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24/05/2011 | FRANCE | N°10-18074

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 mai 2011, 10-18074


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (rendu sur renvoi après cassation chambre commerciale, financière et économique, 2 décembre 2008, pourvoi n° 07-19.904), que, par acte du 6 août 1996, publié le 30 septembre 1996, la société Accueil Lunel a cédé un fonds de commerce à la société Accueil Meunières, le prix étant pour partie payé par compensation avec une créance de la société cessionnaire ; que le 3 octobre 1996, le receveur principal des impôts de Lunel a fait opposition au paiement du prix de ven

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (rendu sur renvoi après cassation chambre commerciale, financière et économique, 2 décembre 2008, pourvoi n° 07-19.904), que, par acte du 6 août 1996, publié le 30 septembre 1996, la société Accueil Lunel a cédé un fonds de commerce à la société Accueil Meunières, le prix étant pour partie payé par compensation avec une créance de la société cessionnaire ; que le 3 octobre 1996, le receveur principal des impôts de Lunel a fait opposition au paiement du prix de vente au titre de créances de taxe sur la valeur ajoutée dues par la société Accueil Lunel pour les exercices 1992 à 1996, à la suite d'une notification de redressement du 9 septembre 1996 ; que des redressements complémentaires ont été notifiés les 20 décembre 1996 et 3 juin 1997 ; qu'après mise en recouvrement des impositions, le receveur a, le 3 juin 1998, notifié au séquestre, un avis à tiers détenteur portant sur la totalité des sommes dues ; que n'ayant reçu qu'un paiement partiel, il a demandé que la société Accueil Meunières soit condamnée à lui payer le solde de sa créance, à titre de dommages-intérêts ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du code civil et les articles L. 141-12 à L. 141-18 du code de commerce ;
Attendu que pour rejeter la demande du receveur des impôts, l'arrêt retient que celui-ci ne justifie plus d'aucun préjudice puisqu'il a reçu la somme correspondant au montant de l'opposition qui en constitue la limite et que le paiement par compensation effectué par la société Accueil Meunières n'est pas constitutif d'une faute pour les sommes non visées par l'opposition, le prix de vente étant redevenu disponible à la date de l'avis à tiers détenteur du 3 juin 1998 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la faute commise par le cessionnaire en payant le prix avant l'expiration du délai d'opposition prive le receveur des impôts du paiement de la totalité des sommes qu'il aurait pu appréhender lors de la distribution du prix de cession et non des seules sommes au titre desquelles il a fait opposition, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur la seconde branche du moyen :
Vu les articles 1382 du code civil et L. 141-17 du code de commerce ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient qu'il convient, pour apprécier le préjudice subi par le receveur des impôts résultant du paiement par compensation effectué par la société Accueil Meunières, de rechercher le caractère certain des créances objet de l'avis à tiers détenteur à la date de publication de la cession et que seule la notification de redressement fonde le principe certain de créance, en sorte que doivent être écartées les créances consécutives aux notifications des redressements des 20 décembre 1996 et 3 juin 1997 ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les créances de taxe sur la valeur ajoutée relatives aux exercices 1993 à 1996, ayant fait l'objet de l'avis à tiers détenteur, ne constituaient pas des dettes de la société Accueil Lunel qui, étant afférentes à des périodes d'activité antérieures à la cession du fonds de commerce, étaient nées avant la publication de la cession, peu important à cet égard que ces dettes ne fussent devenues exigibles que par la notification des rappels d'imposition postérieurs à cette date, la cour d ‘appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Accueil Meunières aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour le comptable des impôts du service des impôts des entreprises de Lunel.
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a confirmé le jugement du 7 février 2006 qui a débouté le comptable des impôts de Lunel de son action aux fins d'engager la responsabilité civile de la société Accueil Meunière acquéreur du fonds de commerce de la société Accueil Lunel ;
AUX MOTIFS QUE « dès lors pour les impositions ci-dessus reprises figurant aux avis n°s 05002 et 05003, il convient effectivement de rechercher, dans le cadre du seul préjudice subi du fait du paiement par compensation, si elles correspondent ou non à des créances existant comme certaines à défaut d'être exigibles, à la date de publication de la vente, le 30 septembre 1996 ; que dans la mesure où seule la notification de redressement adressée par l'administration fiscale fonde le principe certain de créance ainsi que le rappelle justement le premier juge et ce même si l'exigibilité résulte de l'avis de mise en recouvrement établi postérieurement, doivent être écartées du seul effet lié à l'opposition du 3 octobre 1996 les créances consécutives aux notifications de redressements des 20 décembre 1996 et 3 juin 1997, étant sans effet que les dettes de la société aient un fait générateur antérieur à la date de publicité de la vente ; que l'effet de l'opposition étant limité à la créance qui la motive, la demande en paiement présentée sur le fondement de l'article L. 141-17 du code de Commerce est fondée pour la somme de 209 683 francs ou 31 965,97 euros (162 267 francs de principal et 47 416 francs de majorations) représentative du redressement du 9 septembre 1996 ; que dès lors ayant reçu en exécution de l'opposition du 3 octobre 1996 la somme de 316 566,74 francs (48 260,29 euros), il n'existe plus aucun préjudice indemnisable du fait du paiement par compensation intervenu le 6 août 1996 en violation des dispositions de l'article L 141-17 du code de commerce ; qu'à la date de notification le 3 juin 1998 à la CARSAM de l'avis à tiers détenteur notifié au seul débiteur saisi, la société Accueil Lunel, le prix de vente était devenu disponible et ainsi le paiement par compensation effectué par la société Accueil Meunières ne peut être constitutif d'une faute commise à l'origine d'un préjudice subi par le receveur principal des impôts de Lunel. Tous ces éléments et ceux non contraires du premier juge justifient la confirmation de la décision déférée » ;
ALORS QUE, premièrement, la faute de l'acquéreur consistant à avoir payé son vendeur avant l'expiration du délai de dix jours visé à l'article L. 141-17 du code de commerce a eu pour conséquence de priver le comptable des impôts du paiement des sommes qu'il aurait pu valablement appréhender dans le cadre de la distribution du prix de vente du fonds de commerce, non seulement à hauteur du montant de son opposition mais également à hauteur de sa créance totale ; qu'en considérant que seule l'opposition extrajudiciaire du 3 octobre 1996 peut servir de base à la quantification du préjudice de ce dernier et que le paiement par compensation effectué par la société Accueil Meunières ne peut être constitutif d'une faute commise par cette dernière pour les sommes non visées par l'opposition, le prix de vente étant redevenu disponible à la date de l'avis à tiers détenteur du 3 juin 1998, la cour a violé les dispositions des articles 1382 du code civil et L. 141-12 à L. 141-18 du code de commerce, privant sa décision de base légale au regard de ces articles ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, les créances qui ont fait l'objet de l'avis à tiers détenteur du 3 juin 1998 étaient nées à la date de la publication de la vente. En recherchant le caractère certain de la créance, objet de l'avis à tiers détenteur, à la date de la publication de la vente pour apprécier le seul préjudice subi par le comptable du fait du paiement par compensation et non pas la naissance antérieure à cette date de ladite créance et en considérant au surplus que seule la notification de redressement en fondent le principe certain, la cour de Montpellier, statuant comme cour d'appel de renvoi a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 141-17 du code de commerce et 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-18074
Date de la décision : 24/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

