La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/03/2011 | FRANCE | N°09-72384

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mars 2011, 09-72384


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 20 octobre 2009), que M. X... a été engagé le 3 novembre 1975 par la société Satas en qualité de technicien puis de VRP ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment au paiement de dommages-intérêts pour illégalité des critères de répartition prévus par les accords d'intéressement conclus dans l'entreprise ;

Attendu que la société Satas fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... u

ne somme à titre de dommages-intérêts pour avoir fait application depuis 1994 d'un accor...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 20 octobre 2009), que M. X... a été engagé le 3 novembre 1975 par la société Satas en qualité de technicien puis de VRP ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment au paiement de dommages-intérêts pour illégalité des critères de répartition prévus par les accords d'intéressement conclus dans l'entreprise ;

Attendu que la société Satas fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts pour avoir fait application depuis 1994 d'un accord d'intéressement illicite, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article L. 441-1, alinéa 4, devenu l'article L. 3314-1 du code du travail que les modalités de calcul de l'intéressement peuvent varier selon les établissements et les unités de travail ; qu'en l'espèce, pour juger illicites les accords d'intéressement conclus depuis 1994 au sein de la société Satas et la condamner à indemniser un salarié, la cour considère que les salariés du secteur commercial ont pendant un certain nombre d'années perçu un intéressement qui était égal à la moitié par rapport à l'intéressement prévu pour les autres catégories de salariés et que l'employeur a donc introduit un critère de répartition qui n'était pas prévu par les textes ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme la société Satas l'y invitait pourtant, si les accords d'intéressement de la société Satas n'instituaient pas une modalité de calcul de l'intéressement différenciée entre deux unités de travail (le réseau commercial/ force de vente et le reste de l'entreprise) et sans rechercher si les salariés du secteur commercial ne constituaient pas une unité de travail distincte des autres entités composant la société Satas, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard du texte susvisé ;

2°/ qu'en toute hypothèse, l'article 441-1, alinéa 6, devenu l'article L. 3314-5 du code du travail limite seulement les critères de répartition de l'intéressement au sein d'un établissement ou d'une unité de travail, mais n'interdit pas que les modalités de calcul de l'intéressement global à répartir au sein des différents établissements ou unités de travail soient différentes ; qu'en l'espèce, pour juger illicites les accords d'intéressement conclus depuis 1994 au sein de la société Satas et la condamner à indemniser un salarié, la cour considère que les salariés du secteur commercial ont pendant un certain nombre d'années perçu un intéressement qui était égal à la moitié par rapport à l'intéressement prévu par les autres catégories de salariés et que l'employeur a donc introduit un critère de répartition qui n'était pas prévu par les textes ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme la société Satas l'y invitait pourtant, si les salariés du secteur commercial ne constituaient pas une unité de travail distincte des autres entités composant la société Satas, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard du texte susvisé ;

3°/ que pour les mêmes motifs, en l'espèce, pour juger illicites les accords d'intéressement de la société Satas, la cour considère en substance que l'employeur a introduit un critère de répartition non prévu par la loi en distinguant les VRP du réseau commercial d'un côté et les autres catégories professionnelles de l'autre ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme les écritures de la société Satas le soutenaient expressément " le réseau commercial/ force de vente terrain " ne comprenait pas des salariés relevant de catégories professionnelles et de statut différents, mais effectuant les mêmes tâches avec les mêmes conditions de travail et sous le même encadrement de sorte que l'existence d'une unité de travail était caractérisée, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article L. 441-1, alinéa 4, devenu l'article L. 3314-1 du code du travail ensemble l'article L. 441-1, alinéa 6, devenu l'article L. 3314-5 du code du travail ;

4°/ qu'en tout état de cause, aux termes de l'article L. 143-14 devenu l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2277 du code civil alors applicable ; qu'en l'espèce, pour condamner la société Satas à verser à M. X... la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, la cour, tout en admettant que les sommes versées à un salarié en application d'un accord d'intéressement illicite sont des salaires et donc soumis à la prescription quinquennale, considère que de toute façon le salarié s'est situé sur le terrain indemnitaire ; qu'en statuant ainsi, cependant, que sous couvert d'une demande de dommages-intérêts, le salarié demandait le paiement de créances de nature salariale qui étaient prescrites en application de l'article 2277 du code civil alors applicable, la cour viole ce texte ensemble l'article L. 143-14 devenu L. 3245-1 du code du travail ;

