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30/03/2011 | FRANCE | N°10-11509

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mars 2011, 10-11509


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, le 8 février 2009), que M. X... a été engagé le 12 juin 1986 par la société Hachette, devenue Relay France, en qualité de gérant d'un kiosque à journaux, le contrat d'engagement précisant qu'il bénéficiait du statut d'agent régi par l'article L. 781-1 2° du code du travail alors applicable ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant au paiement d'un rappel de prime de risque commercial pour les années 2002 à 2006, qui

avait été diminuée d'une somme au titre d'un déficit d'inventaire ;
Attendu ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, le 8 février 2009), que M. X... a été engagé le 12 juin 1986 par la société Hachette, devenue Relay France, en qualité de gérant d'un kiosque à journaux, le contrat d'engagement précisant qu'il bénéficiait du statut d'agent régi par l'article L. 781-1 2° du code du travail alors applicable ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant au paiement d'un rappel de prime de risque commercial pour les années 2002 à 2006, qui avait été diminuée d'une somme au titre d'un déficit d'inventaire ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé, peu important que les parties n'aient pas sollicité cette requalification ; que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur ; qu'en l'état des conclusions d'appel de l'exposant qui invoquait l'existence d'un contrat de travail, la cour d'appel ne pouvait s'arrêter à la qualification donnée par le contrat d'engagement au visa de l'ancien article L. 781-1-2° (recod. L. 7321-2°) du code du travail sans rechercher si les prescriptions résultant de ce contrat d'engagement, ainsi que des conditions générales de gestion des kiosques de la société Relais H signées par l'exposant ne caractérisaient pas l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, de sorte que M. X... était lié à la société Relais H par un lien de subordination inhérent au contrat de travail, et non par un contrat de gérance salariée ; qu'en refusant d'effectuer cette recherche, au motif inopérant que les contrats de gérance sont caractérisés par une absence de subordination, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L.1221-1 du code du travail et 12 du code de procédure civile et, par fausse application, les articles L.7321-2° a) à L.7321-4 du code du travail ;
2°/ qu'un motif de simple affirmation équivaut à un défaut de motifs ; en affirmant l'absence de subordination juridique et, partant, l'absence de contrat de travail en l'espèce, sans se référer à aucun élément de fait et de preuve, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que ni la dénomination de « contrat d'engagement », ni le visa, par ce contrat, de l'article L. 7321-2 du code du travail, ne font présumer l'absence d'un lien de subordination et, partant, la responsabilité pécuniaire du gérant salarié même en cas de faute lourde ; que la cour d'appel, qui a déduit de la seule mention par le contrat d'engagement des dispositions de l'article L. 781-1-2° (recod. L. 7321-2)du code du travail, l'absence nécessaire de toute subordination juridique et a, en conséquence, fait supporter à l'exposant une responsabilité pour risque économique indépendamment de toute faute lourde de sa part, a violé, par fausse interprétation l'article L. 7321-2 du code du travail ;
4°/ que les dispositions du code du travail s'appliquent aux gérants salariés de succursales visés par l'article L. 7321-2-2°, a) de ce code, sous réserve de l'application des articles L. 7321-3 et L. 7321-4 du même code relatifs à la responsabilité des gérants en matière d'hygiène et de sécurité ; qu'est nulle toute convention contraire à l'ensemble de ces dispositions ; est, dès lors, applicable aux gérants salariés de succursales le principe de droit du travail selon lequel la responsabilité d'un salarié ne peut être engagée qu'en cas de faute lourde ; en relevant qu'est licite l'engagement pris par un gérant salarié de kiosque de garantir un déficit dans la seule mesure où il n'est pas, sauf en cas de faute lourde, porté atteinte à son droit au salaire minimum, la cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article L.7321-1 du code du travail et, par refus d'application, les articles L. 7321-5, L.3251-1du même code, et le principe selon lequel la responsabilité du salarié n'est engagée à l'égard de son employeur qu'en cas de faute lourde ;
