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10/05/2011 | FRANCE | N°10-15651

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 mai 2011, 10-15651


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la commune de Creissels du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme X... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 15 décembre 2009), que les consorts Y... et M. Z... ayant refusé l'offre d'indemnisation que leur a faite la commune de Creissels pour l'expropriation à son profit de parcelles leur appartenant, celle-ci a saisi le juge d'une demande de fixation des indemnités dues ;

Sur les premier et second moyens, réunis :

Vu les articles L.

13-14 et L. 13-15- I. du code de l'expropriation ;

Attendu que pour évaluer à 15...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la commune de Creissels du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme X... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 15 décembre 2009), que les consorts Y... et M. Z... ayant refusé l'offre d'indemnisation que leur a faite la commune de Creissels pour l'expropriation à son profit de parcelles leur appartenant, celle-ci a saisi le juge d'une demande de fixation des indemnités dues ;

Sur les premier et second moyens, réunis :

Vu les articles L. 13-14 et L. 13-15- I. du code de l'expropriation ;

Attendu que pour évaluer à 15 euros le m ² les parcelles expropriées, à la date de la décision de première instance, 11 avril 2008, l'arrêt se fonde sur des éléments de référence constitués de terrains à bâtir ou des terrains à lotir, ainsi que sur des éléments de plus-value émanant d'une future urbanisation ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que les parcelles expropriées ne pouvaient constituer des terrains à bâtir en raison de l'inexistence ou de l'insuffisance des réseaux et dessertes, et que s'agissant de l'achat de terrains à lotir à La Cavalerie par la société Saphyr, elle ignorait tout des caractéristiques du terrain nu par rapport à la Plaine de Buech, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches des moyens :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre des expropriations) ;

Condamne les consorts Y... et M. Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts Y... et M. Z... à payer la somme de 2 500 euros à la commune de Creissels ; rejette la demande des consorts Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la commune de Creissels

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fixé à la somme globale de 142. 570 € l'indemnité d'expropriation due aux consorts Y... ;

