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16/06/2011 | FRANCE | N°10-14819

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 juin 2011, 10-14819


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... est propriétaire d'un immeuble assuré contre le risque incendie auprès de la société Abeille, devenue la société Aviva (l'assureur), et qui a été ravagé par un incendie ; que l'assureur lui ayant refusé sa garantie, il l'a fait assigner pour obtenir l'indemnisation de ses préjudices, d'abord à titre provisionnel, devant le juge des référés d'un tribunal de grande instance, puis au fond ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, tel que repro

duit en annexe :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'évaluer à une cer...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... est propriétaire d'un immeuble assuré contre le risque incendie auprès de la société Abeille, devenue la société Aviva (l'assureur), et qui a été ravagé par un incendie ; que l'assureur lui ayant refusé sa garantie, il l'a fait assigner pour obtenir l'indemnisation de ses préjudices, d'abord à titre provisionnel, devant le juge des référés d'un tribunal de grande instance, puis au fond ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, tel que reproduit en annexe :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'évaluer à une certaine somme l'indemnité d'assurance pour frais de démolition et de déblai de son immeuble ;

Mais attendu que l'arrêt retient que l'expert avait évalué le coût de ces travaux à la somme de 47 840 euros, conformément à un devis du 17 février 2005 ; que si M. X... reproche à l'assureur son refus permanent de verser les sommes évaluées par l'expert, l'examen des pièces du dossier démontre au contraire que des indemnités provisionnelles lui ont été allouées pour faire face aux frais de démolition et de déblai, par arrêts des 14 novembre 2001 et 29 mars 2004 et par ordonnances du juge de la mise en état des 25 novembre 2004 et 7 septembre 2006 ; qu'ainsi, au mois d'octobre 2006, il avait perçu la totalité du coût de ces travaux ; qu'il aurait donc pu les effectuer dans un délai raisonnable avant que leur coût n'atteigne un montant supérieur ;

Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a souverainement déduit que quel que soit le titre auquel il avait perçu des provisions de la part de l'assureur, M. X... pouvait les affecter aux travaux les plus urgents ;

Et attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions que M. X... avait soutenu devant la cour d'appel que les premiers juges avaient dénaturé le contrat en évaluant l'indemnité sur le fondement d'un devis estimatif ;

D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit, comme tel irrecevable, en sa première branche, n'est pas fondé en ses deuxième et troisième branches ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, tel que reproduit en annexe :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'une indemnité correspondant aux mesures conservatoires de son immeuble incendié ;

Mais attendu qu'il ne résulte pas des conclusions de l'assureur devant la cour d'appel qu'il soutenait avoir déjà réglé le coût des mesures conservatoires ;

Et attendu que l'arrêt retient, par des motifs non critiqués par le pourvoi, que la couverture des mesures conservatoires n'est pas prévue par le contrat ;

Que par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, tel que reproduit en annexe :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité d'assurance pour privation de jouissance de son immeuble incendié ;

Mais attendu qu'après avoir relevé qu'il n'était pas contesté que M. X... n'exploitait pas le local professionnel et qu'il ne l'avait pas donné à bail à l'époque du sinistre, qu'il n'occupait pas la partie habitation qui n'était pas non plus donnée en location, qu'ainsi, il ne justifiait pas avoir subi, du fait de l'incendie, une perte de loyers ou une privation de jouissance, l'arrêt retient que compte tenu de l'état de vétusté de l'immeuble tel qu'indiqué par l'expert, qui n'est contredit par aucun élément probant, du fait qu'il était inoccupé depuis plusieurs années à l'époque de l'incendie et de l'absence de projet de réhabilitation antérieur au sinistre, M. X... ne justifie pas davantage d'une perte de chance d'avoir pu obtenir des revenus locatifs ;

Que de ces constatations et énonciations, dont il résultait que M. X... n'avait subi aucun préjudice de jouissance, la cour d'appel a pu déduire, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, hors toute dénaturation, qu'il n'existait pas de préjudice réparable à ce titre ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, tel que reproduit en annexe :

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. X... une certaine somme au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré ;

