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26/01/2011 | FRANCE | N°09-40284

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2011, 09-40284


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 novembre 2008), qu'engagée le 18 avril 1985 par la société Brosserie Jeanne d'Arc, Mme Y..., qui exerçait les fonctions d'ouvrière de production dans un établissement situé à Marseille, s'est vu notifier, le 23 mai 2006, un changement de son lieu de travail s'accompagnant d'un aménagement de ses horaires ; que la salariée ayant refusé ce changement, l'employeur l'a licenciée le 18 septembre 2006 pour refus de se rendre sur son nouveau l

ieu de travail situé à Roquefort-La-Bédoule ;
Attendu que l'employeu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 novembre 2008), qu'engagée le 18 avril 1985 par la société Brosserie Jeanne d'Arc, Mme Y..., qui exerçait les fonctions d'ouvrière de production dans un établissement situé à Marseille, s'est vu notifier, le 23 mai 2006, un changement de son lieu de travail s'accompagnant d'un aménagement de ses horaires ; que la salariée ayant refusé ce changement, l'employeur l'a licenciée le 18 septembre 2006 pour refus de se rendre sur son nouveau lieu de travail situé à Roquefort-La-Bédoule ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement et de le condamner à payer à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un licenciement pour motif personnel et non pour motif économique, le licenciement prononcé en raison du refus du salarié de se soumettre à la décision de l'employeur de changer ses conditions d'exécution de son contrat de travail, ce changement s'inscrirait-il dans le cadre d'un regroupement des activités et du matériel décidé par l'employeur ; qu'en affirmant que l'employeur ne pouvait procéder qu'à un licenciement économique dès lors qu'il s'inscrivait dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1232-1 et L. 1233-3 du code du travail (anciens articles L. 122-14-2, L. 122-14-3 et L. 321-1) ;
2°/ que l'employeur peut modifier unilatéralement les conditions d'exécution du contrat de travail d'un salarié, coïncideraient-elles avec les conditions collectives de travail visées dans un accord collectif applicable à l'entreprise ; qu'en affirmant que l'employeur ne pouvait, sans l'accord du salarié, modifier son lieu de travail (de Marseille à Roquefort-la-Bédoule) ni ses horaires de travail (de 7 heures/15 heures à 8 heures/16 heures) dès lors que l'accord d'entreprise du 30 décembre 1999 visait la répartition des effectifs entre les deux sites existants (Marseille et Roquefort-la-Bédoule) ainsi que l'organisation du temps de travail (horaire collectif 7 heures/15 heures pour les ouvriers de fabrication), la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil, L. 1232-1 du code du travail (ancien article L. 122-14-3) ;
3°/ que les juges du fond doivent apprécier si le changement du lieu de travail décidé par l'employeur intervient ou non dans le même secteur géographique, i.e. apprécier la distance séparant l'ancien et le nouveau lieu de travail, ainsi que les moyens de desserte permettant de la parcourir, la seule référence au bassin d'emploi, notion distincte, étant en conséquence inopérante ; qu'en se bornant à constater que l'ancien lieu de travail à Marseille et le nouveau lieu de travail à Roquefort-La-Bedoule étaient situés dans des bassins d'emplois différents pour en déduire que le changement du lieu de travail constituait une modification du contrat de travail, quand il lui appartenait de préciser en quoi ces deux communes, distantes d'une vingtaine de kilomètres seulement et notamment reliées par le réseau autoroutier, n'étaient pas situés dans un même secteur géographique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 1232-1 du code du travail (ancien article L. 122-14-3) ;
4°/ que pour déterminer si le changement de lieu de travail constitue une modification du contrat de travail ou un simple aménagement des conditions d'exécution du contrat de travail, les juges doivent rechercher si le nouveau lieu d'affectation du salarié est situé ou non dans un secteur géographique différent de celui où était localisé son ancien lieu de travail ; que sont à cet égard inopérantes les contraintes et sujétions personnelles avancées par le salarié, seulement susceptibles d'ôter un caractère de gravité à son refus d'accepter le changement de son lieu de travail ; qu'en l'espèce, pour dire que le changement du lieu de travail, distant de vingt kilomètres de l'ancien, constituait une modification du contrat de travail, la cour d'appel s'est bornée à constater que la salariée ne possédait pas de véhicule personnel en bon état, ne pratiquait pas de co-voiturage avec ses collègues en sorte qu'elle était obligée d'utiliser les transports en commun, ce qui allongeait son temps de travail de près de cinq heures par jour en l'absence de desserte suffisante par les transports en commun entre son domicile et le nouveau lieu de travail, entraînait