LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse régionale de réassurances mutuelles agricoles Groupama Grand Est (l'assureur) a conclu les 23 et 26 mars et le 23 avril 2004 avec l'EARLde La Rente Lamartine et son gérant, M. de X..., différents contrats d'assurances d'une durée d'un an garantissant leur responsabilité civile professionnelle, l'exploitation agricole ainsi que les matériels utilisés et, le 30 juin 2008, des contrats " grêle " d'une durée de cinq ans ; que l'assureur a notifié à M. de X..., ès qualités ou à titre personnel, la " résiliation " de ces contrats ; que l'EARL de La Rente Lamartine a assigné l'assureur en nullité de ces " résiliations " ;
Sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de déclarer inopposables à l'EARL de La Rente Lamartine et à M. de X... les résiliations de contrats d'assurance " grêle " qu'il leur a notifiées le 8 octobre 2008 et de dire en conséquence que ces contrats continuent à produire leur effet ;
Mais attendu que l'arrêt retient que chacun des contrats " grêles ", conclu pour une durée de cinq ans, stipule qu'il " est, à son expiration, reconduit d'année en année, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties, deux mois avant le 31 décembre de l'année en cours, le cachet de la poste faisant foi " ; qu'il ressort des termes clairs et explicites de cette stipulation que chacune des parties bénéficie, mais uniquement à l'expiration de la durée quinquennale du contrat initial, de la faculté de résilier ces contrats à chaque échéance annuelle suivante ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d ‘ appel, qui a exactement analysé la clause contractuelle litigieuse, a déduit à bon droit que l'assureur ne pouvait se prévaloir des résiliations des contrats d'assurance " grêle " qu'il a notifiées le 8 octobre 2008 avec effet au 31 décembre suivant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour déclarer inopposables à l'EARL de La Rente Lamartine et à M. de X... les résiliations de contrats d'assurance que l'assureur leur a notifiées le 23 octobre 2007 à effet au 31 décembre 2007, l'arrêt, après avoir rappelé que les clauses des conditions particulières d'une police d'assurance prévalent sur celles des conditions générales au cas où les premières sont inconciliables avec les secondes, retient qu'en l'espèce les conditions particulières des contrats litigieux, dépourvues d'ambiguïté, ne prévoyaient qu'une faculté de résiliation au profit de l'assuré à chaque échéance annuelle des contrats souscrits ;
Qu'en statuant ainsi, sans prendre en compte les conditions générales en ce qu'elles prévoyaient, sans contradiction avec les conditions particulières, la tacite reconduction du contrat d ‘ assurance conclu pour un an avec la faculté de s'y opposer pour chaque partie, deux mois avant la date d'échéance dudit contrat, contractuellement fixée au 1er janvier de chaque année, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions déclarant inopposables à l'EARL de La Rente Lamartine et à M. de X... les résiliations de contrats d'assurance que l'assureur leur a notifiées le 23 octobre 2007 à effet au 31 décembre 2007 et disant que ces contrats continuaient à produire leur effet, l'arrêt rendu le 13 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils pour la caisse régionale de réassurances mutuelles agricoles Groupama Grand Est.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:En ce que l'arrêt attaqué déclare inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 23 octobre 2007, dit en conséquence que ces contrats continuent à produire leur effet, et condamne la société GROUPAMA Grand Est sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que sur la résiliation des contrats d'assurance notifiée par lettre du 23 octobre 2007 que le droit de résilier le contrat d'assurance à l'expiration d'un délai d'un an, institué par l'article L. 113-12 du code des assurances en faveur tant de l'assureur que de l'assuré, " doit ", selon les termes mêmes de ce texte, " être rappelé dans chaque police " ; que la police d'assurance s'entend, pour l'application de ce texte, au sens des dispositions de l'article L. 112-4 du même code qui énumère les mentions que doit comporter ce document daté du jour où il est établi et soumis à la signature de l'assuré ; pour la circonstance que l'analyse des polices d'assurance produites au débat par les parties, dénommées « Tour de Plaine », « Conduire » et « Tracteur matériel agricole » dont la société GROUPAMA a notifié le 23 octobre 2007 la résiliation à M. de X..., en son nom personnel ou en sa qualité de gérant de l'E. A. R. L. de la RENTE LAMARTINE, enseigne qu'elles renferment chacune la clause suivante : « Ce contrat se renouvelle d'année en année, sauf dénonciation de votre part au moins deux mois avant la date d'échéance annuelle, le cachet de la poste faisant foi » ; qu'il en ressort que la société GROUPAMA, en insérant dans les polices cette mention réservant au seul assuré la faculté de résilier à chaque échéance annuelle les contrats souscrits, n'a satisfait aux prescriptions de l'article L. 114-12 du code des assurances que pour ce qui concerne le droit de celui-ci d'exercer cette option ; qu'il en résulte que l'assureur, n'ayant pas rappelé dans ces polices le droit que la loi lui réservait, sous la condition d'en porter la mention, de résilier annuellement les contrats afférents, n'est pas fondé à l'opposer à l'E. A. R. L. ou à M. de X... et à se prévaloir, de la sorte, des résiliations de contrats qu'il a notifiées le 23 octobre 2007 à ses assurés et pour lesquels il ne produit aucune police mentionnant qu'il aurait, pour ce qui concerne le droit qu'il revendique, satisfait aux exigences de la loi ; qu'il y a lieu, par conséquent, de juger que les contrats d'assurance cités dans cette correspondance n'ont pas été résiliés à leur échéance du 31 décembre 2007 et continuent de produire leurs effets ;
