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16/02/2011 | FRANCE | N°09-70318

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 février 2011, 09-70318


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X..., ès qualités de ce qu'elle reprend l'instance ;

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'ordonance attaquée (conseil de prud'hommes de Thionville, 12 août 2009) que M. Y... employé comme conducteur de bus par la société Trans Fensch ne s'est pas rendu à son travail pour garder sa fille malade durant un jour et demi en avril 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en référé pour obtenir le paiement de ses journées d'absence ; que par jugement du 10 octobre 2

008, le tribunal de grande instance de Thionville a ouvert une procédure de liqu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X..., ès qualités de ce qu'elle reprend l'instance ;

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'ordonance attaquée (conseil de prud'hommes de Thionville, 12 août 2009) que M. Y... employé comme conducteur de bus par la société Trans Fensch ne s'est pas rendu à son travail pour garder sa fille malade durant un jour et demi en avril 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en référé pour obtenir le paiement de ses journées d'absence ; que par jugement du 10 octobre 2008, le tribunal de grande instance de Thionville a ouvert une procédure de liquidation judiciaire civile à l'égard de M.
Y...
et désigné Mme X... en qualité de mandataire liquidateur ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'ordonnance de déclarer recevables les demandes du salarié et de le condamner à lui payer des sommes à titre de rappel de salaire alors, selon le moyen :

1°/ qu'il existe une contestation sérieuse lorsque l'examen de la demande présentée en référé appelle nécessairement une appréciation sur l'existence des droits invoqués ; qu'en estimant que la demande en paiement de salaire présentée par M.
Y...
, conducteur de bus, ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, dès lors que le salarié avait la qualité de commis commercial au sens de l'article L. 1226-24 du code du travail, puisqu'il vendait des billets aux voyageurs et encaissait de l'argent pour le compte de la société Trans Fensch, la formation de référé du conseil de prud'hommes, qui a ainsi tranché une contestation sérieuse relative à la notion de commis commercial, a violé l'article R. 1455-5 du code du travail ;

2°/ qu'en estimant que la demande en paiement de salaire présentée par M.
Y...
, conducteur de bus, ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, dès lors que le salarié avait subi un accident au sens de l'article L. 1226-24 du code du travail, puisqu'il s'était trouvé obligé de garder son enfant malade, la formation de référé du conseil de prud'hommes, qui a ainsi tranché une contestation sérieuse relative à la notion d'accident, a violé l'article R. 1455-5 duc du travail ;

3°/ que le trouble manifestement illicite procède de la méconnaissance d'un droit, d'un titre ou, corrélativement, d'une interdiction les protégeant ; qu'en estimant qu'il convenait en l'espèce de mettre fin à un trouble manifestement illicite, sans caractériser la méconnaissance d'un droit dont M.
Y...
aurait été la victime, en l'absence d'analyse sérieuse sur les conditions de mise en oeuvre de l'article L. 1226-24 du code du travail, le juge des référés a violé l'article R. 1455-6 du code du travail ;

4°/ qu'aux termes de l'article L. 1226-24 du code du travail, « le commis commercial qui, par suite d'un accident dont il n'est pas fautif, est dans l'impossibilité d'exécuter son contrat de travail a droit à son salaire pour une durée maximale de six semaines » ; qu'en estimant que M.
Y...
était fondé à se prévaloir de ces dispositions, cependant que l'intéressé n'avait pas la qualité de commis commercial mais occupait un poste de conducteur de bus, la formation de référé du conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;

5°/ qu'en ne caractérisant pas l'existence d'un quelconque « accident » ouvrant droit au paiement revendiqué par M.
Y...
, la formation de référé du conseil de prud'hommes a violé l'article L. 1226-24 du code du travail ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 1226-24 du code du travail, applicable dans les départements de la Moselle, du Bas Rhin et du Haut Rhin, le commis commercial qui, par suite d'un accident dont il n'est pas fautif, est dans l'impossibilité d'exécuter son contrat de travail a droit à son salaire pour une durée maximale de six semaines ; que l'absence du salarié pour une courte durée, nécessitée par la garde de son enfant malade, qui suspend le contrat de travail pendant la durée de l'absence, entre dans les prévisions de ce texte ;

Et attendu qu'ayant constaté que M.
Y...
, qui a la qualité de commis commercial, n'avait été absent qu'un jour et demi pour rester auprès de son enfant malade, le conseil de prud'hommes, statuant en référé, a pu décider que l'employeur était tenu, en application du droit local, de lui maintenir sa rémunération ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Trans Fensch aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X..., ès qualités ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils pour la société Trans Fensch.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir déclaré recevables les demandes de Monsieur
Y...
;

