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30/06/2011 | FRANCE | N°10-18441

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 30 juin 2011, 10-18441


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 28 avril 2010), que la société Nobody Shipping limited (la société), représentée par M. Y..., a confié la défense de ses intérêts à la SCP X..., avocat au barreau d'Aix-en-Provence (la SCP), en raison des difficultés d'exécution d'un contrat signé avec la société Monaco Yatching Technology (MYT) ; que le litige s'est terminé par une tran

saction aux termes de laquelle la société MYT a restitué la somme de 3, 6 m...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 28 avril 2010), que la société Nobody Shipping limited (la société), représentée par M. Y..., a confié la défense de ses intérêts à la SCP X..., avocat au barreau d'Aix-en-Provence (la SCP), en raison des difficultés d'exécution d'un contrat signé avec la société Monaco Yatching Technology (MYT) ; que le litige s'est terminé par une transaction aux termes de laquelle la société MYT a restitué la somme de 3, 6 millions d'euros ; que l'avocat a saisi le bâtonnier de son ordre d'une demande en fixation de ses honoraires ;
Attendu que la SCP fait grief à l'ordonnance de la débouter de sa demande de taxation d'honoraires à hauteur de 180 000 euros HT dirigée contre la société pour les diligences concernant un litige l'ayant opposée à la société MYT, à laquelle elle avait commandé un yacht d'une valeur de 18 000 000 d'euros, et ayant conduit à la signature d'une transaction le 7 avril 2008 lui ayant permis de se dégager de toutes obligations contractuelles et de récupérer l'acompte de 3, 6 millions d'euros qu'elle avait versé, alors, selon le moyen, que plusieurs avocats peuvent accomplir des diligences dans la même affaire, en particulier de représentation d'une part et d'assistance d'autre part ; que la SCP avait justifié de diligences d'assistance non contestées dans le cadre de la procédure italienne (32 heures), la procédure monégasque (32 heures dont la rédaction d'écritures et la plaidoirie) et la procédure à Saint-Tropez (35 heures dont la rédaction d'écritures et la plaidoirie), pour lesquelles certains confrères étaient effectivement intervenus conjointement, en qualité de représentants ; que le premier président de la cour d'appel, après avoir relevé que la rémunération prévue forfaitairement entre la SCP et sa cliente n'incluait pas les diligences accomplies dans le cadre des instances judiciaires, ne pouvait pas se borner à retenir que les avocats qui avaient « plaidé » ces affaires avaient été rémunérés et que la SCP ne pouvait inclure dans sa demande des diligences déjà accomplies par d'autres, sans expliquer pourquoi les diligences judiciaires d'assistance invoquées par la SCP et non contestées, et qui avaient complété les diligences accomplies par les autres avocats, ne devaient pas être elles aussi rémunérées (manque de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et de l'article 1134 du code civil) ;
Mais attendu que l'ordonnance retient que le dossier, objet du litige, était bien inclus dans la mission générale d'assistance juridique confiée à la SCP ; que selon les déclarations mêmes du client, cette rémunération n'incluait pas les diligences accomplies dans le cadre d'instances judiciaires ; qu'avaient ainsi été rémunérés les avocats italiens, monégasques et français qui avaient eu à plaider devant diverses juridictions pour la défense des intérêts de la société ; qu'il avait précisé que, de la même façon, la SCP avait facturé directement à chaque société du groupe ses diligences à caractère judiciaire dans d'autres litiges ; qu'ainsi, la SCP avait facturé pour un montant total de 3 500 euros ses diligences devant le tribunal de commerce de Cannes pour la société ; que la SCP n'expliquait pas pourquoi elle croyait devoir inclure dans sa demande de fixation d'honoraires des diligences qui avaient été déjà rémunérées ou qui avaient été accomplies par d'autres avocats ; que la facture litigieuse correspondait à l'évidence à un honoraire de résultat et qu'en l'absence de la justification de l'existence d'une convention préalable aucun honoraire de résultat n'est dû par le client ;
Que de ces constatations et énonciations, le premier président a pu déduire, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis aux débats, que la SCP ne rapportait pas la preuve de diligences encore dues par la société et décider l'exclusion de tout honoraire complémentaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les première, deuxième, troisième et cinquième branches du moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCP X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP X... ; la condamne à payer la somme globale de 2 500 euros aux sociétés Nobody Shipping limited et P2C Investissments ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils pour la SCP X...