Mais attendu qu'après avoir relevé qu'en s'abstenant de manière injustifiée de lui verser une indemnité à ce titre, l'assureur a contribué à ce que M. X... soit dans l'impossibilité de financer les travaux de reconstruction de son immeuble au sens de l'article 11. 2, alinéa 5, l'arrêt retient qu'il a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle à son égard, qu'il doit en conséquence être tenu de réparer le préjudice qui résulte du retard d'exécution de son obligation, et qui n'est pas compensé par la seule valeur vénale de l'immeuble au jour du sinistre, même augmentée des frais de démolition ; que compte tenu des éléments d'appréciation de ce préjudice il y a lieu d'accorder à M. X..., à titre d'indemnisation le bénéfice de l'article 11. 2, alinéa 5, du contrat et de lui allouer la valeur de reconstruction du bâtiment au jour du sinistre, vétusté déduite ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, faisant application des clauses du contrat, a souverainement décidé de condamner l'assureur au titre de la reconstruction ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour fixer à une certaine somme l'indemnité due à M. X... par l'assureur pour la reconstruction de l'immeuble, l'arrêt retient que la valeur de reconstruction indiquée par l'expert était celle de l'époque de son rapport, établi en octobre 2006, et qu'il n'est pas contesté que par application de l'indice FNB la valeur de reconstruction au jour du sinistre s'établit à 406 600 euros ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'évaluation figurant dans le corps du rapport d'expertise était datée du 14 avril 2006, que M. X... lui avait demandé de prendre cette date comme référence du calcul de l'indemnité et que l'expert n'avait pas procédé à une réactualisation dans les conclusions de son rapport d'octobre 2006, la cour d'appel a dénaturé ce rapport et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du troisième moyen du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a inclus dans la somme de 309 975, 60 euros celle de 243 960 euros au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré, l'arrêt rendu le 1er février 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne la société Aviva aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Aviva ; la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Blanc et Rousseau, avocat M. X..., demandeur au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir évalué à 47. 840 € l'indemnité d'assurance due par la société Aviva Assurances à Monsieur Bernard X... pour frais de démolition et de déblai de son immeuble ravagé en 1999 par un incendie.

Aux motifs que l'expert avait évalué le coût des frais de démolition et de déblai à 47. 840 € conformément à un devis estimatif du 17 février 2005 ; qu'un arrêt du 14 novembre 2001 avait alloué à Monsieur X... une provision de 22. 062, 42 € et un arrêt du 29 mars 2004 une deuxième provision de 13. 896, 12 € ; qu'au mois d'octobre 2006, Monsieur X... avait ainsi perçu la totalité du coût des travaux de démolition et de déblai de son immeuble ; qu'il avait donc pu effectuer dans un délai raisonnable ces travaux avant qu'ils soient effectués d'office, en 2008, par la commune pour un coût de 124. 338 € ; qu'en s'étant abstenu de faire procéder à ces travaux, Monsieur X... avait laissé l'immeuble se dégrader davantage et qu'il était dès lors responsable de l'augmentation de leur coût.

Alors 1°) qu'en ayant évalué l'indemnité d'assurance pour frais de démolition et de déblai sur le fondement d'un « devis estimatif », quand l'article 1-2 des conditions générales du contrat stipulait que ces frais étaient garantis « à concurrence de leur montant réel », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.

Alors 2°) et en tout état de cause que la cour d'appel, qui a relevé que l'immeuble s'était dégradé entre février 2005, date du devis estimatif, et 2008 date des travaux de démolition effectués d'office par la commune de Marmande et qui a mis à la charge de Monsieur X... la responsabilité de la totalité de cette dégradation, tout en ayant relevé que Monsieur X... n'avait perçu l'indemnité qui aurait pu lui permettre d'effectuer ces travaux qu'au mois d'octobre 2006, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.

Alors 3°) et en tout état de cause qu'en ayant retenu qu'en octobre 2006, Monsieur X... avait perçu de l'assureur la totalité de la somme de 47. 840 € représentant le coût des travaux de démolition, en se fondant notamment sur les provisions de 22. 062, 42 € et 13. 896, 12 € allouées en référé par les arrêts des 14 novembre 2001 et 29 mars 2004, quand ces provisions représentaient non pas le coût des travaux de démolition, mais « le coût des mesures conservatoires destinées à éviter l'effondrement des murs mitoyens », dont elle a par ailleurs jugé, contrairement au juge des référés, qu'il était exclu de la garantie, la cour d'appel a violé le principe de l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la clause.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande d'une indemnité d'assurance de 40. 834, 03 € pour mesures conservatoires de son immeuble incendié.

