La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/04/2011 | FRANCE | N°10-17348

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 07 avril 2011, 10-17348


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 16 et 160 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Semitag (la société) en qualité de mécanicien, a déclaré avoir été victime, le 2 février 1990, d'un accident, alors qu'il réparait le système d'ouverture électrique des portes d'u

n bus ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère ayant décidé de prendre en char...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 16 et 160 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Semitag (la société) en qualité de mécanicien, a déclaré avoir été victime, le 2 février 1990, d'un accident, alors qu'il réparait le système d'ouverture électrique des portes d'un bus ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère ayant décidé de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions présentées par M. X..., ce dernier a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande de reconnaissance de la faute professionnelle de la société ; que ce dernier, victime d'une rechute, a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de la société ; qu'une cour d'appel a accueilli cette demande et ordonné une expertise ;

Attendu que pour rejeter la demande du salarié aux fins d'annulation du rapport d'expertise du docteur Y..., l'arrêt, après avoir relevé que, lors de la consultation de l'original du dossier de M. X... au CHU de Grenoble, l'expert avait constaté que les comptes-rendus ne mentionnaient l'existence de lésions qu'au genou droit, alors que la copie du dossier que M. X... lui avait adressée faisait état de lésions " aux genoux " et " aux genoux droit-gauche ", retient que cet expert n'avait fait que consulter le dossier que M. X... avait en sa possession, de sorte qu'en l'absence de grief invoqué par ce dernier, le principe du contradictoire n'avait pas été violé ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'expert n'avait pas soumis aux parties les résultats des investigations techniques auxquelles il avait procédé hors leur présence, afin de leur permettre d'être éventuellement à même d'en débattre contradictoirement avant le dépôt de son rapport, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande d'annulation de l'expertise du Docteur Y... ;

