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21/09/2011 | FRANCE | N°10-20286

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-20286


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er décembre 2009), que Mme X..., engagée le 4 décembre 1989 en qualité de vendeuse bijouterie par M. Y..., a été licenciée le 24 janvier 2002 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en dommages-intérêts pour propos vexatoires et humiliants, nullité de son licenciement, licenciement sans cause réelle et sérieuse, paiements des indemnitÃ

©s de préavis et congés payés afférents, alors selon le moyen :

1°/ que lorsque le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er décembre 2009), que Mme X..., engagée le 4 décembre 1989 en qualité de vendeuse bijouterie par M. Y..., a été licenciée le 24 janvier 2002 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en dommages-intérêts pour propos vexatoires et humiliants, nullité de son licenciement, licenciement sans cause réelle et sérieuse, paiements des indemnités de préavis et congés payés afférents, alors selon le moyen :

1°/ que lorsque le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers ; qu'elle a produit, aux débats l'attestation d'une cliente faisant état « des éclats de voix, des insultes et des menaces » récurrents de l'employeur à son égard, un courrier de l'inspecteur du travail constatant le fractionnement du paiement de son salaire, ainsi que des lettres de reproches de l'employeur ; que ces éléments suffisaient à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de prouver que les agissements qui lui étaient reprochés étaient étrangers à tout harcèlement ; qu'en retenant au contraire qu'« il n'est établi aucun fait de nature à présumer l'existence d'un harcèlement moral depuis cette intervention de l'inspection du travail », la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2°/ qu'en retenant que les éléments produits par la salariée « ne permettent pas de caractériser les faits répétés de harcèlement moral », la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve du harcèlement sur la salariée et violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3°/ qu'en retenant « qu'il n'est établi aucun fait de nature à présumer l'existence d'un harcèlement moral » sans vérifier si les certificats médicaux des docteurs Z... et A... faisant respectivement état de « troubles phobiques invalidants » et d'« un état dépressif réactionnel probable (…) lié à de très gros problèmes à son travail » et le constat de son inaptitude à son emploi ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

Mais attendu que l'arrêt relève que la salariée n'établit pas les propos vexatoires et humiliants allégués à l'encontre de l'employeur qui n'était pas présent au quotidien dans le magasin, qu'elle ne lui reproche pas de n'avoir pas mis en oeuvre à partir d'octobre 1998 l'invitation du contrôleur du travail à ne plus fractionner le paiement de son salaire, qu'elle ne conteste pas le manque à gagner de l'employeur qui se contente de demander plus de vigilance et ne la sanctionne pas, que le choix de la date de début du congé sabbatique a été expliqué en son temps par l'activité intense de fin d'année, qu'aucun élément ne permet de rattacher les troubles phobiques invalidants invoqués à des conditions de travail imputables à l'employeur qui avait accepté le choix de la salariée de travailler en journée continue ; qu'en l'état de ces motifs, dont elle a déduit que la salariée n'établissait pas la matérialité de faits précis et concordants susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement, la cour d'appel qui n'a pas inversé la charge de la preuve, n'encourt aucun des griefs du moyen ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de fixer le montant des dommages-intérêts dus au titre de la rupture abusive de son contrat de travail à 3 000 euros, alors, selon le moyen :

1°/ que la cassation qui interviendra sur le premier moyen de cassation entrainera, par voie de conséquence, et en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation du chef de l'arrêt fixant le montant des dommages-intérêts au titre de la rupture abusive de son contrat de travail à la somme de 3 000 euros ;

2°/ que subsidiairement, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être inférieure à six mois de salaire que si la société a moins de deux ans d'ancienneté ou si le licenciement est opéré dans une entreprise de moins de onze salariés ; qu'en limitant à deux mois de salaire l'indemnité due à la salariée qui totalisait treize ans d'ancienneté, motif pris de l'effectif « réduit » de l'entreprise, sans rechercher si celle-ci employait habituellement moins de onze salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-3 et L. 1235-5 du code du travail ;

