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25/01/2011 | FRANCE | N°10-82730

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 janvier 2011, 10-82730


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Marc
X...
,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 31 mars 2010, qui, pour violences, l'a condamné à cinq mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 111-4, 112-1, 121-1, 121-3, 222-11 du code pénal, ensemble violation de l'article 593 du Code de procédure pénale, violation des règle

s qui gouvernent la saisine, ensemble méconnaissance des exigences de l'article 6...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Marc
X...
,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 31 mars 2010, qui, pour violences, l'a condamné à cinq mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 111-4, 112-1, 121-1, 121-3, 222-11 du code pénal, ensemble violation de l'article 593 du Code de procédure pénale, violation des règles qui gouvernent la saisine, ensemble méconnaissance des exigences de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" en ce que l'arrêt attaqué a retenu le prévenu M.
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dans les liens de la prévention et en répression l'a condamné à cinq mois de prison avec sursis ;
" aux motifs propres et non contraires, notamment que l'enquête et les auditions effectuées ont permis d'établir les faits suivants : le 3 février 2009, Mme Y...s'est présentée à la gendarmerie d'Ancerville pour déposer plainte contre ses employeurs pour des insultes permanentes proférées à son égard ; qu'elle a expliqué qu'elle a travaillé comme vendeuse depuis douze ans dans la boulangerie implantée ... à Ancerville et qu'en octobre 2006 le couple Z...avait vendu le commerce aux époux
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; que ces derniers avaient commencé par modifier son contrat de travail en faisant passer de 35 heures à 30 heures par semaine ; qu'au fil des mois, les relations entre les nouveaux employeurs s'étaient dégradées, ces derniers lui faisant des reproches et des critiques quant à la qualité de son travail et qu'elle s'est dite être victime d'insultes, Mme X...lui avait même demandé, selon elle, à ce que les vitres extérieures soient nettoyées cependant qu'il faisait une température de-10° à l'extérieur ; que son état de santé s'était altéré, un arrêt de travail lui avait été prescrit par son médecin traitant à compter du 3 février 2009 ; qu'un certificat médical délivré par le docteur B...indique avoir recueilli des plaintes de troubles psychologiques avec anxiété permanente, de troubles du sommeil que la patiente a dit consécutifs à ses conditions de travail, sur le plan objectif avoir constaté des pleurs, un bouton d'herpès labial persistant et une tachycardie à 120 pulsations/ mn : qu'il a conclu à un arrêt de travail de 13 jours et a prescrit des médicaments psychotropes ; que le 1er avril 2009, Mme Y...a à nouveau été entendue par les gendarmes, selon elle, ses employeurs ne lui avaient pas versé à ce jour les compléments de salaire dus à raison de son arrêt de travail ; qu'elle a indiqué aux gendarmes avoir croisé son patron, à bord de son véhicule, devant son domicile ; que réentendue le 27 juin 2009, Mme Y...a déclaré être toujours en arrêt de travail jusqu'au 16 juillet 2009 et sous traitement à base d'antidépresseurs et d'antianxiolytiques ; qu'elle a fait part aux enquêteurs de la condamnation le 18 mai 2009 par le Conseil des prud'hommes de Bar-le-Duc de ses employeurs à lui verser les indemnités en retard ; qu'entendu, M. C..., concubin de Mme Y..., a rapporté le mal-être de sa compagne essentiellement dû à ses conditions de travail déplorables ; qu'il a dit craindre pour sa santé, son état s'étant dégradé au fil des mois et ce malgré un traitement médical ; que M. Z..., fils des anciens propriétaires, a indiqué avoir été employé comme boulanger au sein de la boulangerie
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: si, au début, les relations étaient bonnes, elles s'étaient dégradées au sein de l'équipe ; qu'ainsi, il a rapporté que M.
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l'avait insulté un matin du mois de mai 2008 et il avait fallu qu'un employé s'interpose entre eux, car M.
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voulait s'en prendre physiquement à lui ; qu'il a indiqué que M.
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employait en permanence les termes suivants à l'égard de son personnel : « fainéant, branleur, bon à rien » ; qu'une fiche de renseignement en date du 3 mai 2008 a été jointe au dossier selon laquelle M. Z...était venu se plaindre aux gendarmes du comportement de son employeur ; que M. D...travaillait depuis deux ans comme boulanger chez le couple
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: c'est lui qui s'était interposé entre M.
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et M. Z...; qu'il avait, quant a lui, entendu une fois Mme
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traiter Mme Y...de fainéante et dire que son travail n'était pas bon ; que M. E..., pâtissier à la boulangerie, a déclaré très bien s'entendre avec ses patrons ; qu'ayant travaillé sept mois, à raison d'une heure trente par jour, en même temps que Mme Y..., lui au fournil, elle au magasin, il a déclaré qu'elle ne faisait pas correctement son travail et passait son temps à attendre le client, ne prenant pas l'initiative de faire du ménage ; que M. F...a indiqué avoir été témoin d'une altercation entre Mme
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et Mme Y...concernant des insultes reçues par Mme Y...venant du fournil au travers de l'interphone ; que les époux Z..., anciens employeurs de Mme Y..., l'ont décrite comme une employée modèle, n'ayant eu aucune remarque négative à lui faire au cours des dix années pendant lesquelles ils l'avaient employée ; qu'elle n'avait rencontré aucun problème avec ses autres collègues ; qu'ils lui avaient fait entière confiance et les clients l'appréciaient également ;
" aux motifs encore que sur réquisition, le docteur G..., médecin psychiatre expert, a procédé le 14 avril 2009 à un examen médico-psychologique et psychiatrique de Mme Y..., âgée de 41 ans, vivant en concubinage depuis 1988, mère de deux enfants de 21 et de 14 ans, soignée par antidépresseur et anxiolytique ; que depuis un an et demi, Mme Y...lui a dit être soumise à une situation de harcèlement moral avec disqualification de sa personnalité et de son travail qu'elle vivait de plus en plus mal ; que dans ce contexte, elle avait développé un état dépressif sévère ayant conduit à un arrêt de travail en février 2009 ; que l'examen psychiatrique a mis en évidence cet état dépressif, avec en particulier idées noires, sentiment de culpabilité et de dévalorisation ; que la problématique de Mme Y..., selon l'experte, réside dans le fait que, même si elle a une personnalité tout à fait normale, c'est quelqu'un qui aime son travail, est très investie dans celui-ci et vit donc très mal les critiques, voire les « insultes » de ses patrons ; que Mme Y...a reconnu qu'en temps normal elle est relativement sensible « aux critiques » car elle aime « le travail bien fait » et la clientèle, mais que cette fois-ci, cela dépasse « l'entendement » ; qu'elle a évoqué un sentiment de peur pour son intégrité physique, mais aussi celle de sa famille puisque-selon ses dires-elle aurait même été suivie en voiture par son ancien employeur ; que ce qui majore son mal-être, c'est qu'elle ne peut expliquer l'attitude de ses employeurs, ayant, selon ses dires, « toujours bien fait son travail » ; comme il est classique, selon l'experte, dans ces situations de harcèlement moral, Mme Y...a développé un sentiment de culpabilité « qu'ai je fait de mal ? », un sentiment d'infériorité « je ne suis plus bonne à rien » s'étant compliqué dans une dynamique d'état dépressif sévère avec nécessité d'un arrêt de travail ; que l'experte n'a pas retrouvé dans le discours de Mme Y...de tendances à la mythomanie, ni de recherche de bénéfices secondaires par rapport à cette situation, mais une dynamique de harcèlement moral d'un employeur sur son employée ; que si Mme Y...présente peut-être une faiblesse dans sa personnalité du fait de son désir de « toujours bien faire » et son « investissement dans son métier », il n'y a rien de pathologique dans cette dynamique ; qu'elle serait même dans une certaine manière « victime de ses qualités » puisqu'elle ne comprend pas que voulant bien faire, elle soit autant dévalorisée ; que l'experte observe aussi dans cette dynamique l'apparition de comportement phobique par rapport à son travail avec des états de crise et d'anxiété majeure dès qu'elle s'approche de la boulangerie, justifiant tout à fait l'arrêt de travail, l'ITT sera en fonction de cet arrêt de travail et est donc actuellement d'au moins trois mois ; qu'enfin, compte tenu de l'état clinique de Mme Y..., l'experte lui a vivement conseillé de prendre rendez-vous pour un suivi spécialisé ; qu'en effet, au-delà du traitement chimiothérapique, elle estime que Mme Y...a besoin d'une prise en charge psychothérapique pour l'aider à se reconstituer psychologiquement, car cette affaire a brisé en elle de nombreuses résistances psychologiques la rendant encore plus sensible à la situation et a totalement brisé ses capacités, sa confiance en elle, entraînant alors la décompensation dépressive observée ; que les enquêteurs ont pris attache avec le service de l'Inspection du travail : un rapport établi par un contrôleur du travail, comprenant les auditions de Mme Y...et des époux
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, a été transmis au parquet de Bar-le-Duc ; que dans ce rapport, le contrôleur du travail rapporte avoir reçu le 13 mai 2008 un salarié pâtissier chez les
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, souhaitant garder l'anonymat, qui a fait état d'insultes dont il aurait été victime de la part de son patron, rapportant que celui-ci était coutumier du fait, notamment à l'encontre de Mme Y...; que le 17 février 2009, l'agent avait reçu Mme Y...: elle avait situé le début des faits au commencement de 2007, succédant à la baisse de son horaire de travail ; que dans ce rapport, le contrôleur du travail, qui a mené son enquête le 27 mars 2009, a noté que le passage d'un temps complet à un temps partiel de 30 heures hebdomadaires a été proposé à Mme Y...par courrier du 31 janvier 2007 et accepté par la salariée ; que le motif invoqué justifiant de la diminution horaire de travail était « restructuration de l'entreprise » ; que la diminution de l'horaire hebdomadaire de travail de Mme Y...a été faite conformément aux dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail, M.
