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04/05/2011 | FRANCE | N°09-70412

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mai 2011, 09-70412


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 9 septembre 2009), que Mme X... a été engagée le 8 juillet 1990 en qualité de secrétaire, standardiste et chauffeur par la société des Ambulances Belaubre aux droits de laquelle se trouve, depuis le 1er février 2007, la société Gières ambulances (la société) ; qu'elle a été licenciée pour motif économique le 4 mai 2007 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt confirmatif de dire le licenciement économique dépourvu de cause

réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la réorganisation de l'entrepris...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 9 septembre 2009), que Mme X... a été engagée le 8 juillet 1990 en qualité de secrétaire, standardiste et chauffeur par la société des Ambulances Belaubre aux droits de laquelle se trouve, depuis le 1er février 2007, la société Gières ambulances (la société) ; qu'elle a été licenciée pour motif économique le 4 mai 2007 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt confirmatif de dire le licenciement économique dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique autonome de licenciement ; que la lettre de licenciement qui fait mention d'une modification du contrat de travail consécutive à une réorganisation de l'entreprise et qui indique que cette situation entraîne une suppression d'emploi, une transformation ou une modification du contrat est suffisamment motivée ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement de Mme X..., fondé sur un refus de modification justifiée par une restructuration, ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse car la lettre de licenciement ne précisait pas les causes économiques et financières rendant nécessaire la restructuration, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1233-3 du code du travail ;
2°/ que, à titre subsidiaire, lorsque la lettre de licenciement fait état d'un refus d'une modification du contrat de travail consécutif à une réorganisation, il appartient aux juges du fond de rechercher, notamment au vu des éléments de preuve produits par l'employeur, si cette réorganisation était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; qu'en décidant que le licenciement de Mme X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse car la lettre de licenciement ne précisait pas les causes économiques et financières rendant nécessaire la restructuration et les incidences de la restructuration sur l'emploi de Mme X..., sans vérifier comme elle y était invitée, si la réorganisation invoquée était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la SARL Gières ambulances, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1232-6 et L. 1233-3 du code du travail ;
3°/ que le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des écrits qui lui sont soumis ; que la lettre de licenciement énonçait que "nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant : Refus de modification de votre contrat de travail justifiée par la restructuration de la société et suite à l'impossibilité de vous reclasser. En effet, par courrier du 5 mars 2007, nous vous avons informé que, suite au rachat par notre société du fonds de commerce des ambulances Belaubre, une restructuration de la gestion et de l'organisation interne de la société s'avérait nécessaire. Les tâches administratives et de secrétariat que vous faites actuellement seront effectuées bénévolement par la gérante. Nous avons étudié les possibilités de maintenir votre emploi dans notre structure et nous vous avons proposé deux modifications possibles de votre contrat de travail. 1°) maintenir une durée de travail identique, mais effectuer des fonctions différentes savoir : partage de votre temps de travail entre la fonction de standardiste et la fonction de chauffeur avec formation financée par la société. 2°) réduction de votre temps de travail savoir : maintien de la fonction de standardiste répartie sur deux jours. Vous nous avez informé le 3 avril 2007 de votre refus de ces deux propositions et, suite à l'impossibilité de vous redresser à d'autres postes nous avons été contraints de en place une procédure de licenciement économique" ; qu'en affirmant néanmoins que la lettre de licenciement n'énonçait pas les incidences de la restructuration sur l'emploi de Mme X..., la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°/ que dans ses conclusions devant la cour d'appel la société Gières ambulances faisait valoir qu'elle "était dans une situation financière très dégradée puisque son bénéfice annuel était non seulement ridiculement faible, mais se dégradait encore au fil des ans. La concluante rappelait qu'il était de 6 548 euros en 2004, 4 647 euros en 2005 et 1 954 euros en 2006. Il fallait donc à l'évidence relancer l'activité, diminuer les dépenses. Il résulte de l'acte de cession de fonds de commerce que l'entreprise avait besoin d'une réorganisation urgente et qu'il y en allait de sa survie" ; qu'en affirmant néanmoins que la société Gières ambulances n'avait apporté des explications sur des difficultés économiques que dans ses conclusions devant le conseil des prud'hommes, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions de la société Gières Ambulances en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
