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02/02/2011 | FRANCE | N°09-43022

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 février 2011, 09-43022


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 du code civil, L. 1222-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme
X...
, employée depuis le 2 mai 1989 par la société Rodom Madimarché en dernier lieu en qualité de " manager de rayon ", a été licenciée le 20 mars 2006 pour faute grave, en raison de son refus réitéré d'accepter sa mutation géographique ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale p

our obtenir la condamnation de son employeur à lui payer diverses indemnités a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 du code civil, L. 1222-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme
X...
, employée depuis le 2 mai 1989 par la société Rodom Madimarché en dernier lieu en qualité de " manager de rayon ", a été licenciée le 20 mars 2006 pour faute grave, en raison de son refus réitéré d'accepter sa mutation géographique ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la condamnation de son employeur à lui payer diverses indemnités au titre de la rupture ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de diverses indemnités, l'arrêt énonce que les mutations proposées étaient des décisions unilatérales de l'employeur, présentées comme susceptibles de répondre aux préoccupations de la salariée, mais que nulle demande explicite n'est communiquée et que l'employeur n'explique pas pour quelles raisons le " statut quo " ne pouvait être maintenu, et qu'au surplus l'affectation de la salariée dans un magasin donné en location-gérance revenait à la faire changer d'employeur, ce qui constituait une modification de son contrat de travail qu'elle était en droit de refuser, en l'absence d'application de plein droit de l'article L. 122-12 du code du travail ;
Attendu cependant en premier lieu que, à défaut de clause contractuelle claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans un lieu, le changement de lieu de travail intervenu dans le même secteur géographique constitue un simple changement des conditions de travail et non une modification du contrat de travail ; que, en second lieu, la bonne foi contractuelle étant toujours présumée, les juges n'ont pas à rechercher si la décision de l'employeur de modifier les conditions de travail d'un salarié est conforme à l'intérêt de l'entreprise et il incombe au salarié de démontrer que cette décision a en réalité été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait par des motifs inopérants, sans rechercher si les changements d'affectation proposés à la salariée intervenaient dans le même secteur géographique que son lieu de travail ni si la location-gérance du magasin dans lequel était mutée la salariée était intervenue antérieurement à son premier refus, et sans exposer les raisons pour lesquelles, dans ce cas, l'article L. 1224-1 du code du travail ne s'appliquait pas, la cour d'appel, qui a privé sa décision de base légale au regard des premiers textes susvisés, n'a pas non plus satisfait aux exigences du dernier ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;
Condamne Mme
X...
aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Rodom Madimarché.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Rodom Madimarché à verser à Mme X... les sommes de 3. 922 € à titre de solde de salaires d'octobre, novembre, décembre 2005 et janvier, février, mars 2006, 4. 268, 64 € à titre d'indemnité de préavis, 426, 86 € à titre de congés payés sur préavis, 17. 074 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 11. 809 € à titre d'indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, l'employeur reproche à l'intimée de ne pas avoir rejoint un poste lui permettant de résoudre les problèmes qu'elle rencontrait dans son poste actuel ; que même s'il insiste sur la notion de « reclassement », il se déduit des échanges de correspondance entre les parties que les mutations proposées étaient des décisions unilatérales de l'employeur, présentées comme susceptibles de répondre aux préoccupations de la salariée ; qu'or, nulle demande explicite n'est communiquée et l'employeur n'explique pas pour quelle raison le « statu quo » ne pouvait être maintenu, à supposer avérés les refus des mutations envisagées ; qu'au surplus l'affectation de la salariée dans un magasin donné en location-gérance revenait à la faire changer d'employeur, ce qui constituait une modification de son contrat de travail qu'elle était en droit de refuser, en l'absence d'application de plein droit de l'article L. 122-12 du code du travail alors applicable ; que l'employeur n'ayant pas rapporté la preuve que les faits qu'il reproche à la salariée étaient fautifs, le licenciement de Mme
X...
doit être considéré comme abusif ;
ET, AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Mme X... Micheline avait au sein de l'entreprise plus de seize ans et demi d'ancienneté ; qu'elle est âgée de 50 ans et que l'effectif de l'entreprise est de 50 salariés ; que la société n'a pas tenté de reclasser la salariée dans l'enceinte de l'entreprise ; qu'il convient de constater que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'il y a lieu de réparer le préjudice en octroyant une somme de 17. 074 €, soit douze mois de salaires ;

1°) ALORS, D'UNE PART, QUE constitue une faute justifiant son licenciement le refus par un salarié du changement de ses conditions de travail consécutif à sa mutation dans un autre établissement de l'entreprise, situé dans le même secteur géographique que celui où il était précédemment affecté ; qu'en affirmant que l'employeur n'avait pas rapporté la preuve que les faits reprochés à la salariée étaient fautifs, sans avoir recherché si le refus opposé par Mme
X...
à son affectation au magasin de Bezaudin, soit à 15 kilomètres seulement du magasin où elle était précédemment affectée, ne constituait pas une faute justifiant le prononcé, à son encontre, d'une mesure de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision d'un manque de base légale au regard des articles L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°) ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE le juge ne peut se substituer à l'employeur dans son pouvoir de direction ; qu'en reprochant à la société Rodom Madimarché de ne pas s'être expliquée sur les raisons pour lesquelles le « statu quo » ne pouvait être maintenu, à supposer avérés les refus des mutations envisagées, pour en déduire que le licenciement n'était pas justifié, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
3°) ALORS, DE TROISIEME PART, SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en jugeant que la salariée était en droit de refuser son affectation dans un magasin donné ensuite en location-gérance, motif pris de ce que l'article L. 1224-1 n'était pas applicable de plein droit, la cour d'appel, qui s'est déterminée par voie de simple affirmation, n'a pas satisfait aux exigences de motivation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS, DE QUATRIEME PART, SUBSIDIAIREMENT, QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux griefs qui y sont énoncés ; qu'en constatant que le licenciement de Mme
X...
avait été prononcé pour faute grave et en considérant que cette mesure était abusive, au motif éventuellement adopté que la société n'avait pas tenté de reclasser la salariée dans l'enceinte de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1232-6 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-43022
Date de la décision : 02/02/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 28 mai 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 fév. 2011, pourvoi n°09-43022


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Jacoupy, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.43022
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