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01/09/2011 | FRANCE | N°10-88582

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 septembre 2011, 10-88582


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises d'ILLE-ET-VILAINE, en date du 29 octobre 2010, qui, pour viols, l'a condamné à treize ans de réclusion criminelle ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 168 du code de procédure pénale ;

" en ce que le procès-verbal des débats constate qu'à l'audien

ce du 28 octobre 2010, le Pr Y..., expert, a été entendu en qualité d'expert psychologue ;

" au...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises d'ILLE-ET-VILAINE, en date du 29 octobre 2010, qui, pour viols, l'a condamné à treize ans de réclusion criminelle ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 168 du code de procédure pénale ;

" en ce que le procès-verbal des débats constate qu'à l'audience du 28 octobre 2010, le Pr Y..., expert, a été entendu en qualité d'expert psychologue ;

" aux motifs que (…) à cet instant, Me Z...et Me A...déposent des conclusions sur le bureau de la cour qui ont été aussitôt visées par le président et le greffier, tendant à ce que la cour leur décerne acte de propos tenus à la barre par le Pr Y..., expert, le jeudi 28 octobre 2010, lors de son audition (…) ; qu'il y a lieu de faire droit, dans les termes requis, aux points n° 1 et 3 des conclusions déposées par la défense de l'accusé M. X... (procès-verbal des débats, p. 10 s) ;

" alors que, toute partie doit avoir une possibilité raisonnable d'exposer sa cause dans des conditions qui ne la désavantagent pas d'une manière appréciable par rapport à la partie adverse ; qu'en l'espèce, il ressort du procès-verbal des débats, que le Pr Y..., entendu à l'audience en qualité d'expert psychologue sur la personnalité de M. X..., a répondu aux questions qui lui étaient posées par le président de la cour d'assises, les avocats des parties civiles et l'avocat général mais a expressément refusé de répondre à celles posées par les avocats de l'accusé ; qu'en statuant ainsi, sans
qu'ait été annulée l'audition du Pr Y...qui s'était déroulée dans des conditions contraires au principe de l'égalité des armes, la cour d'assises a violé les textes susvisés " ;

Attendu que les avocats de la défense ont déposé des conclusions tendant à ce qu'il leur soit donné acte des propos tenus par l'expert Y...lors de sa déposition ainsi que du refus de cet expert de répondre à leurs questions ;

Attendu que, par arrêt incident du 29 octobre 2010, la cour a fait partiellement droit à ces demandes ;

Attendu qu'en cet état, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ;

Qu'en effet, il n'appartenait pas à la cour, saisie de demandes de donné acte, de se prononcer sur la régularité de la déposition de l'expert ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de violation des articles 429, 706-71, R. 53-33 et suivants, D. 47-12-6, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que le procès-verbal des débats constate qu'à l'audience du 28 octobre 2010, à 14 h 05, le Dr C..., expert, a été entendu en sa déposition au moyen d'un procédé de communication audiovisuelle en application des articles 706-71 et R. 53-36 du code de procédure pénale (visioconférence) ;

" aux motifs que l'expert C..., présent au tribunal de grande instance de Laval, qui avait été chargé de procéder à une expertise au cours de l'information, a été entendu oralement au moyen d'un procédé de communication audiovisuelle en application des articles 706-71 et R. 53-36 du code de procédure pénale ; que le Dr C...a été entendu après avoir prêté le serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et sa conscience ; qu'après l'exposé de cet expert, les autres dispositions de l'article 168 du code de procédure pénale et celles de l'article 312 du même code ont été observées ; qu'après son audition, la visioconférence a été interrompue et l'audience s'est poursuivie ; que le procès-verbal établi par le tribunal de grande instance de Laval sera joint au présent procès-verbal (procès-verbal des débats, p. 8) ;

1) " alors que le procès-verbal des opérations techniques prévu à l'article 706-71 du code de procédure pénale doit être établi dans chacun des lieux reliés entre eux par des moyens de télécommunication ; qu'en l'espèce, s'il résulte des mentions du procès-verbal des débats, qu'à l'audience du 28 octobre 2010, l'expert C...a été entendu par visioconférence, le dossier de la procédure ne comporte, en annexe au procès-verbal des débats, qu'un seul procès-verbal des opérations techniques, lequel n'indique pas, au demeurant, le lieu dans lequel il a été établi ; qu'en cet état, la décision attaquée ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;

2) " alors que tout procès-verbal n'a de valeur probante que s'il est régulier en la forme et si son auteur a agi dans l'exercice de ses fonctions ; qu'il résulte de l'article D. 47-12-6 du code de procédure pénale que le procès-verbal dressé en chacun des lieux en application de l'article 706-71 du même code doit être établi et signé par un agent ou un fonctionnaire de la juridiction désigné par le greffier en chef ou par un fonctionnaire pénitentiaire désigné par le chef d'établissement ; qu'ainsi, ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale et, partant, ne permet pas de s'assurer de l'intégrité de l'enregistrement qu'il constate, le procès-verbal des opérations techniques qui, se bornant en l'espèce à énoncer qu'il a été établi et signé le 2 novembre 2010 par M. D..., en qualité " d'adjoint administratif ", ne précise ni la juridiction à laquelle l'intéressé serait attaché, ni qu'il ait la qualité de fonctionnaire de cette juridiction, et omet en outre d'indiquer s'il a été régulièrement désigné à cette fin par le greffier en chef de ladite juridiction ;