Aux motifs que les mesures conservatoires n'étaient pas prévues par le contrat et que l'opportunité et l'efficacité de ces mesures n'avaient pas été soumises à l'appréciation de l'expert judiciaire.

Alors 1°) qu'en ayant retenu que les mesures conservatoires n'étaient pas prévues par le contrat, quand la société Aviva assurances, non seulement ne le contestait pas, mais soutenait qu'elle en avait déjà réglé le coût à Monsieur X..., la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.

Alors 2°) qu'il appartient aux juges de se prononcer sur tous éléments de preuve qui leur sont soumis, quand bien même ceux-ci n'auraient pas été soumis à l'expert ; qu'en ayant refusé d'apprécier elle-même l'opportunité et l'efficacité des mesures provisoires que la commune de Marmande avait enjoint de prendre à Monsieur X..., parce que cette opportunité et cette efficacité n'avaient pas été appréciées par l'expert, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé les articles 1353 du code civil et 4 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à 243. 960 € l'indemnité due à Monsieur X... par la société Aviva assurances pour la reconstruction de l'immeuble sinistré.

Aux motifs qu'il apparaissait justifié d'allouer à Monsieur X... la valeur de reconstruction du bâtiment au jour du sinistre, vétusté déduite ; que, la valeur de reconstruction indiquée par l'expert étant celle de l'époque de son rapport, établi en octobre 2006, il n'était pas contesté que, par application de l'indice FNB, la valeur de reconstruction un jour du sinistre s'établissait à 406. 000 €, somme à laquelle il convenait d'appliquer un coefficient de vétusté de 40 % ; qu'ainsi, l'indemnité due par la société Aviva serait fixée à 243. 960 €.

Alors 1°) qu'en ayant retenu que le coût de la reconstruction déterminé par l'expert était celui d'octobre 2006, date du dépôt du rapport d'expertise, alors que le devis établi par l'expert dans son rapport était daté du 14 avril 2006, pour appliquer l'indice FNB d'octobre 2006 et non pas d'avril 2006, en remontant jusqu'à la date du sinistre en 1999, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise et violé le principe de l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause.

Alors 2°) que la cour d'appel qui a entériné l'évaluation à 448. 506 € faite par l'expert du coût de la reconstruction, stipulée hors taxe, sauf à lui appliquer l'indice FNB pour la rapporter au jour du sinistre, ainsi qu'un abattement pour vétusté de 40 %, n'a pas précisé si les sommes retenues de 406. 600 et 243. 960 € étaient hors taxes, ou taxe sur la valeur ajoutée comprise, privant sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande d'indemnité d'assurance pour privation de jouissance de son immeuble incendié.

Aux motifs que le contrat prévoyait une garantie pour la privation de jouissance jusqu'à concurrence d'une année de loyers ou, à défaut, de la valeur locative annuelle des locaux ; que les conditions générales du contrat définissaient la privation de jouissance comme le préjudice résultant de l'impossibilité pour l'assuré d'utiliser temporairement, à la suite d'un sinistre garanti, tout ou partie des locaux dont il avait la jouissance au jour du sinistre ; que Monsieur X... n'exploitait pas la partie professionnelle et n'habitait pas la partie habitation de l'immeuble à l'époque du sinistre ; qu'il ne justifiait donc pas qu'il avait subi, du fait de l'incendie, une privation de jouissance.

