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21/09/2011 | FRANCE | N°10-14790

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-14790


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 2010), que M. X..., a été recruté le 2 mai 1990 par la société Itm logistique internationale (ITM) appartenant au groupement Intermarché ; que le 1er mars 1999, il a souscrit un contrat de travail avec une autre société du même groupe, la Société européenne de transport (SET) ; que celle-ci ayant fusionné avec la précédente, il est devenu, à compter du 1er janvier 2004 salarié de la société Itm où il exerçait les fonctions de directeur du transport

; qu'il a été licencié pour faute grave le 11 mai 2006, l'employeur lui repro...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 2010), que M. X..., a été recruté le 2 mai 1990 par la société Itm logistique internationale (ITM) appartenant au groupement Intermarché ; que le 1er mars 1999, il a souscrit un contrat de travail avec une autre société du même groupe, la Société européenne de transport (SET) ; que celle-ci ayant fusionné avec la précédente, il est devenu, à compter du 1er janvier 2004 salarié de la société Itm où il exerçait les fonctions de directeur du transport ; qu'il a été licencié pour faute grave le 11 mai 2006, l'employeur lui reprochant de n'avoir pas fait procéder aux contrôles ni mis en place les procédures qui auraient permis de déceler les malversations d'une société portugaise dans la facturation des transports prétendûment effectués par elle ;
Sur le pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de ne pas retenir la faute grave du salarié et de la condamner à lui payer des indemnités de rupture, alors selon le moyen :
1°/ que, la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, directeur transport de la société Itm logistique internationale chargé de l'approvisionnement et de la logistique de la société, avait fait preuve de défaillance en ne mettant pas en place de procédures de vérifications des affrètements, même après avoir été alerté des difficultés de paiement de certains clients ce qui avait entraîné un lourd préjudice financier pour l'entreprise ; qu'en décidant néanmoins que ces faits ne pouvaient justifier un licenciement pour faute grave, au seul motif qu'il n'était pas établi que le salarié était sciemment associé à un système de fausses facturations, tandis qu'à elles seules les graves carences commises par le salarié ne permettaient pas de le maintenir dans ses fonctions de directeur transports sans risques majeurs supplémentaires pour l'entreprise, la cour d'appel ne tire pas les conséquences de ses propres constatations, violant ainsi les articles L. 1234-1 et L 1234-9 du code du travail ;
2°/ que, la qualification de faute grave n'implique pas nécessairement l'établissement d'une intention frauduleuse du salarié ; qu'en décidant néanmoins que les carences reprochées au salarié ne pouvaient justifier un licenciement pour faute grave, au seul motif qu'il n'était pas établi que le salarié était sciemment associé à un système de fausses facturations, la cour d'appel viole les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail en ajoutant une condition non requise ;
Mais attendu que l'arrêt relève que le salarié dirigeait l'approvisionnement et la logistique de la société et n'était pas chargé de la comptabilité ; que la société SET avait développé des relations privilégiées avec la société portugaise en cause, laquelle avait eu l'autorisation de s'installer dans l'antenne locale de la première et d'accéder à son logiciel d'exploitation ce qui lui permettait d'émettre directement sur ses prétendus clients, en réalité des sociétés inexistantes, les factures dont elle demandait ensuite indûment le paiement au groupement Intermarché ; que toutefois, le salarié qui participait aux réunions de cadres connaissait les difficultés de paiement suscitées par cette société portugaise, avait été alerté sur cette situation et en tant que directeur transports, aurait dû redoubler de vigilance sur les vérifications lui incombant, ce qu'il n'avait pas fait ; qu'en l'état de ces seuls motifs, elle a pu en déduire que les faits reprochés s'ils pouvaient être fautifs ne constituaient pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié pris en ses trois branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter en conséquence de ses demandes en paiement de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un cadre dirigeant ne saurait se voir imputer à faute des défaillances lorsqu'il n'a fait qu'appliquer la politique de la société qui l'emploie conformément