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08/06/2011 | FRANCE | N°10-15198

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juin 2011, 10-15198


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que Mme X... et quinze autres salariés de la société ITM Logistique international, établissement Base de Mauchamps, engagés entre le 1er août 1983 et le 16 juillet 2001, ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement d'un rappel de salaire et de dommages-intérêts sur le fondement du principe "à travail égal, salaire égal" ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de les débouter de leurs de

mandes, alors, selon le moyen ;
1°/ que tout employeur doit assurer l'égalité ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que Mme X... et quinze autres salariés de la société ITM Logistique international, établissement Base de Mauchamps, engagés entre le 1er août 1983 et le 16 juillet 2001, ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement d'un rappel de salaire et de dommages-intérêts sur le fondement du principe "à travail égal, salaire égal" ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen ;
1°/ que tout employeur doit assurer l'égalité d'évolution de carrière ou de traitement et de salaire entre tous ses salariés placés dans une situation identique ; que dans leurs conclusions d'appel, les salariés concernés avaient régulièrement fait valoir qu'avant 2002, une seule grille de salaire était applicable et ce depuis le 29 avril 1993, et non pas trois comme le soutenait la société ITM Logistique international, en raison de la dénonciation par cette dernière des deux accords collectifs des 1er février 1984 et 24 février 1988 concernant l'instauration des deux grilles de salaire litigieuses ; qu'en se bornant à faire état de ces grilles de salaire pour conclure à l'absence de discrimination salariale compte tenu de ce critère objectif que constituerait l'ancienneté des intéressés dans l'entreprise au regard de leur date d'embauche, sans rechercher, ainsi qu'il le lui était ainsi demandé, si ces grilles étaient appliquées, et ce valablement, dans l'entreprise, compte tenu de la dénonciation des accords collectifs les concernant, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 3221-2 du code du travail et du principe d'égalité de traitement ;
2°/ qu'au regard de l'application du principe « à travail égal, salaire égal », la seule circonstance que les salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif en application duquel des grilles de salaire auraient été créées ne saurait suffire à justifier des différences de traitement entre eux, pour autant que cet accord collectif n'a pas pour objet de compenser un préjudice subi par les salariés présents dans l'entreprise lors de son entrée en vigueur ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que les différences de traitement seraient justifiées par l'ancienneté dans l'entreprise déterminée par les dates d'embauche des salariés concernés par application de grilles de salaire édictées en application d'accords collectifs, sans constater que ces accords collectifs auraient eu pour objet de compenser un préjudice subi par les salariés présents dans l'entreprise lors de leur prise d'effet respective, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard du principe susvisé et de l'article L. 3221-2 du code du travail ;
Mais attendu que l'ancienneté, à condition qu'elle ne soit pas prise en compte dans une prime spéciale, peut justifier une différence de rémunération ;
Et attendu qu'après avoir constaté, par motifs propres et adoptés qu'à la suite de la dénonciation, en février 1993, des accords ayant institué la 2e et la 3e grille de rémunération lesquelles fixaient les salaires en fonction de la classification et de la date d'embauche, et des usages en vigueur dans l'entreprise relatifs au paiement de diverses primes et notamment d'une prime d'ancienneté, l'employeur avait continué, en l'absence d'accords de substitution, d'appliquer volontairement les grilles de rémunération prévues par les accords dénoncés et pris en compte dans la rémunération de base l'équivalent de la prime d'ancienneté, la cour d'appel a retenu, sans avoir à procéder à une recherche que ces constatations rendaient inopérantes, que les différences de salaires dénoncées résultaient de la seule prise en compte de l'ancienneté des salariés et étaient donc justifiées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
Attendu que pour débouter Mmes X... et Y... de leurs demandes, l'arrêt énonce qu'il apparaît que les différences de salaires ne trouvent leur cause que dans la prise en compte de l'ancienneté des salariés et que dès lors l'employeur n'a pas méconnu son obligation d'égalité de rémunération entre salariés effectuant le même travail ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mmes X... et Y... qui faisaient valoir qu'elles avaient été victimes d'une inégalité de traitement dans le déroulement de leur carrière en invoquant l'existence de grilles de rémunération distinctes pour les hommes et pour les femmes, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mmes X... et Y... de leurs demandes en paiement de rappels de salaires, congés payés afférents et de dommages-intérêts au titre de l'inégalité de traitement en à raison de leur sexe, l'arrêt rendu le 3 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société ITM entreprises aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société la société ITM entreprise à payer à Mmes X... et Y... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit de Me Brouchot, avocat aux conseils pour Mme X... et autres