AUX MOTIFS QUE 1/ la consultation par l'expert du dossier de Monsieur X... auprès du Professeur Z...: le Docteur Y..., autorisée par le Président de la Chambre sociale de la Cour d'appel de GRENOBLE, a pris rendrez-vous avec le Professeur Z...au C. H. U. de GRENOBLE pour prendre connaissance de l'original du dossier médical de Monsieur X... ; que le dossier consulté au C. H. U. par l'expert est le même dossier dont Monsieur X...lui avait remis copie ; que lors de sa consultation au C. H. U., l'expert a pu constater que les comptes-rendus ne mentionnaient l'existence de lésions qu'au genou droit alors que la copie du dossier que Monsieur X...lui avait adressé indiquait des lésions aux « genoux » (page 1 et 2) et aux « genoux droitgauche » (page 4) ; que l'expert n'a fait que consulter le dossier que Monsieur X... avait en sa possession ; que Monsieur X... n'invoque ni ne caractérise aucun grief ; que le principe du contradictoire n'a pas été violé ; 2/ la communication du rapport du Docteur B..., sapiteur, et des documents annexés avant le dépôt du rapport du Docteur Y... : que le Docteur B...a établi un rapport le 23 octobre 2008, en qualité de sapiteur-chirurgie orthopédique et traumatologique – à la demande du Docteur Y... ; que le rapport du Docteur B...n'a pas été transmis avant le dépôt du rapport définitif du Docteur Y... ; que cette irrégularité constitue un vice de forme ; qu'un vice de forme ne peut entraîner la nullité d'une expertise que s'il y a eu atteinte aux intérêts du plaideur ; qu'en l'espèce, Monsieur X... soutient exclusivement que la communication du rapport du Docteur B...devait lui permettre de le discuter ; que le grief allégué par Monsieur X... n'est pas fondé ; qu'en effet, le rapport du Docteur Y... qui a été adressé le 12 janvier 2009 aux parties, dont Monsieur X... et son conseil, comportait le rapport du Docteur B...; qu'il n'est pas douteux que Monsieur X...qui n'a pas répondu à la convocation du Docteur B..., a disposé de tout le temps nécessaire pour prendre connaissance de ce rapport et le discuter ; que Monsieur X... n'a fait parvenir aucun élément médical de nature à contredire le rapport du sapiteur ou à en modifier les conclusions ; 3/ la non-jonction par l'expert de l'intégralité des deux dires déposés par le conseil de Monsieur X..., en date du 11. 08. 2008 et 23. 12. 2008 et la non réponse à ces dires : qu'en réalité, Monsieur X... mentionne dans ses conclusions que le dire du 23 décembre 2008 ainsi que ses annexes avaient bien été joints au rapport, de même qu'une annexe au dire du 11 août 2008 (dire du Docteur C..., médecin traitant) ; que la consultation par la Cour des documents annexés par l'expert à son rapport fait apparaître que le dire du 23 décembre 2008 et le « dire » du Docteur C...sont effectivement joints au rapport de l'expert ; que cette même consultation montre que le dire du 11 août 2008 du conseil de Monsieur X... n'est pas joint au rapport ; que le dire du conseil de Monsieur X... daté du 11 août 2008 conteste le choix de l'expert de recourir au Docteur B...en qualité de sapiteur et sollicite la désignation du Professeur D...; que l'absence de la jonction du dire du 11 août 2008 du conseil de Monsieur X... au rapport du Docteur Y... est une irrégularité de forme qui n'est susceptible d'entraîner la nullité du rapport d'expertise que si la preuve de l'existence d'un grief est rapportée ; que Monsieur X... ne rapporte pas cette preuve ; que la désignation par l'expert d'un sapiteur relève de son pouvoir d'appréciation ; qu'en ce qu concerne la réponse par l'expert aux dires visés ci-dessus, le rapport montre que le Docteur Y... a pris en compte le rapport du Docteur C..., comme un élément de la discussion, rapport joint au dire du 11 août 2008 ; que s'agissant du dire du 23 décembre 2008, celui-ci contestait à nouveau le choix du Docteur B..., communiquait à nouveau le rapport du Docteur C...et adressait à l'expert les pièces justificatives de l'arrêt de travail de Monsieur X... – pièces déjà fournies selon lui – et des éléments relatifs aux activités sportives de Monsieur X... ; que le dire du 23 décembre est en réalité une correspondance transmettant à l'expert différents documents ; que l'expert a joint ceux-ci à son rapport et en a tenu compte dans la rédaction de ce dernier ; que l'expert n'avait pas à répondre de façon spécifique à ce « dire » ; qu'en ce qui concerne le rapport du Docteur B..., l'appelant critique le fait que celui-ci mentionne avoir fait son analyse à partir « d'un certain nombre de documents » sans les désigner ; que la contestation de Monsieur X... n'est pas fondée ; que le rapport du Docteur B...permet d'identifier les documents médicaux sur lesquels il s'est fondé ; que selon Monsieur X..., la lettre de mission adressée au Docteur B...n'est pas produite ; que cependant, elle figure en tête du rapport d'expertise du Docteur B...; qu'il importe de rappeler que Monsieur X... ne s'est pas rendu à la convocation du Docteur B..., sans l'informer du motif de son absence ; que le Docteur B...a effectué son expertise sur pièces ; qu'enfin, Monsieur X... reproche à l'expert de ne pas lui avoir restitué les pièces non jointes à son rapport ; que Monsieur X... ne précise pas en quoi cette situation lui fait grief, dans le cadre de la présente procédure ; que la contestation de Monsieur X... doit être rejetée ;

1/ ALORS sur la consultation par l'expert du dossier de Monsieur X... au C. H. U. de GRENOBLE