à l'obligation de loyauté renforcée qu'il lui doit ; que la cour d'appel a constaté que la société SET (devenue Itm logistique internationale) s'était prévalue de ses relations de confiance avec la société OET pour lui accorder toute une série de facilités en sorte qu'en tant que cadre dirigeant de la SET (ensuite de la société ITM logistique internationale), il devait les mettre en oeuvre et agir conformément à cette politique ; qu'en affirmant que son licenciement était justifié au motif qu'il aurait dû mettre en place et faire respecter des procédures de contrôle sans s'assurer que de tels contrôles auraient été compatibles avec la politique de son entreprise qu'il était chargé de mettre en oeuvre, et sans caractériser en conséquence que ces défaillances de contrôle lui soient imputables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1331-1, ensemble l'article L.1221-1 du code du travail ;
2°/ qu'un cadre dirigeant saurait d'autant moins se voir imputer une défaillance dans le contrôle d'un partenaire commercial de la société qui l'emploie qu'il a, au point d'outrepasser le cadre de sa mission, préconisé à sa société de sanctionner ce partenaire commercial aussitôt les irrégularités constatées ; que la cour d'appel a constaté que même s'il ne disposait pas d'une mission comptable il avait malgré tout suggéré et préconisé dès le 30 septembre 2004 d'arrêter l'OET comme client ; qu'en jugeant qu'il aurait dû redoubler de vigilance alors qu'elle a elle-même constaté qu'il avait utilisé, mais en vain, tous les pouvoirs qui lui étaient dévolus, non pas seulement pour contrôler, mais bien pour faire cesser au plus tôt ces irrégularités, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé, à nouveau, les articles L. 1232-1, L. 1331-1, ensemble l'article L.1221-1 du code du travail ;
3°/ que, les juges du fond doivent répondre aux moyens sérieux des conclusions ; qu'il soutenait dans ses conclusions d'appel que la seule chronologie des faits suffisait à rendre sans fondement tous les griefs formulés contre lui puisqu'il ne pouvait être concerné par les pertes subies par la société SET en 2005 dont il n'était plus le salarié depuis le 31 décembre 2003 et cette société n'ayant été reprise par la société Itm logistique internationale qu'au 1er juillet 2005 ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, répondant aux conclusions visées à la dernière branche et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, la cour d'appel a décidé que les faits reprochés au salarié, eu égard à l'importance des fonctions occupées, constituaient une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par Mme Mazars, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par de Me Blondel, avocat aux Conseils pour la société Itm logistique internationale
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société ITM Li à verser à Monsieur X... des sommes à titre d'indemnité de préavis, de congés payés y afférents et d'indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L.1235-1 du Code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier non seulement la régularité de la procédure suivie mais aussi le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties... ; si un doute subsiste, il profite au salarié ; qu'est ou sont constitutifs d'une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur qui s'est placé sur le terrain disciplinaire d'établir la réalité des faits visés par lui dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; qu'aux termes de la lettre du 11 mai 2006, la SA ITM Logistique Internationale expose :
"confrontés à des incohérences comptables à propos des activités de notre filiale au Portugal, nous avons déclenché un audit sur le dossier OET, que nous avons confié au cabinet KPMG
« Le rapport qui nous a été rendu le 27 février 2006 met en lumière des irrégularités comptables flagrantes.... J'ai demandé que les investigations se poursuivent.
« Le complément d'information qui m'a été transmis le 24 avril est tellement accablant pour vous ...
« Je n'ose pas croire que vous avez participé à ce qui apparaît comme de véritables malversations comptables. Je préfère penser que c'est par pure crédulité que vous n'avez pas procédé ou fait procéder aux vérifications comptables les plus élémentaires, qui n'auraient pas manqué de vous alerter sur la situation que vous avez littéralement "avalée ", sans vous poser de questions.
« Comment expliquer autrement que vous n'avez pas fait procéder, au travers des procédures élémentaires nécessaires, à la vérification des transports effectués et donc au paiement des factures émises par la société OET.
