LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 novembre 2008), que la société Sparazur (la société),ayant son siège en Suisse, est propriétaire d'un bien immobilier situé en France pour lequel elle a déposé des déclarations au titre de la taxe de 3% sur les immeubles possédés en France par des personnes morales ; qu'à la suite d'un contrôle de ces déclarations, l'administration fiscale lui a notifié des redressements portant sur la valeur vénale de l'immeuble ; qu'après avoir formé une réclamation contre ces redressements, qui a été rejetée, la société a assigné le directeur général des impôts devant le tribunal de grande instance ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que l'administration fiscale soutient que le pourvoi de la société, formé plus de quatre mois après la signification de l'arrêt attaqué, est irrecevable ;
Mais attendu qu'il résulte des productions que l'autorité suisse requise n'ayant pas procédé aux formalités de signification de l'arrêt, la demande de signification qui lui a été adressée le 17 décembre 2008 n'a pu faire courir le délai du pourvoi ; que celui-ci est recevable ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en décharge des compléments de taxes de 3% auxquelles elles a été assujettie au titre des années 2000, 2001, 2002, 2003 et 2004, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 26 de la Convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 « les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat à aucune disposition ou obligation y relative qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle seront ou pourront être assujettis les nationaux de cet Etat se trouvant dans la même situation » ; qu'il est de principe que des sociétés françaises et suisses possédant des immeubles en France se trouvent dans la même situation au sens de l'article 26 de la convention franco-suisse ; que, l'exonération de la taxe de 3% prévue aux articles 990 D à 990 G du code général des impôts dont sont susceptibles de bénéficier les sociétés étrangères est subordonnée au respect d'obligations déclaratives auxquelles échappent certaines sociétés de droit français ; que lesdites obligations constituent une inégalité de traitement prohibée par le texte susvisé ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a donc violé les textes susvisés ;
2° / qu'il est de principe que, lorsque l'administration conteste, en application de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales, le prix ou l'évaluation énoncés dans un acte ou portés dans une déclaration, il lui appartient d'établir le bien fondé de ses propres évaluations ; qu'en particulier, elle doit justifier la manière dont elle a calculé la surface utile pondérée d'un immeuble d'habitation ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait grief à l'administration fiscale de n'avoir fourni aucune indication quant aux modalités de calcul de la surface utile pondérée de l'immeuble litigieux ; que, par suite, en jugeant que l'exposante ne produirait aux débats aucun élément de nature à contredire la surface pondérée retenue par l'administration fiscale, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve, en violation du texte susvisé ;
3°/ qu'en application de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales pour remettre en cause l'évaluation d'un bien immobilier énoncée dans un acte ou portée dans une déclaration, l'administration fiscale doit recourir à des éléments de comparaison tirés de la cession de biens intrinsèquement similaires en fait et en droit ; qu'ainsi, la valeur vénale de biens immobiliers indivis doit être déterminée par référence à des cessions intervenues dans l'année ayant précédé l'année d'imposition ; qu'en l'espèce, l'exposante soulignait que les dates des cessions prises pour référence n'étaient pas pertinentes car ne correspondant pas à des cessions inter- venues l'année précédant celles de l'imposition ; qu'en se bornant à répondre que l'administration aurait « fourni neuf termes de comparaison pertinents et suffisants pour déterminer avec le maximum de précisions la valeur vénale du bien en cause », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales ;
4°/ qu'il est de principe que la valeur vénale d'un bien immobilier peut être justifiée par référence à des biens actuellement en vente réévalués par référence à des indices annuels de prix ; qu'en l'espèce, au soutien de sa requête, l'exposante produisait des annonces relatives à des biens intrinsèquement similaires proposés à la vente au cours des années 2007 et 2008 en faisant application de l'indice annuel d'évolution des prix dans la région pour chacune des années d'imposition en litige ; qu'en jugeant toutefois que de tels éléments de preuve seraient dépourvus de sérieux la cour d'appel a derechef méconnu le principe susvisé d'administration de la preuve figurant à l'article L.17 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt énonce que l'article 990 E du code général des impôts prévoit un système d'exonération qui concerne tant les sociétés françaises