QUE l'expert qui procède à des investigations techniques, hors la présence des parties, doit leur soumettre les résultats afin de leur permettre d'être éventuellement à même d'en débattre contradictoirement avant le dépôt de son rapport ; que, pour conclure que le principe du contradictoire avait été respecté tout en constatant que l'expert avait consulté le dossier médical de Monsieur X... au C. H. U. de GRENOBLE, hors sa présence, et s'était abstenu de le lui communiquer avant le dépôt de son rapport d'expertise quand il comportait des mentions différentes du sien, motif pris de l'absence de grief invoqué et caractérisé par Monsieur X..., la Cour d'appel a ajouté une condition à la loi que celle-ci ne prévoit pas, et partant violé les dispositions des articles 16 et 160 du Code de procédure civile, et de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2/ ALORS sur la communication du rapport du Docteur B..., sapiteur, et des documents annexés avant le dépôt du rapport du Docteur Y...

QUE l'avis des spécialistes consultés par l'expert doit être porté à la connaissance des parties, afin de leur permettre d'en discuter devant l'expert, avant le dépôt du rapport d'expertise ; qu'en retenant que le rapport du Docteur B...n'avait pas été transmis à Monsieur X... avant le dépôt du rapport d'expertise du Docteur Y..., et en statuant par des motifs inopérants selon lesquels Monsieur X..., qui n'avait pas répondu à la convocation du Docteur B..., avait eu tout le temps de prendre connaissance de ce rapport qui lui avait été adressé avec le rapport d'expertise du Docteur Y... et de le discuter ; la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 16 et 160 du Code de procédure civile, et de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ET encore QUE l'exigence d'une « atteinte aux intérêts du plaideur » n'est nullement exigée pour décider de la nullité de l'expertise quand l'expert n'a pas porté à la connaissance des parties les résultats des investigations des sachants ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 16 et 160 du Code de procédure civile, et de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3/ ALORS sur la non jonction par l'expert de l'intégralité des deux dires déposés par le conseil de Monsieur X..., en date du 11. 08. 2008 et 23. 12. 2008 et la non réponse à ces dires

QUE le principe de la contradiction est respecté dès lors que l'expert a communiqué les dires d'une partie à l'autre et leur a donné un délai pour lui faire parvenir leurs observations, et a répondu à ces dires ; qu'en déduisant de l'absence de jonction du dire du 11 août 2008 au rapport d'expertise une irrégularité de forme susceptible de n'entraîner la nullité de l'expertise que si la preuve d'un grief subi par Monsieur X... était rapportée sans rechercher si l'expert avait néanmoins adressé le dire du 11 août 2008 à l'autre partie et y avait répondu, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;

ALORS également QUE la preuve de l'existence d'un grief n'est pas exigée pour constater la violation du principe de la contradiction ; qu'en exigeant de Monsieur X...qu'il ait dû rapporter la preuve de l'existence d'un grief du fait du défaut de jonction de son dire du 11 août 2008 au rapport d'expertise quand une telle preuve n'est nullement exigée pour faire constater la violation du principe de la contradiction, la Cour d'appel a violé les article 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;

QU'en statuant par des motifs inopérants selon lesquels la désignation par l'expert d'un sapiteur relève de son pouvoir d'appréciation, quand Monsieur X... avait seulement demandé la désignation d'un autre sapiteur que le Docteur B...en la personne du Docteur D..., ce qui ne pouvait apparaître du fait du défaut de jonction du dire du 11 août 2008 de Monsieur X... au rapport d'expertise, la Cour d'appel a violé les articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;

ALORS à tout le moins QU'en soulignant que le Docteur Y... avait de toute façon pris en compte le rapport du Docteur C...« comme un élément de la discussion », joint au dire du 11 août 2008, lequel n'était pas joint au rapport d'expertise, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'expert avait répondu aux questions médicales soulevées par ce rapport, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;

ALORS encore QUE l'absence de réponse aux dires des parties ne respecte pas le principe de la contradiction ; qu'en considérant que le dire du 23 décembre 2008 n'était qu'une correspondance transmettant à l'expert différents documents qu'il avait annexés à son rapport et dont il avait tenu compte dans la rédaction de son rapport sans rechercher s'il avait répondu au dire de Monsieur X... du 23 décembre 2008, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;

