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24/05/2011 | FRANCE | N°10-15760

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 mai 2011, 10-15760


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 janvier 2010), que la société Agilent Technologies Deutschland GmbH est titulaire, en vertu d'un contrat de cession du 29 octobre 1999, de la partie française du brevet européen EP 0309 596 ayant pour titre dispositif de pompage pour délivrer un liquide à haute pression délivré le 31 mars 1999 sur demande de la société Hewlett-Packard GmbH ; qu'un arrêt irrévocable du 7 avril 2004 a débouté la société Waters Corporation, de droit américain, et la société

française Waters de leur demande en nullité des revendications 1 à 12 du br...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 janvier 2010), que la société Agilent Technologies Deutschland GmbH est titulaire, en vertu d'un contrat de cession du 29 octobre 1999, de la partie française du brevet européen EP 0309 596 ayant pour titre dispositif de pompage pour délivrer un liquide à haute pression délivré le 31 mars 1999 sur demande de la société Hewlett-Packard GmbH ; qu'un arrêt irrévocable du 7 avril 2004 a débouté la société Waters Corporation, de droit américain, et la société française Waters de leur demande en nullité des revendications 1 à 12 du brevet, retenu à la charge de ces dernières des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 10, 11 et 12 du brevet pour avoir fabriqué et vendu en France des appareils de chromatographie n° 2690, 2695, 2790 et 2795 ; que dans le cadre d'une procédure en liquidation de préjudice restée pendante, les sociétés Hewlett-Packard et Agilent Technologies Deutschland, estimant que les dispositifs de pompage commercialisés par les sociétés Waters à compter du mois d'août 2002, prétendument modifiés de manière à les exclure du champ du brevet, mettaient en oeuvre les revendications de ce brevet, ont demandé au tribunal d'étendre la mission de l'expert à ces actes de contrefaçon ; que la société Agilent Technologies France est intervenue volontairement à l'instance, en qualité de distributeur en France des appareils de chromatographie couverts par le brevet, pour obtenir réparation du préjudice causé par des faits de concurrence déloyale tant au titre des produits jugés contrefaisants par l'arrêt du 7 avril 2004 qu'au titre des produits modifiés ; que les sociétés Waters Corporation et Waters ont formé une action en déclaration de non-contrefaçon du brevet par les appareils modifiés ;

Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés Hewlett-Packard GmbH, Agilent Technologies GmbH et Agilent Technologies France font grief à l'arrêt de dire que les appareils modifiés 2690, 2695, 2790 et 2795 équipés des logiciels 2.01, 2.02 ou 2.03 commercialisés par les sociétés Waters ne sont pas des contrefaçons de la partie française du brevet européen n°0 309 596, de les débouter en conséquence de leurs demandes et d'ordonner une mesure de publication, alors, selon le moyen :
1°/ que l'étendue de la protection conférée par un brevet européen est déterminée par la teneur de la revendication ; que si celle-ci peut-être interprétée par la description ou les dessins, il ne peut y être ajouté ; qu'en l'espèce, la revendication 1 du brevet couvre un dispositif de pompage caractérisé en ce qu'il comporte, de manière générale, « des moyens de commande (41, 42, 43, 44, 35) reliés aux moyens d'entraînement (30, 34 ; 31, 33 ; 32, 36) pour régler les longueurs de course des pistons (10, 20) entre leur point mort haut et leur point mort bas, respectivement, en réponse au débit d'écoulement désiré du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage, le volume par course (c'est à dire la quantité de liquide déplacée pendant un cycle de pompage) diminuant lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa, de sorte que des pulsations dans l'écoulement du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage sont réduite », sans préciser que ces moyens de commande permettraient un ajustement automatique des longueurs de course en fonction du débit d'écoulement souhaité ; qu'en retenant que la revendication 1 du brevet ne porterait que sur un « fonctionnement automatique des moyens de commande revendiqués », et partant, sur un dispositif permettant un ajustement automatique des longueurs de course en fonction du débit d'écoulement sélectionné, la cour d'appel a ainsi ajouté à la revendication 1 une caractéristique qu'elle ne comporte pas et a, par là même, restreint la teneur de cette revendication, en violation des articles 69 de la convention de Munich du 5 octobre 1973 sur le brevet européen et L. 613-2 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ qu'en se fondant, pour écarter la contrefaçon du brevet n° 0 309 596, tant par reproduction que par fourniture de moyens, sur le fait que ledit brevet n'aurait pas pour objet de couvrir un ajustement manuel de la longueur de course des pistons en fonction du débit désiré, la cour d'appel a apprécié la contrefaçon sur la base d'une lecture erronée de la revendication 1 du brevet, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 613-3 et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