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ayant déclaré avoir perdu un marché et avoir baissé l'horaire de travail de Mme Y...en conséquence ; que concernant les heures de travail, le contrôleur a constaté, au vu des bulletins de salaire, que les salariés de l'entreprise étaient amenés à réaliser des heures supplémentaires, sans que M.
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ne tinsse de système de décompte des heures de travail réalisées, ce qui ne lui a pas permis de contrôler si les heures payées correspondaient aux heures effectivement travaillées ; que selon M.
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, que le contrôleur a entendu, Mme Y...faisait régulièrement des erreurs au magasin ; qu'elle oubliait des commandes, car elle omettait de marquer les noms des clients sur le cahier ; qu'il a déclaré avoir été le lui signaler le jour de sa reprise de travail, le 19 janvier 2009, dans le vestiaire, suite à un arrêt pour cause de grippe ; que selon M.
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, Mme Y...l'aurait mal pris « car il n'y a qu'elle qui a raison » ; que M.
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a déclaré que Mme Y...estimait être la patronne « car elle a douze ans de boîte » ; que M.
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a déclaré également que la susnommée n'en était pas à son premier arrêt de travail, qu'elle avait également été en arrêt de travail du temps de l'ancien employeur ; qu'il a ajouté qu'elle était déjà déprimée du temps de M. Z...; que Mme
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a déclaré quant à elle que Mme Y...ne voulait plus faire le ménage, qu'elle ne ramassait pas les miettes, qu'elle laissait toujours traîner au coin de l'étagère ; qu'elle a déclaré que les tâches de Mme Y...étaient, en plus de la vente, le nettoyage des vitrines intérieures et extérieures, des étagères du magasin et du réfrigérateur ; que, par courrier du 14 avril 2009, le contrôleur du travail a demandé à M.
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de mettre en place un dispositif de décompte des horaires de travail du personnel conforme au code du travail, ce qui a été fait ; que le 21 avril 2009, le contrôleur du travail a reçu un autre salarié, toujours anonymement : celui-ci a déclaré n'avoir jamais été témoin de propos déplacés de M.
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à l'égard de Mme Y...; qu'à une occasion, il avait assisté à une engueulade entre eux, Mme Y...étant en pleurs et Mme
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très énervée : suite à quoi, M.
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lui avait demandé de ne plus passer au magasin, le fait qu'il parle à Mme Y...n'ayant pas plu a sa femme ; qu'il avait aussi assisté à la scène concernant le pâtissier ; que le contrôleur du travail a conclu son rapport en indiquant que les éléments recueillis lors de son enquête ne lui permettaient pas de caractériser des faits de harcèlement moral, sans formellement pouvoir les écarter ; que, par courrier du 6 juillet 2009, le contrôleur du travail a demandé à M.
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de planifier la prévention dans son entreprise, en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, ce conformément aux dispositions de l'article L. 4121-2 du code du travail et de lui transmettre copie du document unique d'évaluation des risques, notamment de la partie où seront retranscrites les solutions apportées aux risques psychosociaux et au risque de harcèlement moral dans l'entreprise articles R. 4121-1 et suivants du code du travail ; qu'il lui a demandé aussi d'apposer un avis, affiché à une place convenable et accessible dans les lieux de travail, indiquant les modalités d'accès des travailleurs au document unique article R. 4121-4 du code du travail et d'organiser une information des salariés de l'entreprise sur les dispositions légales applicables en matière de harcèlement moral ; que contactée, la caisse primaire d'assurance maladie de Bar-le-Duc a fait connaître aux enquêteurs que le nombre de jours d'arrêts de travail de Mme Y...était de 164, soit du 3 février 2009 au 16 juillet 2009 ;
" aux motifs aussi que placé en garde à vue du 29 juin 2009, à 14h30, au 30 juin 2009 à 10h45, M.
