LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la caisse du Régime social des indépendants de son désistement à l'égard du ministre chargé de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui a formulé une demande de retraite personnelle le 13 mars 1996 en vue d'une prise d'effet au 1er août 1996, a demandé en 2005 à la caisse du Régime social des indépendants (la caisse RSI) la révision du montant de sa pension qui ne prenait pas en compte ses cotisations au titre du régime d'assurance vieillesse des commerçants Organic ; que la caisse RSI lui a octroyé cet avantage à compter du 1er avril 2005 ; que l'intéressée, après rejet de son recours amiable, a saisi une juridiction de sécurité sociale pour obtenir le bénéfice de l'avantage au 1er août 1996 ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale et l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
Attendu que pour retenir à la charge de la caisse RSI un manquement à l'obligation d'information et la condamner à remplir les droits de Mme X... au regard de la demande de retraite du 13 mars 1996, l'arrêt énonce que l'intéressée a rempli sa demande de retraite personnelle en précisant qu'elle appartenait à «plusieurs régimes de retraite en France» ;
Qu'en statuant ainsi alors que, dans la demande de retraite litigieuse, Mme X... avait répondu par l'affirmative aux questions «avez-vous appartenu ou appartenez-vous à un autre régime de retraite en France» et «régime de non salariés, commerçants, industriels, artisans, professions libérales, exploitants agricoles» mais n'avait indiqué ensuite que le seul régime d'assurance vieillesse des commerçants ce dont il résultait que l'organisme social dépositaire de la demande, qui n'était pas la caisse RSI alors inexistante, n'avait pas été informé par l'intéressée de ce qu'elle était également ressortissante du régime d'assurance vieillesse des commerçants dénommé Organic, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la déclaration qui ne mettaient pas en mesure l'organisme social de remplir son obligation d'information, a violé le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la caisse du Régime social des indépendants Côte-d'Azur
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté le défaut d'information de la caisse du RSI concernant la demande de Madame X..., tendant à la révision de la prise d'effet de sa retraite et d'avoir renvoyé la Caisse RSI à remplir de ses droits Madame X..., au regard de la demande de retraite personnelle en date du 13 mars 1996,
AUX MOTIFS QUE certes l'article R 351-37 stipule que « si l'assuré n'indique pas la date d'entrée en jouissance de sa pension. celle-ci prend effet le premier jour du mois suivant la réception de la demande par la caisse chargée de la liquidation des droits à pension de vieillesse » ; que la décision querellée, en confirmation de la décision de la CRA, est rendue sur ce seul fondement ; que toutefois la décision de la CRA en date du 13 octobre 2005 a formulé le rejet de la demande de l'assurée sur un fondement différent, en considérant que cette dernière « n'a pas indiqué son activité commerciale auprès de la CRAM et de l'AVA lors de sa demande de retraite en 1996 et qu'ainsi la dite demande n'a pu être considérée comme étant faite au titre de l'ensemble des régimes » ; qu'il en résulte que le premier juge aurait dû rechercher au-delà de l'application stricte du texte applicable, si l'obligation générale d'information de l'organisme de sécurité sociale avait été respectée en l'espèce, tel qu'en outre la défense de l'assurée le soulève ; qu'en effet en tout état de cause, conformément aux dispositions de l'article R 112-2 du code de la Sécurité Sociale, une obligation d'information générale pèse sur les organismes de sécurité sociale dont le champ est large puisque cette obligation concerne aussi bien les prestations auxquelles peuvent prétendre les assurés, que les interrogations relatives aux procédures de contrôle, de redressement ou de recouvrement engagées par les caisses, ou les possibilités de recours et de procédures contentieuses engagées à l'encontre des caisses ; qu'en l'espèce la défense de l'assurée, avec production des pièces au dossier, soulève à juste titre que Charlette X... : - a rempli sa demande de retraite personnelle en précisant qu'elle appartenait à « plusieurs régimes de retraite en France », - a reçu ensuite notamment 2 courriers de la caisse RSI, dont l'un précise « vous n'avez pas à vous adresser aux différentes institutions de retraite votre dossier leur a été automatiquement transmis », et l'autre rappelle « pour nous permettre de déterminer si vous avez fait votre demande de retraite au titre de l'ensemble des régimes nous pourrons les questionner à ce sujet » ; qu'il en résulte que la caisse RSI ne saurait affirmer qu'elle n'a pas été réellement en mesure de porter l'information à la connaissance de l'assurée ; qu'en outre, en matière d'assurance vieillesse, il est établi par une jurisprudence constante qu'une caisse manque à ses obligations