Mais attendu que, si l'article L. 3314-1 du code du travail autorise la mise en oeuvre de modalités de calcul de la prime d'intéressement différentes selon les établissements et les unités de travail, les critères de répartition de cette prime sont ceux prévus par l'article L. 3314-5, soit la répartition uniforme, proportionnelle à la durée de présence dans l'entreprise pendant l'exercice ou proportionnelle aux salaires ou leur combinaison ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que les accords conclus dans l'entreprise depuis 1994 comportaient un critère de répartition de la prime d'intéressement fondé sur le paiement aux VRP d'une part variable de rémunération, non prévu par le texte susvisé, en a déduit à bon droit que l'employeur avait appliqué des accords illicites ;

Et attendu que la cour d'appel, faisant une exacte application des dispositions de l'article L. 3312-4 du code du travail, a alloué des dommages-intérêts au salarié ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Satas aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Blondel, avocat aux conseils pour la société Satas

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société SATAS à verser à Monsieur Jean-Louis X... la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour avoir fait application depuis 1994 d'un accord d'intéressement illicite ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... a développé en cause d'appel une demande indemnitaire sur l'illégalité des critères de répartition des accords d'intéressement ; qu'il fait valoir que les accords conclus au sein de l'entreprise ont pris en considération le fait que les VRP percevraient par le biais des commissions une rémunération fonction des résultats commerciaux et que dès lors, ils percevraient 50 % d'une rémunération fonction des résultats commerciaux ; que de ce fait, ils devaient bénéficier d'une part au titre de l'intéressement et les autres bénéficieraient de deux parts ; qu'il estime que l'intéressement ne devant en rien se substituer à du salaire, il devait être calculé sur la même base de départ ; que la société SATAS s'oppose à cette demande en faisant valoir qu'elle a modifié au fur et à mesure des années, la rédaction de la clause considérée comme litigieuse et que ces accords déposés à la direction du travail n'ont jamais soulevé de critiques ou de remarques sinon de manière récente ; qu'elle rappelle enfin que les demandes de M. X... sont prescrites pour leur plus grande part ; qu'en l'espèce, les accords d'intéressement conclus successivement au sein de la SATAS ne sont critiqués par le salarié que pour ce qui est des critères de répartition ; qu'il est constant que l'intéressement peut être réparti selon trois modalités soit une répartition uniforme, soit une répartition prenant en compte la durée de présence du salarié pendant l'exercice considéré, soit une répartition proportionnelle aux salaires ; que tout autre critère de répartition doit être exclu, sauf si l'on se place dans un supplément d'intéressement, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ou bien si l'on se situe dans des accords conclus au départ au titre de la participation et qui prennent en compte la qualification et l'ancienneté, ce qui n'est pas non plus l'hypothèse considérée ; qu'il n'est pas sérieusement discuté que les salariés du secteur commercial ont pendant un certain nombre d'années perçu un intéressement qui était égal à la moitié par rapport à l'intéressement prévu par les autres catégories de salariés, au motif que les VRP, percevant une partie variable dans leur rémunération se trouvaient déjà associés aux résultats de l'entreprise ; que l'employeur a donc introduit un critère de répartition qui n'était pas prévu par les textes depuis la loi du 25 juillet 1994 et le motif retenu qui se fonde sur la structure particulière de la rémunération des salariés commerciaux est totalement étranger à l'esprit collectif de l'intéressement ; qu'aucun argument ne peut être tiré par la société SATAS pour combattre la demande individuelle de M. X... de ce que les accords successifs d'intéressement ont été acceptés par la direction du Travail et ces dispositions seront considérées comme illicites envers M. X... ; qu'en revanche, avant la loi du 25 juillet 1994, les accords d'intéressement pouvaient faire varier les critères de répartition en fonction des catégories à condition que l'application de ces critères n'aboutisse pas à exclure totalement certains d'entre eux ; qu'en l'espèce, la défense faite par l'employeur de substituer des sommes versées au titre de l'intéressement à des sommes versées au titre des rémunérations n'était nullement en cause puisqu'au contraire, la SATAS a toujours considéré que les VRP avaient déjà une part d'intéressement dans leur rémunération et il sera retenu que les droits à intéressement de M. X... n'ont pas été respectés à partir de 1994 ; qu'il est exact que les sommes qui sont versées aux salariés après reconnaissance du caractère illicite d'un accord d'intéressement sont alors considérées comme des salaires et soumises à la prescription quinquennale ; qu'en l'espèce, Monsieur X... a réclamé des dommages-intérêts pour non-respect de ses droits et s'est donc situé sur le terrain indemnitaire ; que dès lors, la prescription n'a pas à lui être opposée et la Cour dispose des éléments suffisants pour évaluer son préjudice à la somme de 5 000 euros ;

