LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 janvier 2009), que la société Crédit lyonnais (la banque) a consenti à M. X... (l'emprunteur) deux prêts de 310 000 francs (47 259,20 euros) chacun, remboursables sur quinze ans, en vue de financer l'acquisition de biens immobiliers destinés à la location ; que devant la défaillance de l'emprunteur, la banque a prononcé la déchéance du terme, obtenu la vente sur adjudication des biens immobiliers, fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un autre bien immobilier et pratiquer une saisie-attribution ; que l'emprunteur a assigné la banque afin d'obtenir la déchéance du droit aux intérêts, la libération de sa dette, la mainlevée de l'inscription hypothécaire et de la saisie-attribution ainsi que le paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à le libérer de sa dette à l'égard de la banque, à raison du manquement de celle-ci à son obligation de conseil, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges sont tenus d'indiquer sur quels éléments de preuve ils fondent leur décision ; qu'en énonçant que l'emprunteur était un emprunteur averti, dès lors qu'il exerçait la profession de négociation immobilier, sans préciser la pièce versée aux débats faisant état de cette qualité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que toute banque est soumise à un devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur non averti à raison de ses capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi des prêts ; qu'en énonçant que les revenus professionnels de l'emprunteur comportaient une part d'aléa puisqu'il était rémunéré à la commission, sans en déduire que la charge nécessairement variable de l'emprunt ne pouvait être fixée, comme elle l'a fait, à "un peu plus de 30 %", cette seule circonstance imposant à la banque de le mettre en garde contre les risques d'un endettement sans proportion avec ses capacités financières fluctuantes, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'emprunteur n'ayant pas contesté exercer, lors de l'octroi des crédits, la profession de négociateur immobilier retenue par les premiers juges, la cour d'appel n'avait pas à vérifier ce fait ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient que l'emprunteur a la qualité d'emprunteur averti et que ce dernier ne prétendait ni ne démontrait que la banque aurait eu sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles des informations qu'il aurait lui-même ignorées ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par Mme le conseiller doyen faisant fonction de président en son audience publique du huit mars deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande tendant à le libérer de sa dette à l'égard du Crédit Lyonnais, à raison du manquement par la banque de son obligation de conseil à l'égard de l'emprunteur.
AUX MOTIFS PROPRES QUE Monsieur X... fait grief au Crédit Lyonnais de lui avoir consenti des crédits inadaptés à ses facutés de remboursement; Que, dans une demande de prêt datée du 5 décembre 1992, il a fait état de la perception de ressources annuelles de 166.000 francs; Que les deux biens immobiliers acquis grâce aux prêts en cause étaient destinés à la location et une attestation établie par une agence immobilière estimait à 3.500 francs par mois et par studio le revenu locatif attendu; Que la charge des prêts s'établissait au vu de ces éléments à un peu plus de 30%; Que ce ratio ne caractérise pas un crédit abusif; Que la cour observe que Monsieur X..., qui exerçait la profession de négociateur immobilier, était un emprunteur averti à l'égard duquel le prêteur n'était tenu d'aucune obligation d'information et de mise en garde particulière à raison de ses capacités financières; Que le moyen tiré de la disproportion des crédits octroyés doit donc être écarté,
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES que Monsieur X... invoque le fait que le prêteur aurait dû veiller à ce que le crédit consenti ne soit pas manifestement disproportionné aux facultés de l'emprunteur ou aux perspectives de rentabilité de l'opération et lui en signaler le caractère irréaliste; Que les deux biens immobiliers ont été acquis en vue de leur location, étant précisé que Monsieur X... était à l'époque négociateur immobilier, que lors de ces opérations, l'emprunteur a fourni des informations sur ses revenus mensuels et sur son patrimoine, déjà composé d'un autre bien immobilier; Que pour l'année 1992, en remplissant sa demande de prêt, il a fait lui-même état d'un total de ressources de 236.000 francs, outre les revenus locatifs à percevoir de deux autres studios déjà acquis dans la même résidence; Que si ses revenus professionnels comportaient une part d'aléa puisqu'il était rémunéré à la commission, en revanche, il était précisé qu'il était logé gratuitement par sa famille; Qu'il prévoyait pour 1993 des ressources de 180.000 francs; Que compte tenu de la perception de loyers mensuels, pour chaque studio de 3.500 francs, montant couvrant le remboursement, après le second prêt, la charge de l'emprunt était un peu supérieure à 30%, mais il existait une marge de sécurité; Qu'en conséquence, la banque n'a pas fait d'imprudence en donnant un avis favorable,
ALORS QUE D'UNE PART, les juges sont tenus d'indiquer sur quels éléments de preuve ils fondent leur décision; Qu'en énonçant que Monsieur X... était un emprunteur averti, dès lors qu'il exerçait la profession de négociation immobilier, sans préciser la pièce versée aux débats faisant état de cette qualité, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS QUE D'AUTRE PART, toute banque est soumise à un devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur non averti à raison de ses capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi des prêts; Qu'en énonçant que les revenus professionnels de Monsieur X... comportaient une part d'aléa puisqu'il était rémunéré à la commission, sans en déduire que la charge nécessairement variable de l'emprunt ne pouvait être fixée, comme elle l'a fait, à «un peu plus de 30%», cette seule circonstance imposant à la banque de le mettre en garde contre les risques d'un endettement sans proportion avec ses capacités financières fluctuantes, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil.