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27/09/2011 | FRANCE | N°10-81848

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 septembre 2011, 10-81848


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Laurent X...

- M. Sébastien Y..., prévenus,
- M. Claude X...,
- M. Germain Z...,
- Le Syndicat National Sécurité Nationale,
- L'Association Promotion Sécurité Nationale,
- L'Association Défense des Citoyens, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 7e chambre, en date du 23 février 2010, qui a condamné les deux premiers, pour violence aggravée, à six mois d'emprisonnement, a déclaré irrecevables

les constitutions de partie civile des cinq autres, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Laurent X...

- M. Sébastien Y..., prévenus,
- M. Claude X...,
- M. Germain Z...,
- Le Syndicat National Sécurité Nationale,
- L'Association Promotion Sécurité Nationale,
- L'Association Défense des Citoyens, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 7e chambre, en date du 23 février 2010, qui a condamné les deux premiers, pour violence aggravée, à six mois d'emprisonnement, a déclaré irrecevables les constitutions de partie civile des cinq autres, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires ampliatifs et personnels et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 2 mars 2007, MM. Sébastien Y... et Laurent X... se sont rendus au domicile de M. Pierre A... ; qu'à la suite d'une discussion, M. A... a été blessé à la tête, que son fils Kevin est venu à son secours et a tiré à l'aide d'un "flash ball" en direction de M. X... ; que celui-ci a réagi en repoussant avec force le jeune Kevin, qui a été blessé à son tour ; que, durant sa garde à vue, M. X... a brisé une porte vitrée dans les locaux du commissariat ; que MM. Y... et X... ont été cités devant le tribunal correctionnel, selon la procédure de comparution immédiate et, dans l'attente de l'audience, placés sous contrôle judiciaire, conformément à l'article 394 du code de procédure pénale ;

Attendu que, par jugement de défaut, rendu le 11 décembre 2008, le tribunal a déclaré MM. Y... et X... coupables du délit de violence aggravée, et, concernant ce dernier, également du délit de destruction de bien d'utilité publique ; que, par jugement d'itératif défaut du 26 mars 2009, le tribunal a déclaré irrecevable l'opposition formée par M. Y... contre la décision susvisée ; que M. Y... a relevé appel de cette décision ;

Attendu que, par jugement contradictoire du 11 septembre 2009, le tribunal a constaté que M. X... avait fait régulièrement opposition au jugement du 11 décembre 2008 et a renvoyé l'affaire à l'audience du 17 septembre 2009 ; que M. Laurent X... a relevé appel de ce jugement, de même que MM. Y..., Claude X..., Germain Z..., le Syndicat National Sécurité Nationale, l'association Promotion Sécurité Nationale, l'association Défense des Citoyens et M. Germain Z..., non mentionnés dans cette décision ;

Que, par jugement du 17 septembre 2009, le tribunal a déclaré recevable l'opposition de M. Laurent X... au jugement du 11 décembre 2008 ; qu'il a écarté, d'une part, des exceptions présentées par l'intéressé et, d'autre part, les conclusions déposées par M. Claude X..., l'association Défense des Citoyens et le Syndicat National Sécurité Nationale, parties civiles dont il a déclaré les constitutions irrecevables ; que, statuant à nouveau, il a déclaré M. Laurent X... coupable des délits et a prononcé sur les demandes de MM. A..., parties civiles et de la Caisse primaire d'assurance maladie ;

Que M. Laurent X..., MM. Y..., Claude X..., Z..., le Syndicat National Sécurité Nationale, l'association Promotion Sécurité Nationale, l'association Défense des Citoyens ont également relevé appel de cette décision ; que le ministère public a formé un appel incident ;

Attendu que, devant la cour d'appel, l'avocat des prévenus a soulevé une exception de nullité prise de l'irrégularité de la garde à vue et que M. Claude X... a présenté de nombreux autres moyens de nullité ;