Mais attendu que l'effectif de l'entreprise non contesté était de cinq salariés dont quatre vendeurs ; que le moyen, devenu sans objet en sa première branche du fait du rejet du premier moyen, manque en fait en sa seconde branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par Mme Mazars, conseiller doyen en ayant délibéré conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté madame X... de ses demandes de dommages et intérêts pour propos vexatoires et humiliants, de dommages et intérêts pour nullité du licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnités compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QU'en application des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail, pour établir l'existence de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, madame X... produit le courrier adressé le 20 octobre 1998 par le contrôleur du travail à l'employeur l'informant de la réclamation de la salariée sur le salaire qui ne lui était pas versé régulièrement une fois par mois, une lettre de monsieur Y... du 2 juin 1999 autorisant un congé sabbatique à compter du 1er février 2000, une lettre de monsieur Y... du 14 février 2000 demandant à madame X... d'être vigilante dans les encaissements compte tenu du manque d'une somme de 1000 frs sur la seule vente en espèce de 2557 frs réalisée le 10 février 2000, une lettre adressée par madame X... à son employeur le 15 septembre 2000 décrivant diverses circonstances vexatoires et l'attestation d'une passante Martine B... ; que toutefois ces seuls éléments ne permettent pas de caractériser les faits répétés de harcèlement moral ; qu'il n'est pas contesté que monsieur Y... n'était pas au quotidien au sein du magasin ; qu'il n'est pas reproché à ce dernier de n'avoir pas mis en oeuvre à partir d'octobre 1998 l'invitation du contrôleur du travail à ne plus fractionner le paiement du salaire ; qu'il n'est établi aucun fait de nature à présumer l'existence d'un harcèlement moral depuis cette intervention de l'inspection du travail ; que la teneur de la lettre de l'employeur du 14 février 2000 reste courtoise ; que le manque à gagner dont il est fait état n'est pas contesté par madame X... ; que l'employeur se contente de demander à juste titre à la salariée de faire preuve de vigilance ; qu'aucune sanction n'a été prononcée à la suite de cet incident ; que le choix de la date du début du congé sabbatique autorisé a été expliqué en son temps par l'activité intense de fin d'année ; qu'il n'est pas même allégué que l'employeur a abusé de son pouvoir à cet égard ; que la réalité des propos jugés vexatoires par madame X... relatés dans sa lettre du 15 septembre 2000, contestés par monsieur Y..., n'est pas confirmée par le témoignage de madame B... ; que selon ce témoignage, alors que cette passante se trouvait à regarder les vitrines de la bijouterie, elle a entendu des éclats de voix, des insultes et des menaces à l'égard de la vendeuse, ajoutant « que ce n'était pas la première fois, hélas, que j'assistais à la bijouterie Y... à ce genre de scène » ; que les insultes ne sont pas illustrées ; que l'employeur a contesté dès le 4 octobre 2000 les griefs qui lui étaient faits notamment les ; propos qui lui sont imputés et dont il s'étonne de la déformation de leur sens par l'intéressée ; qu'à cette occasion il rappelait que l'origine du conflit datait du jour où en septembre : 2000 il avait constaté que le magasin était resté sans surveillance pour la deuxième fois, que la journée continue relevait d'un choix de la salariée ; que ces deux éléments de fait (magasin sans surveillance et choix de la journée continue) n'ont pas été démentis par madame X... ; qu'également il n'est établi par aucune pièce que l'employeur a modifié les horaires de travail ; qu'il n'est pas démontré que monsieur Y... a souhaité le départ volontaire de madame X..., comme celle-ci l'indique dans sa lettre du 15 septembre 2000 ; qu'au contraire, à la suite du non renouvellement du bail du magasin Aquaboulevard l'employeur a manifesté son intention de conserver la salariée à son service au sein de son autre magasin avant toute déclaration d'inaptitude (cf. lettre du 19 juillet 2001) ; que les troubles constatés par le médecin le 5 octobre 2000 sont qualifiés de " troubles phobiques invalidants " ; qu'aucun élément ne permet de rattacher ces troubles à des conditions de travail imputables à l'employeur ; que les demandes au titre du harcèlement moral sont rejetées ;

1°) ALORS QUE lorsque le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers ; que madame X... a produit, aux débats l'attestation d'une cliente faisant état « des éclats de voix, des insultes et des menaces » récurrents de l'employeur à son égard, un courrier de l'inspecteur du travail constatant le fractionnement du paiement de son salaire, ainsi que des lettres de reproches de l'employeur ; que ces éléments suffisaient à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de prouver que les agissements qui lui étaient reprochés étaient étrangers à tout harcèlement ; qu'en retenant au contraire qu'« il n'est établi aucun fait de nature à présumer l'existence d'un harcèlement moral depuis cette intervention de l'inspection du travail », la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en retenant que les éléments produits par la salariée « ne permettent pas de caractériser les faits répétés de harcèlement moral » (arrêt p. 4 § 2), la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve du harcèlement sur la salariée et a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3°) ALORS QU'en retenant « qu'il n'est établi aucun fait de nature à présumer l'existence d'un harcèlement moral » (arrêt p. 3 § 4), sans vérifier si les certificats médicaux des docteurs Z... et A... faisant respectivement état de « troubles phobiques invalidants » et d'« un état dépressif réactionnel probable (…) lié à de très gros problèmes à son travail » et le constat de l'inaptitude de madame X... à son emploi ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé le montant des dommagesintérêts dus à madame X... au titre de la rupture abusive de son contrat de travail à la somme de 3. 000 euros ;

AUX MOTIFS QUE sur le licenciement, l'employeur n'est pas fondé à soutenir que le reclassement de madame X... était impossible au sein de l'autre magasin motif pris d'un effectif de 5 salariés dont déjà 4 vendeurs ; qu'il n'est en effet pas allégué qu'une modification de l'effectif soit intervenue depuis la proposition faite à madame X... en juillet 2001 d'intégrer ce magasin ; qu'ainsi l'employeur ne justifie pas qu'avant le licenciement survenu au début de l'année 2002, le reclassement de madame X... fût impossible ; que dans ces conditions le licenciement de madame X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à réparation ; que considérant l'ancienneté de madame X... (11 années) et l'effectif réduit de l'entreprise, la cour fixe à 3. 000 euros le montant des dommages et intérêts pour rupture abusive ;

1°) ALORS QUE la cassation qui interviendra sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, et en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation du chef de l'arrêt fixant le montant des dommages-intérêts dus à madame X... au titre de la rupture abusive de son contrat de travail à la somme de 3. 000 euros ;

2°) ALORS QUE (subsidiairement) l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être inférieure à six mois de salaire que si la société a moins de deux ans d'ancienneté ou si le licenciement est opéré dans une entreprise de moins de onze salariée ; qu'en limitant à deux mois de salaire l'indemnité due à la salariée qui totalisait treize ans d'ancienneté, motif pris de l'effectif « réduit » de l'entreprise, sans rechercher si celle-ci employait habituellement moins de onze salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-3 et L. 1235-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20286
Date de la décision : 21/09/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2011, pourvoi n°10-20286


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.20286
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