LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu l'article 524 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue, en référé, par le premier président d'une cour d'appel, que M. X... et la société civile immobilière Math Immo ont saisi le premier président d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement les ayant condamnés, sous peine d'astreinte, à remettre en état des parcelles de terrains, dans un délai de trois mois de la signification de la décision ;
Attendu que, pour arrêter l'exécution provisoire du jugement, l'ordonnance retient qu'en raison de l'importance matérielle des travaux ordonnés et surtout, des conditions climatiques difficiles tenant à la période hivernale, le délai de trois mois imparti s'avérerait impossible à respecter ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'existence de conséquences manifestement excessives pour les débiteurs de l'exécution immédiate de l'obligation, le premier président a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 18 mars 2010, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Douai ;
Condamne M. X... et la SCI Math Immo aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et de la SCI Math Immo, les condamne, in solidum, à payer à la SCI Stanford la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux Conseils, pour la société Stanford
La S.C.I. STANFORD reproche au premier président de la Cour d'appel d'AMIENS, statuant comme juge des référés, d'AVOIR ainsi prononcé : «Arrêtons l'exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu le 13 octobre 2009 par le Tribunal de grande instance d'Abbeville (…) »,
AUX MOTIFS QUE « l'exécution immédiate du jugement entrepris entraînera effectivement des conséquences manifestement excessives au sens de l'article 524 du Code de procédure civile ; en effet, qu'en raison de l'importance matérielle des travaux ordonnés, s'agissant de bassins d'une grande superficie et surtout en raison des conditions climatiques très difficiles de l'hiver 2009/2010, il apparaît que le délai de 3 mois s'avérait impossible à respecter (…) »,
ALORS QUE 1°), en arrêtant l'exécution provisoire du jugement ayant condamné sous astreinte les débiteurs à remettre les lieux en l'état sous un délai déterminé, le premier président, dont la décision a influé sur le cours de l'astreinte ordonnée au profit du créancier, modifiant ainsi l'étendue des droits et obligations des parties tels que fixés par le dispositif du jugement assorti de l'exécution provisoire, a excédé les pouvoirs qu'il tenait de l'article 524 du Code de procédure civile.
ALORS QUE 2°), au surplus, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle peut être arrêtée, en cas d'appel, par le premier président statuant en référé, si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; qu'en l'espèce, en se déterminant par des motifs inopérants au regard de ce qui précède, le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 524 du Code de procédure civile.
ALORS QUE 3°), en outre, à supposer par hypothèse qu'il ait entendu statuer au regard du coût de travaux, compte tenu de leur importance et de la période de leur exécution, le premier président a violé l'article 524 du Code de procédure civile en se déterminant par des considérations d'où il ne résulte pas que l'exécution provisoire risquait d'entraîner pour les codébiteurs in solidum des conséquences manifestement excessives eu égard à leur faculté respective de paiement.
ALORS QUE 4°), en tout état de cause, dans ses conclusions (p. 16), la S.C.I. STANFORD faisait valoir que « M. X... et la SC MATH IMMO ne communiquent aucune pièce sur leur situation financière et la réalité de leur situation patrimoniale », ajoutant (p. 17) «sans donner aucune explication ou preuve portant sur leurs facultés de paiement » ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent de nature à influer sur la solution du litige, en ce qu'il tendait à écarter (p. 17) le prétendu « caractère manifestement excessif » allégué par les débiteurs de l'obligation d'exécuter sous astreinte, le premier président a violé l'article 455 du Code de procédure civile.