Il est reproché à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir débouté la SCP X... de sa demande de taxation d'honoraires à hauteur de 180 000 euros HT dirigée contre la société Nobody shipping limited pour les diligences concernant un litige l'ayant opposée à la société Myt, à laquelle elle avait commandé un yacht d'une valeur de 18 000 000 d'euros, et ayant conduit à la signature d'une transaction le 7 avril 2008 lui ayant permis de se dégager de toutes obligations contractuelles et de récupérer l'acompte de 3, 6 millions d'euros qu'elle avait versé ;
Aux motifs que la société Nobody shipping limited avait signé un contrat le 29 mars 2006 avec la société Monaco yachting technologie (MYT) portant sur la construction d'un navire de plaisance ; qu'en raison des difficultés d'exécution dudit contrat, la société Nobody shipping ltd avait confié ses intérêts à M. X..., l'un de ses conseils habituels ; qu'après diverses péripéties judiciaires, le litige s'était réglé par une transaction aux termes de laquelle la société Myt avait restitué l'acompte de 3, 6 millions d'euros ; que l'avocat avait alors émis une note d'honoraires de 180 000 euros que cette dernière avait refusé d'acquitter ; que pour s'opposer au paiement, la société requérante soutenait que M. X... avait déjà été réglé dans le cadre d'un contrat d'honoraires forfaitaire mensuel de 15 000 euros HT de septembre 2005 à décembre 2007, puis de 7 500 euros de janvier à juin 2008 ; que sans contester l'existence de ces honoraires d'assistance, au demeurant établis par les notes d'honoraires produites par le requérant, l'avocat avait prétendu qu'elles ne concerneraient pas Nobody shipping ltd mais les société du groupe P2C Investissements ; qu'il convenait de relever qu'il procédait exclusivement par voie d'affirmation, étant seulement observé que toutes ses notes d'honoraires avaient été mises à l'ordre de P2C Investissements avec pour seule mention « complément provision d'honoraires » sans aucune référence à un dossier précis ou à une quelconque société ; qu'en outre, M. X... n'expliquait pas pourquoi la société Nobody shipping ltd aurait, seule, eu un traitement différent de celui des autres sociétés du groupe, les relations d'amitié qu'il invoque avec leur dirigeant valant, à l'évidence, pour chacune d'entre elles ; qu'enfin ses dires sont infirmés par son propre courrier du 3 juin 2008, dans lequel il indiquait au client que les honoraires mensuels d'assistance ne se justifiaient plus compte tenu de l'achèvement des dossiers alors en cours, précisant notamment « même chose concernant Nobody/ Myt pour lequel j'attends que l'accord transactionnel négocié soit concrétisé d'ici début août » ; qu'il était ainsi établi que le dossier objet du présent litige était bien inclus dans la mission générale d'assistance juridique confiée à M. X... ; que, selon les déclarations mêmes du client, cette rémunération n'incluait pas les diligences accomplies dans le cadre d'instances judiciaires ; qu'avaient ainsi été rémunérés les avocats italiens, monégasques et français qui avaient eu à plaider devant diverses juridictions dans la défense des intérêts de la société Nobody shipping ltd ; qu'il avait précisé que, de la même façon, M. X... avait facturé directement à chaque société du groupe ses diligences à caractère judiciaire dans d'autres litiges ; qu'ainsi, ce dernier avait facturé pour un montant total de 3 500 euros ses diligences devant le tribunal de commerce de Cannes pour Nobody shipping ltd ; que M. X... n'expliquait par pourquoi il croyait devoir inclure dans sa demande de fixation d'honoraires des diligences qui avaient été déjà rémunérées ou qui avaient été accomplies par d'autres avocats ; que la facture litigieuse correspondait à l'évidence à un honoraire de résultat ; qu'en effet, outre le fait que la somme réclamée par lui correspondait à 5 % du résultat obtenu, c'est M. X... lui-même qui avait indiqué dans sa fixation d'honoraires au bâtonnier qu'il s'agissait d'appliquer un accord verbal consistant en une rémunération complémentaire à hauteur de 5 % sur les sommes qui seraient récupérées ; que l'existence d'une telle convention avait été d'emblée contestée par le client dans son courrier du 1er octobre 2008 ; qu'en l'absence de justification de l'existence d'une convention préalable, aucun honoraire de résultat ne saurait être dû par le client, sauf résultat exceptionnel qui n'était pas allégué en l'espèce même à titre subsidiaire ; que le décompte horaire qu'il produisait pour justifier, tardivement, les honoraires réclamés ne saurait être pris en compte en ce que les diligences qui le fondent avaient déjà été rémunérées dans les conditions exposées plus haut ; que les conditions, le cas échéant frauduleuses, dans lesquelles il a été rémunéré n'ont pas à être appréciées par la juridiction de céans ;
