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07/04/2011 | FRANCE | N°10-17652

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 07 avril 2011, 10-17652


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un incendie survenu dans la nuit du 3 au 4 décembre 2001 a endommagé les locaux propriété de la SCI Jimphi situés dans le centre commercial Anatole France à Clichy-sous-Bois, que celle-ci avait donnés à bail à la société Etoile 3, assurée auprès de la société Nationale Suisse Assurances aux droits de laquelle vient la société Axa France IARD (la société Axa), et à la société Le Fournil du Bois ; que la SCI Jimphi a déclaré le sinistre à son assureur,

la société MACIF ; qu'après expertise ordonnée en référé en l'absence d'accord en...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un incendie survenu dans la nuit du 3 au 4 décembre 2001 a endommagé les locaux propriété de la SCI Jimphi situés dans le centre commercial Anatole France à Clichy-sous-Bois, que celle-ci avait donnés à bail à la société Etoile 3, assurée auprès de la société Nationale Suisse Assurances aux droits de laquelle vient la société Axa France IARD (la société Axa), et à la société Le Fournil du Bois ; que la SCI Jimphi a déclaré le sinistre à son assureur, la société MACIF ; qu'après expertise ordonnée en référé en l'absence d'accord entre sociétés d'assurances sur le montant des dommages, la SCI Jimphi a fait assigner par acte du 17 août 2006 son assureur, le syndicat des copropriétaires du centre commercial Anatole France et la société Axa en réparation devant un tribunal de grande instance ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Attendu que la SCI Jimphi fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société MACIF à lui payer 4 % de la somme de 433 000 euros au titre des honoraires d'experts et 12 % de cette même somme au titre des honoraires d'architecte, alors, selon le moyen, que le contrat d'assurance conclu entre la SCI Jimphi et la MACIF prévoyait expressément que le montant des frais garantis au titre des honoraires d'expert devait être calculé en tenant compte du seul montant de l'indemnité due à l'assuré, à laquelle devait être appliqué le barème contractuellement prévu ; qu'en énonçant toutefois, pour rejeter la demande du bailleur assuré au titre des honoraires d'expert, qu'il ne justifiait pas du montant de ces honoraires, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les stipulations contractuelles qui s'imposaient à elle et, partant, l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève que le contrat d'assurance prévoit que le coût des travaux doit être augmenté du coût de la maîtrise d'oeuvre et stipule un plafond de garantie au titre des honoraires d'experts (4 % de 433 000 euros) ; que la SCI Jimphi ne justifie pas du montant des honoraires versés aux techniciens qu'elle a consultés en qualité d'experts pour la gestion de ce sinistre ; que si la SCI Jimphi a pu également exposer des frais de maîtrise d'oeuvre, elle n'en justifie pas ;

Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu, hors toute dénaturation, décider que la demande formée au titre des honoraires versés aux techniciens consultés en qualité d'experts pour la gestion de ce sinistre serait traitée comme frais irrépétibles de procédure, et débouter la SCI Jimphi de sa demande relative aux frais de maîtrise d'oeuvre ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche, n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal :

Vu les articles 4 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;

Attendu que pour limiter à la somme de 36 880,52 euros dans la limite des plafonds de garantie la condamnation de la société Nationale Suisse Assurances, aux droits de laquelle est venue la société Axa, à relever et garantir la société MACIF des condamnations prononcées à son encontre, l'arrêt énonce que la demande de la SCI Jimphi se limite aux travaux de remise en état du clos et du couvert ainsi que des agencements, soit 456 000 euros, sous déduction de la provision de 23 000 euros versée à la suite d'une ordonnance de référé du 12 septembre 2003 ; que la SCI Jimphi ne formule pas de demande concernant son préjudice locatif qui lui a été réglé par la société MACIF à la suite d'une ordonnance de référé du 24 octobre 2005 ;