Et encore QU'en relevant que le rapport du Docteur B...avait été effectué sur pièces à partir « d'un certain nombre de documents » sans qu'ils soient précisés, et cela d'autant plus que ce rapport n'avait pas été transmis à Monsieur X...avant que le Docteur Y... remette son rapport définitif, la Cour d'appel a violé les articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;

ALORS enfin QUE les pièces remises à l'expert afin de lui permettre d'établir son rapport d'expertise ne lui appartiennent pas ; que, pour décider que Monsieur X... n'avait pas rapporté la preuve d'un grief résultant de l'absence de restitution des pièces non jointes au rapport d'expertise, quand elles n'avaient été d'aucune utilité à l'expert pour remplir sa mission d'expertise et quand elles faisaient en outre partie du dossier médical de Monsieur X..., la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à obtenir une nouvelle expertise ;

AUX MOTIFS QUE 1/ sur la partialité de l'expert : contrairement à ce que soutient l'appelant, le rapport d'expertise relate de façon fidèle les circonstances de l'accident ; que l'expert a retranscrit les propos de Monsieur X... ; qu'en ce qui concerne le dossier médical constitué au C. H. U. de GRENOBLE, Monsieur X... prétend que le dossier que le C. H. U. lui a adressé mentionne des douleurs au niveau des deux genoux et que l'expert n'en a pas tenu compte ; que ce reproche n'est pas fondé ; que l'expert s'est fait communiquer l'original du dossier conservé au C. H. U. et qui mentionne une contusion du seul genou droit ; qu'il ne peut être fait grief à l'expert d'avoir effectué ses travaux au vu de l'original du dossier ; que l'expert, cependant, a pris en considération le fait que Monsieur X... avait fait état d'un traumatisme au genou gauche, de sorte que la critique de Monsieur X... n'est pas fondée ; que la lecture du rapport d'expertise qui contient 16 pages permet de se convaincre du sérieux du travail de l'expert ; qu'à cet égard, il y a lieu de souligner, ainsi que cela a été fait plus haut, que le recours au Docteur B..., sapiteur, avait, notamment, ainsi que le précise la mission confiée au Docteur Y..., pour but de rechercher si « les lésions méniscales des deux genoux » étaient imputables à l'accident du travail » ; que Monsieur X... n'a pas cru devoir se rendre à la convocation du Docteur B...; que Monsieur X... reproche également à l'expert de mentionner qu'il ne s'est pas rendu à la consultation du Docteur Z..., le 23 mars 1990, sans tenir compte de ses explications ; que ce reproche n'est pas fondé, l'expert se borne à rapporter un fait ; que Monsieur X... reproche à l'expert de citer des extraits du dossier hospitalier du 24 mai 1991 et du 28 juin 1991 sans les produire ; que Monsieur X... ne caractérise pas le grief allégué ; que les deux pièces en cause sont des compte-rendus de consultation du Professeur Z..., tenant, chacun, en deux lignes ; que le grief n'est pas fondé ; que Monsieur X... reproche à l'expert de ne pas avoir joint à son rapport des expertises du Docteur E..., du Docteur