que les sociétés étrangères, et retient que si certains types de sociétés françaises n'ont pas à souscrire la déclaration n°2746 pour bénéficier de l'exonération de la taxe, c'est parce qu'elles sont soumises par la loi à des obligations déclaratives qui satisfont à l'objectif d'information de l'administration tel que poursuivi par l'article 990 E 3°du code général des impôts; qu'en l'état de ces énonciations, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que les obligations déclaratives prévues par le système d'exonération de l'article 990 du code général des impôts ne présentaient aucun caractère discriminatoire contraire à l'article 26 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que l'administration fiscale a fourni dans la notification de redressement des éléments descriptifs précis de l'immeuble en cause, notamment sa surface pondérée, et que la société n'a produit aux débats aucun élément les contredisant ; qu'il relève encore que pour rectifier la valeur vénale de l'immeuble, l'administration fiscale a fourni neuf termes de comparaison tirés de la cession de biens similaires entre le 15 juillet 1998 et le 28 octobre 2002, en mentionnant à chaque fois leur adresse, leur description, leur prix ainsi que leur prix au mètre carré ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a déduit que l'administration fiscale avait, dans la notification de redressement, justifié d'éléments à la fois pertinents et suffisants pour déterminer avec le maximum de précision la valeur vénale du bien en cause pour les années 2001 à 2004, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sparazur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à verser au directeur général des finances publiques la somme de 2 500 euros ; rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux conseils pour la société Sparazur
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de l'exposante en décharge des compléments de taxe de 3% auxquels elle a été assujettie au titre des années 2000, 2001, 2002, 2003 et 2004 ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le principe même de l'imposition : La SA SPARAZUR soutient que l'article 990 du Code général des impôts dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1992 qui assujettit à la taxe de 3% toutes les personnes morales dont le siège social est situé en France ou hors de France ne peut être applicable aux sociétés de droit suisse car entrainant une discrimination totalement contraire à l'article 26 de la convention franco-suisse qui dispose que « les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat à aucune disposition ou obligation y relative qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle seront ou pourront être assujettis les nationaux de cet Etat se trouvant dans la même situation ». Elle explique que les dispositions internes françaises prises en application de l'article 990 E du Code général des impôts telles que notamment celles mises en pratique par l'instruction du 22 octobre 1993 conduisent à infliger aux sociétés étrangères se trouvant dans une situation similaire à celle des société françaises, à l'égard des biens immobiliers détenus en FRANCE, des obligations toutes à la fois « autres » et « plus lourdes », et donc source de discrimination. Il convient de rappeler que l'article 990 E prévoit un système d'exonération qui concerne tant les sociétés françaises que les sociétés étrangères et que si les paragraphes 30 et suivants de l'instruction du 22 octobre 1993 ont effectivement prévu des mesures d'assouplissement pour permettre à certains types de sociétés françaises de bénéficier de l'exonération de la taxe sans avoir à souscrire la déclaration n°2746, c'est parce que lesdites sociét és sont par ailleurs soumises par la loi à des obligations déclaratives qui satisfont à l'objectif d'information de l'administration tel que poursuivi par l'article 990 E 3° du Code général des impôts, étant ajouté que si elles ne les respectent pas, elles restent soumises à la taxe de 3%. Il en résulte qu'il existe une égalité de traitement entre les sociétés françaises et les sociétés étrangères et que l'article 990 du Code général des impôts ne présente aucun caractère discriminatoire au regard des dispositions de l'article 26-1 de la Convention franco-suisse. En conséquence, il apparaît que c'est à juste titre que le premier juge par des motifs exacts en fait et pertinents en droit qui seront adoptés par le Cour a pu considérer que la SA SPARAZUR ne pouvait être déchargé des impositions réclamées en application de la taxe de 3% ; Sur la valeur vénale retenue par la Direction générale des impôts : La SA SPARAZUR conteste l'évaluation de la propriété retenue par la Direction générale des impôts pour servir de base au calcul de la taxe qu'elle estime beaucoup trop élevée en faisant valoir d'une part que l'administration fiscale a retenu une surface utile pondérée erronée qui dès lors ne lui a pas permis de vérifier la pertinence quant à leur date. L'administration fiscale dans la notification de redressement