3°/ que la contrefaçon s'apprécie par les ressemblances et non par les différences, et se caractérise par la reproduction des moyens essentiels constituant l'invention ; qu'en relevant, pour écarter la contrefaçon, que dans les appareils Waters modifiés, les pulsations seraient éliminées en rendant identiques la pression à l'intérieur de la première pompe et la pression de sortie du système de pompage au moment de la phase de transfert de la première pompe vers la deuxième pompe, quand il lui appartenait, indépendamment de l'adjonction de ces caractéristiques, de rechercher si les moyens essentiels constituant l'invention protégée par la revendication 1 du brevet n° 0 309 596 n'étaient pas reproduits par les appareils Waters modifiés, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, en violation des articles L. 613-3 et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, contrairement aux affirmations du moyen, n'a pas ajouté à la revendication n°1 mais n'a fait qu'interpréter celle-ci à l'aide de la description ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que les appareils Waters modifiés ne reproduisent ni les caractéristiques du dispositif de pompage couvert par le brevet en ce qu'il recherche la réduction des pulsations par l'action des moyens de commande du dispositif qui, reliés aux moyens d'entraînement, règlent les longueurs de course des pistons en réponse au débit souhaité, ni la caractéristique selon laquelle le volume par course diminue avec un débit d'écoulement plus faible et vice versa ; qu'il retient encore que ce sont les moyens de commande reliés aux moyens d'entraînement qui assurent le réglage automatique de la longueur de course en réponse au débit d'écoulement désiré et non l'opérateur qui ne fait pas partie des moyens de commande de la revendication ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a pu déduire que les caractéristiques essentielles des dispositifs en cause ne présentaient pas de ressemblances suffisantes démontrant une contrefaçon, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Agilent Technologies France fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande pour concurrence déloyale, alors, selon le moyen, que les actions en contrefaçon et en concurrence déloyale ont des fondements distincts ; qu'en déboutant la société Agilent Technologies France de sa demande en concurrence déloyale, sans se prononcer sur le bien-fondé de celle-ci, qui était fondée sur des faits distincts de la contrefaçon, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant confirmé le jugement en ce que celui-ci avait déclaré irrecevable l'action en concurrence déloyale de la société Agilent Technologies France, le moyen manque en fait ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Hewlett-Packard GmbH, Agilent Technologies GmbH et Agilent Technologies France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer aux sociétés Waters Corporation et Waters la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour les sociétés Hewlett-Packard GmbH, Agilent technologies deutschland GmbH et Agilent technologies France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les appareils modifiés 2690, 2695, 2790 et 2795 équipés des logiciels 2.01, 2.02 ou 2.03 commercialisés par les sociétés WATERS ne sont pas des contrefaçons de la partie française du brevet européen n° 0 309 596, d'avoir, en conséquence, débouté les sociétés HEWLETT-PACKARD GmbH, AGILENT TECHNOLOGIES DEUTSCHLAND GmbH et AGILENT TECHNOLOGIES FRANCE de leurs demandes et ordonné une mesure de publication ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les sociétés appelantes font valoir en l'espèce que le brevet est le premier à enseigner un dispositif permettant de modifier le volume par course des pistons en fonction du débit d'écoulement désiré ; qu'il convient, par voie de conséquence, de lui conférer une portée beaucoup plus générale que celle retenue par le tribunal, qu'ainsi, la revendication 1 doit être interprétée comme couvrant tout dispositif dans lequel le volume par course des pistons est réglé, soit automatiquement soit manuellement, en réponse au débit désiré, le volume étant diminué lorsque le débit diminue et vice-versa, la limitation de la portée du brevet à un ajustement automatique du volume par course des pistons ne découlant ni expressément du libellé des revendications ni