FONDS DE COMMERCE - Vente - Prix - Opposition - Délai - Paiement avant son expiration - Effets - Préjudice du créancier opposant - Etendue - Totalité des sommes appréhendables lors de la distribution du prix

FONDS DE COMMERCE - Vente - Prix - Opposition - Délai - Payement avant son expiration - Effets - Préjudice du créancier opposant - Limite - Montant de l'opposition (non)

Méconnaît les articles 1382 du code civil et L. 141-12 à L. 141-18 du code de commerce la cour d'appel qui, pour rejeter la demande d'un receveur des impôts tendant au paiement par la société cessionnaire d'un fonds de commerce du solde de sa créance, retient que celui-ci ne justifie d'aucun préjudice puisqu'il a reçu la somme correspondant au montant de l'opposition qui en constitue la limite et que le paiement par compensation effectué par la société cessionnaire n'est pas constitutif d'une faute pour les sommes non visées par l'opposition, le prix de vente étant redevenu disponible à la date de l'avis à tiers détenteur notifié au cédant, dès lors que la faute commise par le cessionnaire en payant le prix avant l'expiration du délai d'opposition prive le receveur des impôts du paiement de la totalité des sommes qu'il aurait pu appréhender lors de la distribution du prix de cession et non des seules sommes au titre desquelles il a fait opposition


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 16 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 mai. 2011, pourvoi n°10-18074, Bull. civ. 2011, IV, n° 83
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, IV, n° 83

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Carre-Pierrat
Rapporteur ?: Mme Laporte
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.18074
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