5°/ que, à titre subsidiaire, la réorganisation destinée à la sauvegarde de la compétitivité n'implique pas l'existence de difficultés économiques actuelles ; qu'elle implique une anticipation des risques et le cas échant des difficultés à venir ; qu'en reprochant à la société Gières ambulances de n'avoir apporté des explications sur des difficultés économiques que dans ses conclusions devant le conseil des prud'hommes, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, et a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
6°/ qu'enfin les limites du litige sont fixées par les motifs de licenciement énoncés dans la lettre de licenciement ; que la lettre de licenciement se fondait sur un refus de modification de contrat de travail consécutif à une réorganisation ; qu'en affirmant que le poste de Mme X... n'avait pas été supprimé et qu'il était occupé par la gérante de la société, à titre bénévole, pour en déduire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
Mais attendu qu'abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par les première, deuxième, troisième et sixième branches du moyen, la cour d'appel a fait ressortir, par motifs propres et adoptés, que les difficultés économiques invoquées par l'employeur pour justifier la modification du contrat de travail de la salariée n'étaient pas établies ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gières ambulances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Gières ambulances à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Gières ambulances.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt de ce que le licenciement économique de Madame X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, d'avoir condamné la SARL GIERES AMBULANCES à lui verser la somme de 22.425 euros de dommages-intérêts en application des dispositions de l'article L.122-14-4 ancien du Code du travail et d'avoir ordonné à la SARL GIERES AMBULANCES de rembourser à l'ASSEDIC concernée les indemnités de chômage versées à Madame X... du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de trois mois d'indemnités de chômage, en application des dispositions de l'article L.1235-4 du Code du travail ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la lettre de licenciement était ainsi motivée : « nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant : Refus de modification de votre contrat de travail justifiée par la restructuration de la société et suite à l'impossibilité de vous reclasser. En effet, par courrier du 5 mars 2007, nous vous avons informé que, suite au rachat par notre société du fonds de commerce des AMBULANCES BELAUBRE, une restructuration de la gestion et de l'organisation interne de la société s'avérait nécessaire. Les tâches administratives et de secrétariat que vous faites actuellement seront effectuées bénévolement par la gérante. Nous avons étudié les possibilités de maintenir votre emploi dans notre structure et nous vous avons proposé deux modifications possibles de votre contrat de travail. 1°) maintenir une durée de travail identique, mais effectuer des fonctions différentes savoir : partage de votre temps de travail entre la fonction de standardiste et la fonction de chauffeur avec formation financée par la société. 2°) réduction de votre temps de travail savoir : maintien de la fonction de standardiste répartie sur deux jours. Vous nous avez informé le 3 avril 2007 de votre refus de ces deux propositions et, suite à l'impossibilité de vous redresser à d'autres postes nous avons été contraints de en place une procédure de licenciement économique » ; que la lettre de licenciement pour motif économique doit tout à la fois énoncer le dit motif économique justifiant la rupture du contrat de travail et l'incidence du motif sur l'emploi du salarié concerné ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement se borne à faire état d'une restructuration de la société, sans en préciser les causes économiques ou financières la rendant nécessaire ; que la lettre n'énonce pas les incidences de la restructuration sur l'emploi de madame X... ; que la société GIERES AMBULANCES n'a apporté des explications sur des difficultés économiques que dans ses conclusions devant le Conseil des prud'hommes ; que le poste de madame X... n'a pas été supprimé ; qu'il est occupé par la gérante de la société, à titre bénévole ; que la lettre de licenciement ne répondant pas aux exigences des articles L.1233-3 et suivants du Code du travail, le licenciement de madame X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera en conséquence confirmé, y compris en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts, non discuté par l'appelante, qui a été justement déterminé par le premier juge ; que les autres dispositions du jugement, entièrement justifiées, seront également confirmées ;
AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE le conseil constate que la lettre de licenciement ne fait pas mention des motifs économiques du licenciement, qu'elle se contente d'évoquer la restructuration de la gestion et de l'organisation interne sans en déterminer les causes et la nécessité ; que sur les difficultés économiques de l'entreprise les seules indications figurent dans les conclusions du défendeur, à savoir que l'état de vétusté des véhicules a nécessité l'acquisition de deux véhicules d'un montant totale de 70.000 euros et l'indication d'une baisse de bénéfice à savoir 6.548 euros en 2004, euros en 2005 et 1.954 euros en 2006 ; que dans l'acte de cession du fonds les véhicules étaient cités avec leur kilométrage et que figure la mention : « il prendra le fonds, avec tous ses éléments incorporels et corporels, dans leur état actuel ou dans l'état au jour de leur entrée en jouissance, sans pouvoir prétendre ni exiger aucune indemnité, ni diminution du prix fixé, pour quelque cause que ce soit » ;
