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25/05/2011 | FRANCE | N°09-71835

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 mai 2011, 09-71835


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a collaboré à partir du mois d'avril 2001 avec la société Action Commerciale, devenue Editialis, éditant des titres de presse spécialisés dans les domaines du marketing, en qualité de secrétaire de rédaction rémunéré à la pige pour le titre "Commerce Magazine", la convention collective nationale des journalistes étant applicable ; que le 1er juin 2007, il a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'il a saisi la juridiction pru

d'homale de diverses demandes liées à la rupture ;
Sur le premier moyen...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a collaboré à partir du mois d'avril 2001 avec la société Action Commerciale, devenue Editialis, éditant des titres de presse spécialisés dans les domaines du marketing, en qualité de secrétaire de rédaction rémunéré à la pige pour le titre "Commerce Magazine", la convention collective nationale des journalistes étant applicable ; que le 1er juin 2007, il a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes liées à la rupture ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 22 et 23 de la convention collective nationale des journalistes professionnels ;
Attendu que pour condamner la société Editialis à verser à M. X... une somme à titre de rappel de prime d'ancienneté, outre les congés payés afférents, l'arrêt retient que l'article 23 de la convention collective applicable énonce les taux de majoration correspondant aux primes d'ancienneté en fonction du temps de présence du salarié dans l'entreprise, que le statut de journaliste professionnel de M. X... n'étant pas contesté cette prime est due, qu'elle doit être calculée sur la base de son salaire réel, à compter du premier jour de présence ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence d'annexe à la convention collective nationale des journalistes fixant les rémunérations minimales des pigistes, la prime d'ancienneté doit être calculée, non en fonction du montant des salaires perçus par ceux-ci, mais par référence au SMIC, lequel est applicable à cette catégorie de salariés qui doivent être rémunérés au taux du salaire minimum de croissance pour le nombre d'heures qu'ils ont effectué, ou qu'ils ont consacré à la réalisation de chaque pige, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Editialis à verser à M. X... une somme à titre de rappel de prime d'ancienneté, outre les congés payés afférents, l'arrêt rendu le 15 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Editialis.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR "dit la rupture du contrat de travail de Monsieur X... imputable à l'employeur" et condamné en conséquence la Société EDITIALIS à lui verser diverses sommes à titre d'indemnités de rupture, dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et méconnaissance du statut protecteur ;
AUX MOTIFS QUE "Laurent X... a perçu des revenus réguliers de 2001 à 2006 en qualité de secrétaire de rédaction, et de rédacteur jusqu'en 2004 pour un revenu annuel compris entre 7 813 € et 16 590 € puis uniquement en qualité de rédacteur pigiste à compter de cette date, pour une rémunération annuelle de 7 750,55 € en 2005 et de 7 608,81 € en 2006 ;
QU'alors que la Société EDITIALIS se devait de maintenir un niveau d'activité et de rémunération constant à son salarié, cette collaboration s'est effondrée en 2007, le montant total des revenus perçus durant les cinq premiers mois de l'année 2007 s'élevant à 131 € pour un travail réalisé au mois de mars, précisément ; que la question se pose dès lors de rechercher qui du salarié ou de la SA EDITIALIS est responsable de cette situation, le premier soutenant qu'on ne lui fournissait plus de travail ou dans des conditions inacceptables en termes de délai et le second que le salarié, trop occupé à réaliser des papiers pour d'autres employeurs, n'aurait plus été disponible pour les travaux qu'il envisageait de lui confier ;
QU'il y a tout lieu de s'interroger en premier lieu au sujet du courrier du 30 janvier 2007 aux termes duquel la Société EDITIALIS reproche à Laurent X... plusieurs refus en 2006 dont il n'est pas justifié ; qu'au contraire, il ressort d'un échange par mail du 7 juillet 2006 concernant un article à remettre le 21 août que le salarié a accepté l'une des propositions faites sans refuser les autres, prévues pour une parution en octobre et novembre 2006 notamment ; que contrairement à ce qui est prétendu par l'employeur, il n'est pas établi que la réponse de Monsieur X... ait mis la rédactrice en chef de Artisan Mag et Commerce Magazine en difficulté dans la mesure où elle n'aurait pas manqué d'insister et d'en faire la remarque à son interlocuteur si tel avait été le cas ; qu'il ne peut davantage lui être reproché d'avoir, de retour de reportage, le 28 août suivant, refusé un dossier à rendre pour le 15 septembre, compte tenu du temps de préparation nécessaire, d'autant que la date de cette proposition est ignorée et que le salarié venait de se voir confirmer une commande antérieure de la part d'un autre journal et un supplément économique complet ; qu'au demeurant Laurent X... proposait, en toute bonne foi, de livrer quelques contacts au journaliste qui prendrait l'affaire et invitait la rédactrice en chef d'Artisan Mag à l'appeler si elle voulait en parler ; que dans ce contexte, et en l'absence de tout autre refus avéré entre temps, il en ressort que le courrier du 30 janvier 2007 adressé au salarié pas moins de cinq mois plus tard a manifestement été rédigé pour les besoins de la cause ;
