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07/06/2011 | FRANCE | N°10-23515

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 juin 2011, 10-23515


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2005), que la société Dorel France (la société Dorel), est titulaire du brevet français n° 02 14832 déposé le 26 novembre 2002, publié le 24 octobre 2003 et délivré le 29 octobre 2004, portant sur une voiture d'enfant à éléments coulissants sans espaces entre eux, et châssis correspondant et du modèle français de poussette pour enfants n° 03 4542, déposé le 19 septembre 2003 et publié le 5 décembre 2003 ; qu'après avoir fait procéder le 12 juille

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2005), que la société Dorel France (la société Dorel), est titulaire du brevet français n° 02 14832 déposé le 26 novembre 2002, publié le 24 octobre 2003 et délivré le 29 octobre 2004, portant sur une voiture d'enfant à éléments coulissants sans espaces entre eux, et châssis correspondant et du modèle français de poussette pour enfants n° 03 4542, déposé le 19 septembre 2003 et publié le 5 décembre 2003 ; qu'après avoir fait procéder le 12 juillet 2006, puis le 4 septembre 2006, à des saisies-contrefaçons de modèles de poussettes référencés Icon, Vector et Rversus fabriqués et offerts à la vente par la société Bebecar Utilidades Para Crianca (la société Bebecar UPC), de droit portugais, et la société Bebecar France, la société Dorel les a assignées, par actes des 2 juillet et 6 août 2006, en contrefaçon des revendications 1, 2, 14, 22, 25 et 27 de son brevet n° 02 14 832, de son modèle n° 03 4542, et de ses droits d'auteur sur la poussette Loola, concurrence déloyale et parasitisme ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés Bebecar UPC et Bebecar France font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes de nullité des requêtes et des ordonnances de saisie-contrefaçon des 11 juillet et 4 septembre 2006, des procès-verbaux de saisie-contrefaçon des 12 juillet et 4 septembre 2006, de la signification des ordonnances autorisant les saisies-contrefaçons et de la sommation en date du 17 juillet 2006, alors, selon le moyen, que le défaut de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice constitue une irrégularité de fond qui entache l'acte de nullité sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief ; qu'en décidant que les actes critiqués, délivrés à la requête de la société Dorel, société anonyme à conseil d'administration, «agissant poursuites et diligences de son président en exercice», étaient affectés d'une simple nullité de forme qui ne pouvait être prononcée en l'absence d'un grief, quand ces actes relevaient exclusivement du pouvoir du directeur général de la société et que le défaut de pouvoir du président du conseil d'administration, ces deux fonctions fussent-elles réunies sur la tête d'une même personne physique, entachaient les actes critiqués d'une irrégularité de fond, de sorte que les sociétés Bebecar n'avaient pas à faire la preuve d'un grief, la cour d'appel a violé les articles 114, 117 et 119 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 225-56 et L. 225-51 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'en application des statuts de la société Dorel, le président du conseil d'administration cumulait ses fonctions avec celles de directeur général, la cour d'appel en a exactement déduit que le défaut de mention de ces dernières fonctions ne constituait qu'une irrégularité de forme ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les sociétés Bebecar UPC et Bebecar France font grief à l'arrêt de valider le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 4 septembre 2006, alors, selon le moyen, que dans leurs dernières conclusions signifiées le 22 janvier 2010, elles faisaient valoir que la société Dorel ne s'était pas pourvue dans le délai de quinzaine, contrairement aux dispositions de l'article L. 615-5 in fine du code de la propriété intellectuelle, ayant attendu six mois pour invoquer devant le tribunal cette saisie du 4 septembre 2006 et que la saisie du 4 septembre 2006 était nulle, à tout le moins en ce qui concerne l'exemplaire des tarifs Bebecar et de la publicité Rversus réellement saisie ; qu'en énonçant que les sociétés Bebecar abandonnaient en cause d'appel le moyen tiré de la nullité de la saisie-contrefaçon du 4 septembre 2006 faute de saisine du tribunal dans les quinze jours suivant la saisie, la cour d'appel a méconnu les termes du litige tels qu'ils étaient fixés par ces conclusions, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que la société Dorel demandait de déclarer valables, en leur intégralité, les saisies-contrefaçons respectivement réalisées le 12 juillet 2006 et le 4 septembre 2006 et que la dernière est postérieure aux assignations des sociétés Bebecar des 27 juillet et 6 août 2006, la cour d'appel a, à bon droit, validé le procès-verbal du 4 septembre 2006, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen ; que ce dernier n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :
Attendu que les sociétés Bebecar UPC et Bebecar France font grief à l'arrêt de décider qu'elles avaient commis des actes de contrefaçon des revendications n° 1, 2, 14, 22, 25 et 27 du brevet n° 02 14 832 en important, détenant et offrant à la vente les poussettes Vector, Icon, Rversus et Rversus + en France, alors, selon le moyen, qu'après avoir constaté que la revendication 1 du brevet avait pour objet un châssis mettant un oeuvre un assemblage de deux pièces coulissant l'une par rapport à l'autre sans espace entre elles et que, dans les poussettes arguées de contrefaçon, le brancard et le poussoir avant coulissant l'un par rapport à l'autre étaient séparés par un espace, la cour d'appel devait en déduire que la caractéristique revendiquée, tenant à l'absence d'espace entre les pièces coulissant l'une par rapport à l'autre, n'était pas reproduite dans les objets critiqués, lesquels n'étaient donc pas la contrefaçon du brevet ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel, qui s'est fondée sur la considération inopérante que l'espace séparant le brancard avant et le poussoir avait un caractère «fonctionnel» et était «de faible amplitude» et que l'action du coulissement impliquait nécessairement une coopération des deux éléments sans espace entre eux, a méconnu la portée juridique de ses propres constatations et violé par fausse application l'article L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu' il résulte des énonciations des procès-verbaux de saisie-contrefaçon, des châssis saisis et des catalogues Bebecar 2006, que les poussettes incriminées comprennent, à l'instar du dispositif revendiqué par le brevet, un châssis pliant composé d'un brancard avant portant au moins une roue avant, d'un brancard arrière portant au moins une roue arrière, d'un poussoir coopérant avec une poignée de guidage, et mettant en oeuvre un assemblage de deux pièces, en l'espèce un poussoir et un brancard avant, coulissant l'une par rapport à l'autre sans espace entre elles, l'une des deux pièces, en l'espèce, le brancard avant présentant au moins un rail et l'autre, en l'espèce, le poussoir présentant un coulisseau prévu pour coulisser dans ledit rail ; qu'il retient encore qu'il est sans conséquence qu'un espace fonctionnel de faible amplitude sépare le brancard avant et le poussoir avant coulissant l'un par rapport à l'autre dès lors que la structure même de l'assemblage rail coulisseau implique nécessairement que ces deux éléments coopèrent sans espace entre eux, le coulisseau étant prévu pour coulisser dans le rail ; que de ces constatations souveraines, la cour d'appel a pu déduire que les poussettes litigieuses réalisaient la contrefaçon de la revendication 1 du brevet et partant, de l'ensemble des revendications opposées, dépendantes de cette dernière; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :
Attendu que les sociétés Bebecar UPC et Bebecar France font grief à l'arrêt de les condamner à payer à la société Dorel une somme de 117 653,94 euros au titre des dépenses engagées pour faire valoir ses droits, alors, selon le moyen :
1°/ que l'indemnité allouée doit correspondre uniquement au préjudice directement imputable à la contrefaçon ; que seules ayant été accueillies les demandes fondées par la société Dorel sur son brevet, les demandes fondées sur le modèle déposé et les droits d'auteur ayant été rejetées et la société Dorel ayant acquiescé au jugement ayant rejeté l'action en concurrence déloyale, le préjudice subi par cette société en raison des dépenses qu'elle avait engagées pour faire valoir ses droits ne pouvait être réparé qu'à concurrence des seules dépenses engagées pour la défense des droits afférents au brevet opposé ; qu'en allouant à la société Dorel une indemnité correspondant aux dépenses engagées pour faire valoir l'ensemble de ses droits, y compris ceux pour lesquels elle n'avait pas obtenu gain de cause, la cour d'appel, qui a réparé un préjudice sans lien avec la contrefaçon retenue, a violé les articles 1382 du code civil et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que l'indemnité allouée doit réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour la victime ni perte ni profit ; que la