F...et du Docteur G...qu'il lui avait adressées ; que Monsieur X... ne caractérise pas ce grief ; que les expertises en cause ont été reçues par l'expert qui les a prises en considération dans son rapport ; que ce grief n'est pas fondé ; que Monsieur X... reproche à l'expert de ne pas avoir désigné un sapiteur psychiatre ; que ce grief n'est pas fondé ; que Monsieur X... pouvait demander cette désignation ; que Monsieur X... n'a jamais sollicité de l'expert la rédaction d'un pré-rapport, de sorte que sa critique à cet égard n'est pas fondée ; que Monsieur X... reproche à l'expert de mentionner qu'il ne l'a pas renseignée sur sa situation d'inaptitude au travail ; que ce grief n'est pas fondé ; que l'expert note que Monsieur X... est « inapte au travail » et ajoute « non documenté » : ce qui signifie que les pièces afférentes n'ont pas été produites ; que l'expert note aussi après la consolidation (1re mars 1994), qu'il a bénéficié d'un arrêt en maladie stabilisé au 1er janvier 1995 puis a été amis en invalidité catégorie 2 pour des problèmes psychiatriques ; que Monsieur X... reproche à l'expert de minimiser son préjudice ; que cette critique porte sur le fond de l'expertise ; qu'il appartenait à Monsieur X... d'apporter des éléments de nature à modifier le travail de l'expert et à modifier son appréciation ; que Monsieur X... reproche à l'expert d'avoir mentionné qu'il « ressassait » des griefs contre la SEMITAG, le dossier hospitalier et contre l'hôpital ; que selon Monsieur X..., l'expert aurait violé l'article 257 du CPC ; que le terme utilisé par l'expert n'a rien de péjoratif ou de méprisant ; qu'il exprime la perception que l'expert a eue de Monsieur X... ; que ce grief n'est pas fondé ; que Monsieur X... reproche à l'expert l'erreur commise dans la transcription de ses doléances quant à une éventuelle reconversion professionnelle ; que l'erreur qui tiendrait au fait que Monsieur X... avait envisagé une reconversion professionnelle avant l'accident du travail et non en 1986 est sans incidence sur la valeur du rapport d'expertise ; 2/ sur les contradictions du rapport d'expertise : que contrairement à ce que soutient l'appelant, l'expert a répondu aux questions qui figurent au dispositif de l'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE du 10 avril 2008 et ci-dessous reproduit : Prendre connaissance du dossier médical de Antoine X... et examiner l'intéressé ; Décrire les lésions qu'il impute à l'accident dont Antoine X... a été victime, indiquer après s'être fait communiquer tous documents relatifs aux examens, soins et interventions dont la victime a été l'objet, leur évolution et les traitements appliqués ; préciser si ces lésions sont bien en relation directe et certaine avec l'accident ; Dégager en les spécifiant, les éléments médicaux propres à déterminer une indemnisation au titre des souffrances physiques et morales qu'il a endurées, du préjudice esthétique, du préjudice d'agrément et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ; que l'expert a répondu à ces questions, de la façon suivante :

