LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 142-22 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 386 du code de procédure civile ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que l'instance est périmée lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné au second, les diligences expressément mises à leur charge par la juridiction saisie ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Europ Loisirs (la société) a, le 26 juin 2002, saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale d'une demande tendant à contester la décision de redressement notifiée par l'URSSAF de la Haute-Garonne (l'URSSAF) ; que, par jugement rendu le 17 septembre 2004, ce tribunal a prononcé la radiation en précisant que "l'affaire serait rétablie sur justification de l'accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation" ; que, par jugement du 6 juin 2008, il a rejeté le moyen pris de la péremption de l'instance, invoqué par l'URSSAF, au motif qu'aucune diligence particulière, au sens de l'article R 142-22 précité, n'avait été mise à la charge de la société par le jugement antérieurement prononcé ;
Attendu que pour dire l'instance périmée, l'arrêt retient que la société s'est abstenue de faire connaître ses moyens pendant le délai légal, en dépit du jugement qui, ayant prononcé radiation, avait prévu que la reprise de l'instance était subordonnée à l'accomplissement de diligences expressément mises à sa charge ;
Qu'en statuant ainsi, alors que prononçant une radiation pure et simple, le jugement du 17 septembre 2004 n'avait ordonné aucune diligence qui soit expressément mise à la charge de la société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse autrement composée ;
Condamne l'URSSAF de la Haute-Garonne aux dépens ;
Vu l'article 700 du Code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF de la Haute-Garonne ; la condamne à payer à la société Europ loisirs la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux conseils pour la société Europ loisirs ;
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, réformant le jugement, dit que l'instance engagée par la société EUROP LOISIRS par lettre du 26 juin 2002, était périmée ;
AUX MOTIFS QUE par lettre du 26 juin 2002, la société EUROP LOISIRS a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF ; que la saisine du Tribunal ne comporte pas de motif, dès lors que le courrier se borne à énoncer : « Par la présente, j'ai l'honneur de saisir votre Tribunal, aux fins de contester le bien-fondé, en droit comme en fait, de ce redressement et de la décision de rejet prise par la commission de recours amiable » ; que la société EUROP LOISIRS s'est abstenue par la suite de faire connaître ses moyens ; qu'à l'audience du 17 septembre 2004, le Tribunal a en conséquence prononcé la radiation de l'affaire, en énonçant dans son jugement : «Précise que l'affaire sera rétablie sur justification de l'accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation» ; que le Tribunal n'a donc pas prononcé une radiation pure et simple, mais a expressément prévu que le rétablissement de l'affaire serait subordonné à l'accomplissement des diligences manquantes, en l'espèce l'exposé par la société EUROP LOISIRS de ses moyens, que celle-ci s'était abstenue de faire connaître depuis le 26 juin 2002 ; qu'après le jugement de radiation du 17 septembre 2004, la société EUROP LOISIRS a persisté dans la même attitude pendant plus de deux ans, dès lors qu'elle n'a pas fait connaître les raisons justifiant le recours formé par elle contre la décision de la commission de recours amiable ; que l'affaire a été réinscrite sur la demande de l'URSSAF qui, dans des écritures déposées au greffe le 19 octobre 2007, a demandé que soit constatée la péremption de l'instance ; que la société EUROP LOISIRS n'a fait connaître les motifs de son recours qu'à l'occasion de l'audience du 7 décembre 2007, soit cinq ans et demi après avoir saisi le Tribunal ; que dès lors que le jugement de radiation a subordonné le rétablissement de l'affaire à l'accomplissement de diligences expressément mises à la charge des parties et qu'aucune diligence n'a été accomplie par celles-ci pendant le délai de deux ans suivant cette décision, l'instance est périmée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du Code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ; qu'après avoir relevé que la société EUROP LOISIRS l'avait saisi afin de contester la décision de la Caisse lui notifiant un redressement portant sur la période du 1er juillet 1996 au 30 juin 1999 et considéré que l'affaire fixée à l'audience du 17 septembre 2004 n'était pas en état d'être jugée, le Tribunal des affaires de sécurité sociale avait, dans le dispositif de son jugement du 17 septembre 2004, uniquement prononcé la radiation administrative de l'affaire et dit que l'instance était retirée du rôle, se bornant à préciser que l'affaire sera rétablie sur justification de l'accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation ; qu'en affirmant que, par son jugement du 17 septembre 2004, le Tribunal avait, non pas uniquement prononcé une radiation pure et simple de l'instance, mais expressément mis des diligences déterminées à la charge de la société EUROP LOISIRS pour en déduire que l'inaccomplissement de ces diligences impliquait la péremption de ladite instance, la Cour d'appel a dénaturé les termes de ce jugement, violant ainsi les articles 4 du Code de procédure civile et 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a privé son arrêt infirmatif de base légale au regard des dispositions de l'article R. 142-22 du Code de la sécurité sociale.