3) " alors que ne met pas la Cour de cassation en mesure de s'assurer de la régularité des auditions opérées par visioconférence, le procès-verbal des opérations techniques qui, quoique annexé au procès-verbal des débats de la présente affaire, n'indique aucunement qu'il ait été établi dans l'affaire suivie contre M. X... ;

4) " alors que, pour garantir la régularité des auditions opérées par visioconférence et, partant, s'assurer de l'intégrité des déclarations ainsi recueillies, les mentions des procès-verbaux des opérations techniques et celles du procès-verbal des débats doivent être concordantes ; qu'en l'espèce, le procès-verbal des débats indique qu'à l'audience du 28 octobre 2010 à 14 h 05, il a été procédé, par visioconférence, à l'audition de l'expert M. C..., " présent au tribunal de grande instance de Laval " et que " le procès-verbal établi par le tribunal de grande instance de Laval sera joint au présent procès-verbal ", quand ledit procès-verbal des opérations techniques indique expressément que l'audition, par visioconférence, de l'expert C...a été opérée entre la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine et " le tribunal de grande instance de Brest " ; qu'en l'état de ces mentions contradictoires, quant au lieu où l'expert se tenait présent lors de son audition, la décision entreprise ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale " ;

Attendu que, d'une part, le procès-verbal des débats mentionne que dans la matinée du 27 octobre 2010, premier jour des débats, le président a annoncé que l'expert C...serait entendu par visioconférence à partir du tribunal de grande instance de Brest ; que les parties n'ont formulé aucune observation ; que le même procès-verbal énonce que l'audition de l'expert, présent au tribunal de grande instance de Laval, s'est déroulée le lendemain ;

Attendu que, d'autre part, a été joint au procès-verbal des débats, un procès-verbal des opérations techniques établi et signé par M. D..., adjoint administratif, attestant de l'audition par visioconférence du Dr C...le 28 octobre 2010 de 14 heures à 14 heures 45 entre le tribunal de grande instance de Brest et la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine ;

Attendu qu'en cet état, abstraction faite d'une erreur matérielle manifeste qui ne saurait donner ouverture à cassation et dès lors que la capacité du fonctionnaire qui a procédé à l'établissement du procès-verbal est présumée, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer de la régularité de l'audition par visioconférence de l'expert entre le tribunal de grande instance de Brest et la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme, ensemble les principes du droit à une procédure juste et équitable, d'égalité devant la loi et d'égalité devant la justice ;

" en ce que l'arrêt de la cour d'assises d'Ille-et-Villaine du 29 octobre 2010 ne comporte aucun motif ;

" alors que les dispositions des articles 353, 357, 364, 366 et 376 du code de procédure pénale, selon lesquelles les arrêts rendus par les cours d'assises ne sont pas motivés, portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit par les articles 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ainsi qu'aux principes du droit à une procédure juste et équitable, d'égalité devant la loi et d'égalité devant la justice ; qu'en conséquence, la déclaration d'inconstitutionnalité des textes précités qui sera prononcée après renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, privera l'arrêt attaqué de tout fondement juridique " ;

Attendu que, par décision du 1er avril 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions des articles 349, 350, 353 et 357 du code de procédure pénale dont il se déduit l'absence de motivation des arrêts des cours d'assises statuant sur l'action publique ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble violation des droits de la défense, et des articles 353, 357, 364, 366 et 376 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt de la cour d'assises d'Ille-et-Villaine du 29 octobre 2010 ne comporte aucun motif ;

" alors que l'exigence d'un procès équitable suppose une motivation permettant le contrôle du juge de légalité ; qu'en déclarant M. X... coupable de viol sur la personne de Mme E...et sur celle de Mme F..., en l'absence de considérations de fait lui permettant de comprendre les raisons concrètes pour lesquelles il a été répondu positivement ou négativement aux questions posées à la cour et au jury, la cour d'assises a privé celui-ci du droit à un procès équitable et violé les textes susvisés " ;

Attendu que sont reprises dans l'arrêt de condamnation les réponses qu'en leur intime conviction, magistrats et jurés composant la cour d'assises d'appel, statuant dans la continuité des débats, à vote secret et à la majorité qualifiée des deux tiers, ont données aux questions sur la culpabilité, posées conformément au dispositif de la décision de renvoi et soumises à la discussion des parties ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'ont été assurés l'information préalable sur les charges fondant la mise en accusation, le libre exercice des droits de la défense ainsi que le caractère public et contradictoire des débats, l'arrêt satisfait aux exigences légales et conventionnelles invoquées ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 000 euros la somme que M. X... devra payer à Mme Gaëlle E...au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Leprieur conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-88582
Date de la décision : 01/09/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'assises de l'Ille-et-Vilaine, 29 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 sep. 2011, pourvoi n°10-88582


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.88582
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