Attendu que, par arrêt rendu contradictoirement à l'égard de toutes les parties, la cour d'appel a ordonné la jonction des affaires, puis relevé que le jugement du 11 septembre 2009 n'ayant tranché aucune question de procédure, était une simple mesure d'administration judiciaire et que, pour ce motif, l'ensemble des appels formés à son encontre étaient irrecevables ; que, les juges du second degré ont déclaré irrecevables les constitutions de partie civile de M. Claude X... et des personnes morales précitées et retenu que M. Y... était sans intérêt pour former appel contre le jugement du 17 septembre 2009 ;

Qu'ils ont déclaré recevables les appels formés, d'une part, par M. Y... contre le jugement d'itératif défaut rendu à son encontre le 26 mars 2009 et, d'autre part, par M. Laurent X... contre le jugement le concernant en date du 17 septembre 2009, et, enfin, les appels incidents du ministère public ;

Qu'après avoir annulé les jugements déférés et évoqué, conformément à l'article 520 du code de procédure pénale, ils ont déclaré MM. Scouarnec et Laurent X... coupables du délit de violence aggravée et ont prononcé sur les demandes de MM. A..., parties civiles, et de la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Brouchot pour M. Laurent X..., pris de la violation des articles 31, 32, 34 et 39 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué ne constate pas la présence du ministère public à l'audience du 23 février 2010 au cours de laquelle il a été prononcé ;

"alors que le ministère public fait partie intégrante et nécessaire des juridictions répressives qui ne peuvent procéder au jugement des affaires qu'en sa présence et avec son concours ; qu'à défaut de cette constatation essentielle, l'arrêt attaqué ne répond pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;

Attendu que l'arrêt attaqué constate la présence et l'audition du représentant du ministère public à l'audience des débats, sans préciser qu'il assistait également à sa lecture ;

Qu'en cet état, le grief allégué n'est pas fondé ;

Qu'en effet, si les articles 32, 486 et 510 du code de procédure pénale exigent que le ministère public, partie nécessaire au procès pénal, soit présent à chaque audience des juridictions de jugement, il résulte de l'article 592 du même code qu'à l'instar des magistrats composant la juridiction, il est présumé avoir assisté à toutes les audiences de la cause, dès lors qu'il a été entendu en ses réquisitions à celle des débats ; que, selon l'alinéa 2 de ce texte, la nullité de la décision n'est encourue qu'à défaut de cette audition ; qu'il n'importe que la minute ne mentionne pas la présence du ministère public au prononcé ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé par M. Claude X..., l'association Défense des Citoyens et le Syndicat National Sécurité Nationale, pris de la violation des articles 591 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par l'association Promotion Sécurité Nationale, pris de la violation des articles 418, 419, 420, 490, 490-1, 493, 507, 508, 520, 576, 586, 587, 590, 591, 593 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les constitutions de partie civile de M. Claude X... et des associations Défense des Citoyens, Syndicat National Sécurité Nationale et Promotion Sécurité Nationale, l'arrêt relève que les intéressés ne se prétendent pas victimes des délits de violence avec arme reprochés à MM. Laurent X... et Sébastien Y... et ne demandent rien à leur encontre, mais sollicitent la relaxe de ces derniers ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, les juges ont justifié leur décision, dès lors que l'action civile n'est ouverte par l'article 2 du code de procédure pénale qu'à ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés et que, par suite de l'irrecevabilité prononcée, les autres moyens présentés par les demandeurs sont eux-mêmes irrecevables ;

Sur le moyen unique de cassation proposé M. Germain Z..., pris de la violation des articles préliminaire, 2, 418 et suivants, 464, 487, 507, 508, 591 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce
que l'arrêt, après avoir relevé que les raisons de l'appel interjeté par M. Z... ne sont pas explicitées, ne prononce pas expressément dans son dispositif sur la recevabilité de sa constitution de partie civile, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que l'intéressé ne peut prétendre avoir personnellement souffert du dommage directement causé par les infractions au sens de l'article 2 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen de cassation proposé par Me Brouchot pour M. Laurent X..., pris de la violation des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Laurent X... coupable du délit de violences en réunion, l'a condamné à une peine d'emprisonnement de six mois et l'a condamné à verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts ;