AUX MOTIFS QU'il convient de distinguer incompétence territoriale ou matérielle et excès de pouvoir de la formation de référé ; que les juges autres que les magistrats de la Cour de cassation sont des juges du fond ; que la compétence de la formation de référé est la même que celles des autres sections du conseil de prud'hommes mais avec des pouvoirs réduits ; que le fait de savoir si une loi est appliquée ou violée relève bien de la compétence du conseil de prud'hommes et notamment de la formation de référé ; qu'en l'espèce, il s'agit d'appliquer des dispositions d'ordre public, en l'occurrence, à savoir les dispositions de l'article L. 1226-24 du Code du travail (ancien article 63 du Code de commerce local) ; qu'il s'agit d'apprécier l'urgence, l'absence de contestation sérieuse et également un trouble manifestement illicite qui consiste en la violation de la loi en vertu des articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du Code du travail ; que la formation de référé se déclare donc compétente ; que Monsieur
Y...
produit la fiche de paie d'avril 2009 sur laquelle est pointé un congé sans solde de 10, 87 heures pour 123, 59 € correspondant à un jour et demi d'absence pour garde d'enfant malade ; que Monsieur
Y...
produit également une attestation médicale du docteur A...pour garder à domicile un enfant malade de 23 mois avec présence parentale nécessaire ; que la somme de 123, 59 € peut ne pas paraître importante mais que c'est un manque qui se fait sentir lorsqu'on perçoit 1. 618, 66 € net à la fin du mois ;
que l'empêchement personnel de Monsieur
Y...
est directement lié à la qualité de père et que c'est pour ne pas causer d'ennui à son épouse en période d'essai pour un CDI qui risquerait son emploi en cas d'absence qu'il est resté à domicile pour garder son enfant malade ; que Monsieur
Y...
est conducteur de bus ; que sa société est immatriculée au registre du commerce, que lui-même vend des billets aux voyageurs et encaisse de l'argent pour le compte de la Société TRANS FENSCH ; que la contestation se base sur la nature de l'absence qui est bien une cause personnelle, même indirecte par suite d'un accident de la vie d'un membre de la famille, en l'occurrence un bébé incapable de subvenir seul à ses besoins, qui met le salarié dans l'impossibilité d'exécuter son contrat de travail pour une raison sérieuse ; que la jurisprudence de la Cour de cassation, constante sur ce sujet, retient aussi bien la maladie personnelle que le décès d'un proche, la garde d'un enfant malade ainsi que des problèmes matériels graves ; qu'il faut que ce malheur affecte directement ou indirectement le salarié et qu'il soit réellement empêché ; que la contestation n'est pas sérieuse ; que les conditions sont remplies pour l'application de la loi ; que l'article L. 1226-24 du Code du travail impose à l'employeur le maintien du salaire pour une durée maximale de six semaines ; que l'employeur n'a pas respecté son obligation ; qu'en l'espèce, l'absence est justifiée, sa durée est limitée à un jour et demi et l'empêchement réel est lié à la garde de son enfant malade de 23 mois ; qu'il s'agit d'un refus d'appliquer la loi et donc d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser ;

ALORS, D'UNE PART, QU'il existe une contestation sérieuse lorsque l'examen de la demande présentée en référé appelle nécessairement une appréciation sur l'existence des droits invoqués ; qu'en estimant que la demande en paiement de salaire présentée par Monsieur
Y...
, conducteur de bus, ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, dès lors que le salarié avait la qualité de commis commercial au sens de l'article L. 1226-24 du Code du travail, puisqu'il vendait des billets aux voyageurs et encaissait de l'argent pour le compte de la Société TRANS FENSCH (ordonnance attaquée, p. 3, alinéa 8), la formation de référé du conseil de prud'hommes, qui a ainsi tranché une contestation sérieuse relative à la notion de commis commercial, a violé l'article R. 1455-5 du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en estimant que la demande en paiement de salaire présentée par Monsieur
Y...
, conducteur de bus, ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, dès lors que le salarié avait subi un accident au sens de l'article L. 1226-24 du Code du travail, puisqu'il s'était trouvé obligé de garder son enfant malade (ordonnance attaquée, p. 3, alinéa 8), la formation de référé du conseil de prud'hommes, qui a ainsi tranché une contestation sérieuse relative à la notion d'accident, a violé l'article R. 1455-5 du Code du travail ;

