à connaître les difficultés relationnelles des deux employés en cause, comme les avait connues l'ancien gérant ; qu'enfin, l'unique attestation fournie à la barre par le prévenu, émanant de Mme I..., assistante-projeteur au cabinet du 2 octobre 2006 à juillet 2008, affirmant avoir « entretenu une relation pendant deux ans et demi » dont la nature n'a pas été précisée avec M. X... et n'avoir jamais constaté sinon des emportements devant son ordinateur et des haussements de tons face aux gérants, n'est pas de nature à apporter la preuve contraire aux nombreux autres témoignages objectifs recueillis ; que les faits dénoncés doivent être tenus pour matériellement avérés ; que si certains d'entre eux, commis en 2004 et 2005, n'entrent pas dans le saisine de la juridiction, ils constituent des éléments de contexte démontrant que ceux perpétrés en 2006 et 2007 avaient de nombreux et lourds antécédents, dans la lignée desquels ils s'inscrivaient ; qu'ils ont tout aussi conduit à fragiliser la plaignante, qui a donc ressenti plus fortement encore les faits de la saisine ; que les faits, réitérés, ont eu pour effet de porter atteinte à la dignité de Mme Y..., ravalée aux yeux des autres employés ou de tiers au rang de personne incapable, incommodante dans son être et son expression, alors qu'il n'en est rien, seul le prévenu portant sur la jeune femme un tel regard ; qu'ils ont eu, aussi, un effet sur son état de santé, dont M. F... avait souligné la fragilité d'un point du psychologique, en la contraignant à des arrêts de travail ; que ces faits, réitérés et ressentis par l'ensemble du personnel, ont été commis par le prévenu intentionnellement à l'encontre d'une personne dont il rejetait la présence ;

"1) alors que seuls des agissements répétés, dépassant le stade d'incidents isolés, participent à la caractérisation du délit de harcèlement moral au sens de l'article 222-33-2 du code pénal ; qu'en retenant, de façon péremptoire, que les faits reprochés à M. X... dépassaient le stade « d'incidents isolés » pouvant ponctuer la vie professionnelle pour constituer une « répétition d'agissements significatifs », constitutif du délit visé à la prévention, sans vérifier la date de ces faits afin de déterminer s'il y a bien eu des « agissements répétés » au sens de l'article 222-33-2 du code pénal sur la période visée à la prévention, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'assurer son contrôle sur les motifs de l'arrêt attaqué et a, en conséquence, privé son arrêt de toute base légale ;

"2) alors que le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant que le délit de harcèlement moral était caractérisé à l'encontre de M. X... en se fondant sur les accusations de Mme Y... relatant qu' « il arrivait à M. X... et lui arrive encore d'ouvrir la fenêtre dès que j'arrive en soupirant, en me faisant savoir de manière détournée que je le dérange » et qu'« à plusieurs reprises lorsque j'étais au téléphone ou lorsque je parle à un client ou d'un dossier avec un collègue, M. X... commence à s'agiter sur sa chaise, marmonne seul puis tout à coup se lève en hurlant et en m'insultant », sans vérifier la date de ces faits afin de déterminer s'il y a bien eu des « agissements répétés » au sens de l'article 222-33-2 du code pénal sur la période visée à la prévention, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'assurer son contrôle sur les motifs de l'arrêt attaqué et a, en conséquence, privé son arrêt de toute base légale ;

"3) alors que le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en considérant que les accusations dirigées à l'encontre de M. X... étaient utilement appuyées par les déclarations d'autres salariés du cabinet F..., pris en les personnes respectives de MM. D..., A..., Mme B..., et de MM. C... et de E..., quand ces différents témoignages, s'ils font certes état d'altercations entre M. X... et Mme Y..., ne se réfèrent à aucune date précise permettant de s'assurer qu'ils entrent dans la saisine de la juridiction de jugement, qui n'était saisie que de faits commis «courant 2006 et jusqu'au 15 novembre 2007», ou ne font état que d'une altercation relatée par M. D... en 2005 échappant de ce fait à la saisine de la juridiction de jugement, la cour d'appel a privé son arrêt de toute base légale ;

"4) alors que le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant péremptoirement l'existence d'une dégradation des conditions de travail de Mme Y... sans en préciser les modalités concrètes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"5) alors que le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en caractérisant l'altération de la santé mentale de Mme Y... en se fondant sur les certificats médicaux produits par l'intéressée, sans vérifier si la partie civile ne se trouvait pas déjà dans une situation de fragilité mentale excluant tout lien de causalité entre les faits reprochés au prévenu et l'état de santé de la partie civile qui était décrite comme une personne particulièrement fragile psychologiquement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"6) alors que le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en retenant la culpabilité de M. X... du chef de harcèlement moral en se fondant sur l'affirmation péremptoire de ce qu'il aurait agit intentionnellement sans constater dûment qu'il aurait agi de la sorte, non dans le but de restituer un cadre propice au travail, mais dans l'intention de nuire à Mme Y... ou de l'humilier, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments l'infraction dont elle a déclaré le prévenu coupable et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-80434
Date de la décision : 27/09/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 01 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 sep. 2011, pourvoi n°11-80434


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:11.80434
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