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté des salariés de leurs demandes de rappels de salaires, de congés payés afférents et d'indemnités pour préjudice financier, fondées sur une discrimination salariale, dirigées à l'encontre de leur employeur, la société ITM Logistique International ;
AUX MOTIFS QUE des éléments versés aux débats, il ressort qu'avant avril 2002, trois grilles salariales étaient en vigueur dans l'entreprise, s'agissant de la catégorie conventionnelle ouvriers-employés, pour tenir compte des dates de recrutement des salariés concernés (avant 1984, entre 1984 et 1988, après le 25 février 1988), qu'après avril 2002, le nombre des grilles salariales est passé à deux (ouvriers et employés engagés avant ou après 1984) et qu'à compter d'avril 2003, ce nombre est demeuré inchangé avec toutefois la disparition du critère lié à l'époque du recrutement (avant ou après 1984) puisque désormais les salariés de la catégorie conventionnelle concernée bénéficiaient des mêmes conditions de rémunération quelle que soit leur date d'embauche ; que le principe général « à travail égal, salaire égal » invoqué par les appelants, impose à l'employeur d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés, pour autant qu'ils soient placés dans une situation identique ; que dès lors, des salariés, qui ne sont pas placés dans une situation identique, peuvent percevoir des rémunérations différentes ; qu'il s'en déduit que ne contrevient pas au principe « à travail égal, salaire égal » l'employeur qui peut justifier par des éléments objectifs la différence des rémunérations allouées aux salariés effectuant un même travail, ou un travail de valeur égale ; que la société intimée établit l'application des grilles salariales différente en fonction de la date d'embauche des salariés, soit leur ancienneté dans l'entreprise ; que le premier juge a ainsi considéré avec pertinence que les différences salariales appliquées au sein de l'entreprise ne trouvent leur cause que dans l'ancienneté des intéressés constituant en soi un critère objectif, de sorte que l'employeur n'a pas méconnu son obligation d'égalité de rémunération entre salariés effectuant le même travail, ou un travail de valeur égale ;
ALORS, D'UNE PART, QUE tout employeur doit assurer l'égalité d'évolution de carrière ou de traitement et de salaire entre tous ses salariés placés dans une situation identique ; que dans leurs conclusions d'appel, les salariés concernés avaient régulièrement fait valoir qu'avant 2002, une seule grille de salaire était applicable et ce depuis le 29 avril 1993, et non pas trois comme le soutenait la société ITM Logistique International, en raison de la dénonciation par cette dernière des deux accords collectifs des 1er février 1984 et 24 février 1988 concernant l'instauration des deux grilles de salaire litigieuses ; qu'en se bornant à faire état de ces grilles de salaire pour conclure à l'absence de discrimination salariale compte tenu de ce critère objectif que constituerait l'ancienneté des intéressés dans l'entreprise au regard de leur date d'embauche, sans rechercher, ainsi qu'il le lui était ainsi demandé, si ces grilles étaient appliquées, et ce valablement, dans XP/MDL 17.951 l'entreprise, compte tenu de la dénonciation des accords collectifs les concernant, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 3221-2 (ancien article L. 140-2) du Code du travail et du principe d'égalité de traitement ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'au regard de l'application du principe « à travail égal, salaire égal », la seule circonstance que les salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif en application duquel des grilles de salaire auraient été créées ne saurait suffire à justifier des différences de traitement entre eux, pour autant que cet accord collectif n'a pas pour objet de compenser un préjudice subi par les salariés présents dans l'entreprise lors de son entrée en vigueur ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que les différences de traitement seraient justifiées par l'ancienneté dans l'entreprise déterminée par les dates d'embauche des salariés concernés par application de grilles de salaire édictées en application d'accords collectifs, sans constater que ces accords collectifs auraient eu pour objet de compenser un préjudice subi par les salariés présents dans l'entreprise lors de leur prise d'effet respective, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard du principe susvisé et de l'article L. 3221-2 (ancien article L. 140-2) du Code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE dans leurs écritures d'appel, Mmes X... et Y... s'étaient prévalues d'une discrimination dans leur évolution de carrière ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pertinent, la Cour d'appel n'a pas satisfait son obligation de motivation de son arrêt et violé les articles 455 du Code de procédure civile et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-15198
Date de la décision : 08/06/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2011, pourvoi n°10-15198


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15198
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