QUE les quelques commandes dont il est justifié à partir du mois de février 2007 intervenaient tardivement à moins de deux semaines du bouclage, ce qui n'est pas commun, s'agissant de parutions mensuelles ; que les circonstances précises dans lesquelles elles ont eu lieu, telles que rapportées dans la lettre de prise d'acte et vérifiées par la Cour, démontrent à l'évidence l'exécution déloyale du contrat de travail de la part de l'employeur, qui soit ne laissait pas le temps au salarié de répondre utilement, ou encore négligeait de l'appeler sur son téléphone portable en l'absence de réponse mail dans le délai exigé, très court au demeurant ; que la seule proposition sérieuse qui a été faite sur la période est postérieure à la rupture du contrat de travail ;
QUE ce ne sont pas les refus du salarié consécutifs à une surcharge de travail de la part d'autres employeurs pour lesquels celui-ci était légitimement en droit de travailler pour compléter ses revenus qui sont à l'origine de la réduction importante du nombre de piges réalisées, peu important le pourcentage de travaux effectués pour chaque groupe de presse, dès lors que le travail fourni par la SAS EDITIALIS et la rémunération de Laurent X... jusqu'en décembre 2006 s'étaient maintenus à un niveau constant ; que la baisse non négligeable de la quantité de travail fournie à partir de cette date avec, de facto, les conséquences sur le niveau de rémunération du salarié constitue une modification du contrat de travail nécessitant l'accord exprès de celui-ci ; que la réduction des délais de traitement de sujets différents de ceux que le journaliste avait l'habitude de réaliser au vu des articles publiés précédemment caractérise également une modification des conditions de travail qui ne peut être imposée unilatéralement à un salarié bénéficiant du statut protecteur des représentants du personnel (…)" ;
1°) ALORS QU'il appartient au salarié, nonobstant l'indépendance inhérente à sa qualité de journaliste, de se tenir à la disposition de son employeur, et d'être à même d'accepter les propositions de travail qui lui sont faites, y compris si les conditions de délai contrarient son organisation personnelle ou les engagements souscrits par ailleurs, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec ceux-ci ; qu'une telle obligation pèse sur le journaliste pigiste dont le statut de salarié résulte d'une collaboration régulière sur laquelle l'employeur est en droit de compter ; qu'en l'espèce, il ressort tant des propres énonciations de l'arrêt attaqué que des éléments produits, et notamment de la lettre de prise d'acte du 1er juin 2007, que Monsieur X..., entre juillet 2006 et mai 2007, a refusé 7 propositions de piges, soit sans raison (proposition du 7 juillet 2006), soit en raison de la brièveté des délais de réalisation (en moyenne deux semaines : courrier du 29 août 2007, courriel du 27 février 2007), de l'existence de travaux en cours pour le compte d'autres employeurs (courriel du 29 août 2006, courriels des 3 et 6 avril 2007) ou de convenances purement personnelles (refus d'une commande de février 2007 parvenue "à quelques jours de (son) congé de paternité" ou d'un texte de deux pages à rendre "cinq jours ouvrés plus tard compte tenu du pont de l'Ascension", toutes circonstances mentionnées dans son courrier du 1er juin 2007) ; qu'il n'a pas répondu, par ailleurs, à la lettre recommandée de l'employeur du 31 janvier 2007 lui demandant de fixer précisément ses disponibilités "afin d'établir avec (lui) un cadre de travail cohérent lui permettant de bien répartir sa charge de travail" ; que l'employeur, dans ces conditions, était en droit de confier ses "piges" à d'autres journalistes, plus disponibles, sans que le salarié fût admis à lui en faire le reproche et prendre acte, sur cette base, de la rupture de son contrat de travail ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 7112-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;
2°) ALORS QUE la bonne foi se présume ; que dans son courrier du 30 janvier 2007, l'employeur se bornait à solliciter de Monsieur X... "de lui faire connaître son degré de disponibilité afin d'établir avec (lui) un cadre de travail cohérent qui (lui) permette de bien répartir la charge de travail" ; que ce dernier n'avait pas jugé utile d'y apporter une réponse ; qu'en énonçant arbitrairement que ce courrier avait été "manifestement rédigé pour les besoins de la cause" et en reprochant à titre de déloyauté à l'employeur d'avoir ensuite adressé au salarié des propositions de piges ne correspondant pas à ses disponibilités la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