"alors que, dans des conclusions laissées sans réponse par la cour d'appel bien qu'elle en ait relevé la teneur, M. X... avait soulevé in limine litis la nullité de la garde à vue au regard des critères actuels et fait valoir que c'est au cours de cette mesure que le dossier avait pris son orientation puisque le jeune Kévin avait été placé, tout comme les prévenus, en garde à vue et en avait été libéré sur un ordre exprès du procureur de la République qui avait décidé dès ce moment et pour toute la procédure qui serait victime et qui serait auteur ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces chefs péremptoire des conclusions, l'arrêt attaqué n'a pas satisfait aux conditions essentielles de son existence légale" ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé par M. Y..., pris de la violation des articles 384, 385, 507, 508, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6, 11, 13, 14 et 17 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Les moyens étant réunis ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour déclarer M. Laurent X... et M. Y... coupables de violence aggravée, l'arrêt attaqué analyse les déclarations respectives faites, au cours de leur garde à vue, par les différentes protagonistes de l'altercation ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions des prévenus, qui faisaient valoir que la garde à vue était irrégulière, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Et sur le moyen unique de cassation proposé par Me Spinosi pour M. Y..., pris de la violation des articles 132-19, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe de la personnalisation de la peine ;

"en ce que l'arrêt a condamné M. Y... à une peine de six mois d'emprisonnement sans sursis ;

"aux motifs que la peine doit tenir compte de la gravité des faits des circonstances de leur commission ci-dessus rappelées, des antécédents des deux prévenus et de leur totale absence de regrets et de conscience de la dangerosité de leur comportement, mais également du contexte de l'affaire et de la rancoeur dont pouvait être animé M. Y... à l'égard de M. A... en raison du litige qui les avait opposés depuis des années qui portant sur des sommes non négligeables et dans lequel il devait avoir quelques raisons de se sentir lésé ; que c'est pourquoi la cour prononcera à l'encontre de chacun des prévenus une peine de 6 mois d'emprisonnement ;

"alors que la cour d'appel ne pouvait condamner à une peine d'emprisonnement sans sursis le prévenu, qui n'était pas en état de récidive légale, sans préciser ni en quoi la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendait cette peine nécessaire, ni en quoi une autre sanction était manifestement inadéquate ; que les seuls motifs abstraits et généraux de la cour d'appel à cet égard, qui ne distingue nullement entre les deux prévenus ne saurait en aucune façon répondre aux exigences de l'article 132-19 nouveau du code pénal, tel qu'il résulte de la loi du 24 novembre 2009, ensemble le principe de la personnalisation de la sanction pénale" ;

Vu l'article 132-19-1 du code pénal, ensemble l'article 132-24, alinéa 3, du même code ;

Attendu qu'en vertu de ces textes, en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du même code, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et, sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement ;

Attendu que, pour condamner le prévenu à la peine de six mois d'emprisonnement, l'arrêt se détermine par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans caractériser la nécessité de la peine d'emprisonnement ferme conformément aux dispositions de l'article 132-24 du code pénal ni l'impossibilité d'ordonner une mesure d'aménagement, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encore encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de cassation proposés :

CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 23 février 2010, mais seulement en ce qu'il n'a pas prononcé sur l'exception de nullité de la garde à vue, qu'il a déclaré les prévenus coupables et les a condamnés et qu'il a prononcé sur les demandes civiles de M. Pierre A..., de M. Kevin A... et de la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Straehli conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-81848
Date de la décision : 27/09/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 23 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 sep. 2011, pourvoi n°10-81848


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Brouchot, Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.81848
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