1°) ALORS QUE la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique autonome de licenciement ; que la lettre de licenciement qui fait mention d'une modification du contrat de travail consécutive à une réorganisation de l'entreprise et qui indique que cette situation entraîne une suppression d'emploi, une transformation ou une modification du contrat est suffisamment motivée ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement de Madame X..., fondé sur un refus de modification justifiée par une restructuration, ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse car la lettre de licenciement ne précisait pas les causes économiques et financières rendant nécessaire la restructuration, la cour d'appel a violé les articles L.1232-6 et L.1233-3 du code du travail ;
2°) ALORS QUE, à titre subsidiaire, lorsque la lettre de licenciement fait état d'un refus d'une modification du contrat de travail consécutif à une réorganisation, il appartient aux juges du fond de rechercher, notamment au vu des éléments de preuve produits par l'employeur, si cette réorganisation était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; qu'en décidant que le licenciement de Madame X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse car la lettre de licenciement ne précisait pas les causes économiques et financières rendant nécessaire la restructuration et les incidences de la restructuration sur l'emploi de Madame X..., sans vérifier comme elle y était invitée, si la réorganisation invoquée était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la SARL GIERES AMBULANCES, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.1232-6 et L.1233-3 du code du travail ;
3°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des écrits qui lui sont soumis ; que la lettre de licenciement énonçait que « nous sommes contraints de vous licencier pour le motif économique suivant : Refus de modification de votre contrat de travail justifiée par la restructuration de la société et suite à l'impossibilité de vous reclasser. En effet, par courrier du 5 mars 2007, nous vous avons informé que, suite au rachat par notre société du fonds de commerce des AMBULANCES BELAUBRE, une restructuration de la gestion et de l'organisation interne de la société s'avérait nécessaire. Les tâches administratives et de secrétariat que vous faites actuellement seront effectuées bénévolement par la gérante. Nous avons étudié les possibilités de maintenir votre emploi dans notre structure et nous vous avons proposé deux modifications possibles de votre contrat de travail. 1°) maintenir une durée de travail identique, mais effectuer des fonctions différentes savoir : partage de votre temps de travail entre la fonction de standardiste et la fonction de chauffeur avec formation financée par la société. 2°) réduction de votre temps de travail savoir : maintien de la fonction de standardiste répartie sur deux jours. Vous nous avez informé le 3 avril 2007 de votre refus de ces deux propositions et, suite à l'impossibilité de vous redresser à d'autres postes nous avons été contraints de en place une procédure de licenciement économique » ; qu'en affirmant néanmoins que la lettre de licenciement n'énonçait pas les incidences de la restructuration sur l'emploi de Madame X..., la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du Code civil ;
4°) ALORS QUE dans ses conclusions devant la cour d'appel la société GIERES AMBULANCES faisait valoir qu'elle « était dans une situation financière très dégradée puisque son bénéfice annuel était non seulement ridiculement faible, mais se dégradait encore au fil des ans. La concluante rappelait qu'il était de 6.548 euros en 2004, 4.647 euros en 2005 et 1.954 euros en 2006. Il fallait donc à l'évidence relancer l'activité, diminuer les dépenses. Il résulte de l'acte de cession de fonds de commerce que l'entreprise avait besoin d'une réorganisation urgente et qu'il y en allait de sa survie » (conclusions, p. 5) ; qu'en affirmant néanmoins que la société GIERES AMBULANCES n'avait apporté des explications sur des difficultés économiques que dans ses conclusions devant le Conseil des prud'hommes, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions de la société GIERES AMBULANCES en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE, à titre subsidiaire, la réorganisation destinée à la sauvegarde de la compétitivité n'implique pas l'existence de difficultés économiques actuelles ; qu'elle implique une anticipation des risques et le cas échéant des difficultés à venir ; qu'en reprochant à la société GIERES AMBULANCES de n'avoir apporté des explications sur des difficultés économiques que dans ses conclusions devant le Conseil des prud'hommes, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, et a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
6°) ALORS ENFIN QUE Les limites du litige sont fixées par les motifs de licenciement énoncés dans la lettre de licenciement ; que la lettre de licenciement se fondait sur un refus de modification de contrat de travail consécutif à une réorganisation ; qu'en affirmant que le poste de madame X... n'avait pas été supprimé et qu'il était occupé par la gérante de la société, à titre bénévole, pour en déduire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a violé l'article L.1233-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-70412
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 09 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mai. 2011, pourvoi n°09-70412


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.70412
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