ALORS, ENFIN, QUE le trouble manifestement illicite procède de la méconnaissance d'un droit, d'un titre ou, corrélativement, d'une interdiction les protégeant ; qu'en estimant qu'il convenait en l'espèce de mettre fin à un trouble manifestement illicite, sans caractériser la méconnaissance d'un droit dont Monsieur
Y...
aurait été la victime, en l'absence d'analyse sérieuse sur les conditions de mise en oeuvre de l'article L. 1226-24 du Code du travail, le juge des référés a violé l'article R. 1455-6 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir ordonné à la Société TRANS FENSCH de payer à Monsieur
Y...
les sommes de 123, 59 € à titre de rappel de salaire en application de l'article L. 1226-24 du Code du travail et de 12, 35 € brut à titre de congés payés sur rappel de salaire ;

AUX MOTIFS QU'il convient de distinguer incompétence territoriale ou matérielle et excès de pouvoir de la formation de référé ; que les juges autres que les magistrats de la Cour de cassation sont des juges du fond ; que la compétence de la formation de référé est la même que celles des autres sections du conseil de prud'hommes mais avec des pouvoirs réduits ; que le fait de savoir si une loi est appliquée ou violée relève bien de la compétence du conseil de prud'hommes et notamment de la formation de référé ; qu'en l'espèce, il s'agit d'appliquer des dispositions d'ordre public, en l'occurrence, à savoir les dispositions de l'article L. 1226-24 du Code du travail (ancien article 63 du Code de commerce local) ; qu'il s'agit d'apprécier l'urgence, l'absence de contestation sérieuse et également un trouble manifestement illicite qui consiste en la violation de la loi en vertu des articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du Code du travail ; que la formation de référé se déclare donc compétente ; que Monsieur
Y...
produit la fiche de paie d'avril 2009 sur laquelle est pointé un congé sans solde de 10, 87 heures pour 123, 59 € correspondant à un jour et demi d'absence pour garde d'enfant malade ; que Monsieur
Y...
produit également une attestation médicale du docteur A...pour garder à domicile un enfant malade de 23 mois avec présence parentale nécessaire ; que la somme de 123, 59 € peut ne pas paraître importante mais que c'est un manque qui se fait sentir lorsqu'on perçoit 1. 618, 66 € net à la fin du mois ; que l'empêchement personnel de Monsieur
Y...
est directement lié à la qualité de père et que c'est pour ne pas causer d'ennui à son épouse en période d'essai pour un CDI qui risquerait son emploi en cas d'absence qu'il est resté à domicile pour garder son enfant malade ; que Monsieur
Y...
est conducteur de bus ; que sa société est immatriculée au registre du commerce, que lui-même vend des billets aux voyageurs et encaisse de l'argent pour le compte de la Société TRANS FENSCH ; que la contestation se base sur la nature de l'absence qui est bien une cause personnelle, même indirecte par suite d'un accident de la vie d'un membre de la famille, en l'occurrence un bébé incapable de subvenir seul à ses besoins, qui met le salarié dans l'impossibilité d'exécuter son contrat de travail pour une raison sérieuse ; que la jurisprudence de la Cour de cassation, constante sur ce sujet, retient aussi bien la maladie personnelle que le décès d'un proche, la garde d'un enfant malade ainsi que des problèmes matériels graves ; qu'il faut que ce malheur affecte directement ou indirectement le salarié et qu'il soit réellement empêché ; que la contestation n'est pas sérieuse ; que les conditions sont remplies pour l'application de la loi ; que l'article L. 1226-24 du Code du travail impose à l'employeur le maintien du salaire pour une durée maximale de six semaines ; que l'employeur n'a pas respecté son obligation ; qu'en l'espèce, l'absence est justifiée, sa durée est limitée à un jour et demi et l'empêchement réel est lié à la garde de son enfant malade de 23 mois ; qu'il s'agit d'un refus d'appliquer la loi et donc d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser ;

ALORS, D'UNE PART, QU'aux termes de l'article L. 1226-24 du Code du travail (ancien article 63 du Code de commerce local), « le commis commercial qui, par suite d'un accident dont il n'est pas fautif, est dans l'impossibilité d'exécuter son contrat de travail a droit à son salaire pour une durée maximale de six semaines » ; qu'en estimant que Monsieur
Y...
était fondé à se prévaloir de ces dispositions, cependant que l'intéressé n'avait pas la qualité de commis commercial mais occupait un poste de conducteur de bus, la formation de référé du conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en ne caractérisant pas l'existence d'un quelconque « accident » ouvrant droit au paiement revendiqué par Monsieur
Y...
,, la formation de référé du conseil de prud'hommes a violé l'article L. 1226-24 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-70318
Date de la décision : 16/02/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Thionville, 12 août 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 fév. 2011, pourvoi n°09-70318


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.70318
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