ALORS QUE, D'UNE PART, il résulte de l'article L. 441-1 alinéa 4 devenu l'article L. 3314-1 du Code du travail que les modalités de calcul de l'intéressement peuvent varier selon les établissements et les unités de travail ; qu'en l'espèce, pour juger illicites les accords d'intéressement conclus depuis 1994 au sein de la société SATAS et la condamner à indemniser un salarié, la Cour considère que les salariés du secteur commercial ont pendant un certain nombre d'années perçu un intéressement qui était égal à la moitié par rapport à l'intéressement prévu par les autres catégories de salariés et que l'employeur a donc introduit un critère de répartition qui n'était pas prévu par les textes ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme la société SATAS l'y invitait pourtant (concl. d'appel pages 60 et s.), si les accords d'intéressement de la société SATAS n'instituaient pas une modalité de calcul de l'intéressement différenciée entre deux unités de travail (le réseau commercial/ force de vente et le reste de l'entreprise) et sans rechercher si les salariés du secteur commercial ne constituaient pas une unité de travail distincte des autres entités composant la société SATAS, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard du texte susvisé ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, et en toute hypothèse, l'article 441-1 alinéa 6 devenu l'article L. 3314-5 du Code du travail limite seulement les critères de répartition de l'intéressement au sein d'un établissement ou d'une unité de travail, mais n'interdit pas que les modalités de calcul de l'intéressement global à répartir au sein des différents établissements ou unités de travail soient différentes ; qu'en l'espèce, pour juger illicites les accords d'intéressement conclus depuis 1994 au sein de la société SATAS et la condamner à indemniser un salarié, la Cour considère que les salariés du secteur commercial ont pendant un certain nombre d'années perçu un intéressement qui était égal à la moitié par rapport à l'intéressement prévu par les autres catégories de salariés et que l'employeur a donc introduit un critère de répartition qui n'était pas prévu par les textes ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme la société SATAS l'y invitaient pourtant (concl. d'appel pages 60 et s.), si les salariés du secteur commercial ne constituaient pas une unité de travail distincte des autres entités composant la société SATAS, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard du texte susvisé ;

ALORS QUE, PAR AILLEURS, et pour les mêmes motifs, qu'en l'espèce, pour juger illicites les accords d'intéressement de la société SATAS, la Cour considère en substance que l'employeur a introduit un critère de répartition non prévu par la loi en distinguant les VRP du réseau commercial d'un côté et les autres catégories professionnelles de l'autre ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme les écritures de la société SATAS le soutenaient expressément (concl. page 63) " le réseau commercial/ force de vente terrain " ne comprenait pas des salariés relevant de catégories professionnelles et de statut différents, mais effectuant les mêmes tâches avec les mêmes conditions de travail et sous le même encadrement de sorte que l'existence d'une unité de travail était caractérisée, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article L. 441-1 alinéa 4 devenu l'article L. 3314-1 du Code du travail ensemble l'article L. 441-1 alinéa 6 devenu l'article L. 3314-5 du Code du travail ;

ET ALORS ENFIN QUE, et en tout état de cause, aux termes de l'article L. 143-14 devenu l'article L. 3245-1 du Code du travail l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2277 du Code civil alors applicable ; qu'en l'espèce, pour condamner la société SATAS à verser à Monsieur X... la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts, la Cour, tout en admettant que les sommes versées à un salarié en application d'un accord d'intéressement illicite sont des salaires et donc soumis à la prescription quinquennale, considère que de toute façon le salarié s'est situé sur le terrain indemnitaire ; qu'en statuant ainsi, cependant, que sous couvert d'une demande de dommages-intérêts, le salarié demandait le paiement de créances de nature salariale qui étaient prescrites en application de l'article 2277 du Code civil alors applicable, la Cour viole ce texte ensemble l'article L. 143-14 devenu L. 3245-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72384
Date de la décision : 16/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 20 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mar. 2011, pourvoi n°09-72384


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72384
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award