enfin un coût du transport que la salariée devrait supporter ; qu'en se fondant sur des considérations inopérantes relatives à la situation personnelle du salarié pour dire que le changement du lieu de travail constituait une modification du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L1232-1 du code du travail (ancien article L. 122-14-3) ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la ville de Roquefort-la Bédoule ne se situait pas dans le bassin d'emploi de Marseille et que le temps de trajet, au moyen de transports en commun, était allongé de près de cinq heures par jour en raison de l'absence d'une desserte suffisante, la cour d'appel a caractérisé objectivement l'existence d'une mutation imposée par l'employeur à la salariée dans un secteur géographique différent ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Brosserie Jeanne d'Arc aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Brosserie Jeanne d'Arc à payer à Mme Y... la somme de 1 000 euros et rejette la demande de cette société ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Brosserie Jeanne d'Arc
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de la salariée était sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné l'exposante à payer à la salariée 15.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées à la salariée dans la limite de six mois ;
AUX MOTIFS QUE « Madame Y... a été engagée à compter du 18 avril 1985 en qualité d'ouvrière de production par la société sus visée, la convention collective des bois et scieries étant applicable aux relations contractuelles ;Son salaire brut mensuel était de 1 630,19 euros et elle était employée dans l'établissement de la société sis dans le 9ème arrondissement de Marseille ;Dans le cadre d'un accord d'entreprise du 1er février 2000, les horaires de travail en poste continu étaient de 7 h 15 à 15 heures pour l'équipe du matin avec une pause cassecroûte et un temps de nettoyage de 10 minutes et de 15 heures à 19 heures pour l'équipe du soir, sans pause casse croûte mais avec temps de nettoyage ;Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 23 mai 2006, la société adressait à la salariée la proposition suivante :" Nous venons vers vous par la présente afin de vous confirmer que suite à la décision de gestion que nous avons prise de regrouper l'ensemble de nos services en un seul lieu et donc de modifier le siège social de l'entreprise, votre lieu de travail va être transféré de Marseille à Roquefort la Bédoule.Ce changement de votre lieu de travail devrait en principe être effectif à compter du 1er août 2006.Nous vous précisons que vous percevrez, à titre de participation de la société aux frais engendrés par ce changement, une indemnité de transport conformément aux usages en vigueur dans l'entreprise de 23 euros.Par ailleurs, nous vous précisons que ce changement du lieu de travail s'accompagnera d'un aménagement de vos horaires de travail qui seront désormais :8 heures-12 heures et 13 heures-16 heures.Nous vous demandons de vous soumettre à ce changement du lieu de travail et de vos horaires de travail décidé par la direction dans l'intérêt légitime de l'entreprise et attirons votre attention sur le fait qu'un refus éventuel de votre part serait susceptible d'entraîner une sanction disciplinaire pouvant éventuellement aller jusqu'à la rupture de votre contrat de travail. ";Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 1er juin 2006, la salariée répondait en ces termes :"J'accuse réception de votre courrier daté du 24 mai 2006 par R.A.R.Au delà de la forme, il me faut constater que vous nous mettez au pied du mur sans aucune information réelle et sérieuse.De plus, vous nous signifiez que ce changement de lieu de travail devrait en principe être effectif au 1 er août.Je vous prie par retour de me signaler quand je devrais, si je le souhaite, me présenter sur mon nouveau lieu de travail et où il se situe exactement, ROQUEFORT LA BEDOULE n'étant pas une adresse mais un lieu.En plus, vous nous précisez que nous percevrons « une indemnité de transport conformément aux usages ».Or, à ma connaissance il n'y a aucun usage de la sorte pour les salariés de la Brosserie donc j'attends vos précisions puisque pour un salarié touchant un salaire proche du SMIC, des frais supplémentaires de déplacement sont des charges lourdes et parfois insupportables lorsqu'on est seule avec deux enfants, sans compter votre changement d'horaires qui ne respecte pas l'accord sur la réduction du temps du travail.Pour finir, je ne peux admette les mots que vous employez dans votre courrier, on ne peut considérer un refus comme une faute.Dans l'attente de réponses précises ( ... ) ";Le 26 juin 2006, l'employeur répondait ainsi qu'il suit :« Nous faisons suite à votre courrier du 1 er juin dernier aux termes duquel vous formulez un certain nombre de réserve et sollicitez un certain nombre de précisions.A titre liminaire, nous nous permettons de vous indiquer que nous ne comprenons