5°/ que la faute lourde suppose que soit établie l'existence d'une intention de nuire de la part du salarié ; qu'ayant relevé, en premier lieu, que les incidents ayant entraîné un solde débiteur avaient eu pour origine, d'une part, que l'employée de M. X... avait révélé à une personne se faisant passer pour un préposé de la société SFR les numéros permettant d'utiliser le crédit de 41 cartes recharges téléphoniques et, d'autre part, que, pendant que son épouse tenait la caisse, M. X... avait, pour porter secours à une personne ayant eu un malaise dans la boutique, quitté pendant une dizaine de minutes l'arrière boutique dans laquelle il comptait la recette et, en second lieu, que l'exposant s'était vu appliquer le principe selon lequel une rémunération équivalente au salaire minimum de sa catégorie devait être maintenue en l'absence de faute lourde, toutes circonstances dont il se déduisait nécessairement qu'aucune faute lourde n'avait été commise, la cour d'appel a violé, par fausse application, le principe selon lequel la responsabilité du salarié n'est engagée à l'égard de son employeur qu'en cas de faute lourde ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir constaté que le contrat ayant lié les parties était soumis aux dispositions de l'article L. 781-1 du code du travail alors applicable, en a exactement déduit que l'engagement pris par M. X... de garantir le déficit d'inventaire était licite dans la mesure où il n'était pas porté atteinte à son droit au salaire minimum ; que le moyen, irrecevable en ses trois premières branches comme étant nouveau, mélangé de fait et de droit, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... (salarié) de sa demande tendant à ce que la Société RELAIS H (employeur) soit condamnée à lui verser la somme de 13 121, 24 euros euros à titre de rappel de prime de risque, et de 1 312, 12 euros à titre de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... a été engagé le 12 juin 1986 par la Société HACHETTE, devenue par la suite RELAIS H, en qualité de gérant d'un kiosque à journaux ; qu'il exerce au Centre hospitalier Carémeau à NÎMES ; que le contrat d'engagement précise que le statut de l'agent est régi par l'article L.781-1-2° du Code du travail ; qu'aux termes des conditions générales de gestion des kiosques signées par Monsieur X... le 5 avril 1995 et reprenant les stipulations du protocole d'accord signé entre les organisations syndicales et la SNC RELAIS H le 28 février 1994, la rémunération se décomposait de la manière suivante (article 7) : 1° une partie fixe directement liée au niveau et aux spécificités de l'activité du point de vente, 2° mensuellement des commissions sur le chiffre d'affaires du point de vente, 3° une prime annuelle de risque commercial variant en fonction de la différence entre le chiffre d'affaires réalisé pendant l'année considérée et le montant résiduel du solde débiteur généré durant la même période, 4° la prime d'ancienneté conventionnelle ; qu'il était spécifié à l'article 11, alinéa 3, qu'en cas de non représentation des marchandises en nature ou de leur contrepartie en numéraires lors de l'arrêt des comptes annuels ou de mutation, le solde débiteur constitué sera, après prise en charge de 30 % de celui-ci par RELAIS H SNC, imputé sur le montant de la prime de risque épargnée depuis le début de l'exercice, le dépassement éventuel pouvant faire l'objet d'une concertation tant sur le montant que sur les modalités de recouvrement ; que l'article 11, alinéa 4, prévoyait en outre que, sauf faute lourde ou faute d'une particulière gravité entraînant la responsabilité illimitée de l'agent, ce dépassement ne pouvait s'imputer au-delà du salaire minimum garanti de la catégorie ; que les articles L.7321-2° a) à L.7321-4 (anciennement L.781-1-2°) du Code du travail étendent l'application du droit du travail à des personnes, qui, faute de subordination juridique, n'ont normalement pas vocation à en bénéficier ; qu'en l'absence de contrat de travail, la responsabilité du gérant assimilé au salarié (« gérant salarié ») n'est pas identique à celle d'un salarié, soumis à un lien de subordination juridique, qui ne peut être responsable à l'égard de son employeur qu'en cas de faute lourde ; que l'engagement pris par le gérant de garantir le déficit d'inventaire est licite dans la mesure où il n'est pas, sauf en cas de faute lourde, porté atteinte à son droit au salaire minimum ; qu'en l'espèce, d'une part, la prime de risque commercial consiste à imputer partie du solde débiteur correspondant au déficit d'inventaire sur une somme calculée à partir d'un pourcentage du chiffre d'affaires, d'autre part, le dépassement éventuel qui en résulte ne peut s'imputer au delà du salaire minimum garanti de la catégorie ; que ces stipulations sont donc licites ; que Monsieur X..., qui conteste le principe même de l'imputation d'un solde débiteur, n'établit pas ni même n'allègue par ailleurs que la prime aurait été mal calculée pour les années en cause ; qu'il ne démontre en outre aucune défaillance imputable à la Société RELAY France ; que, dans le cadre de l'escroquerie aux cartes téléphoniques dont il a été victime le 15 août 2006, il résulte de la plainte déposée par l'appelant que son employée a, sans vérification, révélé par téléphone à une personne se faisant passer pour un préposé de la Société SFR les numéros permettant d'utiliser le crédit de 41 cartes-recharges téléphoniques alors que, par message mis en ligne à compter du 4 août 2006, la Société RELAY France avait pourtant mis en garde tous les gérants contre une fraude aux coupons électroniques, préconisant aux gérants de faire passer ce message à l'ensemble de l'équipe de vente et de l'imprimer pour le laisser à côté des caisses ; que dans le cadre du vol dont il a été victime le 8 juin 2006, il ressort de la plainte qu'il a déposée, que pendant que son épouse tenait la caisse, il a, pour porter secours à une personne ayant un malaise dans la boutique, quitté pendant