cour d'appel, qui a alloué à la société Dorel une somme de 45 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, cette condamnation correspondant aux sommes engagées par la société Dorel pour la défense de ses intérêts, ne pouvait lui allouer une somme de 117 653,94 euros correspondant aux dépenses qu'elle avait dû engager pour faire valoir ses droits, sans indemniser deux fois le même préjudice, en violation des articles 1382 du code civil et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que les sociétés Bebecar UBC et Bebecar France n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que les frais engagés par la société Dorel pour faire valoir ses droits étaient en partie sans lien avec la contrefaçon de brevet ou qu'ils faisaient double emploi avec l'indemnité par ailleurs réclamée par la société Dorel au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant, irrecevable ;
Et sur les cinquième et sixième moyens, réunis :
Attendu que les sociétés Bebecar UPC et Bebecar France font grief à l'arrêt de les condamner à payer à la société Dorel une somme de 30 000 euros au titre du préjudice commercial et une somme de 30 000 euros au titre de l'atteinte à son image, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en l'absence d'exploitation contrefaisante, le titulaire du brevet ne peut prétendre à la réparation d'aucun préjudice tenant à la perte des bénéfices qu'il aurait réalisés ; qu'après avoir constaté, en se fondant sur le rapport d'expertise, que les poussettes contrefaisantes n'avaient fait l'objet d'aucune vente par les sociétés Bebecar qui avaient procédé à l'annulation des commandes passées et dont les produits contrefaisants avaient été retirés du marché, la cour d'appel ne pouvait considérer que la société Dorel pouvait prétendre à la réparation d'un préjudice commercial en raison des ventes manquées sans violer les articles 1382 du code civil et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que l'indemnité allouée doit correspondre uniquement au préjudice directement imputable à la contrefaçon ; qu'après avoir rejeté l'action de la société Dorel France en contrefaçon de son modèle de poussette Loola, la cour d'appel ne pouvait tenir compte, dans la détermination du montant de l'indemnité allouée à cette société en réparation de l'atteinte à son image, des frais de communication publicitaires qu'elle avait engagés en ce qui concerne le pliage innovant de la poussette Loola sans violer les articles 1382 du code civil et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que, sous couvert d'une violation de la loi, le pourvoi ne tend qu'à remettre en question l'appréciation souveraine par la cour d'appel de l'existence et du montant du préjudice ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Bebecar UBC et Bebecar France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Dorel la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour la société Bebecar-Utilidades Para Crianca et la société Bebecar France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR débouté les sociétés BEBECAR UTILIDADES PARA CRIANCA et BEBECAR FRANCE de leurs demandes de nullité des requêtes et des ordonnances de saisie-contrefaçon des 11 juillet et 4 septembre 2006, des procès-verbaux de saisie-contrefaçon des 12 juillet et 4 septembre 2006, de la signification des ordonnances autorisant les saisies contrefaçons et de la sommation en date du 17 juillet 2006 d'avoir à assister ;
AUX MOTIFS QUE les sociétés BEBECAR soutiennent que les requêtes en saisie-contrefaçon soumises au président du tribunal de grande instance de Paris le 12 juillet 2006 et le 4 septembre 2006 sont entachées d'une irrégularité de fond affectant, au sens des dispositions de l'article 117 du Code de procédure civile, la validité de l'acte pour défaut de pouvoir de la personne agissant pour la société DOREL, que subséquemment, sont nuls sans régularisation possible, les ordonnances présidentielles rendues au visa de ces requêtes, les actes portant signification des ordonnances, les procès-verbaux de saisie-contrefaçon respectivement établis le 12 juillet 2006 et le 4 septembre 2006, la sommation d'avoir à assister au dépôt au greffe du châssis de la poussette RVERSUS saisi au cours des opérations du 12 juillet précédent ; mais que c'est par de justes motifs, que la cour adopte, que les premiers juges, ayant exactement observé que les requêtes contestées ont certes été présentées par la société DOREL FRANCE, société anonyme, «agissant poursuites et diligences de son président en exercice» et pertinemment relevé qu'en vertu des statuts de la société, le président du conseil