AUX MOTIFS QUE la date de référence non contestée est le 20 décembre 1999, date de la révision du plan d'occupation des sols par le conseil municipal ayant classé les parcelles en zone 1NA, le tout par application du code de l'urbanisme (article L. 230-3) qui retient pour déterminer cette date le plus récent des actes rendant public le plan local d'urbanisme ou l'approuvant, le révisant ou le modifiant et délimitant la zone dans laquelle est situé le terrain litigieux ; que la zone 1NA est décrite comme « équipée, destinée à être urbanisée à court ou moyen terme sous forme d'opérations groupées » ; qu'y sont admis notamment des lotissements et groupes d'habitation sous réserve que les opérations comportent au moins trois lots destinés à la construction à usage d'habitation et soient équipés en conséquence ; que toute construction à usage d'habitation devra être raccordée au réseau public d'eau potable, au réseau collectif d'assainissement, au réseau collecteur d'eau pluviale, outre le nécessaire accès automobile sur une voie publique ou privée communale, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin (et éventuellement obtenu par application de l'article 682 du code civil) ; que dans ce contexte reprécisé, il n'est pas sérieusement contesté, ainsi que l'a relevé le premier juge lors du transport sur les lieux, que l'ensemble des immeubles se situent dans une plaine à vocation initialement agricole et dépourvue de tout élément de viabilité, sur une surface relativement plane ; qu'en réalité, il ne peut s'agir en droit de terrain à bâtir (dessertes et réseaux inexistants ou insuffisants), mais qu'il existe un potentiel de constructibilité susceptible à l'évidence d'intéresser un aménageur-lotisseur, ce qui ramène au véritable débat, à savoir celui de la valorisation qui doit se faire, code de l'expropriation oblige, à la date du jugement de premier ressort, soit le 11 avril 2008 ; qu'il n'est pas contestable, ni d'ailleurs contesté, que les conditions de la double majorité prévue par l'article L. 13-16 du code de l'expropriation ne sont pas réunies ; que quatre des accords amiables mis en avant par l'expropriant sont antérieurs à la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2006, ce qui a pour conséquence pour le juge l'absence d'obligation de « prendre pour base » ces quatre accords ou même d'en « tenir compte » au sens de l'article L. 13-16 précité ; que néanmoins, et ainsi que l'a retenu de façon pertinente le premier juge, rien n'interdit au juge de l'expropriation, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation, d'estimer que ces termes de référence présentent une certaine pertinence ; que force est de constater qu'il résulte de cinq termes de comparaison que sur le même site, entre juillet 2004 et octobre 2006, des terrains en zone NA ou en NA et ND ont pu se négocier à une moyenne de 5, 24 € le m ², avec toutes les réserves découlant nécessairement du zonage non totalement transposable, du temps écoulé, et des différences qui peuvent affecter telle ou telle parcelle, les expropriés insistant sur l'absence de transposabilité et la commune ayant tendance à édulcorer les différences, ou à insister sur la qualité des parcelles concernées (E..., F..., G..., H..., B..., SCI Bellevue) ; que la commune propose un autre terme de référence E.../ I..., mutation du 27 décembre 2006, où une parcelle à moins de 200 mètres du centre ville, en zone AU1 du plan local d'urbanisme (équivalent 1NA du plan d'occupation des sols) a été négociée à 6, 41 € le m ², ce qui n'est pas commenté par les appelants ; que les expropriés se fondent sur un rapport C... qui propose deux méthodes, à savoir la méthode des coûts d'aménagement et la méthode par comparaison ; que la première, outre qu'elle table sur un prix de terrain nu égal à 33 % de celui du terrain équipé, repose en réalité sur deux ventes uniquement, à savoir les mutations J.../ K... (6 janvier 2003) et F.../ L... (25 septembre 2006) ; qu'au-delà des critiques doctrinales et des incertitudes techniques qui pèsent sur cette méthode, force est de constater la fragilité du calcul, tant dans son principe que dans son assiette (en l'espèce, deux ventes seulement) ; que s'agissant de la méthode par comparaison, M. C... propose trois termes de référence à La Cavalerie, à Rivière sur Tarn et à Creissels ; que l'attestation du maire de Rivière sur Tarn en date du 20 février 2007 est trop imprécise, et ne parle que « d'estimation » ; que l'attestation notariale de Maître D... évoque une mutation M.../ SCI JCR en date du 16 août 2002, pour une parcelle de terrain à bâtir à Creissels, de 14. 280 m ² pour 9, 6 € le m ² ; que la commune rétorque qu'un permis de construire a été accordé pour cette parcelle le 25 novembre 2003 ; que l'opération de lotissement à La Cavalière, par la SARL Saphyr, est un exemple, certes isolé en l'état des éléments versés au dossier, d'un « terrain à bâtir » acheté 15, 24 € le m ² (8 juillet 2005 – zonage NA) et revendu loti le 3 octobre 2007 à 60, 6 € le m ² (cf. : mutation EURL Saphyr/ N...) ; que le rapport terrain nu/ terrain loti est de 1 à 4, la cour ignorant par contre tout des caractéristiques du terrain nu de La Cavalerie par rapport à la Plaine de Buech ; que la commune revendique toutefois et produit une promesse de vente B..., en date du 20 février 2006, pour 3975 m ² ; qu'est prévue en réalité une dation en paiement sous forme d'un lot de 839 m ² dont 290 m ² inconstructibles, dépendant du futur lotissement communal Plaine de Buech, lot entièrement viabilisé et raccordé aux réseaux ; que le prix prévu est donc manifestement sous-évalué (18. 