« Accident du : 02/ 02/ 1990

Lésions imputables : contusion épaule droite, hanche droite, genou droit

Consolidation : 01/ 03/ 1994

Souffrances endurées : 3, 5/ 7 (trois et demi sur sept)

Dommage esthétique : non caractérisé

Incidence professionnelle : possible au métier de mécanicien poids lourd sous réserve de la notification du médecin du travail mais non caractérisée en vue de la reconversion souhaitée d'expert automobile » ;

qu'aucune contradiction ne peut être relevée dans les réponses apportées par l'expert aux questions qui lui avaient été confiées ; que Monsieur X... ne produit aucun élément de nature à remettre en cause l'expertise et à déterminer le recours à une nouvelle mesure d'expertise ; que Monsieur X... critique l'appréciation de l'expert relative au déclenchement du syndrome anxio-dépressif ; que contrairement à ce que prétend Monsieur X..., l'expert, ainsi que le montre le rapport, a pris en considération les rapports des Docteurs E..., G...et F...; que toutefois, le Docteur Y... a estimé : « Le syndrome dépressif réactionnel à cet accident ne fait pas de doute mais son déclenchement n'a été possible qu'en raison d'un trouble de personnalité attesté par deux expertises psychiatriques et d'un contexte socioprofessionnel favorable à son développement, représenté par une expropriation par SEMITAG et un désir de réorientation professionnelle antérieure à l'accident et qui n'avait pas abouti » ; qu'il appartenait à Monsieur X... de solliciter la désignation d'un sapiteur psychiatre ; que faute de l'avoir fait, Monsieur X... est mal venu à critiquer le travail du Docteur Y... ; que contrairement à ce que prétend Monsieur X..., l'expertise du Docteur H...n'a pas été adressée au Docteur Y..., de sorte qu'il ne peut être reproché à celle-ci de ne pas l'avoir pris en considération ; que les conclusions du Docteur H..., qui estime que les troubles psychiques dont Monsieur X... souffre sont la conséquence de l'accident du travail, ne peuvent être retenues, ce praticien n'étant pas psychiatre ; que le Docteur G..., psychiatre, estime pour sa part que Monsieur X... présente une « structure de personnalité complexe ayant décompensé sur un mode dysthymique dans un contexte réactionnel à l'accident du travail survenu le 02. 02. 1990 » ; que le Docteur F..., spécialiste des maladies du système nerveux, retient que l'état psychiatrique présenté par Monsieur X... n'est pas imputable au fait accidentel du 20. 02. 1990 » ; qu'il s'agit d'une « décompensation d'une personnalité à l'occasion de difficultés dans le domaine professionnel et par ailleurs, d'un polytraumatisme accidentel » ; que tous ces rapports médicaux, à l'exception de celui du Docteur H..., pour le motif précisé ci-dessus, ont été examiné et pris en compte par le Docteur Y... ; que Monsieur X... soutient que l'expert aurait occulté une partie de sa mission consistant à dire si les lésions étaient en relation directe et certaine avec l'accident, aurait confondu les notions « d'antécédents médicaux », « d'état antérieur » et de « prédispositions » ; que Monsieur X... ne cite pas de passages du rapport de l'expert qui manifesteraient ces confusions ; qu'en réalité la critique de Monsieur X... vise le fait que l'expert n'aurait pas suffisamment pris en considération le rapport du Docteur C..., son médecin traitant ; que cette critique n'est pas fondée ; que la lecture du rapport Y... fait apparaître que l'expert a tenu compte, dans son examen et sa discussion, des éléments apportés par le Docteur C...; que ce sont notamment les éléments apportés par le Docteur C...qui ont conduit le Docteur Y... à recourir à l'avis d'u sapiteur, le Docteur B..., et il a été rappelé plus haut que Monsieur X... ne s'était pas rendu à la convocation de ce médecin ; que le Docteur Y... qui a argumenté et raisonné avec l'ensemble des éléments médicaux qui lui avaient été soumis, au rang desquels figure le rapport du Docteur C..., a rempli sa mission avec conscience et de façon complète ; que Monsieur X... fait grief à l'expert de ne pas avoir retenu un préjudice d'agrément ; que cette critique n'est pas fondée, l'expert précise que son appréciation est en rapport avec les séquelles de l'accident, alors même que Monsieur X...se fonde sur des éléments qui ne font pas partie des séquelles indemnisables ; qu'il ne peut être, non plus, reproché à l'expert de ne pas s'être prononcée sur l'évaluation du taux d'incapacité de 20 %, alors même que cette question ne lui avait pas été posée par l'arrêt du 10 avril 2008 et que le régime applicable à la présente procédure est celui de la réparation des accidents du travail, régime qui énumère de façon limitative les préjudices indemnisables : préjudice esthétique, souffrances physiques et morales, préjudice d'agrément et préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle (article L 452-3 du Code de la sécurité sociale) ;