« Il est…effarant de constater que sont supposées intervenir dans ce dossier les sociétés dites "clients" dénommées Alex, Dessantin et Loxinexport qui n'existent pas. Dans le même esprit, d'où viennent les écritures de compensation qui ont été identifiées dans la comptabilité de notre société EIT.
« Au vu de ce que nous connaissons aujourd'hui … ces malversations ont engendré pour EIT une perte de 11 millions d'euros en 2005, sans compter l'annulation d'un chiffre d'affaires fictif.
« Votre comportement dans cette affaire est extrêmement grave. Votre laxisme s'apparente à de l'incurie.
« Vous ne pouvez même pas prétendre que tout se serait passé à votre insu : de nombreux courriers montrent que vous avez directement donné des instructions à vos équipes en leur demandant de payer OET même en l'absence de preuves d'affrètements, ce qui est non seulement totalement contraire aux procédures, mais littéralement aberrant … » ;
Qu'il ressort des pièces et documents produits que le groupement des Mousquetaires s'est implanté au Portugal depuis plusieurs années, que pour faciliter sa mission, la société SET a confié à Monsieur Z... un mandat de représentation exclusive au Portugal suivant un contrat du 8 avril 1998 ; qu'une société OET représentée par l'épouse de Monsieur Z... s'est substituée à Monsieur Z... et un contrat de collaboration commerciale a été signé entre la SET et l'OET ; que ce contrat de collaboration portait sur les transports à destination de l'ensemble du territoire européen ; que la société ITM dans la plainte contre X avec constitution de partie civile déposée entre les mains d'un juge d'instruction écrit que pour des raisons d'efficacité pratique, tenant en particulier à la saisie informatique des éléments comptables liés à la « chaîne logistique » et compte tenu de la régularité du courant d'affaires et du climat de confiance développé, la société OET a été autorisée à installer un bureau au sein des locaux de la base logistique de Paços ; que l'accès au logiciel d'exploitation était libre et autorisé pour OET, les opérations enregistrées par ladite société étant vérifiables par l'utilisation d'un code dédié « Augusto » ; que grâce à cet accès informatique, les représentants de la société OET, en enregistrant une commande au nom de l'un de ses clients apportés dans le cadre de la représentation commerciale provoquaient l'édition d'une facture à entête de ITM Il –EIT (ex-SET) sur le serveur de la base ITM Il, lesquelles factures étaient adressées automatiquement aux clients concernés ; qu'à la faveur de la transmission universelle de la SET à la société ITM IL et de la création de l'établissement EIT, les vérifications faites au sein de la société et l'audit réalisé par KPMG ont mis en évidence plusieurs anomalies ; qu'il est ainsi apparu que :
- les sociétés AFLEX, DESSANTIN, LOSANEXPORT visées comme sociétés clientes n'existaient pas,- les prestations de transport effectuées en 2005 pour le compte de ces trois clientes ont été indûment payées par ITM IL à la société OET,
- des écritures comptables injustifiées de compensation entre les chiffres d'affaires de ces trois sociétés et celui de la société OET ont été enregistrées à hauteur de 11 millions d'euros à l'initiative de la société OET ;
que dans la lettre de licenciement dont les termes ont été rapportés, il est reproché à Monsieur X... :
- de n'avoir pas procédé ou fait procéder à des vérifications comptables les plus élémentaires,
- de n'avoir pas fait procéder au travers de procédures élémentaires nécessaires à la vérification des transports effectués et donc au paiement des factures émises par OET,
- d'avoir donné des instructions aux équipes en leur demandant de payer OET même en l'absence de preuve d'affrètement ;
Que la société KPMG confirme dans son rapport qu'un risque élevé de fraude était rendu possible en raison de dysfonctionnements de contrôle interne ;