Alors que le contrat d'assurance garantissait le préjudice de jouissance défini par les conditions générales comme une impossibilité pour l'assuré d'utiliser temporairement, à la suite d'un sinistre garanti, les locaux dont il avait la jouissance au jour du sinistre ; qu'en ayant exigé, pour que joue cette garantie, que l'assuré occupât ou habitât les lieux au jour du sinistre, la cour d'appel a ajouté à cette stipulation contractuelle une condition qui n'y figure pas et l'a donc dénaturée (violation de l'article 1134 du code civil).
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour la société Aviva assurances, demanderesse au pourvoi incident

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société AVIVA à payer à Monsieur X... la somme de 243. 960 euros au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré,

AUX MOTIFS QUE

" Les conditions générales du contrat d'assurance prévoient dans leur article 1. 2, intitulé " Montants des garanties ", que les garanties s'appliquent pour les bâtiments : " jusqu'à concurrence de leur valeur de reconstruction, vétusté déduite ". L'article 1. 3 relatif aux extensions de garantie, stipule :

" La garantie est étendue à la dépréciation de valeur causée par l'usage aux bâtiments assurés. Dans ce cas et par dérogation au § 11. 2, les bâtiments sont estimés sur la base de leur valeur de reconstruction au prix du neuf au jour du sinistre.

Toutefois :

- le complément d'indemnité qui en résulte ne peut être supérieur au quart de cette valeur de reconstruction à neuf ;

- ce complément n'est dû que si la reconstruction est effectuée, sauf impossibilité absolue, sur l'emplacement du bâtiment sinistré, dans un délai maximal de 2 ans à partir de la date du sinistre et sans qu'il soit apporté de modification importante à la destination du bâtiment ;

- il n'est payé qu'après la reconstruction et sur justification des travaux par la production de mémoires ou de factures ".

L'article 11. 2, intitulé " Estimation après sinistre des biens assurés ", rappelle dans son 3e alinéa que les bâtiments sont estimés d'après leur valeur réelle au prix de reconstruction au jour du sinistre, vétusté déduite, sauf s'il s'agit de menues réparations.

L'alinéa 4 de cette réparation précise cependant :

" Lorsque la valeur de reconstruction-ou le coût des réparations-des bâtiments au jour du sinistre, vétusté déduite, est supérieure à leur valeur vénale, c'est-à-dire à la valeur de vente des bâtiments à l'exclusion de celle du terrain nu, l'indemnité est limitée au montant de cette valeur vénale, augmentée des frais de démolition et de déblai ".

Le 5e alinéa de l'article 11. 2 ajoute : " Toutefois, lorsque la reconstruction est effectuée, les bâtiments sont indemnisés sur la base de leur valeur de reconstruction, vétusté déduite,. Cette reconstruction doit intervenir, sauf impossibilité absolue, dans un délai de deux ans à partir de la date du sinistre … Dans ce cas, le montant de la différence entre l'indemnité en valeur de reconstruction et l'indemnité en valeur vénale n'est payé qu'après reconstruction justifiée par la présentation de mémoires ou factures ".

En l'espèce, l'expert Monsieur Z... a estimé la valeur vénale de l'immeuble, en septembre 1999, à la somme de 45. 000 euros et le coût des travaux de reconstruction à 536. 413, 93 euros, en proposant un taux de vétusté de 40 % par rapport à l'état général de l'immeuble avant le sinistre.

La valeur de reconstruction vétusté déduite s'établit ainsi à la somme de 321. 848, 36 euros qui est supérieure à la valeur vénale de l'immeuble. L'application de l'article 11. 2 alinéa 4 du contrat limite donc l'indemnité due par l'assureur à la valeur vénale augmentée des frais de démolition et de déblai.

Bernard X... soutient pourtant que la compagnie AVIVA, compte tenu de sa responsabilité contractuelle, n'est pas fondée à se prévaloir du défaut de reconstruction dans le délai de deux ans ni de la fixation de l'indemnité au jour du sinistre, dès lors qu'en ne respectant pas ses engagements contractuels, elle ne lui a pas permis de financer la reconstruction.

Si la compagnie d'assurance n'était pas tenue de financer les travaux de reconstruction, il est cependant certain qu'elle devait indemniser l'assuré dans un délai raisonnable après le sinistre survenu le 29 septembre 1999. De même, si le Tribunal a considéré à juste titre, compte tenu de l'origine volontaire de l'incendie, que la résistance de la compagnie AVIVA n'était pas abusive jusqu'à la date de la décision de non-lieu rendue en décembre 2003, il est incontestable que postérieurement à cette décision, rien ne pouvait la dispenser d'exécuter ses obligations conformément aux stipulations du contrat.