d'administration, en la personne de Jean-Claude Z..., cumule ses fonctions avec celles de directeur général, lequel est habilité, selon la loi, à représenter la société dans ses rapports avec les tiers, ont retenu que l'omission de cette indication ne constitue qu'un vice de forme dont les sociétés BEBECAR, dès lors qu'elles n'allèguent aucun grief, ne sont pas fondées à se prévaloir pour exciper de la nullité de l'acte ; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a écarté les demandes de nullité visant l'ensemble des opérations de saisie contrefaçon pour défaut de pouvoir (arrêt attaqué p. 4, al. 1 à 3) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE force est de constater que les requêtes déposées par la société DOREL FRANCE et les actes de signification de l'ordonnance sont faits à la requête de la société DOREL FRANCE « agissant poursuites et diligences de son président en exercice» ; que les sociétés BEBECAR ne contestent pas que Monsieur Jean-Claude Z... cumule les fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général comme les textes légaux le permettent (art. L.225-51-1 et suivants du Code de commerce) ; que cependant les mentions portées sur les requêtes et les actes de signification indiquent que la société DOREL est représentée par son président du conseil d'administration alors qu'il aurait fallu indiquer qu'elle était représentée par le président du conseil d'administration qui exerce également les fonctions de directeur général ; que cette omission constitue une erreur puisque, si la représentation de la société DOREL FRANCE est conforme aux prescriptions légales, encore faut-il, dans les actes qui sont destinés à des tiers, indiquer les mentions qui permettent à ces tiers de vérifier la régularité de cette représentation ; que pour autant cette omission ne constitue qu'une nullité de forme telle que prévue à l'article 114 du Code de Procédure civile ; qu'aucun grief n'est démontré ni même allégué par les sociétés BEBECAR et ce d'autant que le président du conseil d'administration de la société DOREL FRANCE exerce les fonctions de directeur général et avait donc tous pouvoirs pour représenter la société dans une procédure judiciaire (jugement p. 7, al. 5 à 7 et p. 8 al. 1 à 3) ;
ALORS QUE le défaut de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice constitue une irrégularité de fond qui entache l'acte de nullité sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief ; qu'en décidant que les actes critiqués, délivrés à la requête de la société DOREL FRANCE, société anonyme à conseil d'administration, « agissant poursuites et diligences de son président en exercice », étaient affectés d'une simple nullité de forme qui ne pouvait être prononcée en l'absence d'un grief, quand ces actes relevaient exclusivement du pouvoir du directeur général de la société et que le défaut de pouvoir du président du conseil d'administration, ces deux fonctions fussent-elles réunies sur la tête d'une même personne physique, entachaient les actes critiqués d'une irrégularité de fond, de sorte que les sociétés BEBECAR n'avaient pas à faire la preuve d'un grief, la cour d'appel a violé les articles 114, 117 et 119 du Code de Procédure civile, ensemble les articles L.225-56 et L.225-51 du Code de commerce.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR validé le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 4 septembre 2006 ;
AUX MOTIFS QUE les sociétés BEBECAR abandonnent en cause d'appel le moyen tiré de la nullité de la saisie-contrefaçon du 12 juillet 2006 à raison de la saisie de trois catalogues au lieu des deux autorisés par l'ordonnance, ainsi que le moyen tendant à la nullité de la saisie-contrefaçon du 4 septembre 2006, faute de saisine du tribunal (en l'espèce par conclusions additionnelles, l'instance étant d'ores et déjà introduite) dans les quinze jours suivant la saisie (arrêt attaqué p. 4, al. 4) ;
ALORS QUE dans leurs dernières conclusions signifiées le 22 janvier 2010 (p. 10, al. 2 et 3), les sociétés BEBECAR faisaient valoir que « la société DOREL ne s'était pas pourvue dans le délai de quinzaine, contrairement aux dispositions de l'article L.615-5 in fine du Code de la Propriété Intellectuelle », « DOREL ayant attendu six mois pour invoquer devant le tribunal cette saisie du 4 septembre 2006 » et que la saisie du 4 septembre 2006 était nulle, à tout le moins en ce qui concerne l'exemplaire des tarifs BEBECAR et de la publicité RVERSUS réellement saisie » ; qu'en énonçant que les sociétés BEBECAR abandonnaient en cause d'appel le moyen tiré de la nullité de la saisie contrefaçon du 4 septembre 2006 faute de saisine du