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, entendu, a reconnu avoir bousculé M. Z...; qu'en revanche, il a réfuté être l'auteur de violences morales a l'encontre de Mme Y...et a mis en doute les déclarations faites par elle, les témoins et l'expert psychiatre ; qu'il s'est dit victime d'un complot émanant de Mme Y...et de M. Z...; qu'il a remis une lettre de M. H..., fournisseur de farine, attestant que Mme Y...avait déjà été en arrêt de travail par le passé ; que placée en garde à vue le 29 juin de 14h30 a 20h50, Mme I..., épouse
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, entendue, a, tout comme son mari, réfuté les accusations de son employée ; qu'elle a déclaré que, si elle ne disait pas à Mme Y...ce qu'il fallait faire dans le magasin, le travail n'était pas fait ; qu'elle s'est dite également victime d'une coalition entre Mme Y...et M. Z..., la première désirant leur soutirer de l'argent ;
" aux motifs également que le jugement attaqué commence par rappeler que le délit de violences est constitué, en dehors de tout contact matériel avec le corps de la victime, par tout acte ou comportement de nature à causer sur la personne de celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou psychique caractérisée par un choc émotif ou une perturbation psychologique ; qu'il indique ensuite que, s'il est constant que M.
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a modifié, conformément aux règles du droit du travail, le contrat de Mme Y..., alléguant un motif a priori recevable, la perte d'un marché qui réduisait le chiffre d'affaires, à l'audience, pas plus que durant l'enquête, il n'avait estimé utile de préciser quel marché il avait perdu ; qu'il avait même indiqué fièrement à l'audience que le résultat de la boulangerie était désormais largement supérieur à celui obtenu précédemment par M. Z..., sans produire aucun justificatif ni dans un sens ni dans l'autre ; que le juge a relevé que les propos liés à l'amélioration du résultat étaient une réaction aux allégations selon lesquelles M.
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aurait mis une forte pression sur ses employés, en fonction des résultats insuffisants ; que, par ailleurs, le jugement relève que le Conseil de prud'hommes a condamné M.
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pour ne pas avoir établi de bulletin de salaire, ni avoir payé les sommes dues pendant l'arrêt de travail de Mme Y..., conformément à la convention collective applicable, sans que M.
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ne nie les faits ; que le jugement note qu'à l'audience, le susnommé s'est reconnu impulsif et entier, que Mme
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a confirmé avoir demandé à Mme Y...d'effectuer un certain nombre de tâches, dont notamment le nettoyage des vitrines, qui selon elle n'aurait pas été fait sans sa demande, sans être en mesure de décrire le contenu du contrat de travail de Mme Y..., qui, selon elle, ne lui aurait pas été transmis par les vendeurs du fonds de commerce, que Mme Y...soutient que ce nettoyage aurait dû avoir lieu en plein hiver alors qu'il gelait, sans être contredite sur ce point ; que par ailleurs le jugement constate que M. et Mme
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ont reconnu en procédure, et confirmé à l'audience, que Mme
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avait modifié la façon dont les employés du fournil venaient chercher leur pain à la boutique, modifiant le trajet et leur imposant de rester le minimum de temps, ce qui revenait en pratique à leur interdire de parler, « de bavarder » avec Mme Y...; que le jugement relève que les déclarations des prévenus tendant à justifier leur attitude et les faits-que pourtant ils ne reconnaissent pas-par les erreurs et la mauvaise volonté au travail de Mme Y..., sont en pleine contradiction avec les déclarations très positives des époux Z..., qui ont employé Mme Y...pendant 10 ans ; que les termes prétendument utilisés, bien que réfutés par M.
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, sont confirmés par M. Z...; que ce dernier a quitté la boulangerie dès qu'il a pu trouver un autre emploi, ce qui tend à accréditer ses dires et confirmer les termes de la plainte de Mme Y...; que cet ensemble de circonstance indique bien, pour les premiers juges, que les époux
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ont souhaité dégouter Mme Y...pour lui faire quitter son emploi, lui « pourrissant la vie » ; qu'enfin que M.
