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23/03/2011 | FRANCE | N°10-60217

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 mars 2011, 10-60217


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office :
Vu le second alinéa de l'article 625 du code de procédure civile ;
Attendu que par jugement du 1er décembre 2009, le tribunal d'instance a annulé les élections des membres du CHSCT de la " direction opérationnelle Sud-Est " de la société Manpower ; qu'à la suite de cette annulation, de nouvelles élections ont eu lieu le 18 janvier 2010, et que par jugement du 30 mars 2010 le tribunal d'instance de Lyon a annulé ce nouveau scrutin ;
Attendu que le jugement du 1er décembr

e 2009 ayant été annulé par l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office :
Vu le second alinéa de l'article 625 du code de procédure civile ;
Attendu que par jugement du 1er décembre 2009, le tribunal d'instance a annulé les élections des membres du CHSCT de la " direction opérationnelle Sud-Est " de la société Manpower ; qu'à la suite de cette annulation, de nouvelles élections ont eu lieu le 18 janvier 2010, et que par jugement du 30 mars 2010 le tribunal d'instance de Lyon a annulé ce nouveau scrutin ;
Attendu que le jugement du 1er décembre 2009 ayant été annulé par l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 22 septembre 2010 n° 09-60454, il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler le jugement du 30 mars 2010 ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 30 mars 2010, entre les parties, par le tribunal d'instance de Lyon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Annule les élections tenues le 18 janvier 2010 pour l'élection des membres du CHSCT de la Direction des opérations Sud-Est de la société Manpower ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Manpower et les établissements Manpower France, Direction des opérations Sud-Est, à payer aux défendeurs la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour MM. Y...,
Z...
, A..., B..., C..., D..., E..., Mme G..., MM. H..., I..., J..., K..., L..., M..., N..., O..., F..., Mme P..., M. Q..., Mme R..., MM. S..., T..., U..., V..., W..., XX..., II..., TT..., UU..., Mme YY..., MM. ZZ..., AA..., Mme BB..., MM. CC..., DD..., Mme EE..., MM. FF..., GG..., HH..., Mmes JJ..., KK..., LL..., MM. MM..., NN..., Mme OO..., MM. PP..., QQ..., RR...et Mme SS...;
Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR constaté que les désignations de Monsieur Abdelkader A..., Monsieur Abdelwoihab C..., Monsieur Edouard B..., Monsieur Jean Marie Y..., Monsieur Thierry
Z...
et Monsieur Jean-Louis D..., salariés intérimaires, intervenues le 18 janvier 2010 au titre de la délégation de la représentation du personnel au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la DO SUD EST de la S. A. S. MANPOWER FRANCE n'étaient pas conformes aux dispositions impératives du Code du Travail et d'avoir annulé lesdites élections ;
AUX MOTIFS QU'il n'est pas discuté dans la présente instance que les dispositions de l'alinéa 4 de l'article 7 de l'accord du 05 décembre 2006, en ce qu'elles se rapportent à la composition des Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des établissements de la S. A. S. MANPOWER FRANCE sont susceptibles de continuer à produire effet dès lors qu'elles ne font pas parties des dispositions conventionnelles expressément stipulées à durée déterminée par l'alinéa 6 de ce même article 7 ; néanmoins, ces dispositions relatives à la composition du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail notamment au sein de la DO Sud Est de la S. A. S. MANPOWER FRANCE ne doivent recevoir application que dans la mesure où, conformément aux dispositions de l'article L 4611-7 du Code du Travail, elles organisent pour les salariés, dans leur ensemble, des modalités de désignation plus favorables que celles imposées par les article L 4613-1 et R 4613-1 du Code du travail ; selon ces derniers textes, la délégation du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est, dans les établissements de 1 salariés et plus, composée de neuf salariés, dont trois appartenant au personnel de maîtrise ou des cadres ; lors de l'élection du 18 janvier 2010, le collège désignatif, afin de tenter de concilier ces prescriptions légales impératives avec l'article 7 de l'accord du 05 décembre 2006 a procédé à la désignation de trois cadres et a désigné six salariés liés à la S. A. S. MANPOWER FRANCE par des contrats de travail temporaire mais ayant, selon certains défendeurs, une activité au sein même de l'entreprise de travail temporaire par l'exercice de mandats de représentation du personnel ou de représentation syndicale ; toutefois, outre qu'il n'est absolument pas démontré que les salariés intérimaires ainsi élus — qui sont au moins au nombre de trois — consacrent entièrement leur temps de travail à l'exercice de leur mandat électif ou syndical au sein des structures de la S. A. S. MANPOWER FRANCE, il ne peut qu'être rappelé qu'en l'état du droit positif, il est de principe que les représentants du personnel au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail doivent, compte tenu des missions de cette instance, travailler dans l'entreprise au sein de laquelle ledit Comité est constitué ; cette règle implique que lesdits représentants du personnels participent, en vertu de leurs contrats de travail, aux activités, principales ou secondaires, de l'entreprise et se trouvent, ainsi, dans une situation de travail similaire ou proche de celle des salariés qu'ils ont vocation à représenter ; or, la situation des salariés intérimaires dont l'élection est contestée ne remplit pas cette condition : en effet, même à retenir leur présence permanente au sein de l'entreprise de la S. A. S. MANPOWER FRANCE, ils ne se trouvent pas dans une situation de travail commune avec celle des salariés permanents mais exercent un mandat électif ou syndical qui implique, en revanche, une suspension de leur prestation de travail ; en outre, comme