600 €) puisque le commissaire du gouvernement reconnaît (note d'ordre intérieur) que le terrain aménagé et loti se négocie à 55 ou 60 € le m ², en zone d'habitation, et 31 € hors lotissement, ce qui apparaît bien le moins ; que le lot attribué à M. B... valait donc au moins 55 € x 839 – 290 m ²) soit 30. 195 €, et même 46. 145 € (839 m ²) ce qui ramène à une valeur minimale comparable à celle de la SCI Bellevue, soit 7, 59 € le m ² (30. 195 € : 3975 m ²), et plus certainement de 11, 60 euros le m ² (46. 145 euros : 3975 m ²) ; qu'en effet, la mutation Bellevue a été conclue le 24 décembre 2007 à 7, 57 € le m ² (28. 966 € : 3823 m ²), la promesse de vente datant du 30 octobre 2006 ; qu'il s'agit d'un zonage mixte (1NA et ND), avec une maisonnette de 19 m ² dont l'état de ruine n'est pas contesté (cf. : commentaire C... p. 5), non utilisée depuis les décennies 30/ 40, et qui devra être démolie ; que le document accompagnant l'arrêté portant déclaration d'utilité publique (cote n° 8 de la commune) indique textuellement : « Le projet présenté par la commune de Creissels est tout d'abord la continuité de l'existant ce qui est un avantage tant au point de vue environnemental qu'économique. La viabilité est en partie existante sur ce secteur. Il existe une bonne desserte en réseaux et en voirie à proximité immédiate. Le secteur est accessible à partir de la RD 992 sur laquelle a été aménagé un carrefour giratoire. Ce carrefour permet un accès direct à la ville de Millau. La future urbanisation est entourée d'une zone d'emplois (ZA de Raujolles) et de terrains de sport permettant l'activité humaine. La zone d'urbanisation projetée ne présente pas de contraintes pour la construction … pas de risque géologique … pas de zone inondable » ; qu'en conclusion, et compte tenu de la promesse B... ci-dessus examinée, et de la tendance qui se dégage dès 2002 pour des terrains à bâtir certes (9, 6 € le m ² – 16 août 2002 – M.../ JCR) et des terrains à lotir (8 juillet 2005 : 15, 24 € le m ² SARL Saphyr) outre le prix SCI Bellevue pour une parcelle moins bien zonée en partie, la cour estime que les éléments de plus-value ci-dessus repris et qui émanent de l'enquête d'utilité publique permettent d'évaluer à 15 € le m ² les parcelles litigieuses en avril 2008 ; que les consorts Y... peuvent donc justement revendiquer 128. 700 € (8580 m ² x 15 €), outre un remploi de 13. 870 €, soit 142. 570 € ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'en affirmant d'emblée que les parcelles en cause ne constituaient pas des terrains à bâtir en raison de dessertes et de réseaux inexistants ou insuffisants (arrêt attaqué, p. 7 § 1), puis en se fondant pour se déterminer sur le prix de transactions concernant des terrains à bâtir (mutation M.../ J. C. R., cf. arrêt attaqué, p. 9 § 2), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'en se fondant pour se déterminer sur le prix d'une transaction d'un terrain à lotir situé dans la commune de La Cavalerie, située à 20 km de Creissels (mutation Eurl Saphyr/ N..., cf. arrêt attaqué, p. 8 § 6 et p. 9 § 2), tout en constatant qu'il s'agissait d'un « exemple certes isolé » et qu'elle ignorait « tout des caractéristiques du terrain nu de La Cavalerie par rapport à la Plaine de Buech », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'en indiquant que la commune proposait un terme de référence constitué par une mutation concernant une parcelle située à moins de 200 mètres du centre ville, dans une zone équivalent à la zone 1NA du plan d'occupation des sols, négociée à 6, 41 € le m ², puis en relevant que ce terme de comparaison n'était pas « commenté » par les appelants (mutation E.../ I..., cf. arrêt attaqué, p. 7 § 6), sans expliquer ensuite en quoi ce terme de comparaison qu'elle écartait n'était pas pertinent, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, EN QUATRIEME LIEU, QUE le juge de l'expropriation doit tenir compte, pour fixer l'indemnité due à l'exproprié, des accords réalisés à l'amiable à l'intérieur des zones d'intervention foncière, des zones d'aménagement différé et des périmètres provisoires ; que dans ses conclusions d'appel (p. 2 § 3), la commune de Creissels faisait valoir qu'une zone d'aménagement différé avait été instaurée par arrêté préfectoral du 23 septembre 1998 ; qu'en estimant que quatre des accords amiables invoqués par la commune ne pouvaient être pris en compte dès lors qu'ils étaient antérieurs à la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2006 (arrêt attaqué, p. 7 § 3), sans rechercher si ces accords n'étaient pas en toute hypothèse postérieurs à l'arrêté instaurant la zone d'aménagement différé, de sorte qu'il convenait d'en tenir compte au regard des dispositions du texte précité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 13-16 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QU'en relevant qu'aux termes d'accords amiables, cinq propriétaires concernés par l'opération d'expropriation avaient été indemnisés sur la base de 5, 24 € le m ² (arrêt attaqué, p. 7 § 5), sans tirer aucune conséquence de ce terme de référence qui portait pourtant sur des parcelles de même nature et présentant les mêmes caractéristiques que celles concernées par la présente instance, la cour d'appel a violé les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fixé à la somme globale de 65. 900 € l'indemnité d'expropriation due à Monsieur Z... ;