une dizaine de minutes l'arrière boutique dans laquelle il comptait la recette, avec précipitation et sans fermer ce local, de sorte que quand il y est revenu, la recette (plus de 3 000 euros) avait disparu ; qu'aucune circonstance ne peut l'exonérer de sa responsabilité contractuelle ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé, peu important que les parties n'aient pas sollicité cette requalification ; que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur ; qu'en l'état des conclusions d'appel de l'exposant qui invoquait l'existence d'un contrat de travail, la Cour d'appel ne pouvait s'arrêter à la qualification donnée par le contrat d'engagement au visa de l'ancien article L.781-1-2° (recod. L.7321-2°) du Code du travail sans rechercher si les prescriptions résultant de ce contrat d'engagement, ainsi que des conditions générales de gestion des kiosques de la Société RELAY H signées par l'exposant ne caractérisaient pas l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, de sorte que Monsieur X... était lié à la Société RELAIS H par un lien de subordination inhérent au contrat de travail, et non par un contrat de gérance salariée ; qu'en refusant d'effectuer cette recherche, au motif inopérant que les contrats de gérance sont caractérisés par une absence de subordination, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L.1221-1 du Code du travail et 12 du Code de procédure civile et, par fausse application, les articles L.7321-2° a) à L.7321-4 du Code du travail ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QU'un motif de simple affirmation équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant l'absence de subordination juridique et, partant, l'absence de contrat de travail en l'espèce, sans se référer à aucun élément de fait et de preuve, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, en méconnaissance de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE, ni la dénomination de « contrat d'engagement », ni le visa, par ce contrat, de l'article L.7321-2 du Code du travail, ne font présumer l'absence d'un lien de subordination et, partant, la responsabilité pécuniaire du gérant salarié même en cas de faute lourde ; que la Cour d'appel, qui a déduit de la seule mention par le contrat d'engagement des dispositions de l'article L.781-1-2° (recod. L.7321-2) du Code du travail, l'absence nécessaire de toute subordination juridique et a, en conséquence, fait supporter à l'exposant une responsabilité pour risque économique indépendamment de toute faute lourde de sa part, a violé, par fausse interprétation l'article L.7321-2 du Code du travail ;
ALORS, DE QUATRIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE les dispositions du Code du travail s'appliquent aux gérants salariés de succursales visés par l'article L.7321-2-2°, a) de ce Code, sous réserve de l'application des articles L.7321-3 et L.7321-4 du même Code relatifs à la responsabilité des gérants en matière d'hygiène et de sécurité ; qu'est nulle toute convention contraire à l'ensemble de ces dispositions ; qu'est, dès lors, applicable aux gérants salariés de succursales le principe de droit du travail selon lequel la responsabilité d'un salarié ne peut être engagée qu'en cas de faute lourde ; qu'en relevant qu'est licite l'engagement pris par un gérant salarié de kiosque de garantir un déficit dans la seule mesure où il n'est pas, sauf en cas de faute lourde, porté atteinte à son droit au salaire minimum, la Cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article L.7321-1 du Code du travail et, par refus d'application, les articles L.7321-5, L.3251-1du même Code, et le principe selon lequel la responsabilité du salarié n'est engagée à l'égard de son employeur qu'en cas de faute lourde ;
ET ALORS, AU DEMEURANT ET ENFIN, QUE la faute lourde suppose que soit établie l'existence d'une intention de nuire de la part du salarié ; qu'ayant relevé, en premier lieu, que les incidents ayant entraîné un solde débiteur avaient eu pour origine, d'une part, que l'employée de Monsieur X... avait révélé à une personne se faisant passer pour un préposé de la Société SFR les numéros permettant d'utiliser le crédit de 41 cartesrecharges téléphoniques et, d'autre part, que, pendant que son épouse tenait la caisse, Monsieur X... avait, pour porter secours à une personne ayant eu un malaise dans la boutique, quitté pendant une dizaine de minutes l'arrière boutique dans laquelle il comptait la recette et, en second lieu, que l'exposant s'était vu appliquer le principe selon lequel une rémunération équivalente au salaire minimum de sa catégorie devait être maintenue en l'absence de faute lourde, toutes circonstances dont il se déduisait nécessairement qu'aucune faute lourde n'avait été commise, la Cour d'appel a violé, par fausse application, le principe selon lequel la responsabilité du salarié n'est engagée à l'égard de son employeur qu'en cas de faute lourde.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-11509
Date de la décision : 30/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 08 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 mar. 2011, pourvoi n°10-11509


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.11509
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