La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2011 | FRANCE | N°10-15634

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 juin 2011, 10-15634


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite d'une donation-partage du 3 janvier 1987, MM. Pierre et Etienne X...sont devenus chacun propriétaire de diverses parcelles de vignes et propriétaires indivis d'un ensemble immobilier comprenant des bâtiments d'exploitation et une cave vinicole, qu'ils ont constitué le même jour le groupement foncier agricole du Combarel (le GFA) auquel ils ont apporté lesdites parcelles, que par acte du 25 avril 1988, le GFA a donné à bail à long terme à M. Etienne X...l'ensemble des parcelles ap

portées par les associés ; que soutenant que les bâtiments indivis...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite d'une donation-partage du 3 janvier 1987, MM. Pierre et Etienne X...sont devenus chacun propriétaire de diverses parcelles de vignes et propriétaires indivis d'un ensemble immobilier comprenant des bâtiments d'exploitation et une cave vinicole, qu'ils ont constitué le même jour le groupement foncier agricole du Combarel (le GFA) auquel ils ont apporté lesdites parcelles, que par acte du 25 avril 1988, le GFA a donné à bail à long terme à M. Etienne X...l'ensemble des parcelles apportées par les associés ; que soutenant que les bâtiments indivis étaient occupés et utilisés exclusivement par son frère Etienne, M. Pierre X...a saisi, sur le fondement de l'article 815-9 du code civil, le président d'un tribunal de grande instance qui, par ordonnance de référé du 6 juillet 2004, a condamné M. Etienne X...au paiement d'une provision au titre de l'indemnité due pour l'occupation privative des biens indivis pendant les cinq dernières années ; qu'un arrêt du 2 juillet 2009 a dit que pour la période 1999 à 2005, MM. Etienne et Pierre X...avaient l'un et l'autre utilisé la cave vinicole, qu'à compter de l'année 2006 M. Etienne X...l'avait seul utilisée et a ordonné la réouverture des débats sur le montant de l'indemnité d'occupation ; qu'un arrêt du 7 décembre 2009 a statué sur la provision allouée au titre de l'occupation privative des biens indivis par M. Etienne X...;

Sur le troisième moyen dirigé contre l'arrêt du 2 juillet 2009, qui est préalable :

Attendu que M. Pierre X...fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que pour la période 1999 à 2005, M. Etienne X...et lui-même ont utilisé l'un et l'autre la cave vinicole, alors que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ; qu'en affirmant que M. Pierre X...avait utilisé la cave à vin indivise avec son frère avant 2005, sans constater qu'il exploitait personnellement des vignes autres que celles qu'il avait apportées au GFA et que celui-ci avait donné à bail à M. Etienne X...qui les avait exploitées jusqu'à la date du partage du 10 avril 2006, la cour a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 815-9 du code civil ;

Mais attendu que la jouissance privative au sens de l'article 815-9 du code civil résulte de l'impossibilité de droit ou de fait pour les co-indivisaires d'user de la chose ; qu'ayant souverainement retenu que l'usage par M. Etienne X...du bien indivis n'excluait pas la même utilisation par son coïndivisaire, l'arrêt se trouve légalement justifié au regard du texte susvisé ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen dirigé contre l'arrêt du 7 décembre 2009, pris en ses deux premières branches, après avis de la deuxième chambre :

Vu les articles 16 et 480 du code de procédure civile ensemble l'article 1351 du code civil ;

Attendu que pour fixer l'indemnité d'occupation privative des biens indivis due par M. Etienne X...à une certaine somme et rejeter la contestation de M. Pierre X...qui faisait valoir que cette indemnité ne pouvait être fixée en se référant à un rapport d'expertise privé et non contradictoire, l'arrêt retient que M. Pierre X...ne peut remettre en cause l'arrêt du 23 avril 2009 qui a jugé que l'expert judiciaire n'avait pas répondu à sa mission en fixant la valeur vénale des biens indivis à la somme de 160 000 euros (valeur 2007), en contradiction avec la mission à lui donnée sur ce point, et a décidé de retenir l'avis de l'expert amiable qui avait fixé cette valeur vénale au 23 juin 2004, soit à une date proche de celle retenue par la cour ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le juge ne peut fonder sa décision sur un moyen de droit qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations et que l'arrêt du 23 avril 2009, qui s'était borné à ordonner la réouverture des débats en invitant les parties à s'expliquer et à conclure au vu des demandes formulées dans les motifs de l'arrêt, n'avait tranché dans son dispositif aucune contestation sur les modalités de fixation de l'indemnité d'occupation due par M. Etienne X..., la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres griefs :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 2 juillet 2009 ;

CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 7 décembre 2009, entre les parties par la cour d'appel de Montpellier ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne M. Etienne X...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Blondel, avocat de M. Pierre X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

Il est fait grief à l'arrêt attaqué de la Cour d'appel de Montpellier du 7 décembre 2009 d'avoir limité la condamnation de Monsieur Etienne X...à payer à Monsieur Pierre X...au titre de l'indemnité pour occupation privative des biens indivis en cause, pour la période de 1999 à 2008, une provision de dix mille trois cents euros ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Etienne X...expose, pour répondre à la demande de la Cour dans l'arrêt du 2 juillet 2009, que pour la période de 1999 à 2008 l'indemnité pour l'occupation des lieux s'élève à la somme globale de 20. 601, 50 euros et que la quote-part à sa charge ne saurait excéder la somme de 10. 300 euros ; que tout en reconnaissance que le calcul de M. Etienne X...n'est pas arithmétiquement contestable, M. Pierre X...fait valoir, d'une part, qu'il n'a eu aucune récolte à loger dans la cave viticole en cause, d'autre part, que la décision ne peut se référer au rapport privé de M. Y...ni judiciaire, ni contradictoire alors que le rapport de l'expert judiciaire Z... répond complètement aux questions posées par la Cour ; … que sur le second point, la cour, dans son arrêt du 23 avril 2009, a jugé que, contrairement à ce que prétend M. Pierre X..., l'expert judiciaire Z... n'a pas répondu à sa mission en fixant la valeur vénale à la somme de 160. 000 euros (valeur 2007) alors que la Cour lui avait demandé de chiffrer la valeur vénale de l'ensemble des bâtiments indivis, et a décidé de retenir l'avis de l'expert Y...qui, pour sa part, avait chiffré cette valeur vénale au 23 juin 2004 (87. 000 euros pour l'ensemble des bâtiments, 36. 000 euros pour les seuls braiments (sic !) d'exploitation hors cave viticole), date se rapprochant de celle retenue par la cour ; que M. Pierre X...ne peut non plus remettre en cause l'arrêt du 23 avril 2009 ;

ALORS, d'une part, QUE le juge doit observer en toutes circonstances la contradiction ; qu'en se fondant sur l'autorité de la chose jugée par son précédent arrêt du 23 avril 2009, sans provoquer les explications des parties sur ce moyen relevé d'office, la Cour viole l'article 16 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, d'autre part, QUE la décision qui se borne à procéder à la réouverture des débats dans son dispositif constitue une simple mesure d'administration judiciaire dépourvue de toute autorité de chose jugée ; qu'en reconnaissant à son arrêt du 23 avril 2009 une autorité de chose jugée et se déterminant sur cette base quand la Cour s'était bornée dans son dispositif à ordonner la réouverture des débats pour que les parties s'expliquent et concluent au vu des demandes formulées par la Cour dans les motifs de son arrêt, la Cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble les articles 480 et 537 du Code de procédure civile ;

ALORS, de dernière part, et en toute hypothèse, QUE dans son arrêt du 25 janvier 2007, la Cour d'appel avait demandé à l'expert de lui « fournir tous éléments permettant de déterminer, notamment en fonction de l'état des biens, leur valeur locative à la date de la demande soit au 16 juin 2004, ainsi que la valeur locative pour les cinq années la précédant » ; qu'en estimant dès lors que la Cour avait demandé à l'expert de chiffrer la valeur vénale de l'ensemble des bâtiments indivis au 16 juin 2004, la Cour dénature son arrêt du 25 janvier 2007 et partant viole l'article 4 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:

Il est fait grief à l'arrêt attaqué de la Cour d'appel de Montpellier du 7 décembre 2009 d'avoir limité la condamnation de Monsieur Etienne X...à payer à Monsieur Pierre X...au titre de l'indemnité pour occupation privative des biens indivis en cause, pour la période de 1999 à 2008, une provision de dix mille trois cents euros ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Etienne X...expose, pour répondre à la demande de la Cour dans l'arrêt du 2 juillet 2009, que pour la période de 1999 à 2008 l'indemnité pour l'occupation des lieux s'élève à la somme globale de 20. 601, 50 euros et que la quote-part à sa charge ne saurait excéder la somme de 10. 300 euros ; que tout en reconnaissance que le calcul de M. Etienne X...n'est pas arithmétiquement contestable, M. Pierre X...fait valoir, d'une part, qu'il n'a eu aucune récolte à loger dans la cave viticole en cause, d'autre part, que la décision ne peut se référer au rapport privé de M. Y...ni judiciaire, ni contradictoire alors que le rapport de l'expert judiciaire Z... répond complètement aux questions posées par la Cour ; que, sur le premier point, la Cour, dans son arrêt du 2 juillet 2009, a jugé que pour la période 1999 à 2005, tant M. Etienne X...que M. X...ont utilisé l'un et l'autre la cave viticole ; que M. Pierre X...ne peut donc soutenir le contraire ;

ALORS QU'en application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation qui interviendra du chef de l'arrêt du 2 juillet 2009 entraînera la cassation de l'arrêt attaqué.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:

Il est fait grief à l'arrêt attaqué de la Cour d'appel de Montpellier du 2 juillet 2009 d'avoir dit que pour la période 1999 à 2005, tant Monsieur Etienne X...que Monsieur Pierre X...ont utilisé l'un et l'autre la cave viticole ;

AUX MOTIFS QUE selon acte de donation-partage du 3 janvier 1987, après qu'il a été constaté que la propriété viticole était impartageable en quatre lots, il a été décidé de faire deux lots égaux comprenant vignes, terres et bois, ainsi que les bâtiments d'exploitation situés commune d'Assignant, mais de laisser ces derniers dans l'indivision par moitié, le lot n° 1 étant attribué à M. Pierre X..., et le lot n° 2 étant attribué à M. Etienne X...; que le 3 janvier 1987 un GFA a été créé entre les deux frères par apport en nature de leurs terres ; que par acte notarié du 25 avril 1988, le GFA a donné à bail, pour une durée de 18 années entières et consécutives commençant le 1er janvier 1988 pour finir à pareille époque de l'année 2006, l'ensemble des terres à M. Etienne X...; que cependant les bâtiments d'exploitation indivis par moitié entre Messieurs Pierre et Etienne X..., comprenant notamment la cave viticole, n'ont pas été inclus dans le bail ; qu'après résiliation du bail et partage des vignes à la date du 10 avril 2006, M ; Pierre X...a apporté sa récolte en 2006 à la cave coopérative de Cessenon, puis par la suite à celle de Saint Chinian ; qu'au vu de ces éléments, il s'en est déduit que jusqu'en 2005, tant M. Etienne X...que M. Pierre X...qui n'établit pas avoir apporté sa récolte à la cave coopérative avant cette date ont donc utilisé l'un et l'autre en tant qu'exploitant viticole la cave vinaire, et que dès lors la valeur locative annuelle des bâtiments d'exploitation doit exclure la cave viticole pour la période de 1999 à 2005 ; qu'au-delà, à compter de l'année 2006, la valeur locative annuelle doit porter sur l'ensemble des bâtiments d'exploitation y compris la cave viticole puisqu'il est établi que celui cette année M. Pierre X...porte sa récolte aux caves coopératives ;

ALORS QUE l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, recevable d'une indemnité ; qu'en affirmant que Monsieur Pierre X...avait utilisé la cave à vin indivise avec son frère avant 2005, sans constater qu'il exploitait personnellement des vignes autres que celles qu'il avait apportées au GFA et que celui-ci avait donné à bail à Monsieur Etienne X...qui les avait exploités jusqu'à la date du partage du 10 avril 2006, la Cour d'appel prive son arrêt de base légale au regard de l'article 815-9 du Code civil, violé.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-15634
Date de la décision : 29/06/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 07 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 jui. 2011, pourvoi n°10-15634


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Blondel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15634
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award