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03/03/2011 | FRANCE | N°10-30554

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 03 mars 2011, 10-30554


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 janvier 2010), que, saisie le 25 mars 2005 par la société GEREP (la société), la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la CPAM) lui a, le 4 novembre 2005, déclaré inopposable la prise en charge de l'accident du travail dont son salarié, M. X..., avait été victime le 26 mars 1991 ; que la caisse régionale d'assurance maladie a notifié à cet employeur le 19 mai 2006 des taux de cotisations accidents du trava

il rectifiés pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 2004 ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 janvier 2010), que, saisie le 25 mars 2005 par la société GEREP (la société), la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la CPAM) lui a, le 4 novembre 2005, déclaré inopposable la prise en charge de l'accident du travail dont son salarié, M. X..., avait été victime le 26 mars 1991 ; que la caisse régionale d'assurance maladie a notifié à cet employeur le 19 mai 2006 des taux de cotisations accidents du travail rectifiés pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 2004 ; que la société ayant sollicité le remboursement des cotisations versées en trop pendant cette période, l'URSSAF de Seine-et-Marne a limité le remboursement à celles réglées après le 25 mars 2002 en invoquant la prescription de la demande pour la période antérieure ; que la société a saisi une juridiction de sécurité sociale en sollicitant, à titre principal, la condamnation de l'URSSAF au remboursement des sommes indûment versées entre 1993 et 2002, et à titre subsidiaire, la condamnation de la CPAM au paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en remboursement, alors, selon le moyen :
1°/ que, selon l'article 2257 (devenu 2233) du code civil, la prescription ne court point à l'égard d'une créance qui dépend d'une condition, jusqu'à ce que la condition arrive ; qu'une demande de remboursement de cotisations n'est fondée que si l'employeur détient un titre de créance qui la fonde ; que la prescription d'une action en remboursement de l'indu fondée sur une décision de la CRAM de réduction des taux de cotisations "accidents du travail" ne peut courir avant la naissance de l'obligation de remboursement découlant de cette décision ; que viole le texte susvisé l'arrêt attaqué qui retient que la prescription de la demande en remboursement de cotisations formée par la société à la suite de la décision du 19 mai 2006 de la CRAM d'Ile-de-France de réduire les taux de cotisations "accidents du travail" de ladite société aurait pu courir avant la naissance de la créance de remboursement de ladite société née de cette décision de la CRAM d'Ile-de-France ;
2°/ que, selon l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; que méconnaît le droit d'accès à un tribunal et viole le texte susvisé l'interprétation déraisonnable, d'un formalisme excessif, par le juge interne d'une règle de procédure ou d'une formalité entraînant l'irrecevabilité d'un recours ; qu'en retenant que la société devait introduire son recours en restitution des cotisations indues avant que soit reconnu son droit à ces restitutions, la cour d'appel a interprété de manière déraisonnable la règle de l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale relative à la prescription et violé l'article 6.1 susvisé de la Convention européenne des droits de l'homme ;
3°/ que, selon l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens et nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; que la créance de remboursement de cotisations indues de la société s'analyse en une valeur patrimoniale et caractérise un bien au sens du texte susvisé ; que viole ce texte l'arrêt attaqué qui oppose à ladite société un délai de prescription décompté, selon l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, à partir du paiement indu, et non à partir du jour où le principe de la créance a été reconnu et a permis d'agir en restitution ;
Mais attendu qu'ayant exactement rappelé que l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale était le seul texte applicable à une demande de remboursement de cotisations de sécurité sociale indûment versées et constaté que les taux majorés de cotisations avaient été notifiés à la société annuellement à compter de 1993 avec la mention des délais de recours et qu'aucun obstacle ne l'avait empêchée de contester en temps utile l'opposabilité de la décision de prise en charge de la caisse pas plus que d'engager l'action en remboursement dans les limites de la prescription, la cour d'appel a fait ressortir qu'aucun élément ne permettait de fixer le point de départ du délai de prescription à une date différente de celle prévue par le texte susmentionné de sorte que la réclamation de la société ne pouvait être accueillie pour les cotisations réglées avant le 25 mars 2002 ;
Et attendu qu'ayant ainsi relevé que la société n'avait été privée d'aucune possibilité d'exercice des voies de recours utiles, la cour d'appel en a justement déduit qu'aucune violation des prescriptions de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'était caractérisée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que la société reprochait à la CPAM d'avoir commis une faute en considérant, à tort, comme opposable à ladite société la prise en charge de l'accident du travail de M. X..., opposabilité qui avait entraîné l'attribution de taux de cotisations "accidents du travail" erronés par la CRAM d'Ile-de-France et consécutivement le versement de cotisations indues par la société ; que viole l'article 1382 du code civil l'arrêt attaqué qui refuse de retenir cette responsabilité de la CPAM ;
2°/ que ne constitue nullement une négligence le fait par une partie d'avoir attendu que son droit soit juridiquement établi avant d'exercer, dans les délais impartis par les textes, l'action permettant de le faire sanctionner, en sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le préjudice dont la société réclamait réparation était en relation de causalité non avec une faute de la CPAM mais avec la carence de cette société qui n'avait pas engagé son action en temps utile, a ainsi justifié sa décision rejetant la demande fondée sur les dispositions de l'article 1382 du code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Rejette le pourvoi ;
