La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/09/2011 | FRANCE | N°10-15287

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-15287


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er septembre 1991 en qualité de directeur de la communication par la société Serono France ayant son siège à Boulogne-Billancourt ; que cette société a été cédée en janvier 2007 au groupe Merck qui décidait du rapprochement des activités commerciales des sociétés Serono France et Merck Lipha santé dans le cadre d'une implantation géographique unique à Lyon ; qu'ayan

t refusé la modification de son contrat de travail consistant en une mutation à Lyo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er septembre 1991 en qualité de directeur de la communication par la société Serono France ayant son siège à Boulogne-Billancourt ; que cette société a été cédée en janvier 2007 au groupe Merck qui décidait du rapprochement des activités commerciales des sociétés Serono France et Merck Lipha santé dans le cadre d'une implantation géographique unique à Lyon ; qu'ayant refusé la modification de son contrat de travail consistant en une mutation à Lyon par lettre du 14 août 2007, Mme X... a été licenciée pour motif économique par lettre du 29 octobre 2007 ; que contestant le motif énoncé dans la lettre de licenciement et reprochant à l'employeur de ne pas avoir satisfait à son obligation de reclassement, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur n'était pas en mesure de faire une offre personnalisée à la salariée qui avait indiqué en refusant la modification de son contrat de travail être dans l'attente d'une proposition intéressante et qui reconnaissait avoir reçu la liste des postes à pourvoir en interne, laquelle ne comprenait aucun emploi correspondant à son niveau de responsabilité ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'employeur était tenu de proposer à la salariée dont le licenciement était envisagé tous les emplois disponibles de même catégorie ou à défaut, d'une catégorie inférieure sans pouvoir limiter ses offres en fonction de la volonté présumée de l'intéressée de les refuser, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement rendu par le conseil de prud'hommes, l'arrêt rendu le 4 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Condamne la société Merck Serono aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Merck Serono à payer la somme de 2 500 euros à Mme X... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et signé par Mme Mazars, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément aux dispositions de l'article 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt et un septembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit et jugé que le licenciement pour motif économique de Madame X... repose sur une cause économique réelle et sérieuse, dit et jugé que la SAS Merck Lipha Santé a respecté son obligation de reclassement à l'égard de Madame X... et d'AVOIR en conséquence débouté Madame X... de ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. Y... a été engagé en qualité de directeur de la communication au sein de la société Merck Santé qui est une société juridiquement distincte de la société Merck Lipha Santé (cf. le contrat de travail de M. Y... produit aux débats) ; que Mme X... ne peut donc prétendre que le poste qui lui était offert à Lyon était déjà pourvu et qu'ainsi la proposition de modification de son contrat de travail était déloyale (arrêt, p. 4) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la demanderesse, pour refuser son transfert à Lyon, a ainsi motivé sa décision : « n'ayant pas eu à ce jour, de proposition intéressante au sein du groupe Merck ou une réelle visibilité sur le devenir de mon poste, je ne peux répondre par l'affirmative quant à l'acceptation de mon transfert à Lyon ; qu'en tant que salariée siégeant au Comité de Direction, je considère avoir été totalement écartée des négociations » ; que cependant la société MLS garantissait à tous les salariés transférés le maintien de tous les éléments de leur contrat de travail en dehors du lieu d'exercice de leur fonction, leur garantissant le fonctionnement conjoint de deux structures juridiques dans une même entité juridique ; que si les salariés pouvaient craindre une possible remise en cause d'une pareille organisation, à plus ou moins long terme, le risque d'une fusion n'étant pas écarté, il n'en reste pas moins que dans un premier temps, en acceptant cette mutation ils étaient assurés de retrouver leur poste à l'identique (jugement pp. 7 et 8) ;
1°/ ALORS QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que Mme X... indiquait avoir refusé la modification de son contrat de travail en raison de son absence de visibilité sur le poste qu'elle occuperait à Lyon et invoquait le doute qu'elle nourrissait de voir son emploi et son niveau de responsabilité maintenus compte tenu du recrutement, concomitant au déclenchement de la procédure de licenciement pour motif économique, d'un directeur de la communication par le groupe Merck ; qu'en jugeant le licenciement économique justifié sans rechercher, comme il lui était demandé, si la proposition de modification présentée à Mme X... était suffisamment précise et concrète pour que la salariée l'apprécie de manière éclairée, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 1222-1 et L. 1222-6 du code du travail ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le poste de directeur de la communication au sein de la société Merck Santé ne pouvait pas lui être proposé au titre du reclassement puisque son licenciement n'était pas encore envisagé (arrêt, p. 4) ;
