LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 30 avril 2009), que M. X... a confié à Mme Y... en février 2001 la défense de ses intérêts dans quatre affaires, ayant donné lieu à treize procédures, et a signé une convention portant sur des honoraires forfaitaires de diligences et de résultat, puis l'a dessaisie en avril 2005 et a demandé au bâtonnier de l'ordre de fixer le montant de ses frais et honoraires ;
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de fixer à une certaine somme le montant des honoraires et des frais dus à Mme Y..., alors, selon le moyen :
1°/ qu' aux termes de la combinaison des articles 1134 du code civil et 10, alinéa 2, de la loi du 31 décembre 1971, la prévision d'honoraires forfaitaires de diligences fait la loi des parties et ne peut donner lieu à rémunération complémentaire au temps passé en l'absence d'accord ultérieur ayant mis le client en mesure d'apprécier utilement le coût supplémentaire prévisible de l'intervention de son avocat ; qu'en se déterminant comme il l'a fait, le premier président a violé les textes susvisés ;
2°/ que le juge taxateur qui relève l'existence d'une convention basée sur un taux horaire peut néanmoins fixer le montant des honoraires sur la base des critères énumérés à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée en prenant en considération la situation de fortune du client, les difficultés de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété ainsi que les diligences utiles effectuées dans le dossier ; qu'en avalisant de manière quasi automatique le décompte de cinq cent dix heures produit par l'avocat sans autrement réfuter les critiques circonstanciées du client sur la sincérité d'un décompte lui-même reconnu fantaisiste par le bâtonnier de l'ordre au regard notamment de l'hétérogénéité des « diligences », de l'absence d'utilité, voire de sérieux de nombre d'entre elles, ainsi que de divers doublons, le premier président a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 10 de la loi de 1971 modifiée et de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que le litige est circonscrit par les demandes et défenses des parties aux termes de l'article 4 du code de procédure civile ; qu'en l'état d'une réclamation portant sur un complément d'honoraires au temps passé, le premier président n'a pu légalement accorder à la réclamante des honoraires tant forfaitaires que de diligences et de résultat au titre des dossiers Z..., A... et Mutuelles du Mans sans dénaturer les termes du litige en violation du texte susvisé ;
4°/ que des « diligences » inutiles sinon frustratoires n'ont pas lieu d'être rémunérées au temps passé, unilatéralement fixé par l'avocat ayant par ailleurs reçu un honoraire forfaitaire ; qu'à tort dans ces conditions le premier président a alloué un honoraire complémentaire au titre du dossier pénal contre la banque Chaix dont elle avait constaté le caractère frustratoire ; qu'en se déterminant comme il l'a fait, le premier président a derechef violé les dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée ;
Mais attendu qu'en l'absence d'acte ou de décision juridictionnelle irrévocable au moment du dessaisissement de l'avocat, la convention d‘honoraires est inapplicable et les honoraires correspondant à la mission effectuée ne peuvent être appréciés qu'en fonction des seuls critères définis par l'article 10, alinéa 2, de la loi du 31 décembre 1971 ;
Et attendu que, d'une part, en ce qui concerne les contentieux dirigés contre la banque Chaix, l'ordonnance retient qu'en raison du dessaisissement de Mme Y..., intervenu en cours de procédure, les honoraires forfaitaires et de résultat convenus ne sont pas exigibles mais que les honoraires au temps passé n'en restent pas moins dus ; que, d'autre part, l'ordonnance retient exactement que le fait que Mme Y... était intervenue, après de multiples instances, dans le sillage de ses précédents confrères, n'était pas de nature à lui faciliter la tâche, qu'il s'agissait incontestablement de dossiers complexes et de surcroît très largement imbriqués, dans lesquels elle s'est réellement investie et a obtenu des résultats, qu'il est justifié par la production de très nombreuses pièces, notamment des fiches de diligences et des décomptes horaires établis pour chaque dossier, de la réalité et de la densité du travail effectué et que le détail du temps passé, à raison de cinq cent dix heures de février 2001 à fin avril 2005, se trouve dûment justifié, dossier par dossier, et point par point, quant à la nature des diligences effectivement accomplies, ne présentant en aucun cas un quelconque caractère fantaisiste et correspondant sur une période de quelque quatre années à moins de dix heures par an à raison de chacune des treize procédures auxquelles les dossiers ont donné lieu ;
Que par ces constatations et énonciations, le premier président, qui n'était pas tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui a fait état des critères déterminants de son estimation, a souverainement fixé le montant des honoraires dus et ainsi légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses troisième et quatrième branches n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux conseils pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à 157.074,28 € HT le montant des honoraires et à 692,36 € HT celui des frais dus par M. X... et d'avoir en conséquence condamné M. X... à payer à Me Y..., déduction faite des règlements déjà intervenus, un honoraire complémentaire de 127.926,02 € HT soit 152.999,51 € TTC, outre 692,36 € HT soit 828,06 € TTC au titre des frais, et les intérêts ;
aux motifs que M. X... a accepté, en contresignant, le 22 mars 2001, un courrier de Me Y... du 13 mars 2001, les honoraires, tant forfaitaires, de diligences, que de résultat, ensemble proposés par son avocate, et étant ainsi fixés à 30.000 F. HT (4.573,47 €), par dossier et instance au fond, outre, en termes de résultat, à 13 % HT ; qu'il est justifié, par la production, du chef de Me Y..., de très nombreuses pièces, dont notamment, tant des fiches de diligences que des décomptes horaires précisément établis pour chacun d'entre eux, de la réalité et de la densité du travail effectué par ses soins ; qu'en effet, le détail du temps passé, à raison de 510 heures de travail, sur l'entière période de février 2001 à fin avril 2005, à raison d'un taux horaire de 230 € HT, se trouve dûment justifié, dossier par dossier, et point par point, quant à la nature des diligences effectivement accomplies, ne présentant en aucun cas un quelconque caractère fantaisiste, contrairement en cela aux énonciations de la décision querellée ; que le taux horaire de 230 € HT ainsi retenu ne revêt déjà en lui-même aucun caractère exorbitant, au regard de l'ancienneté dans le barreau et de l'expérience professionnelle de Me Y..., non plus que le nombre d'heures passé, dont il est précisément justifié, et ne représentant encore, comme le souligne non moins pertinemment l'avocate, sur la période de quelque quatre années qu'ont duré ces multiples interventions, que moins de dix heures par an à raison de chacune des quelque treize procédures distinctes auxquelles devaient donner lieu les dossiers dont elle était ainsi en charge, ce qui reste bien loin de pouvoir être, de premier abord, taxé d'excessif ; qu'il est ainsi avéré que le dossier contre M. Z..., M. A... et les Mutuelles du Mans s'est soldé par un résultat ayant abouti à l'encaissement par M. X... d'une somme de 235.925,73 €, en octobre 2002 puis avril 2003, rendant dans le principe et ensemble exigibles les honoraires convenus, tant forfaitaires que de résultat ; qu'en effet, dans cette affaire, un résultat irrévocable était indéniablement obtenu, en l'état du désistement des Mutuelles du Mans, dès le mois d'août 2002, de leur pourvoi en cassation contre l'arrêt du 12 mars 2002, soit bien avant le dessaisissement de Me Y..., intervenu fin avril 2005 ; que, s'agissant des trois autres dossiers, les honoraires convenus sont, il est vrai, en leur ensemble, inexigibles, par l'effet du dessaisissement de Me Y..., intervenu fin avril 2005, soit en cours de procédure et avant tout résultat ; que les seuls honoraires de diligence au temps passé n'en restent pas moins, en leur principe, dus, tant dans le dossier civil contre la Banque Chaix, qu'au titre du dossier pénal contre la même, ou bien encore s'agissant du dossier successoral, en l'état de l'accomplissement, dans chacun de ceux-ci, des diligences effectives dont il est précisément justifié ; (…)
qu'en particulier, sur le dossier Z..., A... et Mutuelles du Mans, après la condamnation de l'expert comptable Laporte du chef de complicité d'escroquerie par un jugement correctionnel du TGI de Marseille du 31 mars 1995, devenu définitif, la cour d'Aix-en-Provence, par un arrêt du 12 mars 2002, allouait à M. X..., avec l'intervention de Me Y..., la condamnation de l'assureur de M. Z... à réparer son préjudice à hauteur de 235.925,73 € ; que M. X... ne peut soutenir qu'un tel résultat était acquis dès avant l'intervention de Me Y... dans ce dossier, jusqu'à lui dénier le droit au paiement des honoraires par elle revendiqués de ce chef, la seule circonstance que cet arrêt du 12 mars 2002 certes fait suite à de précédentes décisions ne retire rien à la réalité ni à la densité du travail néanmoins effectué par sa nouvelle avocate ; que celle-ci n'en reste donc pas moins assurément fondée à prétendre voir fixer ses honoraires tant forfaitaires, de diligences que de résultat, ensemble convenus au titre de ce dossier, à hauteur de la somme de 39.797,28 € HT et à obtenir, compte tenu du règlement déjà intervenu, un solde de 32.510,22 € HT soit 38.882,22 € TTC ;