AUX MOTIFS QUE la date de référence non contestée est le 20 décembre 1999, date de la révision du plan d'occupation des sols par le conseil municipal ayant classé les parcelles en zone 1NA, le tout par application du code de l'urbanisme (article L. 230-3) qui retient pour déterminer cette date le plus récent des actes rendant public le plan local d'urbanisme ou l'approuvant, le révisant ou le modifiant et délimitant la zone dans laquelle est situé le terrain litigieux ; que la zone 1NA est décrite comme « équipée, destinée à être urbanisée à court ou moyen terme sous forme d'opérations groupées » ; qu'y sont admis notamment des lotissements et groupes d'habitation sous réserve que les opérations comportent au moins trois lots destinés à la construction à usage d'habitation et soient équipés en conséquence ; que toute construction à usage d'habitation devra être raccordée au réseau public d'eau potable, au réseau collectif d'assainissement, au réseau collecteur d'eau pluviale, outre le nécessaire accès automobile sur une voie publique ou privée communale, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin (et éventuellement obtenu par application de l'article 682 du code civil) ; que dans ce contexte reprécisé, il n'est pas sérieusement contesté, ainsi que l'a relevé le premier juge lors du transport sur les lieux, que l'ensemble des immeubles se situent dans une plaine à vocation initialement agricole et dépourvue de tout élément de viabilité, sur une surface relativement plane ; qu'en réalité, il ne peut s'agir en droit de terrain à bâtir (dessertes et réseaux inexistants ou insuffisants), mais qu'il existe un potentiel de constructibilité susceptible à l'évidence d'intéresser un aménageur-lotisseur, ce qui ramène au véritable débat, à savoir celui de la valorisation qui doit se faire, code de l'expropriation oblige, à la date du jugement de premier ressort, soit le 11 avril 2008 ; qu'il n'est pas contestable, ni d'ailleurs contesté, que les conditions de la double majorité prévue par l'article L. 13-16 du code de l'expropriation ne sont pas réunies ; que quatre des accords amiables mis en avant par l'expropriant sont antérieurs à la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2006, ce qui a pour conséquence pour le juge l'absence d'obligation de « prendre pour base » ces quatre accords ou même d'en « tenir compte » au sens de l'article L. 13-16 précité ; que néanmoins, et ainsi que l'a retenu de façon pertinente le premier juge, rien n'interdit au juge de l'expropriation, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation, d'estimer que ces termes de référence présentent une certaine pertinence ; que force est de constater qu'il résulte de cinq termes de comparaison que sur le même site, entre juillet 2004 et octobre 2006, des terrains en zone NA ou en NA et ND ont pu se négocier à une moyenne de 5, 24 € le m ², avec toutes les réserves découlant nécessairement du zonage non totalement transposable, du temps écoulé, et des différences qui peuvent affecter telle ou telle parcelle, les expropriés insistant sur l'absence de transposabilité et la commune ayant tendance à édulcorer les différences, ou à insister sur la qualité des parcelles concernées (E..., F..., G..., H..., B..., SCI Bellevue) ; que la commune propose un autre terme de référence E.../ I..., mutation du 27 décembre 2006, où une parcelle à moins de 200 mètres du centre ville, en zone AU1 du plan local d'urbanisme (équivalent 1NA du plan d'occupation des sols) a été négociée à 6, 41 € le m ², ce qui n'est pas commenté par les appelants ; que les expropriés se fondent sur un rapport C... qui propose deux méthodes, à savoir la méthode des coûts d'aménagement et la méthode par comparaison ; que la première, outre qu'elle table sur un prix de terrain nu égal à 33 % de celui du terrain équipé, repose en réalité sur deux ventes uniquement, à savoir les mutations J.../ K... (6 janvier 2003) et F.../ L... (25 