pas les réserves que vous émettez s'agissant de la forme que nous avons employée pour vous informer de la modification de vos conditions de travail ou de l'information qui vous a été communiquée.Ceci étant, nous vous confirmons que le changement de votre lieu de travail sera effectif à compter du 1er août 2006.Nous vous confirmons l'adresse de votre nouveau lieu de travail qui sera à compter de cette date sis : Zac de la Plaine du Caire, Rue Ampère 13830 Roquefort la Bédoule.Enfin, nous vous indiquons que contrairement à ce que vous indiquez le personnel déjà affecté sur le site de Roquefort la Bédoule perçoit une prime mensuelle de transport d'un montant de 23 Euros.S'agissant des conséquences d'un refus de votre part, nous ne pouvons que vous confirmer les termes de nos précédents courriers à savoir qu'en cas de refus la société se verrait contrainte d'envisager la rupture de votre contrat de travail dans le respect des règles applicables en la matière tant en terme de procédure que de motivation. ";Le 3 juillet 2006, la salariée répondait en ces termes :Suite à la réception de votre courrier en date du 26 juin 2006 en RAR, et aux vues de mon salaire, je ne peux accepter d'aller travailler à Roquefort la Bédoule au seul fait que les frais de transport occasionnés pour se rendre sur ce nouveau lieu de travail entraînerait de fait une perte de salaire de plus de 10 %.Sans compter votre modification de nos horaires qui m'obligerait à prendre du personnel pour mes enfants, ce qui entraînerait une charge financière que je ne pourrais supporter, surtout lorsqu'on connaît le prix des loyers dans notre région.Vous comprendrez donc que je ne peux accepter votre proposition dans les termes que vous me proposez.Bien entendu, si vous me faisiez une proposition prenant en compte ma situation personnelle, je serais prête à la regarder. ";Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 4 septembre 2006, elle a été convoquée à un entretien préalable en vue de son licenciement en ces termes :" Selon courrier du 23 Mai 2006, nous vous avons informé du changement de votre lieu de travail dans le même secteur géographique à compter du 1 er août 2006 et de l'aménagement de vos horaires de travail en raison de ce changement.Aux termes d'un échange de correspondances, vous nous avez indiqué que vous ne pouviez accepter ce changement de votre lieu de travail.Nous vous avons alors rappelé que le nouveau lieu de travail se situant dans le même secteur géographique, il s'agissait d'une modification de vos conditions de travail qui s'imposait à vous et vous avons invité à revoir votre décision à défaut de quoi nous nous verrions contraints de prendre les mesures qui s'imposent.Or, nous sommes au regret de constater que depuis le 28 août 2006 date de votre retour de congés, vous ne vous êtes pas présentée à votre poste de travail et vous n'avez donc pas rejoint votre nouveau lieu de travail.Vous n'avez pas non plus justifié de votre absence.Nous nous voyons donc contraints de vous convoquer à l'entretien préalable prévu par la loi qui aura lieu le 13 septembre 2006 à 10 heures au bureau de la Direction de la Société.Zac de la Plaine du Caire, rue Ampère 13830 Roquefort la Boule. )Nous vous invitons à vous présenter à cet entretien éventuellement munie de vos justificatifs d'absence. Au cours de cet entretien, vous avez la possibilité de vous faire assister par un membre du personnel de votre choix appartenant à l'entreprise. ";Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 11 septembre 2006, la salariée a répondu en ces termes :"Suite à votre courrier RAR du 4 septembre dont le fond et la forme n'ont pas manqués de me surprendre au seul fait que je vous ai signifié par le courrier du 3 juillet que j'ai refusé de me rendre sur le nouveau site de ROQUEFORT LA BEDOULE pour des considérants que je vous ai exposés dans mes courriers.Aujourd'hui, vous ne tenez pas compte de mes courriers, vous avez omis de les lire et vous considérez que je suis en absence injustifiée depuis le 28 août 2006.Curieux comme management du personnel puisqu'il vous appartenait de tirer les conséquences et non de tenter de vous y soustraire.D'autre part, n'ayant plus de véhicule et n'ayant pas les moyens de me déplacer physiquement et pour ma santé, je vous préviens que je ne pourrai pas être présente à l'entretien préalable pour des absences que mes courriers vous avaient signifiées; en aucun cas, je ne peux accepter le transfert de mon lieu de travail dans les conditions que vous nous imposez. ";Par lettre recommandée en date du 18 septembre 2006, elle s'est vue notifier son licenciement pour les motifs suivants :"Nous faisons suite à l'entretien préalable qui devait avoir lieu le 13 septembre dernier mais auquel vous ne vous êtes pas présenté afin de vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse au motif suivant:Selon courrier du 23 mai 2006, nous vous avons informé de la modification de votre lieu de travail à compter du 1 er août 2006 et