tribunal dans les quinze jours suivant la saisie, la cour d'appel a méconnu les termes du litige tels qu'ils étaient fixés par ces conclusions, en violation de l'article 4 du Code de Procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir d'AVOIR décidé que les sociétés BEBECAR UTILIDADES PARA CRIANCA et BEBECAR FRANCE avaient commis des actes de contrefaçon des revendications n° 1, 2, 14, 22, 25 et 27 du brevet n° 02 14 832 en important, détenant et offrant à la vente les poussettes VECTOR, ICON, RVERSUS et RVERSUS en France ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des énonciations des procès-verbaux de saisie-contrefaçon, des châssis saisis et des catalogues BEBECAR 2006 que les poussettes incriminées comprennent à l'instar du dispositif revendiqué par le brevet un châssis pliant composé d'un brancard avant portant au moins une roue avant, d'un brancard arrière portant au moins une roue arrière, d'un poussoir coopérant avec une poignée de guidage, et mettant en oeuvre un assemblage de deux pièces (en l'espèce un poussoir et un brancard avant) coulissant l'une par rapport à l'autre sans espace entre elles, l'une des deux pièces (en l'espèce le brancard avant) présentant au moins un rail et l'autre (en l'espèce le poussoir) présentant un coulisseau prévu pour coulisser dans ledit rail ; que les sociétés BEBECAR tentent vainement de contester la contrefaçon en faisant valoir que leur poussette laisserait apparaître un espace entre le brancard avant et le poussoir ; qu'il est en effet sans conséquence pour l'appréciation de la contrefaçon qu'un espace fonctionnel de cette amplitude sépare le brancard avant et le poussoir avant coulissant l'un par rapport à l'autre dès lors que la structure même de l'assemblage rail/coulisseau implique nécessairement que ces deux éléments coopèrent sans espace entre eux, le coulisseau étant prévu pour coulisser dans le rail ; qu'il s'infère de ces éléments que les poussettes litigieuses réalisent la contrefaçon de la revendication 1 du brevet et partant de l'ensemble des revendications opposées, dépendantes de cette dernière (arrêt attaqué pp. 7-8) ;
ALORS QU'après avoir constaté que la revendication 1 du brevet avait pour objet un châssis mettant un oeuvre un assemblage de deux pièces coulissant l'une par rapport à l'autre sans espace entre elles et que, dans les poussettes arguées de contrefaçon, le brancard et le poussoir avant coulissant l'un par rapport à l'autre étaient séparés par un espace, la cour d'appel devait en déduire que la caractéristique revendiquée, tenant à l'absence d'espace entre les pièces coulissant l'une par rapport à l'autre, n'était pas reproduite dans les objets critiqués, lesquels n'étaient donc pas la contrefaçon du brevet ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel, qui s'est fondée sur la considération inopérante que l'espace séparant le brancard avant et le poussoir avait un caractère « fonctionnel » et était « de faible amplitude » et que l'action du coulissement impliquait nécessairement une coopération des deux éléments sans espace entre eux, a méconnu la portée juridique de ses propres constatations et violé par fausse application l'article L.615-1 du Code de la Propriété Intellectuelle.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les sociétés BEBECAR UTILIDADES PARA CRIANCA et BEBECAR FRANCE à payer à la société DOREL FRANCE une somme de 117.653,94 € au titre des dépenses engagées pour faire valoir ses droits ;
AUX MOTIFS QUE l'expert a conclu à l'absence de préjudice commercial pour la société DOREL mais a relevé que celle-ci a dû engager pour faire valoir ses droits des dépenses notamment au titre des traductions de documents et d'actes, des consultations auprès de conseils en propriété industrielle, pour un montant de 117.653,94 € dont le détail est parfaitement justifié au rapport ; que la société DOREL est fondée à obtenir un dédommagement de ce chef de préjudice à due concurrence (arrêt attaqué, p. 10 al. 2 et 3) ;
ALORS, d'une part, QUE l'indemnité allouée doit correspondre uniquement au préjudice directement imputable à la contrefaçon ; que seules ayant été accueillies les demandes fondées par la société DOREL FRANCE sur son brevet, les demandes fondées sur le modèle déposé et les droits d'auteur ayant été rejetées et la société DOREL FRANCE ayant acquiescé au jugement ayant rejeté l'action en concurrence déloyale, le préjudice subi par cette société en raison des dépenses qu'elle avait engagées pour faire valoir ses droits ne pouvait être réparé qu'à concurrence des seules dépenses engagées pour la défense des droits afférents au brevet opposé ; qu'en allouant à la société DOREL FRANCE une indemnité correspondant aux dépenses engagées pour faire valoir l'ensemble de ses droits, y compris ceux pour lesquels elle n'avait pas obtenu gain de cause, la cour d'appel, qui a réparé un préjudice sans lien avec la contrefaçon retenue, a violé les articles 1382 du Code civil et L.615-1 du Code de la Propriété Intellectuelle ;