3°) ALORS QUE la lettre de rupture énonçait ; "…vos équipes semblent faire en sorte que plus aucune commande "acceptable" ne me soit offerte…ces commandes interviennent systématiquement tardivement, généralement à moins de deux semaines du bouclage (ce qui témoigne d'un fonctionnement curieux pour des magasines mensuels) ou dans des circonstances pour le moins troublantes…ce fut le cas, par exemple, en février 2007, lorsqu'une lettre recommandée m'est parvenue m'informant que vous preniez acte de mon refus de collaborer à un guide annuel que vous souhaitiez exceptionnellement me confier cette année, à quelques jours de mon congé de paternité, pourtant approuvé par votre service administratif …en avril 2007, lorsque deux commandes de pige m'ont été adressées alors que je venais d'en décliner une pour cause de déplacement professionnel exceptionnel pendant huit jours…en mai 2007, lorsque le mercredi 15 mai à 15 h, soit moins de 3 h avant son "départ en vacances", votre directrice de rédaction m'a fait parvenir un mail me demandant de m'engager avant 18 heures pour un rendu de textes de deux pages chacun le 28 mai, soit 5 jours ouvrés au plus tard, compte tenu du pont de l'Ascension…" ; que cette lettre reprochait exclusivement à l'employeur la brièveté des délais de réalisation des travaux proposés, compte tenu des contingences personnelles ou professionnelles propres au salarié, justifiant son refus de ces propositions "inacceptables" ; qu'en déduisant la mauvaise foi de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail des "circonstances précises … telles que rapportées dans la lettre de prise d'acte" dans lesquelles les commandes d'articles refusées lui avaient été passées "soit ne laissant pas le temps au salarié de répondre utilement, ou encore négligeant de l'appeler sur son téléphone portable en l'absence de réponse mail dans le délai exigé" la Cour d'appel a dénaturé la lettre de rupture, violant l'article 1134 du Code civil ;
4°) ALORS QU'en sanctionnant une "exécution déloyale", par l'employeur, de son obligation de fournir du travail déduite de ce que les propositions faites en 2007 et refusées par le salarié n'étaient pas sérieuses, sans constater, ni que ces propositions auraient été formulées pour des raisons étrangères à l'intérêt de l'entreprise, ni qu'elles n'étaient pas acceptables et réalisables par le salarié dans les délais, fussent-ils brefs, qui lui étaient impartis, ni enfin qu'un usage de la profession ou une pratique antérieure de l'entreprise de presse et du journaliste permettait à celui-ci d'exiger des délais plus longs, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
5°) ALORS QUE le juge saisi par le salarié d'une demande de requalification de prise d'acte de la rupture en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse doit tenir compte du comportement respectif des parties ; qu'en l'espèce la Société EDITIALIS, dont de nombreuses propositions de piges avaient été refusées par Monsieur X... compte tenu des obligations souscrites par ailleurs auprès d'autres entreprises de presse (courriels des 28 août 2006, 27 février 2007…), avait souligné, dans ses écritures, que le salarié avait, ce faisant, manqué à son obligation conventionnelle de déclarer préalablement et par écrit à son employeur ses collaborations extérieures ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions la Cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
6°) ALORS en toute hypothèse QU'en retenant comme modification des conditions de travail imposée irrégulièrement au salarié bénéficiant du statut protecteur des propositions d'articles "sur des sujets différents de ceux que le journaliste avait l'habitude de traiter" et dans des conditions de délais réduites, qui ne lui avaient nullement été imposées, mais uniquement proposées, de telle sorte qu'il les avait refusées sans que l'employeur en tire une quelconque conséquence, la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 2411-3 du Code du travail et 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Société EDITIALIS à verser à Monsieur X... une somme de 463,80 € à titre de rappel de prime d'ancienneté, outre les congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE "l'article 23 de la convention collective applicable énonce les taux de majoration correspondant aux primes d'ancienneté en fonction du temps de présence du salarié dans l'entreprise ; (…) que le statut de journaliste professionnel de Laurent X... n'étant pas contesté, cette prime est due ; qu'elle doit être calculée sur son salaire réel à compter du premier jour de présence (…) ; qu'il est dû une somme de 1410,72 € à titre de rappel de prime d'avril à décembre 2006 au titre de la prime d'ancienneté dans l'entreprise outre 323,08 € au titre de la prime d'ancienneté dans la profession correspondant à la différence entre les primes versées et le montant réellement dû sur la base d'une rémunération de 54,08 € par pige, soit en tout un rappel de 463,80 €, congés payés afférents en sus" ;
ALORS QU'en l'absence d'annexe à la convention collective nationale des journalistes fixant les rémunérations minimales des pigistes, la prime d'ancienneté doit être calculée, non en fonction du montant des salaires perçus par ceux-ci, mais en référence au SMIC, lequel est applicable à cette catégorie de salariés qui doivent être rémunérés au taux du salaire minimum de croissance pour le nombre d'heures qu'ils ont effectué, ou qu'ils ont consacré à la réalisation de chaque pige, qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 22 et 23 de la Convention collective nationale des journalistes.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-71835
Date de la décision : 25/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 15 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 mai. 2011, pourvoi n°09-71835


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.71835
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