en date du 17 septembre 2004 a fourni les éléments suivants : « il s'agit d'une maison d'habitation d'une superficie de 275 m2 (6 pièces) construite en 1972 sur un terrain de 2.750 m2, elle est affectée d'une catégorie cadastrale de 03. Elle dispose d'une terrasse, d'une piscine de 60 m2 et d'un garage. La surface utile pondérée s'établit à 305 m2. Enfin, elle se situe à l'intérieur d'un domaine fermé et sécurisé, gardienné en permanence ». Il convient d'observer à titre liminaire que la SA SPARAZUR ne produit aux débats aucun élément qui contredirait ces éléments descriptifs et particulièrement la surface pondérée telle que retenue dans ce document. Pour rectifier la valeur vénale, l'administration a fourni neuf termes de comparaison tirés de la cession de biens similaires entre le 15 juillet 1998 et le 28 octobre 2002, en mentionnant à chaque fois leur adresse, leur description, leur prix ainsi que leur prix au m2. Ces éléments apparaissent tout à la fois pertinents et suffisants pour déterminer avec le maximum de précisions la valeur vénale du bien en cause par les années 2001, 2002, 2003 et 2004, étant précisé qu'ils ne peuvent être sérieusement contredits par les annonces relatives à des biens proposés à la vente courant 2008 versées aux débats par la SA SPARAZUR. En conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne l'imposition relative à l'année 2000 qui a fait l'objet d'un dégrèvement » ;
ALORS, PREMIEREMENT, QU'aux termes de l'article 26 de la Convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 « les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat à aucune disposition ou obligation y relative qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle seront ou pourront être assujettis les nationaux de cet Etat se trouvant dans la même situation » ; qu'il est de principe que des sociétés françaises et suisses possédant des immeubles en France se trouvent dans la même situation au sens de l'article 26 de la convention franco-suisse ; que, l'exonération de la taxe de 3% prévue aux articles 990 D à 990 G du Code général des impôts dont sont susceptibles de bénéficier les sociétés étrangères est subordonnée au respect d'obligations déclaratives auxquelles échappent certaines sociétés de droit français ; que lesdites obligations constituent une inégalité de traitement prohibée par le texte susvisé ; qu'en jugeant le contraire, la cour a donc violé les textes susvisés ;
ALORS, DEUXIEMEMENT, QU'il est de principe que, lorsque l'administration conteste, en application de l'article L. 17 du Livre des procédures fiscales, le prix ou l'évaluation énoncés dans un acte ou portés dans une déclaration, il lui appartient d'établir le bien fondé de ses propres évaluations ; qu'en particulier, elle doit justifier la manière dont elle a calculé la surface utile pondérée d'un immeuble d'habitation ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait grief à l'administration fiscale de n'avoir fourni aucune indication quant aux modalités de calcul de la surface utile pondérée de l'immeuble litigieux ; que, par suite, en jugeant que l'exposante ne produirait aux débats aucun élément de nature à contredire la surface pondérée retenue par l'administration fiscale, la Cour a renversé la charge de la preuve, en violation du texte susvisé ;
ALORS, TROISIEMEMENT, QU'en application de l'article L. 17 du Livre des procédures fiscales pour remettre en cause l'évaluation d'un bien immobilier énoncés dans un acte ou portés dans une déclaration, l'administration fiscale doit recourir à des éléments de comparaison tirés de la cession de biens intrinsèquement similaires en fait et en droit ; qu'ainsi, la valeur vénale de biens immobiliers indivis doit être déterminée par référence à des cessions intervenues dans l'année ayant précédé l'année d'imposition ; qu'en l'espèce, l'exposante soulignait que les dates des cessions prises pour référence n'étaient pas pertinentes car ne correspondant pas à des cessions intervenues l'année précédent celles de l'imposition ; qu'en se bornant à répondre que l'administration aurait « fourni neuf termes de comparaison pertinents et suffisants pour déterminer avec le maximum de précisions la valeur vénale du bien en cause », la Cour a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 17 du Livre des procédures fiscales ;
ALORS, QUATRIEMEMENT, QU'il est de principe que la valeur vénale d'un bien immobilier peut être justifiée par référence à des biens actuellement en vente réévalués par référence à des indices annuels de prix ; qu'en l'espèce, au soutien de sa requête, l'exposante produisait des annonces relatives à des biens intrinsèquement similaires proposés à la vente au cours des années 2007 et 2008 en faisant application de l'indice annuel d'évolution des prix dans la région pour chacune des années d'imposition en litige ; qu'en jugeant toutefois que de tels éléments de preuve seraient dépourvus de sérieux la Cour a derechef méconnu le principe susvisé d'administration de la preuve figurant à l'article L.17 du Livre des Procédures Fiscales.