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18/05/2011 | FRANCE | N°10-25421

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mai 2011, 10-25421


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2143-7 et L. 2143-8 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu que par requête, déposée au greffe le 7 avril 2010, le syndicat CGT-FAI, et MM. X..., Y... et Z... ont saisi le tribunal d'instance d'une contestation de la désignation de trois délégués syndicaux par un syndicat FO au sein de la société First Aquitaine industrie ;
Attendu que pour déclarer cette action forclose, le tribunal d'instance, après avoir relevé que la réunion du

24 mars 2010, invoquée par le syndicat CGT comme date à laquelle il avait a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2143-7 et L. 2143-8 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu que par requête, déposée au greffe le 7 avril 2010, le syndicat CGT-FAI, et MM. X..., Y... et Z... ont saisi le tribunal d'instance d'une contestation de la désignation de trois délégués syndicaux par un syndicat FO au sein de la société First Aquitaine industrie ;
Attendu que pour déclarer cette action forclose, le tribunal d'instance, après avoir relevé que la réunion du 24 mars 2010, invoquée par le syndicat CGT comme date à laquelle il avait appris les désignations des délégués syndicaux par le syndicat FO, n'est pas plus déterminante en terme de publicité que celle du 17 mars de sorte que rien n'autorise le tribunal à retenir le 24 mars comme date de la connaissance des désignations et que le tribunal doit juger que dès le 17 mars les co-demandeurs avaient connaissance de la désignation des délégués syndicaux ;
Attendu, cependant, qu'en l'absence d'affichage de la désignation, la preuve de la date de la connaissance de cette désignation par les tiers pèse sur la partie qui se prévaut de l'expiration du délai de forclusion ;
Qu'en statuant comme il l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations qu'à la date de la réunion du 17 mars, qu'il a retenue comme point de départ de la forclusion, ni la présentation ni le mode de convocation des délégués syndicaux ne permettait de s'assurer que les requérants avaient pu avoir connaissance des désignations contestées, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 23 septembre 2010, entre les parties, par le tribunal d'instance de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Libourne ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société First Aquitaine industries à payer aux demandeurs la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat du syndicat CGT FAI et de MM. X..., Y..., Z..., A..., B... et C...