implicitement de la description du brevet ; que s'il est admis, en présence d'une invention pionnière, que le brevet puisse décrire un mode de réalisation de l'invention et revendiquer tout autre mode possible de réalisation, il ne saurait, fût-il pionnier, se voir conférer une portée générale quand ses revendications sont rédigées en termes restrictifs ; qu'en particulier, une revendication non ambigüe de portée étroite ne saurait se voir accorder, sous couvert d'une interprétation, une portée générale, notamment lorsque le breveté a été contraint, pour se distinguer de l'art antérieur, de limiter la portée de la revendication dans le cadre de la procédure de délivrance ; qu'à cet égard, les premiers juges ont exactement relevé que le membre de phrase « en réponse au débit d'écoulement désiré du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage, le volume par cours (c'est-à-dire la quantité de liquide déplacée pendant un cycle de pompage) diminuant lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa » a été ajouté au libellé de la revendication 1 en cours d'examen devant l'Office européen des brevets de manière à obtenir la délivrance du brevet ; que le breveté qui a modifié ses revendications pour leur donner une portée restreinte ne peut, sans porter atteinte à la sécurité des tiers, prétendre que les modifications n'étaient pas nécessaires non plus que les revendications restreintes auraient la même portée que les revendications originaires plus larges ; qu'il s'infère de l'ensemble de ces éléments que le brevet doit être regardé, selon les termes de la revendication 1, comme couvrant un dispositif dans lequel les moyens de commande règlent les longueurs de course des pistons en réponse au débit d'écoulement désiré, le volume par course diminuant lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa, de telle sorte que les pulsations de sortie soient réduites ; qu'en effet, la réduction des pulsations résulte de l'action des moyens de commande du dispositif qui, reliés aux moyens d'entraînement, règlent les longueurs de courses des pistons en réponse au débit souhaité, cette dernière caractéristique, précédemment évoquée comme ayant été ajoutée dans la procédure de délivrance du brevet, impliquant sans ambiguïté que ce sont les moyens de commande qui ajustent la longueur de course en fonction du débit d'écoulement désiré ; que la revendication se trouve corroborée par la description du dispositif breveté telle qu'énoncée en page 17 (lignes 2 à 15), citée plus haut, d'où il résulte que les moyens de commande revendiqués calculent automatiquement la longueur de course correspondant à un débit désiré en utilisant une relation mathématique prédéterminée, illustrée à la figure 4, entre le débit d'écoulement et la longueur de course ou le volume par course qui est proportionnel à la longueur de course ; qu'il ressort par ailleurs de cette description, de la manière la plus claire, que si l'utilisateur intervient, ce n'est qu'au niveau du choix du débit d'écoulement, les moyens de commande du dispositif ajustant ensuite de façon automatique la longueur de course du piston en réponse à la modification du débit d'écoulement de sorte qu'il revient toujours aux moyens de commande reliés aux moyens d'entraînement d'assurer le réglage de la longueur de course en réponse au débit d'écoulement désiré et non à l'opérateur qui ne fait pas partie de moyens de commande de la revendication ; que les sociétés appelantes font valoir que la description du brevet indiquerait expressément en page 17, lignes 17 à 24, un mode de réalisation dans lequel la limitation des pulsations en sortie de la pompe serait obtenue par un ajustement manuel de la longueur de course ou du volume par course ; qu'il est énoncé au passage invoqué : « bien que dans le présent mode de fonctionnement, il y ait une relation prédéterminée entre le débit d'écoulement et le volume par course, le circuit de commande selon la présente invention, permet cependant de supprimer la liaison entre le débit d'écoulement et le volume par course de sorte qu'une sélection indépendante de la longueur de course ou du volume devienne possible ; qu'il y est fait état d'une possibilité de suppression de la corrélation entre le débit d'écoulement et le volume par course selon un mode de mise en oeuvre dans lequel les moyens de commande tels que revendiqués, c'est-à-dire réglant le volume par course en réponse à la valeur de débit souhaité, ne sont plus sollicités, qu'il n' y est fait aucune référence à la diminution revendiquée du volume par course lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa, qu'il n'y est pas dit enfin que la mise en oeuvre proposée a pour résultat la réduction des pulsations de sortie revendiquée ; qu'il s'ensuit que la possibilité proposée est évoquée