Qu'en statuant ainsi, alors la SCI Jimphi demandait devant la cour d'appel la condamnation de la société Axa à lui verser la somme de 535 000 euros (353 000 + 182 000) au titre des dommages matériels, tels qu'évalués par l'expert, sous déduction des sommes mises à la charge de la société MACIF, et qu'elle faisait valoir que si celle-ci lui avait versé une somme de 13 880,52 euros au titre des pertes de loyers estimées à 42 797 euros TTC par l'expert judiciaire, elle n'avait pas été indemnisée de la totalité de son préjudice et que la société Axa devait être condamnée à lui verser, à ce titre, une somme de 32 422,83 euros, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions de la SCI Jimphi, a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu les articles 1134 du code civil et L. 113-1 du code des assurances ;

Attendu que pour condamner la société MACIF à payer à la SCI Jimphi la somme de 433 000 euros au titre des dommages bâtiments avec ses intérêts au taux légal à compter du 17 août 2006, en refusant d'exclure les dommages aux agencements de la garantie, l'arrêt énonce que les assureurs soulèvent l'irrecevabilité de la demande de la SCI Jimphi du chef des agencements qui seraient la propriété des locataires commerciaux ; qu'il n'est cependant pas contesté que les baux ont été résiliés de plein droit après le sinistre ainsi que le rappelle le conseil de la SCI Jimphi, citant la société MACIF, de telle sorte que la perte des agencements préjudicie à la SCI Jimphi qui en serait devenue propriétaire en vertu des baux si elle ne l'était déjà et s'ils n'avaient pas été détruits ; que celle-ci est donc recevable à demander le remboursement des sommes exposées pour la reconstruction de ses lots et pour la perte des agencements ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 1er, chapitre 1er, des conditions générales du contrat d'assurance souscrit par la SCI Jimphi auprès de la société MACIF prévoyait expressément, au titre de l'exclusion de garantie, "les agencements, aménagements, vitrines et glaces de devanture, des magasins et locaux commerciaux ou artisanaux, durant leur exploitation par les locataires, copropriétaires ou occupants de ces bâtiments", sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce chef de dommage ne faisait pas l'objet d'une exclusion de garantie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause la société MACIF ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société MACIF à payer à la SCI Jimphi la somme de 433 000 euros au titre des dommages-bâtiments avec ses intérêts au taux légal à compter du 17 août 2006 et en ce qu'il a limité à la somme de 36 880,52 euros dans la limite des plafonds de garantie la condamnation de la société Nationale Suisse Assurances, aux droits de laquelle est venue la société Axa, à relever et garantir la société MACIF des condamnations prononcées à son encontre, l'arrêt rendu le 3 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Axa France IARD à payer à la SCI Jimphi la somme de 2 500 euros ; rejette toutes les autres demandes présentées de ce chef ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour la SCI Jimphi.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La Sci Jimphi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement déféré en ce qu'il avait condamné la Macif à lui payer 4% de la somme de 433.000 euros au titre des honoraires d'experts et 12% de cette même somme au titre des honoraires d'architecte ;

AUX MOTIFS QUE le travail de l'expert établit suffisamment le quantum du préjudice de la Sci ; que le coût des travaux doit être augmenté du coût de la maîtrise d'oeuvre ; que la police de la Macif prévoit un plafond de garantie au titre des honoraires d'experts (4% de 433.000 €) ; qu'il n'est pas justifié du montant des honoraires versés aux techniciens qu'elle a consultés en qualité d'experts pour la gestion de ce sinistre ; que la demande formée de ce chef sera donc traitée comme frais irrépétibles de procédure ; (…) que la Sci a pu exposer des frais de maîtrise d'oeuvre ; qu'elle n'en justifie toutefois pas ;

1°) ALORS QUE le contrat d'assurance conclu entre la Sci Jimphi et la Macif prévoyait expressément que le montant des frais garantis au titre des honoraires d'expert devait être calculé en tenant compte du seul montant de l'indemnité due à l'assuré, à laquelle devait être appliqué le barème contractuellement prévu (pièce n° 6 produite par l'exposante) ; qu'en énonçant toutefois, pour rejeter la demande du bailleur assuré au titre des honoraires d'expert, qu'il ne justifiait pas du montant de ces honoraires, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les stipulations contractuelles qui s'imposaient à elle et, partant, l'article 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel, qui, pour rejeter la demande formée par l'exposante au titre des honoraires d'architecte, dont le montant n'était contesté par aucune des parties, s'est fondée d'office sur le moyen tiré de l'absence de preuve du montant de ces frais, sans néanmoins avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, a, en conséquence méconnu le principe du contradictoire et violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