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR déclaré les contestations formées par le syndicat CGT FAI et Messieurs X..., Y... et Z... irrecevables comme tardives ;
AUX MOTIFS QUE le recours sur contestation de désignation des délégués syndicaux n'est recevable que s'il est introduit dans les quinze jours suivant l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa de l'article L 2143-7 du Code du Travail, lequel dispose que les noms du ou des délégués syndicaux sont portés à la connaissance de l'employeur dans des conditions déterminées par décret et sont affichés sur des panneaux réservés aux communications syndicales ; ceci exposé, dans le cas d'espèce, la contestation n'émane pas de l'employeur mais de trois salariés de la société employeur ainsi que du syndicat CGT F.A.I ; le délai de quinze jours court à l'égard des organisations syndicales et des salariés de l'entreprise, du jour où le nom du ou des délégués syndicaux a été porté à leur connaissance par affichage sur les panneaux réservés aux communications syndicales ou par tout autre moyen ; sur la publicité par affichage : aucun élément probant tiré des débats ou des pièces versées au dossier ne permet à la juridiction d'appréhender si la formalité d'affichage (qui n'est pas spécialement imputable à l'employeur) des trois désignations ait pu être vêtue ; rien ne permet davantage de dater un éventuel affichage ; le débat sur l'opposabilité aux tiers concernés de ce mode de publicité ne revêt donc aucune utilité sur le plan juridique ; en l'espèce, la désignation de messieurs D... Pierre, E... Bruno et F... Eric n'a pas été portée à la connaissance du syndicat CGT F.A.I. et de messieurs X..., Y... et Z... par le biais d'un affichage ; cependant, l'affichage n'est pas le seul moyen existant de publicité de la désignation dans la mesure où la notion de publicité "par tout moyen" coexiste et doit être analysée à défaut d'affichage ; seule la notion de publicité "par tout autre moyen" doit donc être retenue pour l'analyse à laquelle doit se livrer la juridiction de céans, tant à l'égard du syndicat CGT que des trois autres demandeurs ;
Et AUX MOTIFS QUE, sur la publicité "par tout autre moyen" : les co-demandeurs prétendent avoir eu connaissance des désignations querellées lors d'une réunion du 24 mars 2010 relative aux risques psycho-sociaux ; que partant, leur contestation a été bien formée dans les délais légaux requis pour ce faire ; à cet égard, force est de constater que si l'annulation des désignations est sollicitée, c'est bien que les codemandeurs en ont eu connaissance antérieurement à la saisine du tribunal ; il importe dès lors de se livrer à une étude chronologique objective des événements à compter de mars 2010 en fonction des pièces et documents versés aux débats : - 3 mars 2010 : convocation des délégués syndicaux aux négociations annuelles ; - 11 mars 2010 : 1er tour des élections ; - 17 mars 2010 à 9 h 30 : négociations annuelles syndicats-employeurs (dont la CGT et F.O. où, pour ce dernier sont présents, ou convoqués, Messieurs D..., G..., F... et E...) ; - 17 mars 2010 à 10 h 15 : questionnaire risques psycho-sociaux avec les mêmes protagonistes sauf à y ajouter pour F.O., M. H... ; - 18 mars 2010, courrier du directeur des ressources humaines de la société relatif au calendrier des négociations annuelles, relatant l'issue de la réunion du 17 mars 2010 "avec les organisations syndicales représentatives" et fixant le planning à venir pour les 24 et 31 mars et pour le 7 avril 2010 ; - 24 mars 2010, négociations annuelles, avec les mêmes protagonistes que lors de la réunion du 17 mars 2010 ; - mars 2010, idem ; le tribunal ignore les raisons pour lesquelles les co-demandeurs font le choix du 24 mars 2010 pour faire courir le délai de quinze jours, alors même que ce 24 mars 2010, les trois membres de F.O, délégués syndicaux convoqués par l'employeur pour mener de concert les négociations annuelles obligatoires, intervenaient pour la troisième fois dans leurs fonctions officielles ; à défaut d'autres documents exploitables sur le plan probatoire, le tribunal de céans ne peut retenir la date de prise de connaissance des désignations querellées telle qu'alléguée par les co-demandeurs, à savoir le 24 mars 2010, dans la mesure où elle n'est pas plus déterminante sur le plan de la publicité que celle du 17 mars 2010 ; car lors de la réunion du 24 mars 2010, la présentation et le mode de convocation des délégués syndicaux ont été les mêmes que pour celle du 17 mars 2010 ; et le 24 mars n'a pas été plus précisé la qualité de délégué syndical des trois défendeurs que le 17 mars 2010, qu'ils soient "anciens" ou "nouveaux" délégués syndicaux (distinction opérée par les demandeurs) ; de telle sorte que rien n'autorise le tribunal à retenir le 24 mars 2010 comme date de la connaissance des désignations querellées par le syndicat CGT et par messieurs X..., Y... et Z... ; en vertu de quoi et des éléments fournis aux débats, le tribunal doit juger que dès le 17 mars, les co-demandeurs avaient connaissance que messieurs D..., E... et F... étaient bien désignés délégués syndicaux F.O ; ainsi, le délai de contestation de quinze jours partant à compter du 17 mars 2010, passé ce délai, les désignations sont purgées de tout vice, s'agissant d'un délai de forclusion ; or les codemandeurs ont saisi le tribunal par requête enregistrée le 7/4/2010, soit hors des délais légaux pour ce faire (expiration du délai le 1er avril 2010) ; les contestations tant de la CGT FAI que des Messieurs X..., Y... et Z... en qualité de salariés, seront donc déclarées irrecevables comme tardives, sans qu'il soit utile procéduralement d'examiner l'autre fin de non recevoir soulevée par la société employeur ;
ALORS QUE les exposants avaient fait valoir que, lors des réunions du 17 mars 2010, la qualité de délégués syndicaux nouvellement désignés de Messieurs Pierre D..., Bruno E... et Eric F... n'avait pas été mentionnée et donc que les parties qui se prévalaient de la forclusion n'établissaient pas qu'ils avaient eu connaissance de ces nouvelles désignations à cette date ; que le Tribunal a relevé que la qualité de délégués syndicaux de Messieurs Pierre D..., Bruno E... et Eric F... n'avait pas été précisée le 17 mars 2010 ; qu'en considérant néanmoins que le délai de contestation courrait à compter du 17 mars 2010, le Tribunal n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient et partant a violé les articles L 2143-7 et L 2143-8 du Code du Travail (anciennement L 412-15 et L 412-16) ;
ALORS en tout état de cause QUE Messieurs X..., Y... et Z... n'étaient pas présents lors des réunions du 17 mars 2010 ; que le Tribunal a fait courir le délai de contestation non seulement pour le syndicat CGT mais également pour les trois salariés à compter de cette date ; qu'en statuant comme il l'a fait, le Tribunal a violé les articles L 2143-7 et L 2143-8 du Code du Travail (anciennement L 412-15 et L 412-16) ;
ALORS au demeurant QUE la seule présence à une réunion de négociation ne vaut pas preuve de la qualité de délégué syndical des salariés représentant le syndicat ; qu'en statuant autrement le Tribunal a violé l'article L 2242-1 du Code du travail
ALORS en outre QUE la charge de la preuve que les contestants ont eu connaissance des désignations plus de 15 jours avant la saisine du Tribunal incombe exclusivement aux parties qui se prévalent de la forclusion ; que le Tribunal a relevé que les contestants ne justifiaient pas des raisons pour lesquelles ils indiquaient avoir eu connaissance des désignations le 24 mars plutôt que le 17 mars ; qu'en statuant comme il l'a fait, le Tribunal a violé l'article 1315 du Code Civil ;
ALORS enfin QUE les exposants avaient fait valoir d'une part que les convocations aux réunions mentionnaient les noms des anciens délégués syndicaux dont les mandats avaient pris fin suite aux élections et d'autre part que la présence des salariés aux réunions n'impliquait pas qu'ils soient délégués syndicaux ni qu'ils aient été nouvellement désignés en cette qualité ; qu'en effet, la seule présence à une réunion de négociation n'implique pas la qualité de délégué syndical ; que le Tribunal s'est référé à des convocations et à la présence de Messieurs D..., E... et F... aux réunions sans rechercher, comme il y était invité, s'il en résultait que les salariés présents avaient la qualité de délégué syndical ni si les nouvelles désignations des délégués syndicaux avaient été portées à la connaissances des exposants ; qu'en statuant comme elle l'a fait, le Tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L 2143-7 et L 2143-8 du Code du Travail (anciennement L 412-15 et L 412-16).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-25421
Date de la décision : 18/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Bordeaux, 23 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mai. 2011, pourvoi n°10-25421


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.25421
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