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06/04/2011 | FRANCE | N°09-70760;09-71023

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 avril 2011, 09-70760 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n°s Z 09-70.760 et K 09-71.023 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 27 mai 2008, n° 07-41.772), que M. X... a été engagé en qualité de directeur d'un complexe cinématographique par la société Espace loisirs (la société) par contrat de travail du 1er janvier 1993 prévoyant le versement d'une prime d'intéressement ; qu'en vertu d'un contrat de travail du 18 janvier 1994, il était stipulé le versement d'une indemnité contract

uelle de licenciement et un nouveau mode de calcul de la prime d'intéressement ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n°s Z 09-70.760 et K 09-71.023 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 27 mai 2008, n° 07-41.772), que M. X... a été engagé en qualité de directeur d'un complexe cinématographique par la société Espace loisirs (la société) par contrat de travail du 1er janvier 1993 prévoyant le versement d'une prime d'intéressement ; qu'en vertu d'un contrat de travail du 18 janvier 1994, il était stipulé le versement d'une indemnité contractuelle de licenciement et un nouveau mode de calcul de la prime d'intéressement ; que M. X... a été licencié le 4 décembre 2001 pour motif économique ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à voir son licenciement reconnu sans cause réelle et sérieuse et à obtenir paiement de diverses indemnités ;
Sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué de la condamner à payer une indemnité contractuelle de licenciement ainsi qu'une prime d'intéressement outre les congés payés afférents alors, selon le moyen :
1°/ qu'un acte entaché d'une fausse signature constitue un faux et ne peut être créateur d'obligation ; qu'en faisant produire effet au contrat du 18 janvier 1994, cependant qu'elle avait constaté la fausseté la signature de l'une des parties, la cour d'appel a violé les articles 1322 et 1324 du code civil ;
2°/ subsidiairement, qu'en retenant qu'il n'aurait pas été établi que M. Y... se soit opposé à la signature du contrat par son co-gérant en janvier 1994, et que M. X... ait connu cette opposition au moment de l'établissement du contrat, sans rechercher si l'apposition d'une fausse signature en lieu et place de celle de M. Y... ne traduisait pas nécessairement que l'opposition de celui-ci était notoire et que les autres signataires du contrat avaient décidé de passer outre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du code de commerce ;
3°/ qu'en tout état de cause la fraude corrompt tout ; que la cour d'appel a constaté que le contrat était entaché d'une fausse signature ; qu'en faisant produire effet à un contrat revêtu d'une fausse signature, sans avoir préalablement constaté que cette fausse signature était étrangère au salarié qui revendiquait l'application du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
Mais attendu d'abord que la juridiction de renvoi s'est conformée sur la question de la validité du contrat du 18 janvier 1994 à la doctrine de l'arrêt de la Cour de cassation du 27 mai 2008 ;
Attendu ensuite qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté que le contrat litigieux n'avait fait l'objet, de la part du gérant dont la signature avait été imitée, d'aucune opposition connue du salarié au moment de l'établissement du contrat ;
Attendu enfin qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société ait soutenu devant la cour d'appel qu'il convenait de rechercher si la fausse signature était ou non étrangère au salarié ;
Que le moyen, irrecevable en ses première et troisième branches, est mal fondé pour le surplus ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi du salarié pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1153 du code civil ;
Attendu que l'indemnité contractuelle de licenciement constitue une créance que le juge ne fait que constater et sur laquelle les intérêts légaux courent de plein droit à compter de la demande valant mise en demeure ;
Attendu que la cour d'appel a condamné l'employeur au paiement de l'indemnité contractuelle de licenciement et a énoncé que les intérêts seraient dus à compter de sa décision ;
Qu'en statuant ainsi, elle a violé le texte susvisé ;
Et attendu que conformément à l'article 627 alinéa 2 du code de procédure civile la cassation doit être prononcée sans renvoi, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit approprié ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la première branche du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives au point de départ des intérêts de l'indemnité contractuelle de licenciement, l'arrêt rendu le 17 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que la somme de 109 682,88 euros due au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement produira intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation ;