à titre d'information mais n'entre pas dans le champ de l'invention protégée par le brevet ; que le jugement entrepris n'est pas critiquable en ce qu'il a retenu que l'invention protégée par le brevet ne porte que sur un fonctionnement automatique des moyens de commande revendiqués et ne couvre pas une opération manuelle qui définirait le réglage des longueurs de course en fonction du débit d'écoulement souhaité » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'arrêt définitif de la cour d'appel de Paris en date du 7 avril 2004 a déclaré valable le brevet EP 0 309 596 si bien que pour apprécier la contrefaçon alléguée par les sociétés AGILENT ou la non contrefaçon revendiquée par la société WATERS, il suffit d'apprécier la portée du brevet ; que la cour d'appel a rappelé que le « premier but du brevet est de réduire, par une simple opération mécanique, les pulsations d'écoulement entraînées par la compressibilité des liquides dans les systèmes de pompes montées en série et ainsi les interférences qu'elles provoquent sur les résultats de mesure chromatographique » ; que le brevet enseigne « la commande calcule la longueur de course correspondante en utilisant une relation mathématique prédéterminée entre le débit d'écoulement et la longueur de course ou le volume par course qui est proportionnel à la longueur de course ; que l'exemple de cette relation prédéterminée entre le débit d'écoulement/volume par course est illustré aux figures 4 et 5 du brevet », et enfin « que le raccourcissement du volume de course provoque le raccourcissement de la phase de compression du liquide et entraîne une diminution de l'amplitude de la pulsation ; qu'elle permet d'utiliser une fréquence de pompage plus élevée de sorte que les pulsations se produisant à une fréquence supérieure, ne forment sur la courbe de pression qu'une faible ondulation qui affecte moins les mesures chromatographiques comme illustré dans la figure 9 du brevet » ; qu'ainsi, la revendication n° 1 qui est ainsi écrite "Dispositif ..... caractérisé en ce qu'il comporte des moyens de commande (41,42,43,44,35) reliés aux moyens d'entraînement (30,34; 31,33; 32,36) pour régler les longueurs de course des pistons (10,20) entre leur point mort haut et leur point mort bas, respectivement, en réponse au débit d'écoulement désiré du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage, le volume par course (c'est-à-dire la quantité de liquide déplacée pendant un cycle de pompage) diminuant lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa, de sorte que des pulsations dans l'écoulement du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage sont réduites. » enseigne des moyens de commande qui règlent automatiquement les longueurs de course en diminuant le volume par course quand le débit d'écoulement diminue et vice versa ; que ces moyens agissent en utilisant une relation mathématique prédéterminée entre le débit d'écoulement et la longueur de course ou le volume par course qui est proportionnel à la longueur de course comme l'a précisé la cour d'appel ; que d'ailleurs, lors de la procédure d'examen à l'OEB, le membre de phrase suivant « en réponse au débit d'écoulement désiré du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage, le volume par course (c'est-à-dire la quantité de liquide déplacée pendant un cycle de pompage) diminuant lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa a été ajouté pour permettre la délivrance du brevet ; qu'ainsi, l'invention du brevet EP 0 309 596 ne porte que sur un fonctionnement automatique des moyens de commande revendiqués et n'inclut pas la présence d'un opérateur qui définit le réglage des longueurs de course en fonction des débits d'écoulement souhaités par ledit opérateur ; que l'invention protège donc des dispositifs qui comprennent des moyens de commande automatiques des longueurs de course des pistons en fonction du débit d'écoulement et qui entraînent une diminution automatique du volume de course quand le débit diminue ou une augmentation automatique du volume de course quand le débit augmente ; qu'ainsi, les sociétés AGILENT ne peuvent prétendre que leur brevet couvrirait tout dispositif de pompage permettant de régler manuellement la longueur des pistons » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'étendue de la protection conférée par un brevet européen est déterminée par la teneur de la revendication ; que si celle-ci peut-être interprétée par la description ou les dessins, il ne peut y être ajouté ; qu'en l'espèce, la revendication 1 du brevet couvre un dispositif de pompage caractérisé en ce qu'il comporte, de manière générale, « des moyens de commande (41, 42, 43, 44, 35) reliés aux moyens d'entraînement (30, 34; 31, 33; 32, 36) pour régler les longueurs de course des pistons (10, 20) entre