1°/ Alors que l'exercice du droit de résiliation annuelle au profit de l'assureur et de l'assuré n'est pas subordonné à sa mention dans la police et peut, s'agissant des assurances pour les professionnels, être invoqué en l'absence de clause contraire ; que la Cour d'appel, qui a déclaré inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 23 octobre 2007 et dit en conséquence que ces contrats continuaient à produire leur effet, sans constater de clause excluant le droit de résiliation annuelle de l'assureur, a violé l'article L. 113-12 du code des assurances ;
2°/ Alors que les conditions générales portées à la connaissance du souscripteur lors de l'adhésion, ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, sont opposables à l'assuré ; que la Cour d'appel, pour déclarer inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 23 octobre 2007 et dire en conséquence que ces contrats continuaient à produire leur effet, a retenu que la police d'assurance s'entendait, pour l'application de l'article L. 113-12 du code des assurances, au sens des dispositions de l'article L. 112-4 du même code qui énumère les mentions que doit comporter ce document daté du jour où il est établi et soumis à la signature de l'assuré ; que la Cour d'appel qui a ainsi limité le contrat aux seules conditions particulières signées soumises à la signature de l'assuré, a violé les articles 1134 du code civil, L. 112-2 et L. 113-12 du code des assurances ;
3°/ Alors que l'exposante a invoqué les conditions générales des contrats, auxquelles renvoyaient les conditions particulières qu'elle complétaient, prévoyant le droit de résiliation annuelle au profit de l'assureur comme de l'assuré ; que la Cour d'appel, pour déclarer inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 23 octobre 2007 et dire en conséquence que ces contrats continuaient à produire leur effet, s'est référée aux mentions figurant dans les seules conditions particulières, sans s'expliquer sur les conditions générales, prévoyant la faculté de résiliation annuelle pour l'assureur comme pour l'assuré, prises en considération par le jugement infirmé, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:En ce que l'arrêt attaqué déclare inopposables à l'EARL de la Rente Lamartine et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 8 octobre 2008, dit en conséquence que ces contrats continuent à produire leur effet, et condamne la société GROUPAMA Grand Est sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que sur la résiliation des contrats d'assurance « grêle » notifiée par lettres du 8 octobre 2008, que l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. de X... versent aux débats deux polices d'assurance afférentes à des contrats dénommés « Grêle traditionnelle » qu'ils ont souscrits le 30 juin 2008 auprès de GROUPAMA sous les références numéros ...ET ..., et qui stipulent, chacune, que « Ce contrat est conclu pour une durée de cinq ans et est, à son expiration, reconduit d'année en année, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties, deux mois avant le 31 décembre de l'année en cours, le cachet de la poste faisant foi » ; qu'il ressort des termes clairs et explicites de cette stipulation que chacune des parties à ces deux contrats bénéficie, mais uniquement à l'expiration de la durée quinquennale, de la faculté de les résilier à chaque échéance annuelle suivante ; qu'il en résulte que la société GROUPAMA ne disposait pas du droit de résilier ces contrats au 31 décembre 2008, dont elle s'est prévalue le 8 octobre 2008, dès lors, qu'ayant été conclus le 30 juin de la même année, ils ne peuvent être résiliés qu'à l'issue de la période de cinq ans courant à compter de cette date ; qu'il y a lieu par conséquence de juger que l'intimée qui, en présence de ces contrats souscrits le 30 juin 2008 qu'elle a expressément mentionnés, pour les dénoncer, dans les lettres de résiliation datées du 8 octobre 2008, invoque en vain les contrats « Grêle » conclus en 2004 avec l'E. A. R. L. de la RENTE LAMARTINE et M. de X..., ne peut se prévaloir des résiliations qu'elle leur a ainsi notifiées pour les contrats concernés, en sorte qu'ils continuent chacun à produire leur effet ;
1°/ Alors que selon les avenants aux contrats d'assurance « grêle » du 30 juin 2008, le « contrat est conclu pour une durée de 5 ans et est, à son expiration, reconduit d'année en année, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties, deux mois avant le 31 décembre de l'année en cours, le cachet de la poste faisant foi » ; que la Cour d'appel, pour déclarer inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 8 octobre 2008 et dire en conséquence que ces contrats continuaient à produire leur effet, a retenu qu'il ressortait des termes clairs et explicites de cette stipulation que chacune des parties à ces deux contrats bénéficiait, mais uniquement à l'expiration de leur durée quinquennale initiale, de la faculté de les résilier à chaque échéance annuelle suivante ; qu'en statuant ainsi, bien qu'il ne résulte nullement des stipulations citées que les parties auraient renoncé au droit de résiliation annuelle avant l'expiration du délai de cinq ans, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ Alors que l'exercice du droit de résiliation annuelle au profit de l'assureur et de l'assuré n'est pas subordonné à sa mention dans la police et peut, s'agissant des assurances pour les professionnels, être invoqué en l'absence de clause contraire ; que la Cour d'appel, qui a déclaré inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 8 octobre 2008 et dit en conséquence que ces contrats continuaient à produire leur effet, sans constater de clause excluant le droit de résiliation annuelle de l'assureur, a violé l'article L. 113-12 du code des assurances ;
3°/ Alors que GROUPAMA faisait valoir que les documents du 30 juin 2008 étaient des avenants aux contrats souscrits le 30 juin 2004 ; que la Cour d'appel, qui a déclaré inopposables à l'EARL de la RENTE LAMARTINE et M. Rodolphe de X... les résiliations de contrats d'assurance que la société GROUPAMA Grand Est leur a notifiées le 8 octobre 2008 et dit en conséquence que ces contrats continuaient à produire leur effet, sans s'expliquer sur ces conclusions déterminantes quant à la date d'effet du contrat, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.