des modalités de ce changement.Aux termes d'un échange de correspondances, vous nous avez indiqué que vous ne pouviez accepter ce changement de votre lieu de travail.Nous vous avons alors rappelé que le nouveau lieu de travail se situant dans le même secteur géographique, il s'agissait d'une modification de vos conditions de travail qui s'imposait à vous et vous avons invité à revoir votre décision à défaut de quoi nous nous verrions contraints de prendre les mesures qui s'imposent.En dépit de cet échange de courriers et de nos explications, vous avez manifestement persisté dans votre refus de vous rendre sur votre nouveau lieu de travail et ne vous êtes pas présentée depuis le 28 août 2006, date de votre retour de congés, à votre poste de travail sur le site de ROQUEFORT LA BEDOULE.Face à ce constat, nous vous avons adressé le 4 septembre 2006 un courrier de convocation à l'entretien préalable en vous invitant à vous présenter éventuellement des justificatifs de votre absence depuis le 28 août 2006.Il résulte de ces éléments que vous avez maintenu la position que vous avez exprimée selon courrier précité et que vous n'entendez pas rejoindre votre nouveau lieu de travail sis à ROQUEFORT LA BEDOULE.Ce refus de déférer à, vos nouvelles conditions de travail empêchent de manière incontestable la poursuite de votre contrat de travail, l'ensemble des équipes et du Matériel ayant été regroupé sur le site de ROQUEFORT LA BEDOULE et nous contraint à procéder à votre licenciement.Compte tenu des contraintes personnelles que vous évoquez pour justifier votre refus, que nous regrettons, votre licenciement est prononcé pour cause réelle et sérieuse.La date de présentation de cette lettre de licenciement marquera le point de départ de votre préavis de 2 mois que nous vous dispensons d'exécuter et qui vous sera payé aux échéances normales de la paye.Par ailleurs, nous vous précisons que vous pourrez bénéficier dans le cadre de votre droit individuel à la formation, et dans la limite de vos droits acquis sur la base de 20 heures maximum par an à compter du 7.5.2004, d'une action de formation, de bilan de compétence ou de validation des acquis à condition d'en faire la demande pendant la durée de votre préavis. ";C'est justement l'appelante soutient que lorsque l'employeur prend la décision de regrouper ses activités et son matériel, cette décision est par nature économique ;Elle prétend que la décision de procéder à la fermeture de l'établissement situé dans le 9ème arrondissement de Marseille s'inscrit dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise, pour un motif non inhérent à sa personne ;Cette décision modifie le contrat de travail et ainsi l'employeur, suite à son refus d'accepter ce qu'elle considère être une modification du contrat de travail, ne pouvait procéder qu'à un licenciement pour motif économique ;Elle soutient justement que c'est à tort l'employeur prétend que seules les conditions de travail ont été modifiées ;En effet il ressort des éléments de la cause que l'employeur a modifié de manière unilatérale l'organisation du travail, le lieu et les horaires de travail tels qu'ils étaient définis dans le cadre d'un accord d'entreprise ;Il apparaît que le transfert du lieu de travail n'était pas rendu possible en raison du fait que cette salariée ne possédait pas de véhicule personnel pour assurer son transport et de l'absence de desserte suffisante pour se rendre sur ce nouveau lieu de travail ;Par ailleurs, c'est justement que l'appelante fait valoir que la ville de Roquefort la Bédoule ne se situe pas dans le bassin d'emploi de Marseille mais dans celui de La Ciotat ;En outre, il n'est pas sérieusement contesté par l'employeur que le temps de trajet, au moyen de transports en commun, pour y aller et en revenir, subissait un allongement de près de cinq heures par jour notamment en raison de l'absence de desserte suffisante ;Il apparaît également que le coût de ce transport s'élevait à la somme de 16,00 euros par semaine ce qui avait une incidence sur le salaire de cette employée alors que l'employeur ne proposait à ce titre qu'un dédommagement d'un montant de 23,00 euros par mois, l'appelante soutenant justement que cela avait une incidence sur sa rémunération en raison d'un salaire peu élevé ;Enfin c'est justement que l'appelante fait observer qu'aucun autre moyen de transport n'existait pour permettre de se rendre sur ce nouveau lieu de travail et qu'il ne ressort d'aucun élément que le co-voiturage était pratiqué par les salariés de l'entreprise ;En conséquence le refus de la salariée d'accepter la modification du contrat de travail est justifié et, dès lors, le licenciement n'étant fondé que sur ce seul refus, alors que l'employeur aurait du soit renoncer à la modification soit procéder à un licenciement pour motif économique, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera réformé en ce sens ;Compte tenu d'une ancienneté de 21 ans au sein de l'entreprise, de la durée du chômage de l'intéressée dont elle justifie par la production de bordereaux de versement d'allocations d'aide de retour à l'emploi jusqu'au 31 mars 2007, de la différence entre le salaire qu'elle aurait perçu si elle avait continué à travailler au service de l'employeur, salaire net mensuel qui était de 1200,00 euros et des indemnités qui lui ont été versées et du fait qu'elle a été privée du dispositif social attaché au licenciement pour motif économique, il lui sera accordé une somme de 15 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;L'employeur sera condamné à rembourser, dans les conditions de l'article L 1235-4 du Code du Travail, à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées à la salariée » ;