leur point mort haut et leur point mort bas, respectivement, en réponse au débit d'écoulement désiré du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage, le volume par course (c'est à dire la quantité de liquide déplacée pendant un cycle de pompage) diminuant lorsque le débit d'écoulement diminue et vice versa, de sorte que des pulsations dans l'écoulement du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage sont réduite », sans préciser que ces moyens de commande permettraient un ajustement automatique des longueurs de course en fonction du débit d'écoulement souhaité ; qu'en retenant que la revendication 1 du brevet ne porterait que sur un « fonctionnement automatique des moyens de commande revendiqués », et partant, sur un dispositif permettant un ajustement automatique des longueurs de course en fonction du débit d'écoulement sélectionné, la Cour d'appel a ainsi ajouté à la revendication 1 une caractéristique qu'elle ne comporte pas et a, par là même, restreint la teneur de cette revendication, en violation des articles 69 de la Convention de MUNICH du 5 octobre 1973 sur le brevet européen et L. 613-2 du Code de la propriété intellectuelle ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le fonctionnement des appareils WATERS modifiés à partir du mois d'août 2002 est décrit dans le rapport du professeur Roger X... qui ne fait l'objet d'aucune critique ; qu'il en ressort que ces appareils sont équipés d'une unité centrale qui commande le fonctionnement de la pompe et en particulier les moyens d'entraînement sous le contrôle de capteurs à savoir notamment un capteur de pression (9) servant à mesurer la pression de sortie de la première pompe, un capteur de pression (11) servant à mesurer la pression de sortie de la deuxième pompe et des codeurs qui permettent de mesurer la position des pistons alternatifs des première et deuxième pompes ; que chacun des moteurs des moyens d'entraînement des première et deuxième pompes est pourvu de son propre système d'entraînement et se trouve contrôlé individuellement par l'unité centrale afin de permettre à la première pompe de pré-compresser le liquide de pression de sortie avant de le décharger vers la deuxième pompe, éliminant ainsi les pulsations du liquide délivré en sortie du système de pompage ; que les pulsations sont éliminées en rendant identiques la pression à l'intérieur de la première pompe et la pression de sortie du système de pompage au moment de la phase de transfert de la première pompe vers la deuxième pompe ; que l'écoulement vers le dispositif de chromatographie s'effectue à débit constant, sans pulsation, grâce à la synchronisation du mouvement des pistons des première et deuxième pompes ; qu'il s'ensuit de ces éléments que les appareils WATERS modifiés ne reproduisent pas les caractéristiques du dispositif de pompage couvert par le brevet en ce qu'il recherche la réduction des pulsations par l'action des moyens de commande du dispositif qui, reliés aux moyens d'entraînement, règlent les longueurs de courses des pistons en réponse au débit souhaité ; que le rapport indique que les appareils WATERS modifiés sont programmés avec une valeur fixe par défaut du volume unitaire du piston de 130 microlitres qui peut être utilisée sur toute la plage de débits allant de 0 à 10 ml/min ; qu'ainsi, ils ne présentent pas la caractéristique du brevet AGILENT selon laquelle le volume par course diminue avec un débit d'écoulement plus faible et vice versa ; qu'il précise enfin que le volume par course par défaut ne peut être modifié que sur intervention expresse de l'opérateur, qu'une fois le volume par course réglé par l'opérateur, le changement de débit a lieu par modification de la fréquence ; qu'ainsi, aucun changement automatique de volume par course n'a lieu « en réponse au débit désiré » ; que les sociétés appelantes admettent du reste, en page 85 de leurs écritures, que « la modification opérée dans les appareils WATERS a pour conséquence de remplacer l'ajustement automatique du volume par course des pistons par un ajustement manuel de ce volume, qu'en d'autres termes, lorsque l'opérateur programme une analyse, il ne doit plus se contenter d'indiquer le débit désiré, il doit en plus indiquer le volume par course désiré » ; que selon le brevet opposé, ce sont les moyens de commande reliés aux moyens d'entrainement qui assurent le réglage automatique de la longueur de course en réponse au débit d'écoulement désiré et non l'opérateur qui ne fait pas partie des moyens de commande de la revendication ; que force est de constater en définitive, étant rappelé que toutes les revendications du brevet dépendent de la revendication 1 ainsi qu'il a été jugé par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 7 avril 2004 et comportent en conséquence la caractéristique « des moyens de commande reliés aux moyens d'entraînement pour régler les longueurs de course des pistons entre le point mort haut et leur point mort bas, respectivement, en réponse au débit d'écoulement désiré du liquide déchargé à la sortie du dispositif de pompage, non reproduite par les appareils WATERS 2690, 2695, 2790 et 2795 commercialisés depuis le mois d'août 2002 ; que le grief de contrefaçon du brevet EP 309 596 invoqué par les sociétés appelantes est dénué de fondement ainsi qu'il a été jugé à raison par les premiers juges ; que les sociétés appelantes soutiennent encore que les sociétés WATERS se seraient rendues coupables de contrefaçon par fourniture de moyens en incitant l'opérateur, aux moyens des instructions d'utilisation, à mettre en oeuvre l'invention en ajustant lui-même les longueurs de course des pistons en fonction du débit désiré et à bénéficier ainsi des enseignements du brevet ; que ce moyen n'est pas davantage fondé au regard des développements qui précèdent d'où il résulte que l'opérateur ne fait pas partie du dispositif revendiqué qui n'a pas pour objet de couvrir un ajustement manuel de la longueur de course des pistons en fonction du débit désiré mais un ajustement automatique réglé par les moyens de commande » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « dans les appareils modifiés, il existe une unité centrale qui commande le fonctionnement de la pompe et en particulier les moyens d'entraînement sous le contrôle d'un certain nombre de capteurs, un capteur de pression (9) servant à mesurer la pression de sortie de la première pompe, un capteur de pression (11) servant à mesurer la pression de la deuxième pompe et des codeurs qui permettent de mesurer la position des pistons alternatifs des première et deuxième pompes ; que chacun des moteurs des moyens d'entraînement des première et deuxième pompes est pourvu de son propre système d'entraînement et est contrôlé individuellement par l'unité centrale afin de permettre à la première pompe de pré-compresser le liquide à la pression de sortie du système de pompage avant de le décharger vers la deuxième pompe éliminant ainsi les pulsations du liquide délivré en sortie du système de pompage ; qu'ainsi, les pulsations sont éliminées en rendant identiques la pression à l'intérieur de la première pompe et la pression de sortie du système de pompage au moment de la phase de transfert de la première pompe vers la deuxième pompe ; que les appareils WATERS ont pour but non pas de « réduire, par une simple opération mécanique, les pulsations d'écoulement entraînées par la compressibilité des liquides dans les systèmes de pompes montées en série et ainsi les interférences qu'elles provoquent sur les résultats de mesure chromatographique » comme dans le brevet EP 0 309 596 des sociétés AGILENT mais de les éliminer en prévoyant une première phase de pré-compression destinée à l'élévation de la pression du liquide prélevé à partir du réservoir jusqu'au niveau de pression de la deuxième pompe avant de mettre en oeuvre le transfert du liquide vers la deuxième pompe pour supprimer les pulsations du liquide en sortie du système de pompage, au cours de cette phase le piston plongeur est déplacé à vitesse relativement élevée, puis au cours de la phase de compression fine, la pression dans la première pompe augmente moins rapidement de sorte que la pression de la pompe primaire est élevée doucement jusqu' au niveau de la pression qui domine dans la deuxième pompe ; que grâce à la synchronisation du mouvement des première et deuxième pompes, l'écoulement vers le dispositif de chromatographie s'effectue à débit constant et sans pulsation ; que le fonctionnement de ce système de pompage est décrit dans le rapport d'expertise contradictoire du professeur Roger X... ; qu'il est mis en oeuvre grâce à une méthode (débits, composition de la phase mobile, gradient et actions temporisées) fixée au moyen d'un système de gestion des solvants et enregistrée dans un fichier méthode ; que ce système de gestion des solvants permet à l'utilisateur de définir plusieurs paramètres de fonctionnement ; qu'ainsi le contrôle des pompes, le flux de la phase mobile et la composition de la phase mobile sont réglés par le biais d'un écran intitulé « mobile phase » sur lequel agit un opérateur ; que les débits initiaux et suivants de la phase mobile peuvent être définis par l'utilisateur qui peut également à partir de l'écran « mobile phase » prédéfinir le volume par course de la pompe pour faire correspondre la plage des débits de la pompe au flux requis de la phase mobile ; qu'une fois le volume par course réglé, l'utilisateur se sert de l'écran « mobile phase » pour régler le flux initial ; que la validité des choix opérés par l'utilisateur est vérifiée et peut amener le logiciel