ET AUX MOTIFS ENCORE QU'il est avéré que Monsieur X... a été employé dans l'entreprise SET du 1er mars 1999 au 31 décembre 2003 et ce en qualité de responsable du développement d'abord puis de secrétaire général ; qu'il ressort du contrat de travail liant Monsieur X... et la société ITM IL signé par les parties le 29 septembre 2003 effectif à compter du 1er janvier 2004, que Monsieur X... e été engagé en qualité de directeur transport, au statut de cadre dirigeant et qu'il était prévu qu'il dirige par délégation, l'approvisionnement et la logistique de la société. ; qu'aux termes de l'article 8 du dit contrat il est stipulé que Monsieur Jacques X... doit accomplir sa mission qui consiste à faire réaliser à la société les meilleurs résultats en quantité et en qualité en restant strictement dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires ; que s'il est clair que Monsieur X... ne disposait pas a priori d'une mission de vérification des éléments de la comptabilité, il est avéré qu'il a accepté que l'OET soit réglé sans exiger les CMR correspondant aux lettres de voiture et ce faisant sans procéder aux vérifications des transports effectués ; que d'après un courriel de Monsieur Z... adressé à Monsieur A..., responsable de la comptabilité ITM IL en date du 16 janvier 2004 il apparaît que Monsieur Z... et Monsieur X... avaient préalablement indiqué à Monsieur A... que certains clients pouvaient être facturés sans CMR, que "Monsieur X... payait la société OET rapidement" en raison de ses problèmes de trésorerie ; que Monsieur A... confirme dans une attestation qu'il recevait de Monsieur X... des consignes orales ; qu'il est par ailleurs établi que Monsieur X... participait aux réunions de cadres telles celles des 24 février 2005, 21 avril 2005, 7 octobre 2005 et même à des réunions antérieures â l'année 2005 et dans le cadre desquelles avaient été évoquées les difficultés de règlement des créances du Portugal ; que Monsieur Jacques X... avait même suggéré le 30 septembre 2004 de réduire les clients qui payent mal, et préconisé d'employer OET comme fournisseur et arrêter comme client tant qu'il ne paie pas ; qu'ainsi alerté sur les difficultés de paiement des clients en lien avec l'OET, Monsieur X..., en tant que directeur transports se devait de redoubler de vigilance sur les vérifications lui incombant sur les affrètements ; qu'à défaut d'établir en l'état la réalité d'une collusion frauduleuse avec les représentants de la société Z..., la démonstration de relations ponctuelles en 2001 et 2003 n'étant pas de nature à permettre de retenir que Monsieur X... était associé sciemment à un système de fausses facturations, les défaillances de Monsieur X... dans les procédures de contrôle qu'il lui appartenait de mettre en place et de faire respecter caractérisent sinon une faute grave rendant immédiatement impossible son maintien dans l'entreprise une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le jugement rendu sera infirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement était justifié par une faute grave ; que Monsieur X... est recevable et fondé en ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés y afférents et de licenciement, cette dernière indemnité devant être calculée en fonction de la reprise d'ancienneté par la société ITM IL, à compter du 2 mai 1990 ; qu'il n'est pas contesté que la moyenne des trois derniers mois de salaire était de 7 257 euros ; que la société ITM sera en conséquence condamnée à verser à Monsieur X... les sommes suivantes :
- 21.771 euros au titre de l'indemnité de préavis,- 2.177,10 euros au titre des congés payés y afférents,- 48.838,36 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;
Que s'agissant d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse, Monsieur X... ne peut voir prospérer sa demande de dommages et intérêts pour un licenciement injustifié ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que le salarié, directeur transport de la société ITM LI chargé de l'approvisionnement et de la logistique de la société, avait fait preuve de défaillance en ne mettant pas en place de procédures de vérifications des affrètements, même après avoir été alerté des difficultés de paiement de certains clients ce qui avait entraîné un lourd préjudice financier pour l'entreprise ; qu'en décidant néanmoins que ces faits ne pouvaient justifier un licenciement pour faute grave, au seul motif qu'il n'était pas établi que le salarié était sciemment associé à un système de fausses facturations, tandis qu'à elles seules les graves carences commises par le salarié ne permettaient pas de le maintenir dans ses fonctions de directeur transports sans risques majeurs supplémentaires pour l'entreprise, la cour d'appel ne tire pas les conséquences de ses propres constatations, violant ainsi les articles L. 1234-1 et L 1234-9 du Code du travail ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, la qualification de faute grave n'implique pas nécessairement l'établissement d'une intention frauduleuse du salarié; qu'en décidant néanmoins que les carences reprochées au salarié ne pouvaient justifier un licenciement pour faute grave, au seul motif qu'il n'était pas établi que le salarié était sciemment associé à un système de fausses facturations, la Cour viole les articles L.1234-1 et L 1234-9 du Code du travail en ajoutant une condition non requise.