1. ALORS QUE constitue un licenciement pour motif personnel et non pour motif économique, le licenciement prononcé en raison du refus du salarié de se soumettre à la décision de l'employeur de changer ses conditions d'exécution de son contrat de travail, ce changement s'inscrirait-il dans le cadre d'un regroupement des activités et du matériel décidé par l'employeur ; qu'en affirmant que l'employeur ne pouvait procéder qu'à un licenciement économique dès lors qu'il s'inscrivait dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise, la Cour d'appel a violé les articles L1232-6, L1232-1 et L1233-3 du code du travail (anciens articles L 122-14-2, L 122-14-3 et L 321-1) ;
2. ALORS QUE l'employeur peut modifier unilatéralement les conditions d'exécution du contrat de travail d'un salarié, coïncideraient-elles avec les conditions collectives de travail visées dans un accord collectif applicable à l'entreprise ; qu'en affirmant que l'employeur ne pouvait, sans l'accord du salarié, modifier son lieu de travail (de Marseille à Roquefort la Bédoule) ni ses horaires de travail (de 7h00/15h00 à 8h00/16h00) dès lors que l'accord d'entreprise du 30 décembre 1999 visait la répartition des effectifs entre les deux sites existants (Marseille et Roquefort la Bédoule) ainsi que l'organisation du temps de travail (horaire collectif 7h00/15h00 pour les ouvriers de fabrication), la Cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil, L1232-1 du code du travail (ancien article L. 122-14-3) ;
3. ALORS QUE les juges du fond doivent apprécier si le changement du lieu de travail décidé par l'employeur intervient ou non dans le même secteur géographique, i.e. apprécier la distance séparant l'ancien et le nouveau lieu de travail, ainsi que les moyens de desserte permettant de la parcourir, la seule référence au bassin d'emploi, notion distincte, étant en conséquence inopérante ; qu'en se bornant à constater que l'ancien lieu de travail à MARSEILLE et le nouveau lieu de travail à ROQUEFORT LA BEDOULE étaient situés dans des bassins d'emplois différents pour en déduire que le changement du lieu de travail constituait une modification du contrat de travail, quand il lui appartenait de préciser en quoi ces deux communes, distantes d'une vingtaine de kilomètres seulement et notamment reliées par le réseau autoroutier, n'étaient pas situés dans un même secteur géographique, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L1232-1 du code du travail (ancien article L. 122-14-3) ;
4. ALORS QUE pour déterminer si le changement de lieu de travail constitue une modification du contrat de travail ou un simple aménagement des conditions d'exécution du contrat de travail, les juges doivent rechercher si le nouveau lieu d'affectation du salarié est situé ou non dans un secteur géographique différent de celui où était localisé son ancien lieu de travail ; que sont à cet égard inopérantes les contraintes et sujétions personnelles avancées par le salarié, seulement susceptibles d'ôter un caractère de gravité à son refus d'accepter le changement de son lieu de travail ; qu'en l'espèce, pour dire que le changement du lieu de travail, distant de 20 km de l'ancien, constituait une modification du contrat de travail, la Cour d'appel s'est bornée à constater que la salariée ne possédait pas de véhicule personnel en bon état, ne pratiquait pas de co-voiturage avec ses collègues en sorte qu'elle était obligée d'utiliser les transports en commun, ce qui allongeait son temps de travail de près de 5 heures par jour en l'absence de desserte suffisante par les transports en commun entre son domicile et le nouveau lieu de travail, entraînait enfin un coût du transport que la salariée devrait supporter ; qu'en se fondant sur des considérations inopérantes relatives à la situation personnelle du salarié pour dire que le changement du lieu de travail constituait une modification du contrat de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L1232-1 du code du travail (ancien article L. 122-14-3) ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40284
Date de la décision : 26/01/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2011, pourvoi n°09-40284


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.40284
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