Comme cela a été rappelé plus haut, la compagnie d'assurance a versé des provisions à Bernard X... pour un montant total de 47. 840 euros correspondant aux frais de démolition et de déblai de l'immeuble. En revanche, jusqu'au jugement entrepris du 25 avril 2008, elle ne lui a réglé aucune autre somme, alors qu'elle était tenue d'indemniser la destruction du bâtiment et que par une application stricte du contrat, elle était redevable, au minimum, du montant de la valeur vénale de l'immeuble.

En s'abstenant de manière injustifiée de lui verser une indemnité à ce titre, la compagnie AVIVA a contribué à ce que Bernard X... soit dans l'impossibilité de financer les travaux de reconstruction de son immeuble au sens de l'article 11. 2 alinéa 5 et elle a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle à son égard. Elle doit en conséquence être tenue de réparer le préjudice qui résulte de son retard d'exécution de son obligation et qui n'est pas compensé par la seule valeur vénale de l'immeuble au jour du sinistre, même augmentée des frais de démolition.

Toutefois, les demandes présentées à ce titre par Bernard X... excèdent largement la mesure du préjudice imputable à la compagnie AVIVA.

Compte tenu des éléments d'appréciation de ce préjudice, il apparaît justifié d'accorder à Bernard X..., à titre d'indemnisation, le bénéfice de l'article 11. 2 alinéa 5 du contrat (qui s'applique normalement en-dehors d'un cas de responsabilité de l'assureur lorsque la reconstruction est effectuée dans le délai de deux ans à compter du sinistre) et de lui allouer ainsi la valeur de reconstruction du bâtiment au jour du sinistre, vétusté déduite.

La valeur de reconstruction indiquée par l'expert étant celle de l'époque de son rapport établi en octobre 2006, il n'est pas contesté que par application de l'indice FNB la valeur de reconstruction au jour du sinistre s'établit à 406. 600 euros.

Par ailleurs, le taux de vétusté de 40 % proposé par l'expert apparaissant justifié par ses constatations et ses indications sur l'état de l'immeuble, il convient de le retenir. En conséquence, l'indemnité due par la compagnie AVIVA sera fixée à la somme de 243. 960 euros et Bernard X... sera débouté du surplus de sa demande ",

ALORS QUE le contrat d'assurance prévoyait en son article 11. 2, alinéa 4, que " lorsque la valeur de reconstruction (…) des bâtiments (…) est supérieure à leur valeur vénale, (…) l'indemnité est limitée au montant de cette valeur vénale, augmentée des frais de démolition et de déblai ", et en son article 11. 2, alinéa 5, que " Toutefois, lorsque la reconstruction est effectuée, les bâtiments sont indemnisés sur la base de leur valeur de reconstruction, vétusté déduite. Cette reconstruction doit intervenir, sauf impossibilité absolue, dans un délai de deux ans à partir de la date du sinistre … Dans ce cas, le montant de la différence entre l'indemnité en valeur de reconstruction et l'indemnité en valeur vénale n'est payé qu'après reconstruction justifiée par la présentation de mémoires ou factures ", de sorte qu'en condamnant la société AVIVA à payer une indemnité de 243. 960 euros à Monsieur X... au titre de la reconstruction de l'immeuble sinistré, au motif inopérant qu'en s'abstenant de manière injustifiée de lui verser une indemnité, elle a contribué à ce que Monsieur X... soit dans l'impossibilité de financer les travaux de reconstruction de son immeuble au sens de l'article 11. 2 alinéa 5, engageant ainsi sa responsabilité contractuelle, et qu'elle devait en conséquence être tenue de réparer le préjudice qui résultait de son retard d'exécution de son obligation et qui n'était pas compensé par la seule valeur vénale de l'immeuble au jour du sinistre, même augmentée des frais de démolition, en accordant, à titre d'indemnisation, le bénéfice de l'article 11. 2, alinéa 5, appliquant ainsi cette disposition contractuelle dans une hypothèse qu'elle ne prévoyait pas, à savoir l'indemnisation du retard de paiement par la société AVIVA, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-14819
Date de la décision : 16/06/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 01 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 jui. 2011, pourvoi n°10-14819


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.14819
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