COUR DE CASSATION 10 CRD 076
Audience publique du 4 avril 2011 Prononcé au 23 mai 2011
La commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, M. Straehli, conseiller, Mme Vérité, conseiller référendaire, en présence de M. Charpenel, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
REJET du recours formé par Jean-Philippe X..., contre la décision du premier président de la cour d'appel de Paris en date du 28 septembre 2010 qui a déclaré sa requête irrecevable.
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 4 avril 2011,le demandeur ne s'y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de M. X... ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;
Vu les conclusions en réponse de M. X... ;
Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur, à l'agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l'audience ;
Sur le rapport de M. le conseiller Straehli, les observations de M. X..., comparant et celles de Me Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Charpenel, le demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,
Attendu qu'en cours de délibéré, M. X... a fait parvenir des observations complémentaires à la commission qui les a reçues le 7 avril 2011 ;
Attendu que ces observations versées, après la clôture des débats, ne peuvent être admises en application du principe de la contradiction ;
Attendu que, par décision du 28 septembre 2010, le premier président de la cour d'appel de Paris a déclaré irrecevable la requête en réparation de M. Jean-Philippe X..., présentée à raison d'une détention provisoire effectuée du 4 avril au 22 août 1995, pour des faits qui auraient donné lieu à un arrêt de relaxe devenu définitif ;
Attendu que M. X... a formé un recours régulier contre cette décision pour obtenir l'allocation des sommes de 64 684 euros et de 150 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral ; qu'il a sollicité en outre 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les articles 149 à 150 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ;
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier pénal que M. X... a été mis en examen et placé en détention provisoire des chefs d'escroquerie, abus de confiance, établissement de comptes inexacts, faux en écriture privée et usage, ainsi que de corruption ; qu'il a été déclaré coupable des seuls faits de faux et usage et relaxé pour les autres délits par la cour d'appel de Paris, le 5 novembre 2008 ; que le prévenu a formé un pourvoi contre cet arrêt ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation de M. X..., prise de ce que son pourvoi contre l'arrêt l'ayant condamné pour faux et usage serait sans incidence sur la recevabilité de sa requête dès lors que ces infractions ne pouvaient fonder sa détention provisoire, et déclarer la requête irrecevable, le premier président retient qu'il ne lui appartient pas d'interpréter la motivation du placement en détention provisoire du requérant ni de s'interroger sur la probabilité ou non de l'incarcération dans le cas où celui-ci aurait été mis en examen du chef de l'une ou l'autre des infractions ; qu'il ajoute que tous les chefs d'infraction visés dans la mise en examen entraient dans la motivation du placement en détention provisoire et de sa prolongation et qu'en outre, ces délits autorisaient cette mesure ;
Attendu que le demandeur fait valoir que les motifs retenus pour le priver de liberté, qu'ils se réfèrent aux investigations en cours ou à la préservation de l'ordre public, sont étrangers aux seuls délits de faux et usage pour lesquels il a été également mis en examen ;
Attendu que l'agent judiciaire du Trésor, comme le procureur général, concluent au rejet du recours, le premier président ayant, selon eux, estimé à bon droit que la requête était irrecevable en l'état ;
Attendu que, lorsqu'un demandeur, placé en détention provisoire du chef de plusieurs infractions, ne bénéficie d'une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement que pour certaines d'entre elles, la compatibilité entre les infractions dont il a été déclaré coupable et la détention provisoire subie s'apprécie en tenant compte de la durée maximale de la détention provisoire que la loi autorise pour les infractions retenues ;
Qu'il s'en déduit que le demandeur est irrecevable à présenter une requête en réparation tant qu'il n'a pas été statué par une décision devenue définitive sur chacune des infractions faisant l'objet de la mise en examen, de la prévention ou de l'accusation ;
Que c'est à bon droit qu'en l'absence de décision définitive intervenue du chef de ces délits, le premier président a déclaré la demande de M. X... irrecevable ;
Qu'en conséquence, il y a lieu de rejeter le recours ;
PAR CES MOTIFS :
ECARTE les observations complémentaires parvenues à la Commission le 7 avril 2011 ;
REJETTE le recours de Jean-Philippe X... ;
Le CONDAMNE aux dépens ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 23 mai 2011 par le président de la commission nationale de réparation des détentions ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.