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a déclaré lui-même en garde à vue « cela fait des années qu'elle est soignée pour dépression » ; qu'il est donc plus que plausible qu'ils aient pensé pouvoir la faire partir assez facilement par cette méthode ; que le jugement conclut que les conséquences de ces faits, dans un contexte de subordination professionnelle qui en a accentué l'impact, et en l'absence de toute autre cause, sont bien la très longue durée d'incapacité et l'état dépressif décrits par l'expertise ; que les débats, lors de l'audience à hauteur d'appel, conduisent à considérer que les faits ne sont pas établis en ce qui concerne Mme
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; que si son attitude à l'égard de la plaignante, en tant que collaboratrice artisan de son mari, notamment dans l'exercice de son pouvoir hiérarchique, n'apparaît pas caractérisée par un grand respect de la personne humaine, aucun acte ne peut être retenu à son encontre tel que rentrant dans la définition rappelée par le jugement attaqué : " acte ou comportement de nature à causer sur la personne de la victime une atteinte à son intégrité physique ou psychique caractérisée par un choc émotif ou une perturbation psychologique » et que dès lors il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qui concerne Madame
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; qu'à l'opposé, le comportement de M.
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, confirmé par témoins, fait d'une agressivité quotidienne pendant plusieurs mois et d'insultes proférées dans des termes extrêmement violents, caractérise bien, comme justement relevé par le jugement attaqué par des motifs pertinents, le délit de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail personnel de plus de huit jours, en l'espèce cent soixante quatre jours ;
" 1°) alors que à la faveur de ses conclusions d'appel, le prévenu insistait sur la circonstance qu'« aucun fait précis de violences de nature à impressionner la victime n'est visé dans la citation, et pour cause, elle mentionne simplement « des violences volontaires commises depuis mai 2008 » plainte déposée le 2 février 2009 ; que cette imprécision porte manifestement atteinte aux droits de la défense du prévenu qui ne peut donc s'expliquer sur des faits précis qui lui seraient reprochés, et contrevient aux dispositions de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales » ; qu'en ne répondant absolument pas à ce moyen de plus en relation directe avec les règles et principes qui gouvernent la saisine, lesquelles doivent se combiner avec les exigences de la défense, la cour viole notamment les articles 593 du code de procédure pénale et l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" 2°) alors que, l'employeur insistait sur les circonstances que les remontrances relevaient de l'exercice du pouvoir général d'organisation du chef d'entreprise et que la qualification de violences volontaires ne pouvait résulter que d'agissements outre-passants ce pouvoir de direction et de contrôle et le fait d'attirer l'attention d'une salariée sur ses défaillances professionnelles, même de façon discourtoise, ne peut être à lui seul assimilé à une violence morale de nature à l'impressionner, en sorte que les premiers juges n'avaient pu retenir le prévenu dans les liens de la prévention sans rechercher si les reproches formulés par l'employeur n'étaient pas effectivement justifiés par les carences professionnelles de la salariée concernée et proportionnées aux objectifs poursuivis par l'employeur, la cour qui ne s'explique pas davantage que les premiers juges par rapport à ce moyen de défense central, ne justifie pas légalement son arrêt au regard des textes cités au moyen ;
" 3°) et alors qu'enfin, il n'y a pas de délit en la matière sans élément intentionnel ; que le prévenu insistait sur le fait que les éventuels reproches même formulés de façon discourtoise, ne peuvent traduire une volonté de perturber psychologiquement la salariée ; qu'en l'espèce et en toute hypothèse l'élément intentionnel faisait défaut ; qu'en ne s'exprimant pas davantage sur cet aspect des écritures et en restant muet sur l'élément intentionnel, les juges du fond ne justifient pas légalement leur arrêt qui, pour cette raison encore, doit être censuré " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme Y..., employée, comme vendeuse dans le commerce de boulangerie tenu par les époux
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, a dénoncé, en février 2009, les insultes permanentes proférées à son égard, depuis mai 2008, par ces derniers ;
Attendu que, pour déclarer M.
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coupable de violences commises entre le 1er mai 2008 et le 2 février 2009, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé la dégradation des relations entre la salariée et ses employeurs, retient que le comportement de M.
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, fait d'une agressivité quotidienne pendant plusieurs mois et d'insultes proférées dans des termes extrêmement violents, caractérise le délit de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail personnel de plus de huit jours, en l'espèce cent soixante-quatre jours ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, qui ne permettent pas de caractériser un acte volontaire de nature à causer un choc émotif à la victime et, qui ne répondent pas aux conclusions du prévenu, qui soutenait qu'aucun acte de cette nature n'était établi à son encontre, la cour d'appel, qui, à supposer les faits non établis sous cette qualification, aurait dû rechercher s'ils ne pouvaient constituer le délit de harcèlement moral, n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 31 mars 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Metz, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Radenne conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-82730
Date de la décision : 25/01/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 31 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 jan. 2011, pourvoi n°10-82730


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Blondel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.82730
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