septembre 2006) ; qu'au-delà des critiques doctrinales et des incertitudes techniques qui pèsent sur cette méthode, force est de constater la fragilité du calcul, tant dans son principe que dans son assiette (en l'espèce, deux ventes seulement) ; que s'agissant de la méthode par comparaison, M. C... propose trois termes de référence à La Cavalerie, à Rivière sur Tarn et à Creissels ; que l'attestation du maire de Rivière sur Tarn en date du 20 février 2007 est trop imprécise, et ne parle que « d'estimation » ; que l'attestation notariale de Maître D... évoque une mutation M.../ SCI JCR en date du 16 août 2002, pour une parcelle de terrain à bâtir à Creissels, de 14. 280 m ² pour 9, 6 € le m ² ; que la commune rétorque qu'un permis de construire a été accordé pour cette parcelle le 25 novembre 2003 ; que l'opération de lotissement à La Cavalière, par la SARL Saphyr, est un exemple, certes isolé en l'état des éléments versés au dossier, d'un « terrain à bâtir » acheté 15, 24 € le m ² (8 juillet 2005 – zonage NA) et revendu loti le 3 octobre 2007 à 60, 6 € le m ² (cf. : mutation EURL Saphyr/ N...) ; que le rapport terrain nu/ terrain loti est de 1 à 4, la cour ignorant par contre tout des caractéristiques du terrain nu de La Cavalerie par rapport à la Plaine de Buech ; que la commune revendique toutefois et produit une promesse de vente B..., en date du 20 février 2006, pour 3975 m ² ; qu'est prévue en réalité une dation en paiement sous forme d'un lot de 839 m ² dont 290 m ² inconstructibles, dépendant du futur lotissement communal Plaine de Buech, lot entièrement viabilisé et raccordé aux réseaux ; que le prix prévu est donc manifestement sous-évalué (18. 600 €) puisque le commissaire du gouvernement reconnaît (note d'ordre intérieur) que le terrain aménagé et loti se négocie à 55 ou 60 € le m ², en zone d'habitation, et 31 € hors lotissement, ce qui apparaît bien le moins ; que le lot attribué à M. B... valait donc au moins 55 € x 839 – 290 m ²) soit 30. 195 €, et même 46. 145 € (839 m ²) ce qui ramène à une valeur minimale comparable à celle de la SCI Bellevue, soit 7, 59 € le m ² (30. 195 € : 3975 m ²), et plus certainement de 11, 60 euros le m ² (46. 145 euros : 3975 m ²) ; qu'en effet, la mutation Bellevue a été conclue le 24 décembre 2007 à 7, 57 € le m ² (28. 966 € : 3823 m ²), la promesse de vente datant du 30 octobre 2006 ; qu'il s'agit d'un zonage mixte (1NA et ND), avec une maisonnette de 19 m ² dont l'état de ruine n'est pas contesté (cf. : commentaire C... p. 5), non utilisée depuis les décennies 30/ 40, et qui devra être démolie ; que le document accompagnant l'arrêté portant déclaration d'utilité publique (cote n° 8 de la commune) indique textuellement : « Le projet présenté par la commune de Creissels est tout d'abord la continuité de l'existant ce qui est un avantage tant au point de vue environnemental qu'économique. La viabilité est en partie existante sur ce secteur. Il existe une bonne desserte en réseaux et en voirie à proximité immédiate. Le secteur est accessible à partir de la RD 992 sur laquelle a été aménagé un carrefour giratoire. Ce carrefour permet un accès direct à la ville de Millau. La future urbanisation est entourée d'une zone d'emplois (ZA de Raujolles) et de terrains de sport permettant l'activité humaine. La zone d'urbanisation projetée ne présente pas de contraintes pour la construction … pas de risque géologique … pas de zone inondable » ; qu'en conclusion, et compte tenu de la promesse B... ci-dessus examinée, et de la tendance qui se dégage dès 2002 pour des terrains à bâtir certes (9, 6 € le m ² – 16 août 2002 – M.../ JCR) et des terrains à lotir (8 juillet 2005 : 15, 24 € le m ² SARL Saphyr) outre le prix SCI Bellevue pour une parcelle moins bien zonée en partie, la cour estime que les éléments de plus-value ci-dessus repris et qui émanent de l'enquête d'utilité publique permettent d'évaluer à 15 € le m ² les parcelles litigieuses en avril 2008 ; que M. Z... peut revendiquer 59. 