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR d'avoir jugé que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse, et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes d'indemnités de préavis, et les congés payés afférents ; de licenciement et dommages et intérêts de ce chef,
AUX MOTIFS propres QUE selon l'article L. 1235-1 du Code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier non seulement la régularité de la procédure suivie mais aussi le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties... ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Est ou sont constitutifs d'une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. II appartient à l'employeur qui s'est placé sur le terrain disciplinaire d'établir la réalité des faits visés par lui dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige. Aux termes de la lettre du 11 mai 2006, la SA ITM Logistique Internationale expose : "confrontés à des incohérences comptables à propos des activités de notre filiale au Portugal, nous avons déclenché un audit sur le dossier OET, que nous avons confié au cabinet KPMG. Le rapport qui nous a été rendu le 27 Février 2006 met en lumière des irrégularités comptables flagrantes.... j'ai demandé que les investigations se poursuivent. Le complément d'information qui m'a été transmis le 24 Avril est tellement accablant pour vous...Je n 'ose pas croire que vous avez participé à ce qui apparaît comme de véritables malversations comptables. Je préfère penser que c 'est par pure crédulité que vous n 'avez pas procédé ou fait procéder aux vérifications comptables les plus élémentaires, qui n 'auraient pas manqué de vous alerter sur la situation que vous avez littéralement "avalée", sans vous poser de questions. Comment expliquer autrement que vous n 'avez pas fait procéder, au travers des procédures élémentaires nécessaires, à la vérification des transports effectués et donc au paiement des factures émises par la société OET. Il est... effarant de constater que sont supposées intervenir dans ce dossier les sociétés dites "clients " dénommées Alex, Dessantin, et Loxinexport qui n'existent pas. Dans le même esprit, d'où viennent les écritures de compensation qui ont été identifiées dans la comptabilité de notre société EIT. Au vu de ce que nous connaissons aujourd'hui... ces malversations ont engendré pour EIT une perte de 11 millions d'euros en 2005, sans compter l'annulation d'un chiffre d'affaires fictif. Votre comportement dans cette affaire est extrêmement grave. Votre laxisme s'apparente à de l'incurie. Vous ne pouvez même pas prétendre que tout se serait passé à votre insu, de nombreux courriers montrent que vous avez directement donné des instructions à vos équipes en leur demandant de payer OET, même en l'absence de preuves d'affrètements ce qui est non seulement totalement contraire aux procédures mais littéralement aberrant... ". Il ressort des pièces et documents produits que le groupement des Mousquetaires s'est implanté au Portugal depuis plusieurs années, que pour faciliter sa mission, la société SET a confié à Monsieur Z... un mandat de représentation exclusive au Portugal suivant un contrat du 8 Avril 1998. Une société OET représentée par l'épouse de Monsieur Z... s'est substituée à Monsieur Z... et un contrat de collaboration commerciale a été signé entre la SET et l'OET. Ce contrat de collaboration portait sur les transports à destination de l'ensemble du territoire européen. La société ITM IL dans la plainte contre X avec constitution de partie civile déposée entre les mains d'un juge d'instruction écrit que pour des raisons d'efficacité pratique, tenant en particulier à la saisie informatique des éléments comptables liées à la "chaîne logistique" et compte tenu de la régularité du courant d'affaires et du climat de confiance développé, la société OET a été autorisée à installer un bureau au sein des locaux de la base logistique de Paços. L'accès au logiciel d'exploitation était libre