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01/03/2011 | FRANCE | N°10-12268

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 01 mars 2011, 10-12268


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... ayant engagé et poursuivi des pourparlers avec MM. Alain et Serge Z... (les consorts Z...), associés de la société ATS studios, en vue d'acquérir le contrôle de cette dernière, jusqu'à la rédaction d'un projet de protocole faisant apparaître les points litigíeux ou en attente de réponse, validé par les vendeurs et l'acquéreur, les vendeurs ont brutalement interrompu ces négociations au motif qu'ils étaient sollicités par une autre société ; que M. X... a fa

it assigner les consorts Z... et la société Holding Z... en réparation ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... ayant engagé et poursuivi des pourparlers avec MM. Alain et Serge Z... (les consorts Z...), associés de la société ATS studios, en vue d'acquérir le contrôle de cette dernière, jusqu'à la rédaction d'un projet de protocole faisant apparaître les points litigíeux ou en attente de réponse, validé par les vendeurs et l'acquéreur, les vendeurs ont brutalement interrompu ces négociations au motif qu'ils étaient sollicités par une autre société ; que M. X... a fait assigner les consorts Z... et la société Holding Z... en réparation ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner solidairement les consorts Z... et la société Z... à payer à M. X... la somme de 100 000 euros en réparation de la perte d'une chance de réaliser l'opération d'acquisition projetée et les gains futurs escomptés, l'arrêt retient que compte tenu du développement des négociations, de ce qu'un certain nombre de points d'accord importants étaient acquis depuis le 18 mai 2005 et de ce que les négociations progressaient positivement, la chance pour M. X... de conclure la transaction qu'il espérait était sérieuse ; qu'il en conclut que ce dernier est donc fondé à se prévaloir d'un préjudice certain au titre de la perte de chance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence d'accord ferme et définitif, le préjudice subi par M. X... n'incluait que les frais occasionnés par la négociation et les études préalables auxquelles il avait fait procéder et non les gains qu'il pouvait, en cas de conclusion du contrat, espérer tirer de l'activité de la société ATS studios ni même la perte d'une chance d'obtenir ces gains, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen qui est recevable :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner solidairement les consorts Z... et la société Z... à payer à M. X... la somme de 40 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du manque à gagner pendant la période de négociation, l'arrêt retient que M. X... est bien fondé à solliciter une indemnisation pour la perte de revenus auxquels il aurait pu prétendre durant les mois de négociation pendant lesquels il s'est totalement investi ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le dommage consistait seulement en la perte d'une chance de retrouver un emploi aussi rémunérateur que celui dont M. X... avait été licencié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte sus-visé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné solidairement les consorts Z... et la société Z... à payer à M. X... les sommes de 100 000 euros en réparation de la perte d'une chance de réaliser l'opération d'acquisition projetée et les gains futurs escomptés et de 40 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du manque à gagner pendant la période de négociation, l'arrêt rendu le 26 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour les consorts Z... et la société Z... Artistic Tracking Sound-Z... et compagnie.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement monsieur Alain Z..., monsieur Serge Z... et la société Z... à payer à monsieur X... la somme de 100. 000 euros en réparation de la perte d'une chance de réaliser l'opération d'acquisition projetée et les gains futurs escomptés ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE compte tenu du développement des négociations, de ce qu'un certain nombre de points d'accord importants étaient acquis depuis le 18 mai 2005, de ce que les négociations progressaient positivement, la chance pour monsieur X... de conclure la transaction qu'il espérait était sérieuse ; que celui-ci est donc fondé à se prévaloir d'un préjudice certain au titre de la perte de chance ; que monsieur X... indique que le résultat prévisionnel qui lui a été transmis laissait apparaître de réels gains et des résultats nets en augmentation sur les trois années à venir (de 270. 000 à 1. 118. 000 euros) ; que ce résultat pouvait être amélioré dès lors que la société rachetée abandonnerait son implication dans le rallye Paris-Dakar ; qu'il ressort du business plan que monsieur X... avait bâti son opération avec un règlement annuel de 200. 000 euros par an de management fees ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, l'indemnité pour perte de chance a été justement évaluée par le tribunal à la somme de 100. 000 euros ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE monsieur X... était en droit d'espérer réaliser à terme une plus-value importante, conformément à son business plan ; qu'il doit être indemnisé de la perte de chance de réaliser ladite plus-value, que la somme réclamée qui ne représente qu'une fraction de ladite plus-value tient suffisamment compte du caractère partiellement incertain d'une telle réalisation ; qu'il convient d'allouer à ce titre à monsieur X... la somme de 100. 000 euros ;
ALORS QUE les circonstances constitutives d'une faute dans l'exercice du droit de rupture unilatérale de pourparlers précontractuels ne sont pas la cause du préjudice découlant de la perte d'une chance de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du contrat ; qu'en l'espèce, les conditions dans lesquelles est intervenue la rupture des négociations, à les supposer fautives, n'étaient pas la cause génératrice de la perte d'une chance de réaliser les bénéfices escomptés de la conclusion du contrat d'acquisition de la société ATS Studios ; qu'en décidant pourtant qu'il y avait lieu de réparer ce dommage, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement monsieur Alain Z..., monsieur Serge Z... et la société Z... à payer à monsieur X... la somme de 40. 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du manque à gagner pendant la période de négociation ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'à titre de préjudice direct indemnisable, monsieur X... est encore bien fondé à solliciter une indemnisation pour la perte de revenus auxquels il aurait pu prétendre durant les mois de négociation pendant lesquels il s'est totalement investi ; que la base d'évaluation proposée (à partir d'un salaire journalier sur lequel a été calculée l'indemnité Assedic) doit être retenue ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à ce titre une somme de 40. 000 euros à monsieur X... ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE durant toute la phase de négociation, monsieur X... percevait des indemnités Assedic représentant une fraction de son revenu ; qu'il y a lieu de le dédommager du manque à gagner correspondant que le tribunal admettra pour 40. 000 euros ;
ALORS QUE le préjudice consistant en la disparition de la probabilité d'un événement favorable s'analyse en une perte de chance, indemnisable lorsque la chance perdue est suffisamment sérieuse ; que la réparation d'une perte de chance correspond à une fraction du bénéfice que la victime aurait retiré de la survenance de l'événement dont la réalisation a été empêchée ; qu'en l'espèce, les consorts Z... faisaient valoir (concl., p. 17 et 18), que monsieur X... avait été licencié avant le début des négociations et que le manque à gagner allégué par ce dernier, lié aux occasions qu'il aurait manquées de conclure un contrat de travail avec un tiers pendant la durée des négociations, s'analysait en une simple perte de chance ; qu'en décidant de réparer l'intégralité du manque à gagner allégué par monsieur X..., sans rechercher si le dommage consistait seulement en la perte d'une chance de retrouver un emploi aussi rémunérateur que celui dont il avait été licencié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-12268
Date de la décision : 01/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 26 novembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 01 mar. 2011, pourvoi n°10-12268


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.12268
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