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12/07/2011 | FRANCE | N°10-17579

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 juillet 2011, 10-17579


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 janvier 2010), et les productions, que, les 2 et 9 juillet 2000, M. X... et Mme Y... ont accepté chacun une offre de prêt in fine d'un montant identique de 182 938,82 euros présentée par le Crédit lyonnais (la banque) pour le financement de l'acquisition en commun d'un bien immobilier ; qu'ils ont apporté, en garantie des prêts, deux contrats d'assurance-vie Lionvie multicapital libellés en unités de compte, souscrits en mai et juin 2000 auprès des Assurances

fédérales-vie par l'intermédiaire de la banque, et choisi le suppo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 janvier 2010), et les productions, que, les 2 et 9 juillet 2000, M. X... et Mme Y... ont accepté chacun une offre de prêt in fine d'un montant identique de 182 938,82 euros présentée par le Crédit lyonnais (la banque) pour le financement de l'acquisition en commun d'un bien immobilier ; qu'ils ont apporté, en garantie des prêts, deux contrats d'assurance-vie Lionvie multicapital libellés en unités de compte, souscrits en mai et juin 2000 auprès des Assurances fédérales-vie par l'intermédiaire de la banque, et choisi le support "gestion dynamique" de ces contrats; que la valeur de ces placements ayant diminué de plus de moitié, M. X... et Mme Y... ont assigné la banque en résolution des contrats et en responsabilité, lui reprochant d'avoir manqué à son devoir de conseil lors de la mise en place des opérations préliminaires à l'acquisition immobilière et, postérieurement, à son obligation de renseignement sur l'évolution de leur placement ; que la banque a reconventionnellement demandé leur condamnation au remboursement du montant des prêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu que M. X... et Mme Y... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande tendant à voir prononcer la résolution judiciaire des contrats d'assurance-vie qu'ils ont souscrits par l'intermédiaire de la banque auprès de la compagnie d'assurances et voir la banque condamnée à leur rembourser le montant des moins-values enregistrées par le placement financier réalisé sur le support Lionvie multicapital dynamique au jour du prononcé de l'arrêt, alors, selon le moyen :

1°/ que la banque qui se voit confier des fonds en vue d'un placement financier est tenue, à l'égard de son client, d'une obligation essentielle de conseil et d'information, tant sur les risques inhérents aux investissements souscrits que sur l'évolution des placements réalisés ; que la violation par la banque d'une telle obligation est susceptible d'entraîner la résolution judiciaire du contrat ; qu'en décidant néanmoins que le manquement par la banque à son obligation de conseil et d'information n'était pas susceptible de justifier la résolution des contrats d'assurance-vie souscrits par M. X... et Mme Y..., la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil ;

2°/ que le manquement d'une gravité suffisante à une obligation de conseil ou d'information peut entraîner la résolution judiciaire du contrat, alors même que cette obligation présente un caractère accessoire ; qu'en décidant néanmoins que le manquement par la banque à son obligation de conseil et d'information n'était pas susceptible de justifier la résolution des contrats d'assurance-vie souscrits par M. X... et Mme Y..., la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a décidé à bon droit que s'agissant des conséquences, sur les contrats d'assurance-vie souscrits avec un tiers, des fautes commises par la banque, intermédiaire, lors de la formation et de l'exécution de ces contrats, ces manquements fautifs ne pouvaient entraîner la résolution de ces contrats et le remboursement des moins values enregistrées sur le placement financier réalisé sur le support Lionvie muticapital dynamique, mais seulement le droit à réparation de la perte de chance résultant de ces manquements ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X... et Mme Y... font le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que le préjudice résultant de la violation d'une obligation de conseil ou d'information est constitué par une perte de chance d'éviter le dommage, par une décision éclairée, et ne saurait présenter un caractère forfaitaire ; qu'il incombe seulement à la victime de préciser à quel montant elle évalue ses différents préjudices, l'office du juge consistant alors à en apprécier le bien-fondé et à déterminer la fraction de ces préjudices correspondant à la perte de chance de les éviter ; qu'en fixant le montant de l'indemnisation de M. X... et de Mme Y... à la somme de 15 000 euros, sans déterminer la fraction des préjudices subi par M. X... et Mme Y... qui correspondait à la perte de chance, consécutive à la violation par la banque de son obligation de conseil et d'information, de ne pas réaliser un placement financier à haut risque et de pouvoir opter en cours de contrat à un placement plus sécurisé, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil et 5 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en fixant à la somme de 15 000 euros le montant de l'indemnisation de M. X... et de Mme Y..., la cour d'appel a souverainement évalué le préjudice résultant pour ces derniers de la perte de chance de ne pas avoir réalisé un meilleur investissement ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils pour M. X..., et autre