2°/ ALORS QUE les possibilités de reclassement s'apprécient antérieurement à la date du licenciement, à compter du moment où celui-ci est envisagé ; qu'en jugeant que le poste de directeur de la communication de la société Merck Santé avait été pourvu par un recrutement extérieur avant que le licenciement de Mme X... soit envisagé, sans caractériser la date à laquelle, précisément, le licenciement de la salariée avait été envisagé, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1233-2, L. 1233-3 et L. 1233-4 du code du travail ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Danielle X... reconnaît avoir reçu la liste des emplois à pourvoir en interne au sein du groupe ; que cette liste démontre qu'aucun emploi de la même catégorie n'était disponible ; que l'employeur n'a commis aucune faute en ne lui faisant aucune proposition sur les postes de catégories très inférieures qui étaient disponibles au sein du groupe Merck dès lors que Mme X... qui siégeait au comité de direction, ce qui donne la mesure de son niveau de responsabilité, avait indiqué par écrit le 14 août 2007 être dans l'attente d'une proposition intéressante ; qu'ainsi, l'employeur n'était pas en mesure de lui faire une offre personnalisée ; qu'il s'ensuit qu'il n'a commis aucun manquement à l'obligation de reclassement et qu'il y a lieu à confirmation du jugement en ce qu'il a dit le licenciement (arrêt, pp. 4 et 5) ;
3°/ ALORS QUE l'absence d'emploi disponible de même catégorie que celle du salarié dont le licenciement est envisagé ne dispense pas l'employeur de son obligation de proposer un poste relevant d'une catégorie inférieure ; que l'employeur ne peut limiter ses offres en fonction de la volonté présumée de l'intéressé de les refuser ; que la proposition de reclassement, nécessairement présentée par écrit, doit être précise, concrète et personnalisée ; qu'en retenant que l'employeur n'était pas tenu de faire une offre personnalisée à la salariée dès lors que celle-ci avait indiqué être dans l'attente d'une proposition intéressante et qu'il lui avait communiqué une liste des emplois disponibles qui ne contenait aucun poste de la même catégorie que la sienne mais seulement des postes de catégorie très inférieure, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-2, L. 1233-3 et L.1233-4 du code du travail ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE Madame X... ne peut raisonnablement tenir grief à la société MLS de ne pas l'avoir reclassée alors qu'elle-même, en refusant sa mutation sur le site de Lyon où tous les postes étaient transférés a pris ce risque, et qu'il ressort du document intitulé « bourse d'emploi interne du 11 octobre 2007 » qu'elle produit qu'aucun poste de reclassement ne pouvait lui être proposé (jugement, p. 8) ;
4°/ ALORS QUE la proposition d'une modification du contrat de travail que le salarié peut toujours refuser, ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement ; qu'en jugeant que la salariée ne pouvait faire grief à son employeur d'avoir manqué à son obligation de reclassement dès lors qu'en refusant sa mutation, elle avait pris ce risque, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L. 1233-2, L. 1233-3 et L.1233-4 du code du travail ;
5°/ ET ALORS QU' en se bornant à affirmer qu'il résultait du document «bourse d'emploi interne du 11 octobre 2007 » qu'aucun poste de reclassement ne pouvait être proposé à la salariée, sans caractériser l'absence de postes disponibles dans le périmètre de reclassement, de même catégorie, ou de catégorie inférieure à celui de Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2, L. 1233-3 et L. 1233-4 du code du travail ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE de surcroît la salariée a adhéré au congé de reclassement proposé, qu'elle bénéficie donc de l'accompagnement du cabinet Leroy Consultants spécialisé dans de nombreux ateliers « cadres dirigeants » ce qui lui permet de tenter de mener à bien la faisabilité de son projet professionnel « devenir consultant en communication dans les «serious games » dans le secteur d'activité pharmaceutique santé en exploitant votre important réseau relationnel », tel qu'il ressort du point d'étape effectué par ce cabinet le 20 mars 2008 où il est précisé : «…actuellement, vous êtes en pleine exploitation de cet évènementiel. Vous avez démarré votre activité en travaillant avec votre partenaire sur l'élaboration de plusieurs propositions de mission à partir des besoins formulés lors de la présentation que vous avez effectuée dans un second temps aux équipes des sociétés intéressées. Depuis le succès de votre petit déjeuner de présentation, nos rendez-vous Leroy Consultants se sont espacés compte tenu de votre moindre disponibilité » » (jugement, p. 8) ;
6°/ ALORS QUE le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut être prononcé que si son reclassement dans l'entreprise, ou dans le groupe auquel elle appartient, est impossible ; qu'en retenant, pour juger que l'employeur n'avait pas manqué à son obligation de reclassement, que la salariée bénéficiait de l'accompagnement d'un cabinet externe dans le cadre du congé de reclassement auquel elle avait adhéré, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2, L. 1233-3 et L. 1233-4 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-15287
Date de la décision : 21/09/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 04 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2011, pourvoi n°10-15287


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15287
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award