LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée en 2002 par les époux Y... en qualité d'aide à domicile, a été licenciée pour faute grave par lettre expédiée le 17 juin 2004 ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en remboursement d'une somme par la salariée, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient au salarié qui, pour justifier de chèques tirés à son profit sur le compte de son employeur, se prévaut d'un mandat de celui-ci d'avoir à régler des dépenses de la vie courante, d'en rapporter la preuve ; qu'en l'espèce, pour débouter l'employeur de sa demande en remboursement de chèques tirés sur son compte, la cour d'appel, après avoir constaté que ces sommes ne correspondaient pas à une rémunération, a retenu les allégations de la salariée selon lesquelles elles correspondraient à des dépenses de la vie courante n'étaient pas contredites ; qu'en statuant de la sorte quand il appartenait à la salariée d'apporter la preuve certaine que les fonds reçus l'avaient été pour régler les dépenses de la vie courante des époux Y..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 1984 du même code ;
2°/ qu'en tout état de cause, tout jugement doit être motivé et que le motif hypothétique constitue un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour débouter l'employeur de sa demande en remboursement de sommes tirées par la salariée sur son compte, que ces sommes « correspondraient » à des dépenses de la vie courante, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il incombe au demandeur en restitution de sommes qu'il prétend avoir indûment payées de prouver le caractère indu du paiement; que la cour d'appel ayant, au vu de l'ensemble des éléments de fait et de preuve produits devant elle, constaté que tel n'était pas le cas en l'espèce, n'a pas statué par des motifs hypothétiques, ni inversé la charge de la preuve ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, qui est recevable :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner Mme Y..., assistée de sa curatrice, au paiement des sommes de 3 501,88 euros et de 350,18 euros à titre d'indemnités de préavis et de congés payés, l'arrêt retient que le licenciement étant déclaré sans cause réelle et sérieuse, la salariée est en droit de prétendre à ces indemnités et qu'elle dispose des éléments nécessaires pour évaluer celles-ci à cette hauteur ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs ne permettant pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé à 3 501,88 euros et 350,18 euros le montant des condamnations à titre d'indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis, l'arrêt rendu le 14 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils pour Mmes Y... et Z....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave de Mme X..., et en conséquence, d'avoir condamné Mme Y..., assistée de sa curatrice, Mme Z..., à payer à la salariée les sommes de 3.501,88 € nets à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 350,18 € nets à titre de congés payés sur préavis, 408,58 € nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts légaux à compter du présent arrêt ;
AUX MOTIFS QUE Mme X..., engagée le 1er février 2002 par les époux Y... en qualité d'aide à domicile, sans contrat écrit mais rémunérée par chèque emploi-service, a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée du 15 juin 2004 motivée comme suit : « Nous faisons suite à l'entretien du 14 juin 2004 où vous étiez assistée de Monsieur B... et au cours duquel nous avons envisagé une mesure de licenciement. Les explications que vous avez fournies, c'est-à-dire la volonté de poursuivre les relations aux mêmes conditions de travail et de salaire qu'avant, soit une rémunération de 76,22 € par jour pour un travail du 1er au 31 de chaque mois, ne nous permettent pas de modifier notre point de vue. Nous vous rappelons que ces conditions illégales au regard du droit du travail ont été décidées unilatéralement par vous-même juste avant la décision de mise sous protection de M. et Mme Y.... Par ailleurs, en ce qui concerne la période antérieure à la mise sous curatelle, vous n'avez jamais été en mesure de fournir ni explication, ni justificatif sur votre niveau de rémunération et sur le nombre d'heures effectives de travail réalisées auprès de vos employeurs. Nous vous avons proposé la rédaction d'un contrat de travail légal par l'intermédiaire du centre social de Lamorlaye qui s'occupe des emplois familiaux avec une rémunération calculée en fonction du nombre d'heures effectivement travaillées. Vous avez refusé cette proposition. Vos conditions imposées sont inacceptables et nous constatons que malgré nos propositions vous avez abandonné votre poste de travail depuis le 28 mai 2004 alors que vos employeurs sont dans un état de dépendance physique nécessitant l'intervention quotidienne d'une aide à domicile ce que, par définition, vous ne pouviez ignorer. Ce comportement est inadmissible et constitutif d'une faute grave privative des indemnités de rupture » ; que contestant la régularité et la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de la rupture