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Jean-Paul X... et Madame Véronique Y... de leur demande tendant à voir prononcer la résolution judiciaire des contrats d'assurance-vie qu'ils ont souscrits, par l'intermédiaire de la Société CREDIT LYONNAIS, auprès des ASSURANCES FEDERALES-VIE et de voir, en conséquence, la Société CREDIT LYONNAIS condamnée à leur rembourser le montant des moins-values enregistrées par le placement financier réalisé sur le support LIONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE au jour du prononcé de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE le manquement dont se prévalent Monsieur X... et Madame Y... affecte les seuls contrats d'assurance-vie LIONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE, et non les contrats de prêts ; que la faute qu'ils reprochent au CREDIT LYONNAIS est sans effet sur ces derniers ; que dès lors, le jugement doit être confirmé en ce qu'il condamne M. X... à régler au CREDIT LYONNAIS la somme en principal de 201.119,28 euros assortie des intérêts au taux contractuel majoré de 8% sur la somme de 193.688,30 à compter du 6 octobre 2004 jusqu'à parfait paiement ; que seules les conséquences sur les contrats d'assurance-vie doivent être examinées ; que si le manquement à un devoir de conseil lors de la formation ou l'exécution d'un contrat permet à la victime d'obtenir indemnisation du préjudice qui en résulte, ce manquement fautif ne lui permet pas d'obtenir la résolution de ce contrat ; qu'ainsi, la demande de Monsieur X... et Madame Y... doit être rejetée en ce qu'elle tend à obtenir la résolution des contrats d'assurance-vie et le remboursement des moins-values enregistrées par le placement financier réalisé sur le support LYONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE ; qu'en revanche le fait de n'avoir pu prendre leur décision en parfaite connaissance des aléas susceptibles d'affecter l'évolution des contrats souscrits, ce en raison du manquement du CREDIT LYONNAIS à son devoir d'information et de conseil, justifie qu'il leur soit alloué, en indemnisation de ce préjudice, la somme de 15.000 euros ;

1°) ALORS QUE les « relevés de patrimoine » versés aux débats, relatifs aux performances des assurances-vie souscrites par Monsieur X... et Madame Y... et établis à leur attention par le CREDIT LYONNAIS, indiquaient tous que leurs placements LIONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE bénéficiaient d'une « gestion conseillée » de la part de la banque ; qu'en affirmant néanmoins qu'il n'était pas établi que Monsieur X... et Madame Y... avaient « confié au Crédit Lyonnais un contrat de "mandat de gestion conseillée" », la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis desdits relevés de compte, en violation de l'article 1134 du Code civil ;

2°) ALORS QUE, subsidiairement, en se bornant à affirmer qu'il n'était pas établi que le CREDIT LYONNAIS s'était vu confier un « mandat de gestion conseillée », sans rechercher s'il ressortait des « relevés de patrimoine » qu'elle avait établis à l'attention de Monsieur X... et de Madame Y... que leurs placements LIONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE bénéficiaient d'une gestion conseillée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