Condamne la société Espace loisirs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Espace loisirs à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi n° Z 09-70.760 par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils pour la société Espace loisirs.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de travail du 18 janvier 1994 faisait la loi des parties, d'avoir condamné la société ESPACE LOISIRS à payer à Monsieur X..., avec intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, 7 852 € au titre de la prime d'intéressement pour l'année 1998 outre 785,20 € au titre des congés payés afférents et d'avoir condamné la société ESPACE LOISIRS à payer à Monsieur X..., avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, 109 682,88 € à titre d'indemnité contractuelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « sur la validité du contrat de travail signé le 18 janvier 1994 ; que pour s'opposer aux demandes de Monsieur X... fondées sur le contrat de travail signé le 18 janvier 1994, la société ESPACE LOISIRS soutient que l'expertise ordonnée dans le cadre de la procédure pénale a établi que Monsieur Y... était en charge des questions relatives à la signature des contrats de travail, que la signature figurant sous son nom est un faux ce dont Monsieur X... a eu connaissance, que Monsieur X... ne peut utiliser ce contrat en vertu de la règle nemo auditur, qu'il ne l'a pas invoqué lors de ses premières réclamations, que ce contrat n'a jamais été ni revendiqué ni appliqué dans le cadre de la précédente gestion et qu'il ne s'agit pas d'un contrat qui a régi les rapports des parties ; que contrairement aux affirmations de la société ESPACE LOISIRS, la fausseté de la signature attribuée à Monsieur Y... ne fait pas du contrat de travail du 18 janvier 1994 un faux ; que la fausseté de cette signature laisse subsister les autres signatures figurant sur le contrat et notamment celle du co-gérant ; que l'absence de signature par Monsieur Y... du contrat n'a aucune incidence sur sa validité dès lors qu'il a été signé par l'un des gérants de la société ESPACE LOISIRS et qu'il n'a fait l'objet d'aucune opposition de Monsieur Y... connue du salarié au moment de l'établissement du contrat ; que l'opposition visée par l'article L. 223-18 du Code de commerce est celle « formée par un gérant aux actes d'un autre gérant » de sorte que la contestation par Monsieur Y... de sa signature en mars 2002 ne démontre pas qu'il s'était opposé à la signature du contrat par l'autre gérant en janvier 1994 ; que ni le contrat de travail invoqué, ni les obligations dont Monsieur X... demande l'exécution ne sont entachés d'une cause illicite de sorte que la règle nemo auditur est sans application en l'espèce ; que l'absence d'exécution du contrat litigieux ne vaut pas renonciation à son exécution ; que dans un courrier adressé le 30 avril 1997 sous la signature de Monsieur Y... à Ecran Total, fait mention de « Pierre X..., qui est directeur d'exploitation » dénomination des fonctions qui ne figurait pas dans le contrat du 1er janvier 1993 mais qui est apparu pour la première fois dans celui du 18 janvier 1994 ; qu'en conséquence le contrat de travail signé le 18 janvier 1994 devant recevoir application, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes d'indemnité contractuelle de licenciement et de prime d'intéressement prévues par ce contrat » ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QU'un acte entaché d'une fausse signature constitue un faux et ne peut être créateur d'obligation ; qu'en faisant produire effet au contrat du 18 janvier 1994, cependant qu'elle avait constaté la fausseté la signature de l'une des parties, la Cour d'appel a violé les articles 1322 et 1324 du Code civil ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, SUBSIDIAIREMENT, QU'en retenant qu'il n'aurait pas été établi que Monsieur Y... se soit opposé à la signature du contrat par son co-gérant en janvier 1994, et que Monsieur X... ait connu cette opposition au moment de l'établissement du contrat, sans rechercher si l'apposition d'une fausse signature en lieu et place de celle de Monsieur Y... ne traduisait pas nécessairement que l'opposition de celui-ci était notoire et que les autres signataires du contrat avaient décidé de passer outre, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-18 du Code de commerce ;
ALORS, DE TROISIEME PART, ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la fraude corrompt tout ; que la Cour d'appel a constaté que le contrat était entaché d'une fausse signature ; qu'en faisant produire effet à un contrat revêtu d'une fausse signature, sans avoir préalablement constaté que cette fausse signature était étrangère au salarié qui revendiquait l'application du contrat, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit.Moyen produit au pourvoi n° K 09-71.023 par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'indemnité contractuelle de licenciement porte intérêts au taux légal à compter de l'arrêt qui l'accorde et d'AVOIR rejeté les demandes de Monsieur X... tendant à voir fixer le point de départ des intérêts et la capitalisation à compter de la demande du 10 avril 2002 ;
Et ce sans aucun motif ;
ALORS QUE toute décision doit être motivée ; que la Cour d'appel a fixé le point de départ des intérêts au taux légal sur l'indemnité contractuelle de licenciement à compter de l'arrêt rendu le 17 septembre 2009 et a rejeté la demande de Monsieur X... tendant à voir fixer ce point de départ au 10 avril 2002 avec capitalisation, sans motiver sa décision ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
ALORS QUE lorsque les créances résultent de la loi ou du contrat, elles portent intérêts au taux légal à compter de la demande ; que la Cour d'appel a dit que l'indemnité contractuelle de licenciement portait intérêts au taux légal à compter de l'arrêt ; qu'en statuant ainsi alors que l'indemnité contractuelle de licenciement résultait du contrat de travail et que la Cour d'appel ne faisait que la constater, la Cour d'appel a violé l'article 1153 du Code Civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-70760;09-71023
Date de la décision : 06/04/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 avr. 2011, pourvoi n°09-70760;09-71023


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Bénabent, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.70760
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