le montrent les bulletins de paie produits (de M. C...exerçant l'activité de cariste et de M, Z... celle de conducteur d'engins), la prestation de travail faisant l'objet des contrats liant la demanderesse et lesdits salariés intérimaires est étrangère au fonctionnement des structures et services de l'entreprise et n'a vocation à être fournie que dans le cadre de contrats de mise à disposition conclus avec les entreprises utilisatrices ; au surplus, l'élection de ces travailleurs intérimaires a nécessairement pour conséquence de priver les salariés permanents de la S. A. S. MANPOWER FRANCE de la représentation exigée par les dispositions du Code du Travail ; les normes constitutionnelles et européennes invoquées, en particulier la directive CEE 89/ 391 concernant la mise en oeuvre des mesures visant à promouvoir l'amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs, ainsi que la directive 91/ 383/ CEE du 25 juin 1991 complétant lesdites mesures en faveur des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire, ont notamment pour objet d'assurer aux travailleurs intérimaires, en matière de sécurité et de santé au travail, le bénéfice du même niveau de protection que celui assuré aux autres travailleurs de l'entreprise et/ ou de l'établissement utilisateurs ; il n'apparaît pas que ces textes, comme d'ailleurs le règlement intérieur " personnel temporaire " invoqué également par un défendeur, imposent la présence de représentants des travailleurs intérimaires au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'entreprise de travail temporaire dès lors que les objectifs recherchés sont atteints par les dispositions légales organisant la participation des travailleurs intérimaires, sous certaines conditions, à l'élection des représentants des salariés au sein du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'entreprise utilisatrice ; de même l'égalité de traitement entre les travailleurs temporaires et les autres travailleurs, imposée par lesdites normes, n'est pas méconnue dès lors que, conformément aux modalités prévues par l'article L 1111-2 du Code du Travail, les salariés intérimaires sont comptabilisés dans l'effectif de l'entreprise utilisatrice pour la mise en place des institutions représentatives du personnel ; en conséquence, il ne peut que se déduire de ce qui précède, que, si, en l'espèce, l'éligibilité des travailleurs intérimaires au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est prévue par des dispositions conventionnelles, susceptibles de produire effet seulement sous la réserve de ne pas restreindre la représentation légale des personnels permanents, les élections de la représentation du personnel au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la DO SUD EST du 18 janvier 2010 ne tiennent pas compte de cette réserve, ne sont donc pas conformes aux exigences légales et doivent être annulées ;
ALORS QUE le législateur n'a pas réservé aux seuls salariés permanents des entreprises de travail temporaire le droit d'être éligibles au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, et n'a prévu aucune condition de capacité électorale, tout salarié de l'établissement pouvant être désigné, peu important qu'il exerce ses fonctions à l'extérieur de l'établissement ; que le Tribunal a refusé aux salariés intérimaires le droit d'être éligibles au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'entreprise de travail temporaire aux motifs qu'ils ne remplissaient pas les conditions requises, ne satisfaisaient pas aux exigences tenant à la participation, en vertu de leurs contrats de travail, aux activités, principales ou secondaires, de l'entreprise et ne se trouvaient pas dans une situation de travail commune avec celle des salariés permanents ; que le Tribunal, qui a exigé des conditions qui ne sont pas prévues légalement, a violé l'article L 4613-1 du Coder du Travail (anciennement L 236-5) ;
ALORS surtout QUE le comité d'hygiène, des sécurité et des conditions de travail est compétent pour apprécier les méthodes de gestion et d'évaluation des salariés, ce dont il résulte que sa compétence concerne au premier chef les salariés intérimaires d'une société d'intérim ; qu'en excluant les intérimaires, privés ainsi de la protection à laquelle ils peuvent prétendre, le Tribunal a violé les articles L 4612-1 et suivants du Code du travail
Et ALORS QUE le temps passé en délégation par les représentants du personnel est de plein droit considéré comme temps de travail ; que le Tribunal a relevé que les salariés intérimaires « ne se trouvent pas dans une situation de travail commune avec celle des salariés permanents mais exercent un mandat électif ou syndical qui implique, en revanche, une suspension de leur prestation de travail » ; qu'en statuant comme il l'a fait, le Tribunal a violé les articles L 2143-17, L 2315-3, L 2325-7 (anciennement L 412-20, L 424-1, L 434-1) ;
Et ALORS QUE les exposants avaient fait valoir que les intérimaires représentaient plus de 95 % de l'effectif total de la société MANPOWER ; que les stipulations conventionnelles qui permettent à une catégorie de personnel représentant plus de 95 % de l'effectif d'être représentée au CHSCT sont plus favorables à l'ensemble des salariés de l'entreprise que les dispositions légales qui permettraient de les exclure totalement ; qu'en jugeant le contraire, le Tribunal a violé l'article L 4611-7 du code du travail (anciennement L 236-13).
QU'à tout le moins, en s'attachant aux droits des seuls salariés permanents, et en n'examinant pas ceux de la collectivité des salariés en son ensemble, le Tribunal n'a pas légalement justifié sa décision au regard desdites dispositions.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-60217
Date de la décision : 23/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Lyon, 30 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 mar. 2011, pourvoi n°10-60217


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.60217
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