Alors que, 1°) la SCP X... avait invoqué le fait que la convention d'honoraires la liant au groupe P2C concernait l'ensemble des sociétés du groupe mais non la société Nobody shipping, qui n'en faisait pas partie, ce qui était d'autant plus évident qu'un tel mode de facturation aurait constitué un abus de biens sociaux au détriment du groupe P2C (conclusions, p. 10, § 1 ; p. 2, § 1 et 2) ; qu'en se bornant à affirmer que la SCP X... n'expliquait pas pourquoi la société Nobody shipping aurait eu un traitement différent des « autres sociétés du groupe », sans répondre au moyen selon lequel la société Nobody shipping n'avait précisément rien à voir avec ledit groupe, sauf la personne de son dirigeant, le premier président de la cour d'appel a privé son ordonnance de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et de l'article 1134 du code civil ;
Alors que, 2°) la SCP X... avait invoqué le fait que la convention d'honoraires la liant au groupe P2C concernait l'ensemble des sociétés du groupe mais non la société Nobody shipping, qui n'en faisait pas partie, ce qui était d'autant plus évident qu'un tel mode de facturation aurait constitué un abus de biens sociaux au détriment du groupe P2C (conclusions, p. 10, § 1 ; p. 2, § 1 et 2) ; qu'en affirmant qu'il n'avait pas à apprécier le caractère éventuellement frauduleux des conditions de la rémunération de l'avocat, quand cela ne lui était nullement demandé, l'abus de biens sociaux étant seulement évoqué pour illustrer l'impossibilité du mode de facturation invoqué par la partie adverse, en l'occurrence la facturation à une société de prestations effectuées au profit d'une autre, le premier président de la cour d'appel a statué par un motif inopérant, privant son ordonnance de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et de l'article 1134 du code civil ;
Alors que, 3°) la SCP X... avait invoqué, tant devant le bâtonnier que devant le premier président de la cour d'appel, une convention d'honoraires prévoyant une rémunération selon le temps passé, complétée en fonction du résultat, le tout dans la limite de 5 % des sommes récupérées, et non un honoraire de résultat complémentaire égal à 5 % du résultat, ce qui était tout à fait différent ; qu'en énonçant que « M. X... indiquait dans sa demande de fixation au bâtonnier qu'il s'agissait d'appliquer un accord verbal consistant en une rémunération complémentaire à hauteur de 5 % sur les sommes qui seraient récupérées », la cour d'appel a dénaturé les écritures de la SCP X... (violation de l'article 4 du code de procédure civile) ;
Alors que, 4°) plusieurs avocats peuvent accomplir des diligences dans la même affaire, en particulier de représentation d'une part et d'assistance d'autre part ; que la SCP X... avait justifié de diligences d'assistance non contestées dans le cadre de la procédure italienne (32 heures), la procédure monégasque (32 heures dont la rédaction d'écritures et la plaidoirie) et la procédure à Saint-Tropez (35 heures dont la rédaction d'écritures et la plaidoirie), pour lesquelles certains confrères étaient effectivement intervenus conjointement, en qualité de représentants ; que le président de la cour d'appel, après avoir relevé que la rémunération prévue forfaitairement entre la SCP X... et sa cliente n'incluait pas les diligences accomplies dans le cadre des instances judiciaires, ne pouvait pas se borner à retenir que les avocats qui avaient « plaidé » ces affaires avaient été rémunérés et que la SCP X... ne pouvait inclure dans sa demande des diligences déjà accomplies par d'autres, sans expliquer pourquoi les diligences judiciaires d'assistance invoquées par la SCP X... et non contestées, et qui avaient complété les diligences accomplies par les autres avocats, ne devaient pas être elles aussi rémunérées (manque de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et de l'article 1134 du code civil) ;
Alors que, 5°) la SCP X... avait justifié un total de 483 heures de travail pour des honoraires de 180 000 euros hors taxe (conclusions, p. 33, § 2), ce qui revenait à un taux horaire hors taxe de 373 euros, que l'ordonnance de première instance avait jugé adéquat compte tenu des diligences effectuées et de leur qualité ; que s'agissant en particulier de la procédure devant le tribunal de commerce de Cannes, la SCP X... avait justifié, sans être contredite, 43 heures de diligences (conclusions, p. 31) ; que la cour d'appel ne pouvait pas énoncer qu'une note d'honoraires de 3 500 euros correspondait à la rémunération totale de cette prestation, ce qui équivalait à 81, 40 euros hors taxe de l'heure, sans expliquer en quoi était justifiée une telle minoration du taux horaire par rapport au tarif horaire invoqué (manque de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et de l'article 1134 du code civil).


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-18441
Date de la décision : 30/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 30 jui. 2011, pourvoi n°10-18441


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.18441
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