ALORS QUE l'expert est tenu d'annexer à son rapport d'expertise les dires des parties et de leur répondre ; qu'en s'abstenant de rechercher si les expertises des Docteurs E..., F...et G...n'avaient pas été communiquées au Docteur Y... sous forme de dire de Monsieur X..., ce qui l'aurait contrainte à y répondre, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des article 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS encore QUE la violation du principe de la contradiction ne nécessite pas la preuve de l'existence d'un grief ; qu'en relevant que Monsieur X... n'avait pas caractérisé de grief du fait de ce défaut d'annexion au rapport de l'expert des rapports des Docteurs E..., F...et G...quand ces rapports faisaient précisément état du syndrome anxio-dépressif de Monsieur X...que l'expert a écarté, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 16 et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS encore QUE l'expert doit répondre à la mission qui lui a été confiée par le juge qui l'a désigné ; qu'en reprochant à Monsieur X... de ne pas avoir demandé la désignation d'un sapiteur psychiatre sans prendre en considération que Monsieur X... souffrait d'un syndrome dépressif qui ne pouvait manquer d'influer sur l'appréciation de ses souffrances morales objet de la mission de l'expert, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 238 du Code de procédure civile ;

ALORS en conséquence QUE Monsieur X... était en droit de reprocher à l'expert de minimiser son préjudice ; qu'en statuant par des motifs inopérants selon lesquels cette critique portait sur le fond de l'expertise et qu'il appartenait à Monsieur X... d'apporter des éléments contraires, quand il avait écarté le rapport du Docteur C..., la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 238 du Code de procédure civile ;

QU'à tout le moins, dans l'hypothèse où la « prise en considération » des rapports des Docteurs E..., F...et G...dans le rapport d'expertise serait retenue, en écartant le syndrome dépressif, motif pris de ce que ces rapports ne l'aurait pas relié exclusivement à l'accident du travail quand l'expert était seulement chargé de dire si les lésions étaient en relation directe et certaine avec l'accident, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 238 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE l'expert ne doit jamais porter d'appréciations d'ordre juridique ; qu'en décidant qu'il ne pouvait être reproché à l'expert de ne pas s'être prononcé sur le taux d'incapacité de 20 % de Monsieur X... « alors même que cette question ne lui avait pas été posée par l'arrêt du 10 avril 2008 » quand la Cour d'appel de GRENOBLE avait, au contraire aux termes de cet arrêt, fait droit à la demande d'expertise judiciaire en vue de déterminer si la rechute de l'accident du travail avait modifié le taux d'incapacité retenu en 1994, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 238 du Code de procédure civile ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(EGALEMENT SUBSIDIAIRE)

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande d'indemnisation du préjudice d'agrément ;

AUX MOTIFS QUE l'expert a exclu l'existence d'un préjudice d'agrément ; que les éléments produits par Monsieur X... montrent qu'il avait cessé les activités sportives avant la survenance de l'accident en date du 02 février 1990 ; qu'ainsi Monsieur X... a pratiqué la plongée sous-marine de 1970 à août 1989, le karaté de 1965 à 1978 et le cyclotourisme de 1975 à l'été 1988 ou 1989 ; que le fait que le Docteur C...a pu retenir que Monsieur X... pratiquait ces différentes activités sportives est indifférent, en l'absence de la justification de ce que l'arrêt de ces activités était lié à l'accident du travail ; que le certificat du Docteur I...daté du 21 février 1990 concerne le fils de Monsieur X..., pas celui-ci ;

ALORS QUE l'expert doit répondre à la mission qui lui a été confiée par le juge qui l'a désigné ; qu'il appartenait à l'expert, aux termes de l'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE du 10 avril 2008 de « dégager, en les spécifiant, les éléments médicaux propres à déterminer une indemnisation …. » ; qu'en relevant que les éléments produits par Monsieur X... montraient qu'il avait cessé les activités sportives avant la survenance de l'accident du travail tout en considérant qu'il ne justifiait pas de ce que l'arrêt des activités sportives était lié à l'accident du travail, la Cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur Monsieur X...qu'il importait à l'expert de dégager, et partant a violé les articles 1315 du Code civil et 238 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-17348
Date de la décision : 07/04/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 11 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 07 avr. 2011, pourvoi n°10-17348


Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17348
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award