et autorisé pour OET, les opérations enregistrées par la dite société étant vérifiables par l'utilisation d'un code dédié "Augusto". Grâce à cet accès informatique, les représentants de la société OET, en enregistrant une commande au nom de l'un de ses clients apportés dans le cadre de la représentation commerciale provoquaient l'édition d'une facture à entête de ITM ILEIT (ex SET) sur le serveur de la base ITM IL, lesquelles factures étaient adressées automatiquement aux clients concernés. A la faveur de la transmission universelle de patrimoine de la SET à la société ITM IL et de la création de l'établissement EIT, les vérifications faites au sein de la société et l'audit réalisé par KPMG ont mis en évidence plusieurs anomalies. Il est ainsi apparu que : -les sociétés AFLEX, DESSANTIN, LOSANEXPORT visées comme sociétés clientes n'existaient pas,- les prestations de transport effectuées en 2005 pour le compte de ces trois clientes ont été indûment payées par ITM IL à la société OET,- des écritures comptables injustifiées de compensation entre les chiffres d'affaires de ces trois sociétés et celui de la société OET ont été enregistrées à hauteur de 11 Millions d'euros à l'initiative de la société OET. Dans la lettre de licenciement dont les termes ont été rapportés, il est reproché à Monsieur X..., de n'avoir pas procédé ou fait procéder à des vérifications comptables les plus élémentaires, -de n'avoir pas fait procéder au travers de procédures élémentaires nécessaires à la vérification des transports effectués et donc au paiement des factures émises par OET, - d'avoir donné des instructions aux équipes en leur demandant de payer OET même en l'absence de preuve d'affrètement. La société KPMG confirme dans son rapport qu'un risque élevé de fraude était rendu possible en raison de dysfonctionnements de contrôle interne.
ET AUX MOTIFS ENCORE QU'il est avéré que Monsieur X... a été employé dans l'entreprise SET du 1 mars 1999 au 31 Décembre 2003 et ce en qualité de responsable du développement d'abord puis de secrétaire général. Il ressort du contrat de travail liant Monsieur X... et la société ITM IL signé par les parties le 29 Septembre 2003 effectif à compter du 1 janvier 2004, que Monsieur X... a été engagé en qualité de directeur transport, au statut de cadre dirigeant et qu'il était prévu qu'il dirige par délégation, l'approvisionnement et la logistique de la société. Aux termes de l'article 8 du dit contrat il est stipulé que Monsieur Jacques X... doit accomplir sa mission qui consiste à faire réaliser à la société les meilleurs résultats en quantité et en qualité en restant strictement dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires. S'il est clair que Monsieur X... ne disposait pas a priori d'une mission de vérification des éléments de la comptabilité, il est avéré qu'il a accepté que l'OET soit réglé sans exiger les CMR correspondant aux lettres de voiture et ce faisant sans procéder aux vérifications des transports effectués. D'après un courriel de Monsieur Z... adressé à Monsieur A..., responsable de la comptabilité ITM IL en date du 16 janvier 2004 il apparaît que Monsieur Z... et Monsieur X... avaient préalablement indiqué à Monsieur A... que certains clients pouvaient être facturés sans CMR, que "Monsieur X... payait la société OET rapidement" en raison de ses problèmes de trésorerie. Monsieur A... confirme dans une attestation qu'il recevait de Monsieur X... des consignes orales. Il est par ailleurs établi que Monsieur X... participait aux réunions de cadres telles celles des 24 Février 2005, 21 Avril 2005, 7 Octobre 2005 et même à des réunions antérieures à l'année 2005 et dans le cadre desquelles avaient été évoquées les difficultés de règlement des créances du Portugal. Monsieur Jacques X... avait même suggéré le 30 Septembre 2004 de réduire les clients qui payent mal, et préconisé d'employer OET comme fournisseur et arrêter comme client tant qu' 'il ne paie pas. Ainsi alerté sur les difficultés de paiement des clients en lien avec l'OET, Monsieur X..., en tant que directeur transports se devait de redoubler de vigilance sur les vérifications lui incombant sur les affrètements. A défaut d'établir en l'état la réalité d'une collusion frauduleuse avec les représentants de la société Z..., la démonstration de relations ponctuelles en 2001 et 2003 n'étant pas de nature à permettre de retenir que Monsieur X... était associé sciemment