ALORS, d'autre part, QUE l'indemnité allouée doit réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour la victime ni perte ni profit ; que la cour d'appel, qui a alloué à la société DOREL FRANCE une somme de 45.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure civile, cette condamnation correspondant aux sommes engagées par la société DOREL FRANCE pour la défense de ses intérêts, ne pouvait lui allouer une somme de 117.653,94 Euros correspondant aux dépenses qu'elle avait dû engager pour faire valoir ses droits, sans indemniser deux fois le même préjudice, en violation des articles 1382 du Code civil et L.615-1 du Code de la Propriété Intellectuelle.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les sociétés BEBECAR UTILIDADES PARA CRIANCA et BEBECAR FRANCE à payer à la société DOREL FRANCE une somme de 30.000 € au titre du préjudice commercial ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des énonciations non contestées du rapport d'expertise déposé par l'expert comptable commissaire aux comptes Michel A... en exécution de la décision entreprise que les poussettes contrefaisantes n'ont fait l'objet d'aucune vente par les sociétés BEBECAR qui ont procédé à l'annulation des commandes passées ; que l'expert a conclu à l'absence de préjudice commercial pour la société DOREL ; mais que cette société fait valoir à juste titre que l'exposition à la vente sur les catalogues BEBECAR 2006, ainsi que sur les catalogues 2006 des distributeurs AUBERT et AUTOUR DE BEBE de produits contrefaisants, déclinés au surplus sur cinq références différentes, aux côtés du produit contrefait, à suffi à lui causer un préjudice commercial par suite des ventes manquées, préjudice que n'ont pu complètement réparer l'annulation des commandes et le retrait du marché des produits contrefaisants ; qu'au regard des éléments versés aux débats ce préjudice doit être évalué à la somme de 30.000 € (arrêt attaqué p. 10) ;
ALORS QU'en l'absence d'exploitation contrefaisante, le titulaire du brevet ne peut prétendre à la réparation d'aucun préjudice tenant à la perte des bénéfices qu'il aurait réalisés ; qu'après avoir constaté, en se fondant sur le rapport d'expertise, que les poussettes contrefaisantes n'avaient fait l'objet d'aucune vente par les sociétés BEBECAR qui avaient procédé à l'annulation des commandes passées et dont les produits contrefaisants avaient été retirés du marché, la cour d'appel ne pouvait considérer que la société DOREL FRANCE pouvait prétendre à la réparation d'un préjudice commercial en raison des ventes manquées sans violer les articles 1382 du Code civil et L.615-1 du Code de la Propriété Intellectuelle.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les sociétés BEBECAR UTILIDADES PARA CRIANCA et BEBECAR FRANCE à payer à la société DOREL FRANCE une somme de 30.000 € au titre de l'atteinte à son image ;
AUX MOTIFS QUE c'est encore à raison que la société DOREL, qui a axé toute sa communication publicitaire auprès des grands distributeurs des produits de puériculture sur le pliage innovant de la poussette LOOLA et l'exclusivité que lui confère son brevet, se prévaut d'une atteinte à son image par suite de la diffusion auprès de ces mêmes distributeurs de catalogues offrant à la vente les poussettes contrefaisantes ; qu'il lui sera alloué de ce chef une somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts (arrêt attaqué p. 10) ;
ALORS QUE l'indemnité allouée doit correspondre uniquement au préjudice directement imputable à la contrefaçon ; qu'après avoir rejeté l'action de la société DOREL FRANCE en contrefaçon de son modèle de poussette LOOLA, la cour d'appel ne pouvait tenir compte, dans la détermination du montant de l'indemnité allouée à cette société en réparation de l'atteinte à son image, des frais de communication publicitaires qu'elle avait engagés en ce qui concerne le pliage innovant de la poussette LOOLA sans violer les articles 1382 du Code civil et L.615-1 du Code de la Propriété Intellectuelle.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-23515
Date de la décision : 07/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 jui. 2011, pourvoi n°10-23515


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.23515
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