3°) ALORS QUE la banque qui se voit confier des fonds en vue d'un placement financier est tenue, à l'égard de son client, d'une obligation essentielle de conseil et d'information, tant sur les risques inhérents aux investissements souscrits que sur l'évolution des placements réalisés ; que la violation par la banque d'une telle obligation est susceptible d'entrainer la résolution judiciaire du contrat ; qu'en décidant néanmoins que le manquement par le CREDIT LYONNAIS à son obligation de conseil et d'information n'était pas susceptible de justifier la résolution des contrats d'assurance-vie souscrits par Monsieur X... et Madame Y..., la Cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil ;

4°) ALORS QUE, subsidiairement, le manquement d'une gravité suffisante à une obligation de conseil ou d'information peut entraîner la résolution judiciaire du contrat, alors même que cette obligation présente un caractère accessoire ; qu'en décidant néanmoins que le manquement par le CREDIT LYONNAIS à son obligation de conseil et d'information n'était pas susceptible de justifier la résolution des contrats d'assurance-vie souscrits par Monsieur X... et Madame Y..., la Cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir limité à 15.000 euros la réparation du préjudice subi par Monsieur X... et Madame Y... du fait des manquements de la Société CREDIT LYONNAIS à son obligation de conseil et d'information lors de la souscription et au cours de l'exécution des contrats d'assurances-vie LIONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE ;

AUX MOTIFS QUE le manquement dont se prévalent Monsieur X... et Madame Y... affecte les seuls contrats d'assurance-vie LIONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE, et non les contrats de prêts ; que la faute qu'ils reprochent au CREDIT LYONNAIS est sans effet sur ces derniers ; que dès lors, le jugement doit être confirmé en ce qu'il condamne M. X... à régler au CREDIT LYONNAIS la somme en principal de 201.119,28 euros assortie des intérêts au taux contractuel majoré de 8% sur la somme de 193.688,30 à compter du 6 octobre 2004 jusqu'à parfait paiement ; que seules les conséquences sur les contrats d'assurance-vie doivent être examinées ; que si le manquement à un devoir de conseil lors de la formation ou l'exécution d'un contrat permet à la victime d'obtenir indemnisation du préjudice qui en résulte, ce manquement fautif ne lui permet pas d'obtenir la résolution de ce contrat ; qu'ainsi, la demande de Monsieur X... et Madame Y... doit être rejetée en ce qu'elle tend à obtenir la résolution des contrats d'assurance-vie et le remboursement des moins-values enregistrées par le placement financier réalisé sur le support LYONVIE MULTICAPITAL DYNAMIQUE ; qu'en revanche, le fait de n'avoir pu prendre leur décision en parfaite connaissance des aléas susceptibles d'affecter l'évolution des contrats souscrits, ce en raison du manquement du CREDIT LYONNAIS à son devoir d'information et de conseil, justifie qu'il leur soit alloué, en indemnisation de ce préjudice, la somme de 15.000 euros ;

ALORS QUE le préjudice résultant de la violation d'une obligation de conseil ou d'information est constitué par une perte de chance d'éviter le dommage, par une décision éclairée, et ne saurait présenter un caractère forfaitaire ; qu'il incombe seulement à la victime de préciser à quel montant elle évalue ses différents préjudices, l'office du juge consistant alors à en apprécier le bien-fondé et à déterminer la fraction de ces préjudices correspondant à la perte de chance de les éviter ; qu'en fixant le montant de l'indemnisation de Monsieur X... et de Madame Y... à la somme de 15.000 euros, sans déterminer la fraction des préjudices subi par Monsieur X... et Madame Y... qui correspondait à la perte de chance, consécutive à la violation par la Société CREDIT LYONNAIS de son obligation de conseil et d'information, de ne pas réaliser un placement financier à haut risque et de pouvoir opter en cours de contrat à un placement plus sécurisé, la Cour d'appel a violé les articles 1147 du Code civil et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-17579
Date de la décision : 12/07/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 26 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 jui. 2011, pourvoi n°10-17579


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17579
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