de son contrat de travail, Mme X... a saisi la juridiction prud'homale ; que la preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise ; que, par ailleurs, le refus d'acceptation par le salarié d'une modification du contrat de travail ne constitue pas une faute susceptible de justifier une sanction ou un licenciement disciplinaire ; qu'il ressort des pièces du dossier que si aucun contrat de travail écrit n'a été signé entre les parties, la salariée travaillait en moyenne 30 heures par mois et était rémunérée par chèque emploi-service à hauteur d'une somme nette mensuelle de 365 € ; que ces conditions de travail ont été unilatéralement modifiées, malgré un refus d'acceptation de la salariée, comme mentionné dans la lettre de licenciement, à compter du mois d'avril 2004 aussi bien en ce qui concerne la durée du travail, portée à 169 heures par mois pour une durée maximale de 40 heures hebdomadaires, que pour ce qui a trait au taux horaire fixé à 10 € ; qu'en l'état, la salariée, qui était en droit de ne pas accepter la modification de son contrat de travail, a pu légitimement considérer qu'il ne lui était pas possible de poursuivre l'exécution du contrat de travail aux nouvelles conditions qui lui ont été unilatéralement imposées à compter du mois d'avril 2004 et prendre la décision de cesser son travail, non pas brutalement, mais à compter du 28 mai 2004 ; qu'en l'état le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse ; que la salariée est par conséquent en droit de prétendre à une indemnité compensatrice de préavis augmentée des congés payés afférents ainsi qu'à une indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'elle peut également prétendre à des dommages et intérêts ;
ET QU'il convient de faire droit à la demande de remboursement des salaires indûment versés en février et mars 2004 par l'employeur, sans l'assistance de la curatrice, au-delà de la rémunération moyenne de 365 € nets correspondant à 30 heures par mois, la salariée n'établissant pas, autrement que par ses propres affirmations et alors qu'elle a manifestement renseigné elle-même les heures effectuées sur le volet social de février 2004, au lieu et place de son employeur pourtant placé sous curatelle renforcée à cette date, en indiquant avoir prétendument effectué 156 heures de travail en février et 224 heures en mars 2004 ; qu'il y a lieu d'infirmer partiellement la décision déférée et de condamner Mme X... à rembourser à Mme Y..., assistée de sa curatrice, les salaires indûment versés en février et mars 2004, au-delà de 30 heures par mois, avec intérêts au taux légal à compter de la présentation par l'employeur de sa demande reconventionnelle ;
ALORS QUE seule la modification du contrat de travail imposée au salarié autorise celui-ci, s'il la refuse, à se prévaloir de la rupture à l'initiative de l'employeur ; que lorsque le salarié souhaite lui-même une modification de son contrat de travail et que l'employeur l'accepte dans les limites légales, il n'y a pas modification du contrat de travail imposée par l'employeur et le salarié qui, quelque temps plus tard, abandonne son poste sans raison légitime, ne saurait imputer à l'employeur l'initiative de la rupture ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'embauchée par Mme Y... sans contrat écrit, Mme X... qui ne travaillait qu'une trentaine d'heures par mois pour une rémunération mensuelle moyenne de 365 euros, a exprimé la volonté non équivoque de modifier ses conditions de travail et de travailler du premier au dernier jour de chaque mois pour une rémunération de 76,22 euros par jour et qu'elle a faussement renseigné les volets sociaux des chèques emploi service en affirmant avoir réalisé des heures de travail qu'elle n'avait pas effectuées ; que l'arrêt a relevé, par ailleurs, que l'employeur a porté la durée de travail à 169 heures par mois pour une durée maximale de 40 heures hebdomadaires, sur la base d'un taux horaire de 10 euros, ce dont il résulte que loin de modifier unilatéralement le contrat de travail, il a entériné la proposition de la salariée dans les limites des dispositions légales ; qu'en décidant, cependant, que Mme Y... avait modifié unilatéralement les conditions de travail du contrat initial et en lui imputant la rupture, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations et a violé l'article L. 1235-1 du code du travail ;
ALORS QU'en tout état de cause, constitue une faute grave susceptible de priver le salarié du droit à délai-congé la manoeuvre de ce dernier qui affirme faussement à son employeur avoir effectué des heures de travail qu'il n'a pas accomplies afin d'obtenir une modification substantielle de son contrat de travail et qui, ayant obtenu cette modification dans le respect des dispositions légales, abandonne son poste sans raison légitime ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui a constaté la manoeuvre de la salariée pour obtenir la modification de son contrat de travail initial et qui a, cependant, retenu que l'employeur avait modifié unilatéralement les éléments substantiels du contrat de travail justifiant l'abandon de poste, a violé l'article L. 1234-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme X..., et en conséquence, d'avoir condamné Mme Y..., assistée de sa curatrice, Madame Z..., à lui payer, notamment, la somme de 3.501,88 € nets à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 350,18 € nets à titre de congés payés sur préavis ;
AUX MOTIFS QUE Mme X..., engagée le 1er février 2002 par les époux Y... en qualité d'aide à domicile, sans contrat écrit mais rémunérée par chèque emploi-service, a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée du 15 juin 2004 ; que le refus d'acceptation par le salarié d'une modification du contrat de travail ne constitue pas une faute susceptible de justifier une sanction ou un licenciement disciplinaire ; qu'il ressort des pièces du dossier que si aucun contrat de travail écrit n'a été signé entre les parties, la salariée travaillait en moyenne 30 heures par mois et était rémunérée par chèque emploi-service à hauteur d'une somme nette mensuelle de 365 € ; que ces conditions de travail ont été unilatéralement modifiées, malgré un refus d'acceptation de la salariée ; que la salariée, qui était en droit de ne pas accepter la modification de son contrat de travail, a pu légitimement considérer qu'il ne lui était pas possible de poursuivre l'exécution du contrat de travail aux nouvelles conditions qui lui ont été unilatéralement imposées à compter du mois d'avril 2004 et prendre la décision de cesser son travail, non pas brutalement, mais à compter du 28 mai 2004 ; qu'en l'état le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse ; que la salariée est par conséquent en droit de prétendre à une indemnité compensatrice de préavis payés augmentée des congés payés afférents ; que Mme Y..., assistée de sa curatrice, Mme Z..., sera donc condamnée à payer à la salariée la somme de 3.501,88 € nets à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 350,18 € nets à titre de congés payés sur préavis ;
ALORS QUE selon l'article 12 de la convention collective nationale du 24 novembre 2004, étendue par arrêté du 2 mars 2000, réglant les rapports entre les particuliers employeurs et leurs salariés, la durée du préavis à effectuer en cas de licenciement pour motif autre que faute grave ou lourde est fixée à deux mois pour le salarié ayant deux ans ou plus d'ancienneté de services continus chez le même employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la salariée embauchée le 1er janvier 2002 et licenciée le 15 juin 2004, percevait une rémunération nette mensuelle de 365 € ; qu'en fixant l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 3.501,88 €, supérieure à deux mois de salaire, et en calculant les congés payés y afférents sur cette somme, la cour d'appel a violé la disposition précitée, ensemble les articles L. 1234-1 et R. 771-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Y... et Mme Z..., ès qualités de curatrice de Mme Y..., de leur demande tendant au remboursement par Mme X... de la somme de 17070 € correspondant à des chèques et paiement en numéraire perçus par cette dernière sur la période d'avril 2003 à février 2004 ;
AUX MOTIFS QU'il n'est ni allégué ni justifié que ces sommes ont été versées par l'employeur au titre de rémunération, de gratifications, ou de remboursement de frais professionnels ; que selon les déclarations de la salariée dans le cadre de l'enquête pénale ayant donné lieu à un classement sans suite en avril 2006, ces sommes correspondraient en revanche à des achats de vie courante effectués pour le compte et à la demande des employeurs, affirmation en rapport avec la situation de dépendance des intéressés, qui n'est contredite par aucun élément et a justifié un classement sans suite de la plainte pénale ; qu'il y a lieu en l'état de débouter l'employeur de sa demande en répétition de l'indu pour le montant réclamé ;
ALORS QUE D'UNE PART, il appartient au salarié qui, pour justifier de chèques tirés à son profit sur le compte de son employeur, se prévaut d'un mandat de celui-ci d'avoir à régler des dépenses de la vie courante, d'en rapporter la preuve ; qu'en l'espèce, pour débouter l'employeur de sa demande en remboursement de chèques tirés sur son compte, la cour d'appel après avoir constaté que ces sommes ne correspondaient pas à une rémunération, a retenu les allégations de la salariée selon lesquelles elles correspondraient à des dépenses de la vie courante n'étaient pas contredites ; qu'en statuant de la sorte quand il appartenait à la salariée d'apporter la preuve certaine que les fonds reçus l'avaient été pour régler les dépenses de la vie courante des époux Y..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 1984 du même code ;
ALORS QUE D'AUTRE PART et en tout état de cause, tout jugement doit être motivé et que le motif hypothétique constitue un défaut de motifs ; qu'en retenant, pour débouter l'employeur de sa demande en remboursement de sommes tirées par la salariée sur son compte, que ces sommes « correspondraient » à des dépenses de la vie courante, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique et a violé l'article 455 du code de procédure civile.