d'information dés lors que leur respect aurait permis à l'assuré de faire utilement sa demande de pension ; qu'en conséquence la CRA. par sa décision en date du 13 octobre 2005, a indiqué à tort que l'assurée n'avait pas précisé ses différentes activités commerciales et que sa demande ne pouvait être considérée comme étant faite au titre de l'ensemble des régimes ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la caisse n'a pas respecté les exigences relatives à l'obligation d'information, rappelées par notamment les articles L 583-l et R 112-2 du code de la Sécurité Sociale ; qu'il convient en conséquence de considérer qu'en rejetant le recours, le premier juge n'a pas fait une juste appréciation des faits de la cause et que sa décision doit être infirmée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'obligation d'information des organismes de sécurité sociale à l'égard de leurs assurés n'est sanctionnée que si elle est expressément prévue par un texte ; qu'en retenant un manquement de la caisse du RSI à son devoir d'information RSI sur la base des seuls articles L 583-1 et R 112-2 du Code de la sécurité sociale qui n'étaient pas applicables aux caisses AVA et ORGANIC dont est issu le Régime Social des Indépendants, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en statuant ainsi, sans rechercher si la caisse AVA ou la caisse ORGANIC avait violé les obligations d'information mises à sa charge par le seul article L 161-17 du code de la Sécurité Sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
ALORS, DE TROISÈME PART, QUE l'obligation d'information n'est sanctionnée que si l'assuré a fourni à la caisse les éléments permettant de le renseigner utilement ; qu'en retenant la faute de la caisse du RSI venue aux droits de la caisse AVA et de la caisse ORGANIC, sans rechercher si Madame X... avait informé l'un ou l'autre de ces deux organismes de l'exercice d'une activité commerciale ou de son affiliation à cette dernière caisse de retraite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 161-17 du code de la Sécurité Sociale, ensemble l'article 1382 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, QU'en statuant ainsi, notamment, au motif que la demande de retraite personnelle déposée par Madame X... préciserait qu'elle appartenait à « plusieurs régimes de retraite en France », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette demande, en violation de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir renvoyé la caisse du RSI à remplir de ses droits Madame Charlette X..., épouse Y..., au regard de sa demande de retraite personnelle en date du 13 mars 1996 ;
AUX MOTIFS QU'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la caisse n'a pas respecté les exigences relatives à l'obligation d'information, rappelées par notamment les articles L 583-l et R 112-2 du code de la Sécurité Sociale ; qu'il convient en conséquence de considérer qu'en rejetant le recours, le premier juge n'a pas fait une juste appréciation des faits de la cause et que sa décision doit être infirmée ; que toutefois la demande de dommages et intérêts sera rejetée, l'assurée n'apportant pas la preuve d'un préjudice et donc d'un lien de causalité entre un éventuel préjudice et la faute ou l'erreur commise par l'organisme ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le régime d'assurance vieillesse constitue un régime légal qui ne peut être ni modifié ni aménagé par la volonté des parties, de sorte que dès lors que la pension a été liquidée conformément à la législation en vigueur, il ne saurait être procédé à l'annulation de la décision au prétexte d'un manquement de la caisse à ses obligations ou d'une erreur de l'assuré ; qu'en infirmant la décision de la caisse du RSI fixant au 1er avril 2005 la date d'effet de la liquidation de la pension de retraite attribuée à Madame X..., pour fixer cette date « au regard » d'une précédente « demande de retraite personnelle en date du 13 mars 1996 » qui ne concernait pas le régime litigieux , et ce au seul motif d'un prétendu manquement de la caisse à son devoir d'information, la cour d'appel a violé par fausse application les articles L 351-1, R 351-34, R 351-35 et R 351-37 du Code de la sécurité sociale ;
ALORS, D'AUTRE PART QU'en statuant ainsi, sans préciser en définitive pour quelles raisons il convenait de renvoyer la caisse de RSI, venant aux droits de la caisse ORGANIC, à remplir de ses droits l'assurée au regard de sa demande de retraite personnelle du 13 mars 1996, et non de celle formée auprès de cette caisse le 29 mars 2005, la cour d'appel n'a pas satisfait aux obligations de l'article 455 du Code de procédure civile, qu'elle a donc violé ;
ALORS, ENFIN, QU'en tout état de cause, en statuant ainsi, tout en constatant expressément l'absence de « preuve d'un préjudice et donc d'un lien de causalité entre un éventuel préjudice et la faute ou l'erreur commise par l'organisme », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1382 du Code civil, qu'elle a donc violé par fausse application.