LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique ;
Vu l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 ;
Attendu que le réseau basse tension exploité par EDF ayant été endommagé par une pelle mécanique, à l'occasion de travaux effectués par la société Vocatour, la société EDF a demandé réparation du préjudice subi devant un tribunal de grande instance ;
Attendu que pour accueillir l'exception d'incompétence des juridictions de l'ordre judiciaire soulevée par la société Vocatour, l'arrêt attaqué retient que si la pelle mécanique constitue bien un véhicule au sens de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957, celle-ci était immobilisée au moment où a été causé le dommage, seul son bras mécanique effectuant un travail d'excavation au cours duquel le câble d'EDF a été accroché, de sorte que la demande ne procède pas de l'action d'un véhicule en circulation relevant de ce texte ;
Qu'en statuant ainsi alors que le bras de la pelle mécanique ne peut être dissocié du véhicule pris comme tel, peu important que celui-ci ne soit pas en mouvement lors du dommage dès lors qu'il en est la cause génératrice, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne la société Vocatour aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Vocatour ; la condamne à payer la somme de 2 500 euros à EDF ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour la société Electricité de France.
PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a infirmé le jugement ayant rejeté l'exception d'incompétence de la société VOCATOUR en faveur de la compétence de la juridiction administrative et, statuant à nouveau, invité EDF à mieux se pourvoir en application de l'article 96, alinéa 1 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE «Si un engin de chantier tel qu'une pelle mécanique constitue un véhicule relevant de la loi du 31 décembre 1957, cette disposition ne peut recevoir application que pour autant que le dommage invoqué trouve sa cause déterminante dans l'action du véhicule ; qu'en l'espèce, il n 'est pas discuté que la pelle mécanique de la société VOCATOUR était immobilisée au moment où a été causé le dommage au préjudice des installations d'EDF, que seul son bras mécanique effectuait un travail d'excavation au cours duquel le câble d'EDF a été accroché, en sorte que le dommage ne procède pas de l'action d'un véhicule en circulation qui seule relève de la loi du 31 décembre 1957; qu'il sera fait droit à l'argumentation de la société VOCATOUR, que la décision déférée sera infirmée et que EDF sera renvoyée à mieux se pourvoir en application de l'article 96 du Code de procédure civile, les juridictions de l'ordre judiciaire étant incompétentes pour en connaître ;
ALORS QUE l'article 1 er de la loi du 31 décembre 1957 attribue de manière générale aux tribunaux de l'ordre judiciaire la connaissance des actions en responsal ilité tendant à la réparation des dommages de toute nature causés par un véhicule quelconque, tel une pelleteuse mécanique pouvant se déplacer par ses propres moyens, sans qu'il fasse obstacle à la circonstance que lorsque s'est produit le fait générateur du dommage, le véhicule n'était pas en mouvement ou participait à l'exécution d'un travail public ; que le dommage dont la société EDF se prévaut se rattache par un lien direct de cause à effet au fonctionnement de la pelle mécanique de la société VOCATOUR présentant le caractère de véhicule ; que si ce dommage a été provoqué par le bras en action de ladite pelle mécanique dont cet engin était muni, ledit appareil ne peut, eu égard aux conditions techniques de son fonctionnement, être dissocié du véhicule pris comme tel ; que, dans ces conditions, l'autorité judiciaire est seule compétente pour connaître de l'action en réparation de ce dommage ; qu'en l'espèce, en dissociant le bras mécanique qui effectuait le travail d'excavation au cours duquel le câble d'EDF a été accroché, de la pelle mécanique elle-même qui était immobilisée au moment du dommage, pour en déduire que ce dommage ne procède pas de l'action d'un véhicule en circulation, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article susvisé.