à émettre un signal d'alarme si un débit plus élevé que celui permis par le volume de course a été choisi ; qu'il ne peut être dit comme le font les sociétés AGILENT que l'émission de ce signal d'alarme équivaut à un réglage automatique effectué par le logiciel ; qu'en effet, dans les appareils WATERS un utilisateur et non les moyens de commande opère les choix qui lui paraissent les plus pertinents mais si un des critères retenus conduit à un dysfonctionnement l'opérateur en est averti pour redéfinir ce choix et le repenser ; qu'aucun caractère automatique du réglage n'est mis en oeuvre dans les appareils WATERS car il n'y a aucune sélection automatique du volume par course par le moyen de contrôle en fonction du débit ; que le réglage automatique des longueurs de course des pistons en fonction du débit d'écoulement par les moyens de commande enseigné par le brevet EP 0 309 596 n'est pas reproduit dans les appareils modifiés WATERS ; que le système WATERS 2695 commercialisé a pour valeur par défaut du volume unitaire du piston une valeur fixe de 130 microns par litre ; que cette valeur peut être utilisée sur toute la plage de débits allant de 0 à 10ml/min et il n'est pas prévu de diminution de volume par course pour un débit d' écoulement plus faible ; qu'ainsi, ce système ne reproduit pas un dispositif qui entraîne une diminution automatique du volume de course quand le débit diminue ; que dans les appareils WATERS le volume de course ne peut être modifié que sur intervention expresse de l'opérateur ; qu'aucune contrefaçon du brevet EP 0 309 596 dont est titulaire la société AGILENT TECHNOLOGIES GmbH n'est commise par les appareils modifiés commercialisés par les sociétés WATERS ; que la société Hewlett-Packard GmbH, la société AGILENT TECHNOLOGIES GmbH et la société AGILENT TECHNOLOGIES France seront en conséquence déboutées de leurs demandes de contrefaçon du brevet EP 0 309 596 par les appareils 2690, 2695, 2790 et 2795 et 2795 modifiés commercialisés par les sociétés WATERS et de leur demande subséquente de liquidation de l'astreinte fixée dans le jugement du 29 mai 2002 qui est sans objet » ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se fondant, pour écarter la contrefaçon du brevet n° 0 309 596, tant par reprod uction que par fourniture de moyens, sur le fait que ledit brevet n'aurait pas pour objet de couvrir un ajustement manuel de la longueur de course des pistons en fonction du débit désiré, la Cour d'appel a apprécié la contrefaçon sur la base d'une lecture erronée de la revendication 1 du brevet, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 613-3 et L. 615-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
ALORS, ENFIN, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la contrefaçon s'apprécie par les ressemblances et non par les différences, et se caractérise par la reproduction des moyens essentiels constituant l'invention ; qu'en relevant, pour écarter la contrefaçon, que dans les appareils WATERS modifiés, les pulsations seraient éliminées en rendant identiques la pression à l'intérieur de la première pompe et la pression de sortie du système de pompage au moment de la phase de transfert de la première pompe vers la deuxième pompe, quand il lui appartenait, indépendamment de l'adjonction de ces caractéristiques, de rechercher si les moyens essentiels constituant l'invention protégée par la revendication 1 du brevet n° 0 309 596 n'étaient pa s reproduits par les appareils WATERS modifiés, la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, en violation des articles L. 613-3 et L. 615-1 du Code de la propriété intellectuelle.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société AGILENT TECHNOLOGIES FRANCE de sa demande pour concurrence déloyale ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la société Hewlett-Packard GmbH, la société AGILENT TECHNOLOGIES GmbH et la société AGILENT TECHNOLOGIES France seront en conséquence déboutées de leurs demandes de contrefaçon du brevet EP 0 309 596 par les appareils 2690, 2695, 2790 et 2795 et 2795 modifiés commercialisés par les sociétés WATERS et de leur demande subséquente de liquidation de l'astreinte fixée dans le jugement du 29 mai 2002 qui est sans objet »
ALORS QUE les actions en contrefaçon et en concurrence déloyale ont des fondements distincts ; qu'en déboutant la société AGILENT TECHNOLOGIES FRANCE de sa demande en concurrence déloyale, sans se prononcer sur le bien-fondé de celle-ci, qui était fondée sur des faits distincts de la contrefaçon, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-15760
Date de la décision : 24/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 mai. 2011, pourvoi n°10-15760


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15760
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