à un système de fausses facturations, les défaillances de Monsieur X... dans les procédures de contrôle qu'il lui appartenait de mettre en place et de faire respecter caractérisent sinon une faute grave rendant immédiatement impossible son maintien dans l'entreprise une cause réelle et sérieuse de licenciement. Le jugement rendu sera infirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement était justifié par une faute grave. Sur les conséquences d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse ; Monsieur X... est recevable et fondé en ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés y afférents et de licenciement, cette dernière indemnité devant être calculée en fonction de la reprise d'ancienneté par la société ITM IL, à compter du 2 Mai 1990. Il n'est pas contesté que la moyenne des trois derniers mois de salaire étaient de 7.257 €.La société ITM IL sera en conséquence condamnée à verser à Monsieur X..., les sommes suivantes : 21.7716 au titre de l'indemnité de préavis, 2.177,10 € au titre des congés payés y afférents, 48.838,36 € au titre de l'indemnité de licenciement. S'agissant d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse, Monsieur X... ne peut voir prospérer sa demande de dommages et intérêts pour un licenciement injustifié. Sur l'indemnité réclamée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile : L'équité commande d'allouer à Monsieur X... une indemnité de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
ALORS, D'UNE PART, QUE un cadre dirigeant ne saurait se voir imputer à faute des défaillances lorsqu'il n'a fait qu'appliquer la politique de la Société qui l'emploie conformément à l'obligation de loyauté renforcée qu'il lui doit ; que la Cour d'appel a constaté que Société SET (devenue ITM LI-EIT) s'était prévalue de ses relations de confiance avec la société OET pour lui accorder toute une série de facilités en sorte que, Monsieur X... en tant que cadre dirigeant de la SET (ensuite de la Société ITM LI), devait les mettre en oeuvre et agir conformément à cette politique ; qu'en affirmant que le licenciement de Monsieur X... était justifié au motif qu'il aurait dû mettre en place et faire respecter des procédures de contrôle sans s'assurer que de tels contrôles auraient été compatibles avec la politique de son entreprise qu'il était chargé de mettre en oeuvre, et sans caractériser en conséquence que ces défaillances de contrôle lui soient imputables, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1, L.1331-1, ensemble l'article L.1221-1 du Code du travail.
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE un cadre dirigeant saurait d'autant moins se voir imputer une défaillance dans le contrôle d'un partenaire commercial de la société qui l'emploie qu'il a, au point d'outrepasser le cadre de sa mission, préconisé à sa société de sanctionner ce partenaire commercial aussitôt les irrégularités constatées ; que la Cour d'appel a constaté que même s'il ne disposait pas d'une mission comptable Monsieur X... avait, malgré tout, suggéré et préconisé dès le 30 septembre 2004 d'arrêter l'OET comme client ; qu'en jugeant que Monsieur X... aurait dû redoubler de vigilance alors qu'elle a elle-même constaté qu'il avait utilisé, mais en vain, tous les pouvoirs qui lui étaient dévolus, non pas seulement pour contrôler, mais bien pour faire cesser au plus tôt ces irrégularités, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé, à nouveau, les articles L.1232-1, L.1331-1, ensemble l'article L.1221-1 du Code du travail.
ALORS, ENFIN QUE, les juges du fond doivent répondre aux moyens sérieux des conclusions; que Monsieur X... soutenait dans ses conclusions d'appel que la seule chronologie des faits suffisait à rendre sans fondement tous les griefs formulés contre lui puisqu'il ne pouvait être concerné par les pertes subies par la société SET en 2005 dont il n'était plus salarié de la SET depuis le 31 décembre 2003 et que cette dernière Société n'avait été reprise par la Société ITM LI qu'au 1er juillet 2005 ;qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant, la Cour d'appel a, en s'absentant d'y répondre, violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-14790
Date de la décision : 21/09/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2011, pourvoi n°10-14790


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.14790
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