970 € (3998 m ² x 15 €), dont à déduire 1. 000 € pour occupation (abattement non contesté effectué par le premier juge), soit un montant principal arrondi à 59. 000 €, outre un remploi de 6. 900 €, soit 65. 900 € au total ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'en affirmant d'emblée que les parcelles en cause ne constituaient pas des terrains à bâtir en raison de dessertes et de réseaux inexistants ou insuffisants (arrêt attaqué, p. 7 § 1), puis en se fondant pour se déterminer sur le prix de transactions concernant des terrains à bâtir (mutation M.../ J. C. R., cf. arrêt attaqué, p. 9 § 2), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'en se fondant pour se déterminer sur le prix d'une transaction d'un terrain à lotir situé dans la commune de La Cavalerie, située à 20 km de Creissels (mutation Eurl Saphyr/ N..., cf. arrêt attaqué, p. 8 § 6 et p. 9 § 2), tout en constatant qu'il s'agissait d'un « exemple certes isolé » et qu'elle ignorait « tout des caractéristiques du terrain nu de La Cavalerie par rapport à la Plaine de Buech », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; qu'en indiquant que la commune proposait un terme de référence constitué par une mutation concernant une parcelle située à moins de 200 mètres du centre ville, dans une zone équivalent à la zone 1NA du plan d'occupation des sols, négociée à 6, 41 € le m ², puis en relevant que ce terme de comparaison n'était pas « commenté » par les appelants (mutation E.../ I..., cf. arrêt attaqué, p. 7 § 6), sans expliquer ensuite en quoi ce terme de comparaison qu'elle écartait n'était pas pertinent, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, EN QUATRIEME LIEU, QUE le juge de l'expropriation doit tenir compte, pour fixer l'indemnité due à l'exproprié, des accords réalisés à l'amiable à l'intérieur des zones d'intervention foncière, des zones d'aménagement différé et des périmètres provisoires ; que dans ses conclusions d'appel (p. 2 § 3), la commune de Creissels faisait valoir qu'une zone d'aménagement différé avait été instaurée par arrêté préfectoral du 23 septembre 1998 ; qu'en estimant que quatre des accords amiables invoqués par la commune ne pouvaient être pris en compte dès lors qu'ils étaient antérieurs à la déclaration d'utilité publique du 12 décembre 2006 (arrêt attaqué, p. 7 § 3), sans rechercher si ces accords n'étaient pas en toute hypothèse postérieurs à l'arrêté instaurant la zone d'aménagement différé, de sorte qu'il convenait d'en tenir compte au regard des dispositions du texte précité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 13-16 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ALORS, EN CINQUIEME LIEU, QU'en relevant qu'aux termes d'accords amiables, cinq propriétaires concernés par l'opération d'expropriation avaient été indemnisés sur la base de 5, 24 € le m ² (arrêt attaqué, p. 7 § 5), sans tirer aucune conséquence de ce terme de référence qui portait pourtant sur des parcelles de même nature et présentant les mêmes caractéristiques que celles concernées par la présente instance, la cour d'appel a violé les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QU'après avoir considéré que M. Z... pouvait revendiquer une indemnité principale de 59. 970 € dont à déduire 1. 000 € pour occupation, la cour d'appel ne pouvait à ce titre lui allouer « un montant principal arrondi à 59. 000 € » sauf à violer les articles L. 13-13, L. 13-14 et L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et le principe de l'égalité devant les charges publiques.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-15651
Date de la décision : 10/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 15 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 mai. 2011, pourvoi n°10-15651


Composition du Tribunal
Président : M. Cachelot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
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