La Sci Jimphi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait seulement condamné la société Nationale Suisse Assurance aux droits de laquelle est venue la société Axa France Iard à relever et garantir la Macif des condamnations prononcées à son encontre et ne l'avait pas condamnée à réparer son entier préjudice ;

AUX MOTIFS QUE la demande de la Sci se limite aux travaux de remise en état du clos et du couvert ainsi que des agencements, soit 456.000 euros, sous déduction de la provision de 23.000 euros versée à la suite d'une ordonnance de référé du 12 septembre 2003 ; que la Sci ne formule pas de demande concernant son préjudice locatif qui lui a été réglé par la Macif à la suite d'une ordonnance de référé du 24 octobre 2005 ;

1°) ALORS QUE, dans ses écritures d'appel (p. 18, 19 et 24), la Sci Jimphi demandait la condamnation de la société Axa à lui verser la somme de 535.000 euros (353.000 + 182.000) au titre des dommages matériels, tels qu'évalués par l'expert, sous déduction des sommes mises à la charge de la Macif ; qu'en énonçant que la demande de l'exposante se limitait aux travaux de remise en état du clos et du couvert ainsi que des agencements, soit à une somme de 456.000 euros, sous déduction de la provision de 23.000 euros déjà versée, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des écritures d'appel de la Sci Jimphi et a, dès lors, violé les articles 4 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE, dans ses écritures d'appel (p. 19, 20 et 24), la Sci Jimphi avait fait valoir que, si la Macif lui avait versé une somme de 13.880,52 euros au titre des pertes de loyers estimées à 42.797 euros TTC par l'expert judiciaire, elle n'avait pas été indemnisée de la totalité de son préjudice et que la société Axa devait être condamnée à lui verser, à ce titre, une somme de 32.422,83 euros ; qu'en énonçant que la Sci ne formulait pas de demande concernant son préjudice locatif qui lui avait été réglé par la Macif à la suite d'une ordonnance de référé du 24 octobre 2005, la cour d'appel a encore dénaturé les termes clairs et précis des écritures d'appel de la Sci Jimphi et a, de nouveau, violé les articles 4 du code de procédure civile et du code civil.

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société MACIF.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la MACIF à payer à la SCI JIMPHI la somme de 433.000 euros au titre des dommages bâtiments avec ses intérêts au taux légal à compter du 17 août 2006, refusant d'exclure les dommages aux agencements de la garantie ;

AUX MOTIFS QUE les assureurs soulèvent l'irrecevabilité de la SCI du chef des agencements qui seraient la propriété des locataires commerciaux ; qu'il n'est cependant pas contesté que les baux ont été résiliés de plein droit après le sinistre ainsi que le rappelle le conseil de la SCI, citant la MACIF de telle sorte que la perte des agencements préjudicie à la SCI qui en serait devenue propriétaire en vertu des baux si elle ne l'était déjà et s'ils n'avaient pas été détruits ; que la SCI est donc recevable à demander le remboursement des sommes exposées pour la reconstruction de ses lots et pour la perte des agencements ;

ALORS QUE l'article 1 chapitre 1 des conditions générales du contrat d'assurance souscrit par la SCI JIMPHI auprès de la MACIF prévoyait expressément, au titre de l'exclusion de garantie, « les agencements, aménagements, vitrines et glaces de devanture, des magasins et locaux commerciaux ou artisanaux, durant leur exploitation par les locataires, copropriétaires ou occupants de ces bâtiments » ; qu'en affirmant que la SCI JIMPHI était recevable à demander le remboursement des sommes exposées pour remédier à la perte des agencements au motif inopérant que ces agencements étaient la propriété de la SCI JIMPHI, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce chef de dommage ne faisait pas, en toute hypothèse, l'objet d'une exclusion de garantie, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et L. 113-1 du Code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-17652
Date de la décision : 07/04/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 07 avr. 2011, pourvoi n°10-17652


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17652
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