Condamne la société GEREP aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société GEREP ; la condamne à payer à la CPAM de Seine-et-Marneet à l'URSSAF de Seine-et-Marne la somme de 2 500 euros à chacune ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Groupage pour l'élimination des résidus polluants - GEREP.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit prescrite la demande de la société GEREP afférente au remboursement des cotisations de sécurité sociale versées antérieurement au 25 mars 2002, D'AVOIR confirmé en conséquence la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF de SEINE ET MARNE du 26 septembre 2007 et D'AVOIR débouté la société GEREP de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L.243-6 du Code de la sécurité sociale est le seul texte applicable à une demande de remboursement de cotisations de sécurité sociale indûment versées ; que la prescription d'une telle demande court à partir du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu valablement agir ; qu'en l'espèce, aucun obstacle n'interdisait à la société GEREP de contester dans les délais utiles la décision du 26 mars 1991, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'elle a reçu notification du taux annuel de cotisations fixé par la CPAM à la suite de l'accident litigieux ainsi que des modalités de recours contre cette décision ; qu'elle était ainsi en mesure de poursuivre à compter de leurs versements et dans les limites du délai de prescription de l'action en répétition le remboursement des cotisations qu'elle estimait avoir indûment payées ; que la société GEREP n'a ainsi été privée d'aucune voie de recours contre cette décision et que, les situations des parties n'ayant pas créé de situation inéquitable, la procédure n'a pas été contraire aux prescriptions de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'à juste titre l'URSSAF argue de ce que la prescription ainsi retenue porte sur les sommes réglées antérieurement au 25 mars 2002 et qu'à tort le premier juge a retenu la date du 1er janvier 2002 » ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE selon l'article 2257 (devenu 2233) du Code civil, la prescription ne court point à l'égard d'une créance qui dépend d'une condition, jusqu'à ce que la condition arrive ; qu'une demande de remboursement de cotisations n'est fondée que si l'employeur détient un titre de créance qui la fonde ; que la prescription d'une action en remboursement de l'indu fondée sur une décision de la CRAM de réduction des taux de cotisations « accidents du travail » ne peut courir avant la naissance de l'obligation de remboursement découlant de cette décision ; que viole le texte susvisé l'arrêt attaqué qui retient que la prescription de la demande en remboursement de cotisations formée par la société GEREP à la suite de la décision du 19 mai 2006 de la CRAM d'ILE DE FRANCE de réduire les taux de cotisations « accidents du travail » de ladite société aurait pu courir avant la naissance de la créance de remboursement de ladite société née de cette décision de la CRAM d'ILE DE FRANCE ;
ALORS, DE DEUXIEME PART QUE, selon l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; que méconnaît le droit d'accès à un tribunal et viole le texte susvisé l'interprétation déraisonnable, d'un formalisme excessif, par le juge interne d'une règle de procédure ou d'une formalité entraînant l'irrecevabilité d'un recours ; qu'en retenant que la société GEREP devait introduire son recours en restitution des cotisations indues avant que soit reconnu son droit à ces restitutions, la cour d'appel a interprété de manière déraisonnable la règle de l'article L.243-6 du Code de la sécurité sociale relative à la prescription et violé l'article 6.1 susvisé de la Convention européenne des droits de l'homme ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE, selon l'article 1er du Protocole additionnel n°1 à la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens et nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; que la créance de remboursement de cotisations indues de la société GEREP s'analyse en une valeur patrimoniale et caractérise un bien au sens du texte susvisé ; que viole ce texte l'arrêt attaqué qui oppose à ladite société un délai de prescription décompté, selon l'article L.243-6 du Code de la sécurité sociale, à partir du paiement indu, et non à partir du jour où le principe de la créance a été reconnu et a permis d'agir en restitution.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
SUBSIDIAIRE
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande subsidiaire de la société GEREP à l'encontre de la CPAM de SEINE ET MARNE sur le terrain de la responsabilité civile ;
AUX MOTIFS QU'« il importe peu dans le présent débat, de discuter des conséquences de l'inopposabilité envers la CPAM, et qu'il soit argué par celle-ci qu'elle ne peut donc être sanctionnée une seconde fois pour les mêmes faits, la question de la réparation éventuelle du dommage subi par la société GEREP du fait de l'appelante n'étant pas conditionnée par le préjudice de l'auteur de ce dommage ; qu'en revanche le préjudice de la société GEREP découle de l'impossibilité par cette société de récupérer les sommes par elle indûment payées ; qu'il a été dit plus haut que cette impossibilité résulte du jeu de la prescription, elle même opposable à la société GEREP en raison de la carence de cette dernière à agir à l'encontre de la décision initiale de la CPAM - ce qu'elle a fait avec succès plus de dix ans après la majoration des taux applicables ; qu'en conséquence, la société GEREP n'est pas fondée à réclamer à la CPAM réparation d'un tel préjudice dont le montant n'est que la résultante de sa propre inaction ; qu'en conséquence que le jugement est infirmé » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la société GEREP reprochait à la CPAM de SEINE ET MARNE d'avoir commis une faute en considérant, à tort, comme opposable à ladite société la prise en charge de l'accident du travail de Monsieur X..., opposabilité qui avait entraîné l'attribution de taux de cotisations « accidents du travail » erronés par la CRAM d'ILE DE FRANCE et consécutivement le versement de cotisations indues par la société GEREP ; que viole l'article 1382 du Code civil l'arrêt attaqué qui refuse de retenir cette responsabilité de la CPAM de SEINE ET MARNE ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE ne constitue nullement une négligence le fait par une partie d'avoir attendu que son droit soit juridiquement établi avant d'exercer, dans les délais impartis par les textes, l'action permettant de le faire sanctionner, en sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a de nouveau violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-30554
Date de la décision : 03/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 03 mar. 2011, pourvoi n°10-30554


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Luc-Thaler, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.30554
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