que, sur le dossier civil contre la banque Chaix, après la cassation partielle par arrêt du 8 juillet 2003 de l'arrêt de la cour d'Aix-en-Provence du 15 novembre 2000 ayant débouté M. X... de son action contre la banque Chaix, le requérant devait obtenir un résultat tangible devant la cour de Nîmes, juridiction de renvoi, qui lui avait alloué 238.000 € ; que l'intervention de Me Y... ne peut être totalement méconnue par son client dans l'obtention d'un tel résultat ; qu'il s'ensuit que Me Y... est fondée à fixer ses honoraires au temps passé dans ce dossier à hauteur de 27.209 € HT et à obtenir, compte tenu du règlement déjà intervenu, un solde de 19.921,94 € HT soit, 23.826,64 € TTC ;
que, sur le dossier pénal contre la banque Chaix, il s'est ici essentiellement agi du dépôt, en juin 2001, d'une plainte, sans constitution de partie civile, mais directement étayée sur pas moins de 9 pages, assurément soldée par une mesure de classement sans suite en octobre 2001, mais ne justifiant toutefois pas que Me Y... ne soit rémunérée de ses honoraires devant être fixés au temps passé, dont il est ici encore très précisément justifié, à la somme requise de 13.363 € HT correspondant, compte tenu des règlements déjà intervenus, à un solde de 6.075,94 € HT soit 7.266,82 € TTC ;
que sur le dossier familial de nature successorale, la cour d'Aix-en-Provence statuant sur appel de deux jugements du TGI de Tarascon, confirmait le débouté des prétentions de M. X... par arrêts du 8 octobre 2002 ; que pour autant, et eu égard au travail effectué par ses soins, Me Y... est fondée à prétendre au paiement des entiers honoraires par elle revendiqués ; que M. X... ne peut faire valoir que son avocate eût bénéficié, à hauteur d'appel, du travail effectué par son prédécesseur en première instance, pour voir sensiblement réduire le montant des honoraires réclamés, au point de prétendre que Me Y... eût été désintéressée de ses entiers honoraires et frais, tant elle avait néanmoins dû reprendre devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence le développement d'une procédure initiée avant elle par l'un de ses confrères en première instance ; que l'intimé ne peut être davantage admis à faire valoir que le mérite de l'arrêt de cassation du 28 février 2006, lui ayant finalement donné gain de cause, reviendrait en son entier à la Scp d'avocats au conseil d'Etat et à la cour de cassation, qui seule pourrait, selon lui, en revendiquer le résultat, quand il est formellement établi que Me Y... y a, néanmoins, elle-même, par sa participation active, largement contribué ; que les honoraires sollicités par Me Y... à hauteur de 76.705 € HT correspondant, compte tenu du règlement déjà intervenu, à un solde de 69.417,94 € HT soit 83.023,88 € TTC outre les débours lui sont donc dus au regard des diligences accomplies ;
1°) alors que, d'une part, aux termes de la combinaison des articles 1134 du code civil et 10 al. 2 de la loi du 31 décembre 1971, la prévision d'honoraires forfaitaires de diligences fait la loi des parties et ne peut donner lieu à rémunération complémentaire au temps passé en l'absence d'accord ultérieur ayant mis le client en mesure d'apprécier utilement le coût supplémentaire prévisible de l'intervention de son avocat ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a violé les textes susvisés ;
2°) alors que, d'autre part le juge taxateur qui relève l'existence d'une convention basée sur un taux horaire peut néanmoins fixer le montant des honoraires sur la base des critères énumérés à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée en prenant en considération la situation de fortune du client, les difficultés de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété ainsi que les diligences utiles effectuées dans le dossier ; qu'en avalisant de manière quasi-automatique le décompte de 510 heures produit par l'avocat sans autrement réfuter les critiques circonstanciées du client sur la sincérité d'un décompte lui-même reconnu fantaisiste par le bâtonnier de l'Ordre au regard notamment de l'hétérogénéité des « diligences », de l'absence d'utilité, voire de sérieux de nombre d'entre elles, ainsi que de divers doublons, la cour a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 10 de la loi de 1971 modifiée et de l'article 1134 du code civil ;
3°) alors que, de troisième part, le litige est circonscrit par les demandes et défenses des parties aux termes de l'article 4 du code de procédure civile ; qu'en l'état d'une réclamation portant sur un complément d'honoraires au temps passé, la cour n'a pu légalement accorder à la réclamante des honoraires tant forfaitaires que de diligences et de résultat au titre des dossiers Z..., A... et Mutuelles du Mans sans dénaturer les termes du litige en violation du texte susvisé ;
4°) alors enfin que, des « diligences » inutiles sinon frustratoires n'ont pas lieu d'être rémunérées au temps passé, unilatéralement fixé par l'avocat ayant par ailleurs reçu un honoraire forfaitaire ; qu'à tort dans ces conditions la cour a alloué un honoraire complémentaire au titre du dossier pénal contre la banque Chaix dont elle avait constaté le caractère frustratoire ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a derechef violé les dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée.