LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 16 janvier 2006 par M. Y..., exploitant un fonds de commerce de pizzeria-glacier, en qualité de cuisinier ; qu'il a été licencié le 27 février 2008 pour non-respect des directives concernant la mise en place des couverts et la préparation des plats, sans amélioration malgré des avertissements, absence totale de motivation et insuffisances professionnelles ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour contester ce licenciement ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt retient que plusieurs clients se sont plaints par écrit de la mauvaise qualité des plats, l'un d'eux ayant même ressenti des manifestations d'intoxication alimentaire ;
Attendu cependant que le licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs imputables à ce salarié ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher en quoi les faits qu'elle retenait étaient imputables au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis la Réunion, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes tendant à voir juger que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et obtenir la condamnation de Monsieur Y... exerçant à titre individuel sous l'enseigne LA FIESTA au paiement de dommages et intérêts et en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et de l'avoir condamné aux entiers dépens de premier instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE le motif principal énoncé dans la lettre du 27 février 2008 est le non respect, à plusieurs reprises, des directives concernant la mise en place des couverts ou la préparation des plats, point sur lequel la situation ne se serait pas améliorée en dépit des avertissements de l'employeur ; la lettre fait également état d'une "absence totale de motivation" ainsi que "d'insuffisances professionnelles dans les tâches qui vous incombent", ce qui "nuit au bon fonctionnement de notre restaurant" et ne peut être accepté compte tenu de la petite taille de l'entreprise; Laurent X... soutient qu'il était loisible à l'employeur, eu égard à la nature du contrat, de rompre celui-ci sans motif, ce dont il déduit l'inexistence des motifs invoqués dont il invoque par ailleurs l'imprécision; il ajoute qu'aucun avertissement ne lui a été notifié; ce dernier point est totalement inopérant; il est par ailleurs inexact de prétendre que l'employeur n'a invoqué aucun élément concret de nature à étayer une appréciation (insuffisance professionnelle) à laquelle les juges n'ont pas à substituer la leur: plusieurs clients se sont plaints par écrit de la mauvaise qualité des plats depuis quelque temps, l'un (René Z...) ayant même "ressenti des manifestations d'intoxication alimentaire"; son licenciement ayant donc une cause réelle et sérieuse, la demande de dommages intérêts de M. X... doit être rejetée;
ALORS QUE il appartient aux juges de rechercher si les faits allégués par l'employeur sont établis et s'ils sont suffisamment sérieux pour justifier son licenciement ; que pour considérer que le licenciement de Monsieur X... avait une cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel, après avoir mentionné les reproches énoncés dans la lettre de licenciement, a ajouté qu'il était « inexact de prétendre que l'employeur n'a invoqué aucun élément concret de nature à étayer une appréciation (insuffisance professionnelle) à laquelle les juges n'ont pas à substituer la leur : plusieurs clients se sont plaints par écrit de la mauvaise qualité des plats depuis quelque temps, l'un (René Z...) ayant même "ressenti des manifestations d'intoxication alimentaire" » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, et en refusant d'apprécier si les faits énoncés par l'employeur étaient réels et sérieux et s'ils justifiaient le licenciement de Monsieur X..., la Cour d'appel a violé les articles L 1232-1 et L 1235-1 du Code du Travail (anciennement L 122-14-3) ;
QU'en tout cas, en ne caractérisant pas l'insuffisance professionnelle alléguée, elle a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions
Et ALORS QUE le salarié ne peut être sanctionné que pour des faits objectifs et qui lui sont personnellement imputables ; que pour considérer que le licenciement de Monsieur X... avait une cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a relevé que «plusieurs clients se sont plaints par écrit de la mauvaise qualité des plats depuis quelque temps, l'un (René Z...) ayant même "ressenti des manifestations d'intoxication alimentaire"» ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher, comme elle y était invitée, ni a fortiori caractérisé en quoi ces faits constituaient des griefs objectifs et imputables à Monsieur X..., la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1232-1 et L 1235-1 du Code du Travail (anciennement L 122-14-3).